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Dialogues
14
Paroles de sectes
Médiatrice
Véronique Maurus
L
es bourdes de l’Elysée ont au
moins un bon côté : le médiateur n’a plus besoin de se
creuser la cervelle pour dénicher un bon sujet de chronique. Il n’a qu’à ouvrir le courrier des lecteurs. Ces derniers temps, un
tollé chasse l’autre. Le débat « Laïcité »
était à peine calmé que déjà enflait la
polémique « Enfants de la Shoah ». On
s’interrogeait sur la fin de la semaine,
quand Emmanuelle Mignon relança
aimablement le chahut par ses propos
sur les sectes.
La conseillère de l’Elysée étant aussitôt démentie par le premier ministre et
par le président de la République alors
qu’elle ne faisait que confirmer la nouvelle stratégie exposée par la ministre de
l’intérieur, le 4 février, l’ensemble a créé
une jolie cacophonie. La lutte contre les
sectes sera-t-elle finalement infléchie,
durcie, maintenue ou pratiquement
abandonnée ? Le moins qu’on puisse
dire est que le doute est semé.
Résultat garanti auprès des lecteurs,
qui, ayant peut-être épuisé leurs réserves d’indignation, préfèrent en rire –
une fois n’est pas coutume. « Il en est
qui, par leurs déclarations ahurissantes,
suscitent en retour, en s’en offusquant, de
pourtant légitimes coups de pied aux
cultes, plaisante (à demi) Jean-Luc Déléris (Figeac, Lot). « Emmanuelle Mignon
calcule qu’en défendant le tout-religieux et
apparenté, on protège et favorise sa propre
croyance. Elle vient donc de s’employer à
déminer le terrain des sectes, sur les brisées
de Michèle Alliot-Marie. En première
ligne de ses attentions : l’Eglise de scientologie, déjà bien accueillie par Nicolas
Sarkozy, au temps de son séjour à Bercy,
en la personne de son représentant délirant – Tom Cruise… Et l’on nous reparle
de spiritualité ! »
Même ton badin dans le message de
Guy Abeille (Paris) : « Nous avions la
Sainte Trinité, avec Nicolas Sarkozy en
Dieu le Père, Claude Guéant en Saint
Esprit et Henri Guaino en Fils Bien Aimé ;
voici qu’apparaît Emmanuelle Mignon en
0123
Dimanche 24 - Lundi 25 février 2008
Vierge Marie. Il ne manque que les Rois
mages portant la Croissance, le Pouvoir
d’achat et l’Equilibre des comptes. »
Jean-François Hagnéré (Creutzwald,
Moselle), lui, rit moins franchement :
« Chaque jour qui passe, la France et les
Français s’enfoncent, à la suite de leurs
dirigeants actuels, dans le délire, écrit-il.
Car voilà autre chose : après avoir critiqué
la Miviludes, mission chargée de la surveillance des sectes, une conseillère (…) assène à un journaliste “de façon informelle”,
que ces dernières sont, chez nous un “nonproblème”. De là à en reconnaître quelquesunes – tenez, au hasard, la Scientologie
(…) –, il n’y a qu’une longueur de parvis de
cathédrale à franchir. »
D
u côté de la défense ne figurent
plus, cette fois, les partisans du
président ou les tenants de la foi
– oserons-nous dire « classique » ? –, mais… les sectes elles-mêmes.
Sous l’intitulé surprenant : « Scientologie : des millions d’adeptes, aucun suicide
collectif en 58 ans », Eliane Dumas-Besson (Paris) fait l’apologie du mouvement et conseille : « Lisez donc un bouquin pour vous faire une idée de ce nouveau courant spirituel plutôt que de croire
ce que dit l’homme qui a vu l’homme qui a
vu l’homme qui a vu la bête… » De même,
Hélène Blanc (Lyon), entre autres, salue
le « bon sens » et le « courage » de Michèle Alliot-Marie « lorsqu’elle évoque la possibilité de mettre fin à la stigmatisation
des minorités de conviction ». Notre cor-
respondante en profite pour fustiger les
« postures qui, du fait d’une rigidité idéologique et d’un militantisme exacerbé, sont
totalement déconnectées de la réalité ».
Car les sectes écrivent au Monde, et
même beaucoup. Pas une semaine sans
un mot, une remarque, une réflexion sur
un sujet d’actualité. Certains signataires
affichent leur appartenance, d’autres
avancent masqués, mais tous sont aisément repérables, Internet aidant.
Depuis des années, le service « Courrier
des lecteurs » entasse ainsi, dans une
épaisse chemise jaune, les messages sectaires, dont il se refuse à publier des
extraits – cette chronique fait exception
–, de même qu’il récuse les textes anonymes (ou signés d’un pseudo), les tracts,
les poèmes, les lettres ouvertes, les pétitions et tout ce qui relève de l’insulte, du
racisme ou de la xénophobie.
On nous demandera pourquoi : après
tout, les « adeptes » sont, eux aussi, des
lecteurs, et leurs e-mails sont souvent
fort bien tournés, parfois même pertinents. Mais ce ne sont pas des lecteurs
comme les autres, et leurs messages sont
tout sauf innocents. La preuve ? Tous traitent les mêmes sujets de la même manière. D’abord, bien sûr, de la défense des
sectes, quelles qu’elles soient – nous
comptons beaucoup de scientologues,
mais aussi de témoins de Jéhovah, et
même quelques défenseurs attardés de
l’Ordre du Temple solaire !
Leurs thèmes de prédilection ne s’arrêtent pas là. Tout ce qui touche à la santé
les mobilise beaucoup : l’usage des antidépresseurs, qu’ils combattent au même
titre que la plupart des médicaments, le
« lobby pharmaceutique », la drogue, la
vaccination, l’eugénisme et les « psys » –
psychiatres, psychanalystes, etc. A
l’inverse sont prônés les médecines douces et tous les traitements alternatifs.
Deuxième antienne, l’éducation : vive
l’école libre, à bas l’action sanitaire, la
protection des enfants en danger, etc.
A
utre thème récurrent, la défense
des libertés individuelles – parmi lesquelles le port du voile…
Haro donc sur les RG, les syndicats, les juges, le « fichage des enfants scolarisés » (sic). Sans oublier la dénonciation de la corruption, de l’« appât du
gain », de l’individualisme, de la pollution, ces « fléaux » humains qui menacent l’avenir de la planète.
Voilà pour le fond, mais toutes les occasions sont bonnes pour « accrocher » un
message. Le procès des hormones de
croissance, un spot télévisé (sur la dépression), un documentaire (de Sandrine
Bonnaire sur sa sœur autiste), la « laïcité
positive », l’apprentissage de la grammaire, etc.
Le fait est que, depuis l’élection de
Nicolas Sarkozy, les « accroches » ne
manquent pas. Est-ce un signe ? Nos
habitués de la chemise « sectes » parlaient rarement de politique. Depuis peu,
ils défendent, de plus en plus clairement,
celle du président… a
Au courrier des lecteurs
A propos du Kosovo
Dans la province romaine d’Illyrie recouvrant le Kosovo, les Dardaniens parlaient à l’origine une
langue indo-européenne proche
de l’albanais. Après l’éclatement
de l’Empire romain en Empire
byzantin, les Slaves commencent
à conquérir l’ancienne Illyrie, de
sorte que le Kosovo devient serbe
dès la fin du XIe siècle. L’empire
ottoman vainc les Serbes en
1 371, puis en 1389 : 36 000 Slaves orthodoxes quittent alors le
Kosovo, mais la très grande majorité de la population, de religion
bogomile, reste sur ses terres et
échappe à l’Inquisition catholique au prix de sa conversion à l’islam. L’étude du professeur
Alexandre Soloviev, « Le Bogomilisme », parue dans les Cahiers
d’études cathares (été 1988), indique que certains musulmans
kosovars fêtaient encore Noël au
début du siècle dernier ! Il y a
donc eu albanisation-islamisation progressive sous domination
turque d’une population slave
arrivée au VIe siècle en Illyrie albanophone, devenue majoritairement bogomile puis musulmane.
Entre Kosovars slaves orthodoxes et Kosovars slaves islamisants, il n’y a donc qu’une diffé-
rence culturelle due aux aléas de
l’Histoire.
Denis Bloud
Petit-Lancy (Suisse)
Un pavillon trop large
Depuis l’annonce de la fusion de
deux grandes directions de Bercy
(celles des impôts et de la comptabilité publique), le plus grand
secret régnait sur le choix du nom
de l’organisme appelé à leur succéder. L’expression « direction générale des finances publiques » ne
semble pas la meilleure.
La notion de finances publiques
est très générale ; son contenu
englobe toutes les attributions de
Bercy, y compris celles dépendant
de grandes directions autonomes
qui subsistent et sont généralement considérées comme les plus
prestigieuses (budget et trésor,
par exemple). Le pavillon « finances publiques » est donc trop large et trop enveloppant par rapport
au contenu réel. Certains comités
d’usagers avaient proposé comme
dénomination « direction générale des recettes et dépenses publiques ». Celle-ci avait l’avantage de
traduire la double fonction de l’organisme.
Jacques Meunier
Courriel
RECTIFICATIFS ET PRÉCISIONS
Algérie. L’article du Monde
paru le 1er février 2008 sous le
titre « L’éventualité d’un troisième mandat pour M. Bouteflika
suscite un débat en Algérie » pouvait laisser croire que le Rassemblement pour la culture et la
démocratie (RCD) était favorable
à un troisième mandat de l’actuel
président, en 2009. Il n’en est
rien. Le RCD du docteur Said Saadi milite, au contraire, contre cette éventualité et appelle à des
élections libres « sous une surveillance internationale massive et
qualifiée ».
datée du dimanche 17-lundi
18 février, le nom du ministre des
affaires étrangères de l’Arménie,
Vartan Oskanian, a été oublié
dans la présentation de l’entretien qu’il nous a accordé.
Stanko Cerovic. Le véritable
titre du livre de Stanko Cerovic,
chroniqué comme « Livre du
jour » (Le Monde du 20 février)
est Après la fin de l’histoire (Climats, 234 pages, 23¤). Le soustitre est « Un regard sur les révoltes du vingtième siècle ».
Alain Robbe-Grillet. C’est
L
e
on-line gratuit à 1deestir njatoiounrnal sportif
deswwplw.ulesquipjeejuniunor.fres.
Diagnostic de performance énergétique. Contrairement à ce que nous avons écrit
dans l’article intitulé « Les limites du diagnostic de performance
énergétique » (Le Monde du
18 février), l’unité kWhEP correspond à des kilowattheures énergie primaire (et non équivalent
pétrole). L’énergie primaire tient
compte non seulement de l’énergie consommée par l’utilisateur,
mais aussi des pertes qui peuvent être subies lors de la production et du transport vers cet utilisateur.
Arménie. Dans notre édition
Gradiva qui vous appelle, le dernier film de l’écrivain et cinéaste
Alain Robbe-Grillet, mort le
18 février, est sorti en 2007 et non
en 2006, comme nous l’avons
écrit par erreur dans l’article
nécrologique qui lui était consacré (Le Monde du 20 février).
Mai 1968. Contrairement à ce
que nous avons écrit (Le Monde
du 21 février), Raymond Marcellin (1914-2004) n’était pas « le
ministre de l’intérieur de Mai 68 ».
Il a été nommé à ce poste le 31 mai
1968, en remplacement de Christian Fouchet (1911-1974), qui l’occupait depuis le 6 avril 1967.