8.5. Portugal : « c`est une période d`opportunités

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8.5. Portugal : « c`est une période d`opportunités
8.5. Portugal : « c’est une période d’opportunités »
Tout le monde sait très bien que les Portugais sont sur la paille. Mais quelles sont les
conséquences pour le milieu des entreprises? Que devez-vous absolument savoir, en tant que
PME belge, avant de vous diriger vers le marché portugais? Quelles sont les choses à faire et à
éviter? Nous avons posé la question à trois Belges qui ont acquis au fil des années une grande
expérience de ce pays : Johan Stevens, Peter Vandekeybus et Robert Matthe. Nous les
remercions sincèrement pour leur collaboration. (M.V.)
Commençons par une note positive: d’après vous, où se situe le plus important
potentiel du Portugal pour les entreprises belges?
“Depuis que le pays a adhéré à l’UE, on n’y a pas consacré beaucoup d’attention à l’agriculture
et à l’industrie”, affirme Johan Stevens. “Selon moi, c’est pourtant là que se situent les
principales opportunités. En outre, on y trouve du personnel jeune et qualifié, et les loyers
pour les bâtiments industriels y sont peu élevés, ce qui est très utile pour l’industrie. Le
Portugal compte également de nombreux ingénieurs qualifiés et parlant l’anglais qui
représentent une véritable valeur ajoutée pour les départements de Recherche &
Développement. Dans le même temps, la crise permet aussi des possibilités: de nombreuses
entreprises rentables sont confrontées à des problèmes de liquidités, ce qui signifie qu’il est
intéressant de les racheter. ”
“Dans le secteur dans lequel nous sommes actifs, le potentiel se situe surtout dans des
produits innovants pouvant attirer le grand public, ainsi que dans des produits faisant l’objet
d’un label privé surtout axés sur les prix”, explique Peter Vandekeybus. “Pour les produits de
marque, le seuil d’accès est actuellement très élevé en raison de la baisse du chiffre d’affaires
des vendeurs au détail et de la façon dont ils cherchent à la compenser – ce qui est logique –
entre autres grâce aux marges arrières.”
“Saisir des opportunités signifie que vous allez réellement utiliser les atouts que présente le
Portugal”, souligne Robert Matthe. “Le coût salarial y équivaut à peine à un tiers de celui de la
Belgique. Les marchandises circulent assez rapidement entre le Portugal et la Belgique ou
d’autres pays européens. En ce moment, le pays a un excédent de personnel qualifié. Un
chiffre suffit à illustrer cette situation : l’année dernière, 150000 jeunes universitaires ont
quitté le pays. Le Portugal constitue également un point de départ vers d’autres pays de
langue portugaise. En outre, il y règne un climat fiscal favorable à l’innovation. ”
Similitudes culturelles
Où se situent exactement les principales différences culturelles entre la Belgique et
le Portugal?
“Les Belges sont un peu plus organisés et les Portugais sont très flexibles”, répond Johan
Stevens. “Mais je préfère me concentrer sur les points communs: tout comme les Belges, les
Portugais sont des gens très productifs, à condition que l’entreprise puisse les soutenir en
mettant en place une bonne organisation. ”
“Le Portugal est un pays à la bureaucratie très lourde et vous devez y remplir des documents
pour tout et n’importe quoi”, affirme Peter Vandekeybus. “La société y est également assez
hiérarchisée et formelle, ce qui se traduit par la grande importance que l’on attache aux titres
et au savoir-vivre. Dans le monde des affaires, il vaut mieux ne pas se montrer trop direct.
Souvent, les Portugais apprennent d’abord à connaître leur partenaire avant de commencer à
parler affaires. Durant les négociations, on voit bien que l’on se trouve dans un pays du Sud.
Souvent, on n’arrive pas à des accords bien précis et tout est toujours discutable.”
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“Ici, les rouages de l’administration sont très lents”, selon Robert Matthe. “Le pays connaît
également des différences sous-jacentes considérables, et ce dans différents domaines. Ainsi,
il n’existe pratiquement pas de classe moyenne, et le fossé entre les riches et les pauvres est
énorme. C’est un pays du Sud, mais le Nord est plus industrialisé que le reste du pays.
Dans le Sud, l’agriculture est plus importante, et Lisbonne constitue le centre administratif.
Dans la région de l’Algarve et sur la côte, le tourisme est omniprésent.”
Effets de la crise
La crise a sévi de façon particulièrement dure au Portugal. Comment ces trois
entrepreneurs le ressentent-ils dans leur expérience quotidienne ?
“Les faits sont indéniables : 80% des efforts réalisés sont dus à la hausse des impôts”, affirme
Johan Stevens. “Dans certains secteurs tels que les matériaux de construction et les ventes de
voitures, la consommation nationale a presque chuté de moitié. En l’espace de 3 ans, le PNB a
chuté d’environ 8%. Faire en sorte que les choses reviennent à la normale représente un
immense défi.
Le crédit bancaire est quasiment inexistant, aussi bien pour les entreprise que pour les
particuliers. Et il coûte cher, avec des marges de 6 à 8%. Les longues échéances de paiement
étaient déjà une habitude ici. À cause de la crise, ce problème s’est encore amplifié. “
“Dans notre secteur, l’importance des produits faisant l’objet d’un label privé a énormément
augmenté”, souligne Peter Vandekeybus. “Parfois, seule la marque A survit encore, et les
marques B et C doivent disparaître du marché. Les entreprises qui se trouvaient déjà dans une
position plus faible avant la crise mettent fréquemment la clé sous la porte. ”
“En principe, les banques devraient accorder des crédits à l’économie, mais ce n’est pas le
cas”, remarque Robert Matthe. “Par contre, elles concluent des accords avec des entreprises
disposant de beaucoup de liquidités qui obtiennent des crédits bon marché en échange de
dépôts à des taux d’intérêt intéressants. Le marché local est morose. L’État n’investit pas non
plus. Par contre, on accorde encore des primes en capital grâce au soutien de l’UE.”
Conseils pratiques
Enfin, que conseilleriez-vous à une entreprise belge qui vise le marché portugais?
“D’après moi, c’est le bon moment pour investir au Portugal”, insiste Johan Stevens. “Tout
indique une reprise économique à moyen terme. Les frais salariaux peu élevés restent un
atout, tout comme la diminution de l’impôt sur les sociétés à laquelle on va procéder.
D’ici 2018, elle devrait atteindre les 19%. Cependant, je vous donne également un
avertissement important: vous avez intérêt à vous montrer particulièrement attentif au
financement d’un projet. Il vaut également mieux être prudent au moment d’octroyer des
crédits à des clients.”
“Les dirigeants d’entreprise belges qui viennent ici sans faire intervenir un gestionnaire local
expérimenté connaissant les caractéristiques spécifiques du pays risquent de rapidement s’y
brûler les ailes et de le payer cher”, affirme Peter Vandekybus. “En tant que dirigeant
d’entreprise belge, je rechercherais toujours de bons partenaires disposant d’un réseau local et
d’une expérience du pays.”
“C’est le moment idéal pour acheter une entreprise”, selon Robert Matthe. “Un grand nombre
d’entre elles sont en effet confrontées à un manque de réserves qu’elles ne se sont jamais
constituées dans le passé. Lorsque vous dirigez une entreprise au Portugal, faites-le de la
même façon que pour une entreprise belge. Autrement dit, il vaut mieux que la gestion
générale et financière se fasse comme en Belgique.”
PME KMO Newsletter 22/10/2013
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