la chronobiologie humaine

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la chronobiologie humaine
LA CHRONOBIOLOGIE HUMAINE
Introduction
Du principe d’homeostasie (Claude Bernard, fin XIX ème siècle) vers l’émergence de la
chronobiologie.
L’homéostasie dit qu’un organisme était à un niveau stable tout le temps.
La notion de rythmicité, de chronobiologie a donc mis du temps à émerger (années 50).
Dans les années 50, c’est en Europe qu’il y a eu les plus grandes avancées :
 Halberg et Aschoff : ont montré les principes endogène des rythmes  horloges biologiques
et synchroniseurs.
 Dans les années 60 : Reinberg a été l’un des premiers à parler de chronobiologie humaine et
de chromopharmacologie.
RYTHMES CHEZ L’HOMME
Rythmes ultradien : <20h
Rythmes infradiens > 28h
 cycle menstruel = rythme circamensuel
 rythme saisonnier = rythme circannuel
rythme saisonnier : (deux chez l’homme)
 naissances
 suicides
Rythme saisonnier de naissances
On a recensé 10 milliards de naissances dans le monde (fin XVIIIème à nos jours)
Europe de l’ouest : Maxi de conception au printemps (naissances en hiver)
10 millions de naissances en France : 1968-1974
 maximum de conception en été (naissances au printemps)
Etude française : 1983-1989
maximum de conceptions en septembre- octobre (naissances en juin juillet).
Pourquoi ?
 origines biologiques ?
cycle de la femme varient au cours de l’année ? (aucun travaux)
variation de spermatogénèse chez l’homme ? (on a montré un rythme saisonnier de niveau
de testostérone avec un pic en fin d’été)
 facteurs sociaux ?
1936 = arrivée des congés payés
Maitrise de la contraception depuis la fin des années 60
LES RYTHMES JOURNALIERS CHEZ L’HOMME
A. LES MARQUEURS DES RYTHMES
La fonction principale des rythmes est de faire en sorte que l’organisme soit synchronisé.
1) Le cycle veille sommeil
On le mesure à l’aide d’un actimètre (bracelet qui va enregistrer tous les mouvements du bras
comme un indicateur de l’activité de la personne). Les personnes portent l’actimètre en continu
pendant 7 jours.
On l’étudie avec un agenda du sommeil, réalisé par le patient.
Grâce au questionnaire de Horne et Ostberg, on va pouvoir définir un chronotype (publié en 1976)
Pour savoir si on est plus du matin ou du soir. En général, les gens sont entre les deux.
Avec l’âge on a une modification du chronotype.
L’adolescent a un retard de phase qui se fait spontanément (se couche plus tard).
2) Un cycle physiologique : rythme de température
Température corporelle : la plus basse est vers 3-4h du matin.
3) Cycles hormonaux mélatonine- cortisol
Mélatonine = hormone du temps. Forte sécrétion la nuit
Le cortisol est également très rythmé. En début de nuit, le niveau est faible. Un pic est atteint en
début de matinée.
B. PROPRIETE, COMPOSANTE ENDOGENE ?
En conditions constantes = en conditions de libre cours.
Expérience
Hors du temps » (labo ou grotte)
Années 50 : premiers essais
 Michel Siffre a expérimenté cela :
1962 : 2 mois (22 ans)
1972 : 7 mois
2000 : 2 mois
Première expérience : au bout de deux mois, il avait totalement perdu la notion du temps (dormait
14 heures alors qu’il pensait dormir 4h.
On remarque un rythme circadien avec un rythme endogène de 24.8h.
Récemment, ces périodes ont été ajustées en labo avec une pénombre permanente de 0.5 lux. La
période est ici de 24.2h.
Synchronisation interne :
Euchronisme = Etat physiologique au cours duquel toutes les variables étudiées ont des rythmes de
période de 24.2h en conditions constantes (ou de 24h en conditions d’alternance jour-nuit), et des
paramètres normaux de rythmes (amplitudes, valeur max, emplacement du pic …).
Lors d’anomalies, Chez 25% des personnes, le rythme devient anormal au bout de deux semaines. Le
rythme veille sommeil devient irrégulier alors que les autres marqueurs restent corrects. L’organisme
devient en désynchronisation interne.
On parle d’allochronisme.
Allochronisme = Etat physiologique, sans trouble objectif ou subjectif, au cours duquel un u plusieurs
paramètres de certains rythmes révèlent des différences par rapport aux valeurs moyennes
normales.
C. LES FACTEURS DE SYNCHRONISATION EXTERNE
La lumière est le synchroniseur le plus puissant.
Pendant une semaine, des sujets reçoivent de la lumière de 5h à 8h du matin. Puisqu’on fait allumer
la lumière trois heures avant, on fait une avance de phase. On remarque que le pic de mélatonine et
que le pic de cortisol se font également plus tôt du coup.
Pour être un synchroniseur maximal, la lumière doit ête à 2500lux.
Influence des facteurs sociaux :
Des groupes de jeunes femmes ont été mises ensembles en conditions constantes. Elles ont toutes
montré le même rythme circadien. On a donc une influence sociale avec plusieurs causes possibles :
 Entrainement total : un individu entraine les autres
 Mécanismes de synchronisation mutuelle : ajustement à un rythme moyen.
On parle de facteurs socio écologiques.
La prise alimentaire n’a pas d’effet synchroniseur assez puissant chez l’homme.
L’effet synchroniseur de l’activité physique sur la vigilance la nuit lors de la conduite a été très étudié.
D. L’ONTOGENESE DU RYTHME JOURNALIER
On a trois phases dans cette mise en place :
 Le premier mois : seulement un rythme ultradien observé avec une période de 4h
 2ème -4ème mois : un rythme commence à s’organiser avec un rythme circadien de l’ordre de
25h
 5ème – 7ème mois : rythme journalier
Au cours des trois premiers mois, on n’a aucun rythme de mélatonine. Il apparait entre 9 et 12
semaines et atteint sa maturation au bout de 24 semaines.
LES APPLICATIONS MEDICALES
A. TROUBLES DES RYTHMES
Dyschronisme = altération de l’organisation temporelle associée à un ensemble de symptômes,
temporaires ou persistants, qui témoignent du trouble d’une ou de plusieurs fonctions.
Syn : chronopathologie
Le but de la chronothérapie est de restaurer ces problèmes.
1) Troubles de la phase
a) Troubles du retard de phase
Appel aussi syndrôme de l’endormissement retardé. Il touche 3.5% de la population. Cela touche
principalement les adolescents (7.3%) et les jeunes adultes. Il n’y a pas de différence liée au sexe.
l’endormissement est retardé mais le sommeil est de qualité normale.
Il est associé dans 50% des cas à une dépression. Il n’a pas de conséquence négative en soi
b) Troubles d’avances de phase
Moins fréquent que les retards de phases.
Ils touchent seulement 1% de la population, pas de différence homme-femme avec un risque accru
avec le vieillissement. Personnes qui se couchent très Tôt (18-21h). ils vont se réveiller entre 3 et 6h
du matin.
Cas familial étudié à Lyon :
Un adolescent a montré qu’il s’endormait à 18h30 et se réveillait entre 3-6h. la qualité et la quantité
du sommeil ne sont pas atteints. Les rythmes de mélatonine sont en avance.
C’est un cas familial car plusieurs membres de la famille sont en avance de phase. On a découvert
qu’ils avaient une mutation sur le gène per.
Ils ont une période endogène plus courte : τ= 23.3h
Pour se recaler, ils sont traités par luminothérapie appliquée en fin de journée (taux de succès de
80%).
La chronothérapie hormonale par la mélatonine est également théoriquement possible. Pour eux, il
faudrait faire une administration de mélatonine le matin. Cette dernière a des effets hypnotiques et
atteint la vigilance donc ce traitement n’est pas réalisé en pratique.
La chronothérapie comportementale est également possible : on fait vivre aux patients des journées
de 21h en renforçant les heures de coucher pendant une semaine.
c) Trouble affectif saisonnier
Cette dépression arrive en hiver avec la diminution de la photophase et la baisse de la luminosité.
Certaines personnes développent un trouble qui inclut un retard de phase associé à une
hypersomnie, avec une qualité du sommeil moindre (interrompu) et non réparateur.
On a aussi une baisse de l’activité physique, combiné avec un appétit accru, envie de glucides 
prise de poids.
Il y a également des troubles de l’humeur : tristesse, anxiété, irritabilité.
On a aussi une baisse de la libido ou troubles menstruels.
Ces symptômes disparaissent au printemps.
On explique ce comportement par la luminosité trop faible et la photophase trop courte.
En traitement, on utilise la luminothérapie en faisant 2h d’exposition matinale
2) Troubles de la période
a) Trouble de type en libre cours
Peu de cas connus. Dans les quelques cas, on compte plus d’hommes que de femmes. Ils contractent
ce trouble avant 30 ans. Dans 25% des cas, ce sont déjà des patients qui ont des troubles
psychiatriques tels que la dépression ou la schizophrénie.
50% des aveugles seraient atteints de ce trouble : ils ne perçoivent pas les variations lumineuses
donc peuvent être désynchronisés par rapport à l’environnement.
On leur donne de la mélatonine le soir. Chez les voyants, on conseille d’y additionner la
luminothérapie (la luminothérapie seule ne donne pas de résultats concluants).
Il y a également une chronothérapie comportementale qui ca renforcer les synchroniseurs matinaux
(heure de réveil fixe, douche froide  1min à 14°C, petit dej riche en protéines  50% ration
quotidienne, pris avec deux personnes pour renforcer les synchroniseurs sociaux, exercice physique
modéré).
b) Troubles de type irrégularité de la veille et du sommeil
Ce sont des cas encore plus rares. Ils sont souvent associés à d’autres pathologies neurobiologiques
(Alzheimer, démence, déficience mentale chez l’enfant).
On peut retrouver ce type de trouble avec le vieillissement.
C’est la disparition d’une période unique du sommeil. Il est morcelé en au moins trois périodes
irrégulières sur 24h.
Les autres rythmes sont aussi morcelés. On a essayé la luminothérapie en exposition le matin et
l’après midi.
3) Troubles de l’amplitude
On les diagnostique souvent avec le vieillissement. En condition normale de vie, il y a bien une baisse
de l’amplitude, du rythme, avec le vieillissement.
En situation contrôlée (repose couché). L’amplitude de rythme, ici, n’est plus différente. Cela veut
dire que l’activité physique général des personnes influence l’amplitude de ce rythme.
L’amplitude du rythme de mélatonine des personnes de plus de 60 ans est beaucoup plus basse que
celle des plus jeunes. Il y a bien un effet du vieillissement sur le système circadien.
B. CHRONOPHARMACOLOGIE
C’est une science qui étudie les effets des médicaments selon le moment de l’administration dans
un cycle journalier.
L’objectif est de savoir quand l’effet thérapeutique est maximal et un effet toxique minimal.
Chronergie = variations périodiques des effets (positifs ou négatifs) d’un médicament.
Quand on parle d’un effet positif, on parle de chronoefficacité.
Cette chronoefficacité dépend de deux concepts :
 Chronocinétique
 Chronesthésie
1) Chronocinétique
Ce sont des variations périodiques de la disponibilité en molécules médicamenteuses.
Un médicament, selon le moment où on va le prendre, n’aura pas la même disponibilité dans notre
corps.
Ex : l’indométacine.
C’est un antiinflammatoire non stéroidien utilisé contre les rhumatismes (genre d’aspirine).
Sur les sujets testés, on remarque qu’on atteint le maximum de disponibilité plasmatique 2h après
l’ingestion et la disponibilité est vraiment maximum le matin (moins efficace l’après midi).
Variation des paramètres d’une substance chimique selon le moment d’administration.
Dépend de :
 Absorption
 Distribution
 Métabolisation
 Elimination
2) Chronesthésie
Chronesthésie = variations périodiques de la susceptibilité d’un système cible à un médicament (qui
dépend de la concentration en récepteurs disponibles à la surface des cellules cibles au cours de la
journée).
Ex : chronesthésie de l’éthanol
L’effet va être plus fort le soir que le matin (plus de récepteurs disponibles).
3) Chronotoxicité et chronotolérance
Chronotoxicité = variations périodiques d’un ou plusieurs effets toxiques et/ou non désirées d’un
agent chimique.
Chronotolérance = variations périodiques de la résistance de l’organisme aux effets toxiques et/ou
non désirés d’un agent chimique.
Chronotoxicité :
Sur un antibiotique (nom à coucher dehors), la toxicité de celui-ci est moins élevée lorsque l’animal
rentre en phase d’activité au moment de l’administration.
4) Un exemple de chronopharmacologie
Asthme nocturne :
 Se manifeste la nuit, même si exposition minimale aux agents allergiques.
 Lié à un rythme journalier du calibre bronchique, qui est minimal la nuit.
Rythme de catécholamines : dilatent les bronches (max jour)
Rythme de cortisol : dilate les bronche (max le jour)
Rythme d’histamine (reprendre)
LES DECALAGES HORAIRES OCCASIONNELS OU REGULIERS
A. DECALAGE HORAIRE OCCASIONNEL
1) Passage heure d’été/ heure d’hiver
Effectué pour faire des économies. Normalement, un décalage une heure n’entraine pas de
perturbations.
Mais on reconnait que passer de l’heure d’hiver à l’heure d’été est plus difficile que le contraire car
notre période endogène (24.2h) est en retard par rapport à l’environnement.
2) Vol transméridien
Si on fait un décalage d’au moins 5h, on développe un syndrome de désynchronisation. A l’arrivée,
les personnes ont un trouble du sommeil (diminué, fragmenté), des troubles de l’humeur( irritabilité,
anxiété), baisses de performances cognitives et sportives, troubles digestifs.
Les symptômes ne sont pas du à la fatigue liée au vol, ils sont bien liés au fait que l’on soit en
désynchronisation avec l’environnement quand on arrive.
C’est une désynchronisation externe.
Si on part de paris à 21h pour aller à new york, on arrive à 3h du mat(heure de paris) mais à New
york, il est 21h quand on arrive
 Quand on va vers l’ouest, il faut faire un retard de phase
Pour se resynchroniser, notre organisme met du temps et toutes nos fonctions biologiques ne se
resynchronisent pas à la même vitesse.
Si on va à New york, Le cycle veille sommeil met 3jours à se resynchronier, la T°C met 6 jours et le
cortisol met deux semaines.
Quand on revient vers l’est, c’est encore plus lent (car on fait une avance de phase) : cycle v-s=
4jours, T°C= 12j, cortisol = 3 semaines.
En effet c’est plus facile d’aller se coucher à 3h du mat qu’à 15h donc plus facile de faire un retard de
phase qu’une avance.
Le traitement est de prendre de la mélatonine quelques jours avant le départ à l’heure où se fera le
coucher dans l’autre pays.
B. DECALAGE HORAIRE CHRONIQUE
Travail posté.
Touche un million de salariés en France. Seulement 10 à 20% des salariés satisfaits des horaires
décalés. 2à 5% développent des troubles. Les travailleurs de nuit ont une mauvaise qualité de
sommeil. Ils ont des problèmes d’endormissement et un sommeil fragmenté donc non réparateur. Ils
ont une baisse de 1 à 4h dans la durée du sommeil.
Conséquences :
 Somnolence pendant la veille (à cause de la dette de sommeil), fatigue
 Baisse de performance (risque d’accident)
 Sur les jours de repos : les travailleurs, pour récupérer leur dette de sommeil, vont plus
dormir  impact sur la vie personnelle.
 Troubles de l’humeur
 Troubles digestifs  excès de poids (le rythme alimentaire désorganisé donne une prise de
poids alors que la quantité ingérée n’est pas différente).
 Pharmacodépendance (prise de somnifères ou hypnotiques)
Ils développent ces symptômes car ils sont désynchronisés par rapport au milieu externe et interne
surtout s’ils sont en rotation car leur activité s’adapte mais leur température interne reste sur un
rythme de 24h.
Le maximum de baisse de vigilance est le milieu de la nuit et la fin de la nuit
Le fait d’avoir un rythme intrinsèque marqué facilité la tolérance au travail posté.
Si on donne des lunettes fumées à des salariés pendant leur phase de repos, on a amélioration de la
qualité du sommeil (12 nuits).
Le rendement n’est pas le même pour un travailleur à 4h du mat qu’à 16h. la sieste est un point
important (une de 20 minutes est recommandée avant de commencer les quarts). Certains
revendiquent le droit à la sieste pendant le travail de nuit.
C. SYNCHRONISATION DES ASTRONAUTES
Travaux réalisés par la NASA et l’hopital de Lyon :
 Jour solaire sur Mars = 24.65h
 Navette : faible intensité lumineuse (10-100lux)
o Désynchronsation des horloges
o Baisse des performances cognitives

Expérience d’entrainement :
Pendant la veille :
o 25 ou 100lux
o 25 ou 100 lux puis deux épisodes de 45 minutes à 10 000 lux
 Ce dernier traitement entraine le rythme.
LES RYTHMES SCOLAIRES
L’INSERM a réalisé une expertise en 2001 repris par l’académie de médecine de 2010. Ces deux
rapports donnaient les mêmes résultats
Chez les CM2, On a une montée de la vigilance tout au long de la matinée, puis une baisse de la
vigilance après le repas du midi (creux post prandial) puis une réaugmentation de la vigilance après.
Ce rythme se met en place tout au long du primaire avec des rythmes beaucoup plus cours chez les
maternelles.
A faible vigilance, il faut faire de l’entretien de connaissance et des activités ludiques.
Au-delà de ce rythme journalier, on a un rythme hebdomadaire :
Quand les enfants ont une semaine d’école de 4 jours, le rythme journalier est inversé (vigilance
baisse dans la matinée et remonte après manger, redescend dans l’aprem).
On a préconisé de respecter une semaine de 4.5 jours pour respecter le rythme journalier et libérer
le samedi matin.
CONCLUSION
Les rythmes sont ubiquistes.
Les troubles ou perturbations des rythmes ont un impact non négligeable sur nos différentes
fonctions biologiques et psychologiques.
Restaurer les rythmes améliore certaines pathologies (ex : cancer).
 Diminue progression des tumeurs.