Techniques de crochetage instrumental myofasciale

Transcription

Techniques de crochetage instrumental myofasciale
Formation
Geste pratique
Kinesither Rev 2008;(75):17-21
Techniques de crochetage instrumental myofasciale
R AMON A IGUADÉ (1), P ATRICK P ONS C AMPS (2), F RANCESC R UBÍ C ARNACEA (3)
La technique de crochetage favorise le glissement entre
les différentes structures anatomiques grâce à son effet de
fybrolyse. Elle permet en plus d’arriver à des zones
difficilement accessibles aux doigts du praticien pénétrant
dans les structures pathologiques et de le réaliser avec une
grande économie énergétique. Cette technique est indiquée
dans de nombreuses affections d’étiologie mécanique
(incluant les névralgies périphériques) et vasculaire. Les effets
de la technique produisent des changements aux niveaux
mécanique, circulatoire, réflexe et métabolique.
Introduction
La technique naît dans les années suivant la 2nde Guerre
Mondiale et se caractérise comme une évolution de la
méthode du Dr. James Cyriax, le massage transversal
profond (MTP).
Des dépôts uriques et calciques se constituent sur les
plans de glissement myo-aponevrotique. Cliniquement,
ils se traduisent par des corpuscules de petite taille qui
sont difficilement palpables (petites boules). Ils provoquent des phénomènes inflammatoires et entraînent
des adhérences profondes qui peuvent “coller” les plans
de glissement tissulaire.
Kurt Ekman, kinésithérapeute suédois et ancien élève
de Cyriax à Londres, a créé la technique en appliquant
des crochets sans pénétrer dans la peau. L’objectif est
de libérer ou de diminuer les adhérences et d’éliminer
les « corpuscules irritatifs » qui se trouvent entre les
aponévroses ou entre les muscles et les aponévroses.
Au début, il travaillait avec des crochets en bois ou
d’autres matériels. Avec le temps, les matériaux ont
MOTS CLÉS
Adhérences
Crochetage
Fibrolyse
Fybrolyse Instrumentale Myofasciale (FIM)
changé et maintenant nous trouvons des crochets en
acier inoxydable, en aluminium ou en résine.
Les crochets (figure 1) présentent différentes courbures
permettant d’arriver à différentes structures anatomiques ou de s’adapter aux différentes morphologies du
sujet. Chaque crochet se termine par une petite spatule
plane qui permet de diminuer la force par unité de surface afin d’éviter l’irritation cutanée.
Bien appliquée, la technique n’est pas douloureuse.
Description de la technique
Le traitement se base sur une approche disto-proximale
de la douleur. Il permet d’éviter les possibles récidives
(1) Kinésithérapeute et Pedagogue. Professeur à l’EUCS Manresa
(Universitat Autònoma de Barcelona) et Universitat Oberta de
Catalunya. Directeur de Fisioformación.
(2) Kinésithérapeute. Professeur de FC à la Université de Vic (UVic).
Kinésithérapeute à Axis Fisioterapeutes (Lleida). Professeur de
Fisioformación.
(3) Kinésithérapeute. Professeur à l’EUCS Manresa (Universitat
Autònoma de Barcelona). Kinésithérapeute à Axis Fisioterapeutes
(Lleida). Professeur de Fisioformación.
Auteur-correspondant : Ramon Aiguade
C/ L’Olivera 67, 08310 Argentona (Barcelone), Espagne
E-mail: [email protected]
Article reçu le 26/09/07.
Accepté le 03/01/08.
Figure 1. Set de trois crochets en acier inoxydable
hypoallergique. Les courbures changent pour permettre une
adaptation à chaque région et aux différentes morphologies du
sujet.
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R AMON A IGUADÉ ET AL .
en essayant d’entrer dans les zones éloignées qui sont
le point de départ des schémas de tensions myoaponévrotiques. Le thérapeute commence la recherche dans
les régions éloignées du “locus dolenti”, mais qui ont
une étroite relation anatomique du point de vue mécanique, circulatoire ou nerveux.
Technique de crochetage
C’est la technique de choix dans le traitement des cloisons intermusculaires. La technique se déroule en trois
phases successives :
– palpation digitale : se réalise avec la main libre, sans
crochet (main dominante du kinésithérapeute), suivant les plans de glissement du tissu conjonctif en
cherchant les déficits de mobilité.
– palpation instrumentale : permet de localiser avec
précision les adhérences ou les corpuscules existants.
– phase de crochetage : consiste en une traction supplémentaire destinée à éloigner, voire à casser les fi-
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bres adhérentes et à faire disparaître les corpuscules.
Elle se réalise à la fin de la palpation instrumentale.
Séquence :
Nous situons l’index de la main exploratoire sur la cloison à traiter (figure 2). Entre le doigt et le pouce, nous
prenons un morceau de tissu (vague), qui s’adapte parfaitement au contour du crochet, sans laisser d’espace
entre le crochet et la peau (crochet bien rempli). La spatule repose à côté même de l’index, parallèlement aux
fibres tissulaires. Nous créons une « vague » avec les
tissus mous et les introduisons dans le crochet avec le
pouce (figure 3). (Voir également figures 15 et 16).
Technique de grattage (figures 4 et 5)
Nous effectuons un mouvement de flexion de l’interphalangienne proximale (IPP) et de l’interphalangienne
distale (IPD) avec l’index de la main palpatoire, accompagné de façon rythmique par le crochet. Nous utilisons
Figure 2 . Palpation digitale de la région à traiter.
Figure 3. Collocation du crochet sur la cloison Rectus femorisvastus lateralis.
Figure 4. Technique de grattage. Application sur un point
concret en faisant de petits déplacements avec la pointe du
crochet.
Figure 5. Grattage pour la libération des adhérences des
tendons extenseurs communs des doigts.
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Techniques de crochetage instrumental myofasciale
« La technique de crochetage est la technique de choix
dans le traitement des cloisons intermusculaires. La
technique se déroule en trois phases successives : la
palpation digitale, la palpation instrumentale et la
phase de crochetage. »
cette technique au niveau des tendons, des reliefs osseux, des ligaments, de la capsule articulaire, des bourses séreuses… et en général dans toutes les régions dans
lesquelles il n’est pas possible d’utiliser la manœuvre
classique de crochetage.
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Technique de pompage (figures 7 et 8)
Elle est réalisée avec le crochet inversé. Le thérapeute
introduit le crochet pour séparer les plans tissulaires à
mesure qu’il s’enfonce dans ce tissu. S’il l’utilise sur un
ventre musculaire, il obtient un effet d’inhibition (inhibition de l’hyperéactivité gamma) et une augmentation
de l’apport sanguin. Il peut l’utiliser aussi sur des points
maxima et des Trigger Points si le grattage est trop agressif ou comme phase préalable au grattage.
E N C A D R É 1 . T Y P E S D E R É S I S TA N C E S .
Technique de grattage en étoile (figure 6)
Elle est utilisée au niveau des points nommés maxima
et Trigger Points. Il s’agit de faire un grattage sur un point
en dessinant une étoile.
Les points maxima sont des points de croisement du
tissu conjonctif de plusieurs muscles ayant une grande
tension myofasciale.
La pénétration et l’exploration palpatoire se réalisent avec
des mouvements antéro-postérieurs lents en appuyant le pisiforme et en réalisant une déviation latérale du poignet pour
translater la vague. La main palpatoire précède l’approche
instrumentale en diminuant l’irritation des tissus. La perception instrumentale d’une résistance momentanée et la persistance d’un ressaut nous indique la présence d’un corpuscule.
Une résistance suivie d’un arrêt brusque indique la présence
d’une adhérence. Nous crochetons en tirant avec les deux
mains.
E NCADRÉ 2. GARANTI E DE RÉUSS ITE.
– Connaissance anatomique palpatoire.
– Bonne collocation du crochet avec la peau.
– Attention à ne pas piquer avec la pointe du crochet (crochet bien plat).
Figure 6. Grattage en étoile. Le même sens qu’à la figure précédente
mais le thérapeute dessine une forme d’étoile, pour libérer les adhérences.
Figure 7. Technique de pompage : technique douce que le
thérapeute peut utiliser sur les Triger Points, cicatrices, ou
comme préparation au crochetage.
Figure 8. Pompage sur le muscle élévateur de la scapula.
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R AMON A IGUADÉ ET AL .
Kinesither Rev 2008;(75):17-21
Technique transversale (figures 9 et 10)
Technique longitudinale (figure 12)
Nous introduisons le crochet inversé avec un angle de
45º et nous effectuons un mouvement de séparation du
ventre musculaire (latéralement) réalisant un mouvement perpendiculaire. Par exemple, au niveau du tractus iliotibialis, des cicatrices, de la cloison médiale des
paravertébraux…
Nous situons le crochet inversé avec un angle de 45º et
nous travaillons avec le crochet posé sur le tissu à traiter. Nous situons deux ou trois doigts de la main palpatoire sur le crochet pour donner plus de stabilité, et
nous effectuons une manœuvre lente de glissement du
crochet en ayant un effet de relaxation et de cassement
d’adhérence superficielle.
Technique longitudinale exploratoire
(figure 11)
Nous introduisons le crochet inversé sur une cloison intermusculaire avec un angle de 45º et nous le glissons
tout du long en explorant les restrictions de mouvement. Cette exploration nous donne une idée des zones sur lesquelles nous devrons travailler avec le crochet. Quand nous retrouvons de fortes adhérences,
cette technique permet de préparer le terrain.
« La technique de crochetage est loin d’être une méthode
douloureuse et peut avoir un effet relaxant important. »
Technique mobilisatrice (figures 13 et 14)
Le crochet est utilisé pour faire des mobilisations très
analytiques et précises avec beaucoup de facilité.
Figures 9 et 10. Travail avec le dos du crochet pour aliser les corpuscules. Cette technique nous permet de travailler la
séparation des différents plans de façon analytique.
Figure 11. Technique longitudinal exploratoire. Le praticien
perçoit sous le crochet les résistances des tissus. Si on trouve
un point de grande résistance, on arrête sur ce point, jusqu’à
la perception d’une libération myofasciale.
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Figure 12. Technique longitudinale.
Techniques de crochetage instrumental myofasciale
Conclusion
–
Kinesither Rev 2008;(75):17-21
Veszely M, Guissard N, Duchateau J. Contribution à l’étude
des effets de la fibrolyse diacutanée sur le triceps sural. Ann.
La technique de crochetage est une excellente méthode
pour traiter les adhérences formées entre les différents
tissus du corps humain. Elle est loin d’être une méthode
douloureuse et peut avoir un effet relaxant important.
Son application doit respecter le locus dolenti. La bonne
connaissance de l’anatomie palpatoire (figures 15 et 16),
de la physiologie de la régénération des tissus mous et
évidemment un bon geste pratique constituent la garantie de la réussite de la thérapeutique.
Kinésithér 2000;27:54-9.
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diagnostico e terapeutico in fisistria. Europa mediophysica
Colombo I, Ekman K. La fibrolisi diacutanea nuovo mezzo
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1978;4.
Figure 13. Décollement et mobilisation de la patela.
Figure 14. Décollement de la scapula.
Figure 15. Visualisation de l’effet du crochet sur le plan
musculaire. Cloison Rectus Femoris – Vastus Medialis.
Fig. 16. Crochetage du Tractus Iliotibialis.
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