A Rome, des enseignants français au profil très peu hexagonal

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A Rome, des enseignants français au profil très peu hexagonal
RELIGION
vendredi 24 octobre 2014
Sur www.la-croix.com
ESSENTIEL
DÉCÈS
Olivier Le Gendre,
auteur de « Confession
d’un cardinal »
L’écrivain Olivier Le Gendre est
mort mardi. On se souvient de
sa savoureuse Confession d’un
cardinal, en 2009, dans laquelle cet observateur attentif
et lucide de l’Église livrait les
réflexions d’un haut responsable de la Curie et proche de
Jean-Paul II, sur les sujets brûlants du catholicisme. Investi
dans l’Arche de Jean Vanier et
dans le réseau mondial des
amis laïcs de l’Assomption, ce
père de cinq enfants avait témoigné de l’épreuve de la
maladie dans C’est une étrange
aventure que de survivre (lire
La Croix du 4 avril 2013).
VIE MONASTIQUE
Le ministre général de l’ordre
des chartreux se retire
Le P. François-Marie Velut,
66 ans, prieur général de la
Grande Chartreuse et ministre
général de l’ordre, se retire pour
raisons de santé. Il avait été élu
le 20 septembre 2012 à la tête
de l’ordre fondé au XIe siècle par
saint Bruno. Son successeur sera
élu début novembre par la communauté de la Grande Chartreuse
(32 moines) et par l’assemblée
des prieurs de tout l’ordre.
ÉTATS-UNIS
À Chicago, Mgr Blase
Cupich opte pour
un logement plus modeste
Le nouvel archevêque de
Chicago, Mgr Blase Cupich, a
annoncé qu’il ne logera pas dans
le palais épiscopal, utilisé par
ses prédécesseurs depuis plus
d’un siècle, optant plutôt pour
le rectorat plus modeste de la
cathédrale du Saint-Nom. Il a également indiqué mercredi qu’un
comité va réléchir à la manière
d’utiliser l’archevêché.
AGENDA
RENCONTRE
Paris. « Le P. Ceyrac,
missionnaire d’avenir ? »,
tel est l’intitulé de la
projection-débat organisée
avec le P. Maurice Joyeux,
jésuite, et Marc Giordan,
administrateur de l’association
P. Cerac, au Centre Sèvres.
Le 6 novembre à 20 heures.
Centre Sèvres, 35bis, rue de Sèvres,
75006 Paris.
TÉL. : 01.44.08.98.12.
RENS. :
[email protected]
t
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Des Français moins tolérants à l’égard des religions, selon le rapport du Crédoc
A Rome, des enseignants français
au profil très peu hexagonal
d Depuis la rentrée universitaire,
une poignée de prêtres français
ont rejoint les établissements
pontificaux romains.
d La compétence académique
et linguistique prime
sur tout critère national
dans le recrutement.
d Face à un public étudiant
originaire du monde entier,
les universités pontificales
exigent une grande
ouverture internationale.
ROME
De notre envoyé spécial permanent
Élu doyen de la faculté de philosophie de l’université dominicaine
Angelicum, le P. Serge-homas Bonino, dominicain de Toulouse, a donc
déménagé à Rome. Ce grand spécialiste de la philosophie thomiste, également secrétaire général de la Commission théologique internationale,
y retrouve un compatriote, le P. Joseph d’Amécourt, vice-doyen de la
même faculté. Il figure parmi les
nouveaux enseignants français dans
les universités pontiicales romaines,
qui se comptent en cette rentrée sur
les doigts de la main.
La Sainte-Croix, université de
l’Opus Dei, a déclaré n’en recevoir
aucun à cette rentrée. Comprenant
ceux déjà en poste, les estimations,
tous statuts confondus, tournent
autour d’une quinzaine d’enseignants français présents actuellement. « Évidemment leur nombre a
baissé », reconnaît leur compatriote
Mgr Patrick Valdrini, vice-recteur du
Latran, autre université pontiicale
romaine, qui n’y voit pas pour autant
le fruit d’une politique linguistique :
« Pour l’enseignement, c’est la compétence des personnes qui est prioritaire. Les recrutements se font sans
volonté d’équilibre entre nations. »
« Mais il faut que son évêque ou le
supérieur de sa congrégation accepte
de s’en séparer », ajoute-t-il. Là réside
une des diicultés : « Le fait qu’il y a
peu de Français enseignants est lié
aussi à l’évolution numérique des
personnes que les supérieurs de
congrégations ou les évêques peuvent
mettre à disposition. »
Autre obstacle de taille, il faut maîtriser parfaitement l’italien, langue
principale d’enseignement. À la langue de Dante s’ajoutent d’autres
langues car les étudiants peuvent
écrire leur thèse dans les langues
étrangères principales. « Ce sont des
conditions non négociables quand
les étudiants sont issus de toutes nat i o n s d u m o n d e » , p ré v i e nt
Mgr Valdrini.
Même exigence à la Grégorienne,
l’université jésuite à Rome, qui a
accueilli cette année trois nouveaux
Français. Dans le plus ancien et, de
loin, le plus fréquenté des établisse-
DELIGNE
« Pour l’enseignement,
c’est la compétence
des personnes
qui est prioritaire.
Les recrutements
se font sans volonté
d’équilibre
entre nations. »
ments pontiicaux, les travaux peuvent être rendus en italien, anglais,
espagnol, français ou allemand.
Les langues étrangères, le P. Nicolas Steeves heureusement les connaît.
Ce jésuite franco-américain de naissance, qui a appris l’italien dès le
collège par correspondance, a commencé ses cours la semaine dernière
à la Grégorienne. Entré dans la Compagnie de Jésus en 2000, cet ancien
avocat était lui-même encore étudiant il y a peu, efectuant son master en théologie fondamentale de
2008 à 2010 dans la même université.
« Je ne sais pas encore quel niveau
d’italien je devrai employer pour être
compris de tous mes élèves », coniaitil avant le début de ses cours. Mais
cette dimension très internationale
de l’université pontiicale, comme
son excellence reconnue dans le
secteur pointu de la théologie fondamentale, sont justement ce qui l’a
motivé. « Il y a 270 doctorants, ce qui
veut dire beaucoup de recherche. C’est
stimulant ! », résume celui qui avait
jusqu’ici accompagné des étudiants
dans le cadre plus français d’HEC
– dont il est diplômé – et du lycée
Sainte-Geneviève à Versailles.
Même appétit pour l’ouverture internationale chez le P. Étienne Vetö,
autre nouvel arrivant à la Grégorienne.
Également franco-américain, ce prêtre
de la communauté du Chemin-Neuf,
normalien agrégé en philosophie qui
a étudié outre-Rhin, travaillé en
Afrique et dernièrement beaucoup
voyagé en Asie pour sa communauté,
est à son aise dans cet univers. « Pour
enseigner à la Grégorienne, il ne faut
pas être trop français », résume celui
qui y fut autrefois étudiant. Il apprécie « l’universalité de l’Église » catholique que l’université pontificale
permet de contempler à l’œil nu.
De fait, les 2 700 étudiants inscrits
pour cette rentrée à la Grégorienne
représentent environ 130 nationalités. La moitié vient d’au-delà de
l’Europe. Cette diversité se retrouve
en partie chez les prêtres jésuites du
corps enseignant permanent de
l’université : sur 72, 25 sont européens, avec une tendance à la baisse.
Les 47 autres sont non-européens,
les Indiens arrivant en tête. Au total,
ils viennent de 26 pays.
« Le corps enseignant doit être international comme le corps étudiant », indique le P. François-Xavier
Dumortier, recteur de l’université,
saluant en italien un professeur
indien à la sortie de son bureau.
Une scène devenue ordinaire pour
ce prêtre jésuite français, pour qui
l’internationalisation acquise au
cours d’une expérience romaine
abreuve ensuite le reste de l’Église.
« Cette ouverture à d’autres, cette
nécessité d’inculturation sont une
richesse que l’on peut ensuite rapporter en France », apprécie dans
le même sens le P. Vetö, pour qui
Rome n’est qu’un passage. Le
temps aussi de s’imprégner de la
longue histoire de l’Église depuis
l’Apôtre Pierre. D’être en contact
avec le Saint-Siège. Et d’approcher
aussi le pape si possible.
SÉBASTIEN MAILLARD
REPÈRES
LES UNIVERSITÉS
PONTIFICALES À ROME
P Dispersées à travers Rome,
les universités pontificales
sont des établissements
d’enseignement supérieur
relevant du Saint-Siège
(Congrégation de
l’éducation catholique).
La formation porte avant
tout sur la théologie,
le droit canon,
la philosophie et l’histoire.
Les étudiants sont inscrits
par des évêques ou
supérieurs de congrégation.
P 20 000 étudiants environ
sont accueillis dans une petite
vingtaine d’établissements
de taille, statut
et rayonnement variés.
P La plupart sont placés
sous la responsabilité
d’une congrégation
religieuse : la Grégorienne
est confiée aux jésuites,
l’Angelicum (Saint-Thomasd’Aquin) aux dominicains,
l’Antonianum aux franciscains,
la Sainte-Croix à l’Opus Dei,
l’athénée Saint-Anselme
aux bénédictins,
la Salésienne aux disciples
de saint François de Sales.
Le Latran est dit l’université
du pape. L’Urbanienne
dépend de la Congrégation
pour l’évangélisation
des peuples.