CFF: hausse de prix difficile à comprendre

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CFF: hausse de prix difficile à comprendre
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CFF: hausse de prix
difficile à comprendre
MOBILITÉ I Les entreprises de transports publics entendent augmenter le prix des billets de
2,9% dès décembre. Au regard des bénéfices engrangés, cette hausse est difficile à justifier.
de bénéfices deux fois plus élevés
pour supporter notre dette.» C’est
ce qu’a déclaré Ulrich Gygi, président du conseil d’administration
des CFF, lors de la présentation des
chiffres 2013, en mars dernier.
Attitude alarmiste
Ces propos s’inscrivent dans
toute une série de déclarations pessimistes sur la situation financière
de l’ex-régie fédérale. Il y a eu des
discours sur l’augmentation des
coûts d’exploitation et sur les gros
investissements à prévoir dans les
infrastructures. Et puis, il y a le
spectre des 10,7 milliards de francs
que les CFF vont devoir injecter au
cours des 25 prochaines années
pour repenser les gares saturées.
Ce qu’on ne dit pas, c’est que
l’agrandissement des gares génère
de précieuses recettes supplémentaires. En jetant un œil aux chiffres
dégagés par le secteur immobilier
des CFF (1), on constate que les
­surfaces commerciales et la forte
fréquentation des gares ont généré des profits annuels de quel­
que 200 millions de francs au cours
des deux derniers exercices. Il est
également intéressant de relever
que la division voyageurs gagne
plusieurs centaines de millions de
francs par an. Sans parler du bénéfice consolidé qui tourne en
moyenne à 335,5 millions de francs
depuis 2009.
Un trou très flou…
Malgré tout, l’Union des transports publics (UTP) estime que la
hausse du prix des titres de transport doit être de 2,9%. Cette mesure touchera tous les billets et
les abonnements à partir du changement d’horaire qui aura lieu le
14 décembre prochain. Ainsi un
abonnement demi-tarif valable
deux ans passera de 330 fr. à 340 fr.
L’abonnement général (AG) de
2e classe grimpera de 3550 fr. à
3655 fr. Des prix nettement plus
élevés que ceux des pays voisins
lorsque les comparatifs sont faits
correctement (lire encadré).
L’ UTP justifie cette augmen­
tation en parlant d’un trou à
­combler de 90 millions de francs
projeté par l’Office fédéral des
trans­ports (OFT). Ce montant correspondrait à une étape inter­
médiaire du financement du trafic voyageurs régional en 2015. Il
s’agit donc, pour l’heure, d’un pronostic. Pronostic qui ne pourra
être vérifié que lorsque les offres
des entreprises de transport seront
rentrées et que les cantons auront
établi leur budget.
Usagers à la caisse
En d’autres termes, personne
ne sait encore si cet argent viendra
à manquer. Si l’on se réfère aux jolis bénéfices engrangés par les CFF
au cours des dernières années, on
voit mal comment ils pourraient se
retrouver dans les chiffres rouges.
La seule certitude, c’est qu’on
puise une fois de plus dans la
poche des usagers, avec une
hausse des tarifs qui rapportera
70 millions de plus aux transports
publics. Sur cette somme, nul ne
sait combien les CFF toucheront…
Gery Schwager / yd / yng
Lire également notre enquête «Quand
le rail fait fructifier la pierre», BàS
12/2013, sur www.bonasavoir.ch
(1)
Martine Dutruit
rentabilité est trop
«N otre
faible. Nous avons besoin
Prix du billet
Une comparaison boiteuse
Huit jours avant l’annonce de l’augmentation du prix des billets de 2,9%,
le Service d’information pour les transports publics (Litra) publiait une étude
affirmant que le rail est plus avantageux
en Suisse que dans des pays comme la
France, l’Italie, l’Allemagne, l’Angleterre
ou les Pays-Bas. Le hic, c’est que les
auteurs comparent des pommes et des
poires.
C’est ainsi qu’ils ont relevé combien un
usager suisse devait débourser pour
faire deux fois par mois le trajet Zurich-
Bivio (GR) par rapport à un Hollandais
qui se déplace d’Amsterdam à Suyde­
roog, vers le nord, à la même fréquence.
Les prix prennent en compte le demitarif en Suisse, mais pas aux Pays-Bas,
sachant que l’abonnement n’est pas
valable pendant les heures de pointe.
Idem en France et en Italie où aucune
réduction n’a été considérée.
De plus, les auteurs ont standardisé
leurs calculs en divisant le prix des billets par le nombre de kilomètres. Ils ont
ensuite multiplié ce chiffre par 132, ce
qui correspondrait aux kilomètres séparant Zurich de Bivio. Sauf qu’il s’agit là
de la distance à vol d’oiseau et non du
parcours réel (172 km). Cette erreur a
pour conséquence de tirer le prix des
billets des autres pays vers le bas.
Financée par 242 membres (dont
89 entreprises de transports publics
suisses), la Litra a donc fourni une
étude approximative, même si ses
auteurs estiment que sa conception
et sa méthodologie étaient claires et
transparentes.

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