Directive relative à l`obligation de la poursuite de divulguer les
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Directive relative à l`obligation de la poursuite de divulguer les
Communiqué Bureau des affaires juridiques et professionnelles DESTINATAIRES : Procureurs en chef et procureurs en chef adjoints aux poursuites criminelles et pénales DATE : Le 17 février 2012 OBJET : Capacité de conduite affaiblie – Divulgation des registres d'entretien des appareils utilisés Les modifications législatives redéfinissant la « preuve contraire » en matière de capacité de conduite affaiblie, introduites par le projet de loi C-21, se sont traduites inévitablement par des demandes de divulgation portant sur une multitude d'aspects concernant l'entretien, la réparation et l'utilisation des appareils approuvés. Dans l'écrasante majorité des cas, les requêtes en divulgation de la preuve concernent les registres d'entretien de l'appareil de détection d'alcool approuvé (A.D.A.), de l'alcootest ainsi que du simulateur ayant servi à effectuer les tests de contrôle avec l'alcootest. La défense soutient que la divulgation de ces registres est nécessaire pour tenter de démontrer une quelconque défectuosité de ces appareils lors de l'analyse des échantillons d'haleine et utile pour évaluer la fiabilité ainsi que l'exactitude des tests au moment où ils ont été effectués. Considérant notamment les nouvelles dispositions de l'article 258 C.cr., de même que le droit de l'accusé d'avoir une défense pleine et entière, et compte tenu du fait que la jurisprudence au Québec sur la question est partagée, il apparaît approprié de modifier la position du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) en regard de la divulgation des registres d'entretien des appareils utilisés. À cet effet, il ne s'agirait pas d'en concéder la pertinence, à savoir que les informations sur l'entretien et la réparation des appareils sont utiles pour déterminer la fiabilité et l'exactitude des analyses au moment des tests passés sur l'individu, à un moment précis, mais plutôt de tenter d'empêcher le plus possible l'accumulation de dossiers et d'éviter un engorgement des tribunaux. Par conséquent, dans le contexte actuel et dans l'attente de la décision que rendra la Cour suprême à l'égard de la validité constitutionnelle des amendements2, le poursuivant devra dorénavant divulguer les éléments suivants à l'accusé, lorsque demande lui sera faite, à savoir : 1 2 copie du registre d'entretien ou tous les documents pouvant constituer un tel registre ou toutes les informations relatives à l'entretien et aux réparations effectuées sur l'alcootest utilisé par les policiers pour analyser l'alcoolémie de l'accusé. Ce registre, ces documents ou ces informations devront couvrir la période de six mois précédant la date où l'individu a fourni un échantillon d'haleine pour Loi sur la lutte contre les crimes violents, L.C. 2008, ch. 6, entrée en vigueur le 2 juillet 2008. R. c. St-Onge Lamoureux, dossier 33970. Cette affaire est présentement en délibéré, l'audition ayant eu lieu le 13 octobre 2011. Complexe Jules-Dallaire 2828, boulevard Laurier Tour 1, bureau 500 Québec (Québec) G1V 0B9 Téléphone : 418-643-9059 Télécopieur : 418-644-3428 www.dpcp.gouv.qc.ca 2. analyse ainsi que la période de six mois suivant ladite date, le cas échéant. Il est demandé soit le « registre » de l'appareil, soit le « registre d'entretien », ou encore le « registre de réparation ». Le document sollicité est celui auquel réfère la Société canadienne des sciences judiciaires3. Précisons qu'il ne s'agit pas de trois registres distincts. En fait, une chemise comprend habituellement tous les documents associés à l'appareil (ex. : rapport de demande d'étalonnage ou de défectuosité d'équipement en sécurité routière, pièces remplacées, vérifications d'étalonnage subséquentes). copie du registre d'entretien ou tous les documents pouvant constituer un tel registre ou toutes les informations relatives à l'entretien et aux réparations effectuées sur le simulateur utilisé avec l'alcootest, pour la même période. copie du registre d'entretien pour l'A.D.A., tenu en vertu du Règlement sur les appareils de détection d'alcool4, pour la même période. Rappelons qu'il n'y a eu aucun changement législatif relativement à l'A.D.A. Le résultat obtenu à l'aide de cet appareil ne fait pas preuve du taux d'alcool, mais sert plutôt à conférer au policier des motifs raisonnables, aux fins du paragraphe 254(3) C.cr., pour procéder à l'arrestation de l'accusé et pour lui intimer l'ordre de fournir des échantillons d'haleine à des fins d'analyse au moyen d'un alcootest. Cela dit, le poursuivant devra prendre soin de préciser, dans sa correspondance transmise à l'accusé, que la pertinence de la divulgation de ces éléments n'est pas reconnue, mais que, dans le but d'écourter les débats en vue d'une saine administration de la justice, lesdits documents sont remis. Des dispositions ont été prises afin d'aviser l'ensemble des corps policiers de cette nouvelle façon de faire pour qu'ils s'y conforment et fassent parvenir au poursuivant, dans les meilleurs délais, sur demande, les documents et informations spécifiés plus haut. Il y a lieu, en réponse aux demandes de communication des registres, de prendre en compte le temps raisonnable qui sera nécessaire aux corps policiers pour y donner suite. En effet, les informations requises ne sont pas nécessairement déjà colligées en vue de la communication compte tenu, notamment, que leur divulgation n'a jamais été exigée auparavant. Jusqu'à maintenant il n'y avait donc pas de nécessité de mettre sur pied des systèmes lourds et coûteux pour faire la gestion de ces renseignements en vue de la divulgation. N'oublions pas que dans le cas de la SQ, il s'agit de renseignements qui concernent 202 alcootests, 194 simulateurs et 632 A.D.A., répartis 3 4 NORMES ET PROCÉDURES RECOMMANDÉES PAR LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES SCIENCES JUDICIAIRES — COMITÉ DES ANALYSES D’ALCOOL, Journal de la Société canadienne des sciences judiciaires, Can. Soc. Forens. Sci. J., vol. 36, no 3 (2003), p. 129-159, dont l’extrait ci-joint (voir le point E de la page 144). Règlement sur les appareils de détection d'alcool, L.R.Q., c. C-24.2, r.0.0001, Code de la sécurité routière, L.R.Q., c. C-24.2, a.619, par. 7.10;1996, c.56, a.133, par 10. 3. sur l'ensemble du territoire du Québec. Au surplus, comme vous le savez plus que moi, le système judiciaire est inondé présentement de demandes pour la divulgation de ces registres. Il faudra donc, dans nos réponses aux avocats qui font la demande de communication ou au tribunal confronté à une requête en divulgation, souligner la nécessité de prendre en compte ce facteur et tenter d'obtenir un délai raisonnable pour s'exécuter. En ce qui concerne les autres renseignements et documents requis par la défense relativement à : l'A.D.A. (ex. : relevé des tests ayant conduit au renouvellement du certificat d'utilisation, registre d'étalonnage à trois points) la solution d'alcool type (ex. : nombre total de bouteilles constituant le lot, méthode d'échantillonnage des bouteilles analysées pour la certification du lot, résultat des analyses, traitement statistique des résultats des analyses, nom des techniciens ayant participé à l'analyse de l'alcool type ainsi que les livres et notes de laboratoire) la mémoire de l'alcootest (code source) l'attestation de qualification du technicien qualifié l'existence d'un programme de contrôle de la qualité la position du DPCP demeure inchangée, à savoir que tous ces éléments ne sont pas pertinents suivant les critères de l'arrêt Stinchcombe5. Il revient à l'accusé d'établir la pertinence de ce qui est demandé. Nous comptons donc sur votre habituelle collaboration pour informer les procureurs sous votre direction de cette nouvelle façon de procéder. (Original signé) Me Pierre Lapointe Procureur en chef aux poursuites criminelles et pénales PL/AMI/nl p. j. 5 R. c. Stinchcombe, [1991] 3 R.C.S. 326.