Noël – Messe de Minuit – C - Abbaye Sainte Anne de Kergonan

Transcription

Noël – Messe de Minuit – C - Abbaye Sainte Anne de Kergonan
Noël – Messe de Minuit – C –
Sainte-Anne, le 24 décembre 2012
Lectures :
Is, 9, 2-7
Tt 2, 11-14
Lc 2, 1-14
Mes biens chers Frères,
Frères et Sœurs,
Telle une douce supplique, notre bel Introït, ce premier chant qui a ouvert, il y a un
instant, notre Messe de Minuit, s’est fait entendre dans le profond silence de la nuit : Dominus
dixit ad me… : Le Seigneur m’a dit : Tu es mon Fils ; moi, aujourd’hui, je t’ai engendré.
Le texte de ce chant qui nous place directement au cœur du mystère que nous
célébrons, est tiré du psaume deuxième. C’est un psaume messianique qui appartient donc à
cette mouvance qui attend tout particulièrement le Messie. Les mots retenus pour notre Introït
sont pris au verset 7. En réalité, c’est le Messie lui-même qui parle et qui affirme sa
génération divine en se référant directement à la parole du Père qui l’engendre. Le Seigneur
m’a dit : Tu es mon Fils ; moi, aujourd’hui, je t’ai engendré. Dans cette petite phrase si courte
mais si dense et chargée de sens, le mot aujourd’hui nous renvoie à l’éternel présent de Dieu,
dans ce temps hors du temps dans lequel ‘Dieu est’ et engendre son Verbe, comme sa parole
unique et substantielle en laquelle s’achève son unique Pensée. Dieu est simple et c’est pour
nous un peu difficile et compliqué de comprendre et de parler de la simplicité de Dieu.
Dans le cadre de notre liturgie, cet Introït est comme le premier mot de l’Enfant-Dieu,
le mot par lequel il nous dit, à travers la voix de l’Église, qui il est et d’où il vient. S’il atteste
de son éternelle naissance, il dit également son avènement dans le temps. Il nous invite à
considérer la plénitude du temps, célébrée dans l’Écriture, où le temps produit l’éternel, la
créature son créateur, et la Vierge son Dieu et son Fils unique tout ensemble. En effet, au
moment où le Christ vient physiquement au monde à Bethléem, il est aussi, en toute vérité,
humainement engendré : il naît de la Vierge Marie fécondée par le Saint-Esprit. Le moi,
aujourd’hui intéresse alors tout autant son engendrement charnel qui est aussi l’œuvre de
Dieu, et le mot aujourd’hui, tout en gardant son sens d’éternité, indique également le jour
précis de sa naissance parmi les hommes.
Oui, pour Marie, arrivèrent les jours où elle devait enfanter. Et elle mit au monde son
fils premier-né; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de
place pour eux dans la salle commune (cf. Lc 2, 6ss). De manière toujours nouvelle, ces mots
nous touchent le cœur. Il est arrivé le moment annoncé par l’Ange à Nazareth : Tu vas
enfanter un fils ; tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand, il sera appelé Fils du TrèsHaut (cf. Lc 1, 31). Il est arrivé le moment attendu par Israël depuis tant de siècles, durant tant
d’heures sombres, à travers des figures encore confuses : le moment annoncé où Dieu
prendrait soin d’eux, où il ne serait plus caché, où le monde deviendrait sain et où il
renouvellerait tout.
Il est arrivé aussi pour nous le moment où le Fils de Dieu vient prendre chair. Car en
engendrant le Verbe dans sa pensée unique et éternelle, le Père, dans le même acte, le
prédestine à être le Chef et le Sauveur de l’humanité tout entière et lui donne déjà tous les
hommes de bonne volonté. Nous sommes au Christ et le Christ est à Dieu.
Ainsi, au cœur de cette nuit, nous sommes invités à nous mettre tout près de Marie, à
son école. À genoux, dans le silence, laissons-nous submerger par la réalité de ce mystère,
laissons-nous gagner par l’émerveillement et l’adoration. Laissons l’Enfant-Jésus, couché
dans la crèche, nous faire entrer dans la joie et l’enthousiasme de la foi.
Notre Introït nous y aide. Sa mélodie qui fait chanter ces quelques mots est des plus
simples. Les notes sont légères et presque immatérielles. L’ambitus est réduit ; les notes ne
bougent qu’à peine et nous tiennent comme au-dessus du temps. La musique respecte le texte
qu’elle veut mettre en valeur. Ces paroles ne disent pas une joie éclatante, mais la
contemplation infinie du Christ appuyée sur la parole du Père, Parole éternelle qu’il est luimême, qu’il entendit dans le sein de Notre-Dame au moment de l’Incarnation et qu’il nous
invite à redire, à méditer avec lui, et à faire nôtre, dans le silence et la paix indicible de son
sourire d’enfant. Dominus dixit ad me… : Le Seigneur m’a dit : Tu es mon Fils ; moi,
aujourd’hui, je t’ai engendré.
Joyeux et Saint Noël à vous tous et à vos familles !