ANACARDIUM / troubles du comportement de lʼenfant.

ANACARDIUM / troubles du comportement de lʼenfant.
Parabole de l'envieux
Mathieu est né le 02 11 87, et je le connais depuis le 27 11 87. C'est l'aîné de
trois garçons. Petit, il a eu de l'eczéma dès l'âge de deux mois, et je suis tout à fait
incapable de vous dire pourquoi diable j'ai donné Morbillinum à deux reprises (sans
résultat flagrant) pour tenter de soigner cet eczéma ; même il y a 13 ans je n'étais
pas allé chez Senn. Ça ne l'a d'ailleurs pas empêché d'avoir la rougeole à 15 mois.
C'est plutôt Graphites qui a permis d'attendre la disparition spontanée de l'eczéma
vers deux ans sans trop de gêne pour l'enfant et la maman.
Par la suite il a eu quelques rhino-pharyngites qui avaient tendance à se
transformer facilement en bronchite, on peut même noter une scarlatine à 4 ans 1/2,
mais rien de bien important, et il réagissait plutôt bien à mes traitements. On peut
noter un tempérament anxieux certain, et il a eu peur de l'examen médical jusqu'à 3
ans, donc plus longtemps que lamoyenne.
Vers 5 ans il a eu plusieurs épisodes d'adénopathies fébriles non expliquées
avec asthénie (sérologie Epstein Barr Virus négative).
Mais ce n'est qu'en juin 1996 (8 ans 1/2) qu'on me l'amène pour autre chose
que des épisodes aigus. Il vient pour une encoprésie. Au début, c'était de temps en
temps, surtout les jours où on le mettait à la cantine. Maintenant c'est quotidien, voire
trois fois par jour. Voilà une liste de symptômes recueillis ce jour là :
À l'école je m'en foutiste, même les remontrances de la maîtresse il s'en
fout ; il écoute sans écouter.
Les devoirs, il ne les fait que si on est constamment derrière lui.
Ment : "à l'école tout va bien.", alors qu'il se ramasse une punition tous les
jours.
Il dissipe aussi les autres élèves.
Il préfère s'amuser avec les petits qu'avec ceux de son âge : "-- Avec les
grands de mon âge, à chaque fois il y a de la bagarre."
"-- Le soir, je sors du lit parce que j'arrive pas à m'endormir, je bouge trop."
De temps en temps il sort : "-- Fallait pas me faire." "-- Vous ne m'aimez
pas."
"-- Je déteste les limaces."
Angoissé, si quelque chose sort de l'ordinaire.
Aime bien manger chaud, mais a toujours trop chaud. Cependant il reste
des fois habillé la nuit par peur d'être en retard le lendemain matin.
Il dort en chien de fusil, la tête redressée par un gros nounours.
Il respire beaucoup par la bouche et a souvent des croûtes sèches dans le
nez.
Je trouve une desquamation de la plante des pieds et des fissures du gros
orteil.
Bien qu'il ait toujours chaud, je prescris Arsenicum Album en 200K.
Je ne le revois qu'en février 97 pour une pharyngite. J'apprends qu'Ars. a tout
de suite réglé le problème d'encoprésie, et que le comportement est plutôt meilleur.
Six semaines après la rentrée, il y a eu une rechute, et une nouvelle prise d'Ars.
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200K réglera tout de suite le problème. La fièvre durera 5-6 jours malgré Pulsatilla
9CH, puis Lycopodium 7CH.
Fin novembre 97 on me le ramène pour son comportement :
Surexcité, n'arrive pas à s'endormir avant 23H
N'écoute rien, toujours à bouger, à sauter partout, à enquiquiner tout le
monde.
Facilement angoissé si tout n'est pas comme il faut pour l'école.
Il faut signer les papiers (pour l'école) devant lui : il n'a pas confiance.
À un moment il avait peur d'être seul. Il dort avec beaucoup de nounours.
"--Tu rêves ? -- Je rêve qu'à la course, j'arrive premier au lieu de
quatrième."
Sa chambre est plutôt foutoir, mais par moment il va tout ranger à la
cuisine, par exemple, et se met en colère si on dérange quoique ce soit.
Le sang, chez les autres ça ne lui fait pas grand chose, mais tombe dans
les pâmes à la moindre égratignure chez lui.
À l'examen : curieux claquement de l'extrémité supérieure du radius à la
supination
Je redonne Ars. en XMK.
Je ne sais pas exactement ce que ça donnera, car je ne le revois qu'en
septembre 1999, pour un DTPolio®. Il existe une nette opposition aux parents, et
une préoccupation très nette pour l'argent, les autres ont toujours plein de choses
que lui ou ses parents ne peuvent pas lui payer. Il y a toujours le claquement à la
supination du bras gauche. Sur fear of poverty et envy, je prescris Calcarea
Carbonica 200K, qui ne fera rien.
En effet, je le revois six semaines après, car les parents ne supportent plus
ses écarts de comportements. À l'extérieur, il est souriant, agréable, à la maison il
est râleur fait tout le temps "la gueule". Il râle que ses parents ne veulent rien
comprendre (il a 12 ans). Il est très violent avec ses frères, surtout le deuxième, il les
cogne ; il ne supporte pas qu'ils le regardent ; "-- Je vais les tuer.". Il a toujours envie
de tout, les autres ont tout et lui n'a rien. À l'école il "plane" bien qu'il ait toujours plus
ou moins peur des profs, il oublie de prendre ses affaires ou son livre. Mais malgré
tout il demande des gros câlins. Il est toujours en train de "bouffer", a toujours le nez
dans le placard. Il se plaint toujours, il a toujours un bobo quelque part.
Je n'ai pas fait de répertorisation ce jour là, mais ai donné un remède en
200K.
Pendant quinze jours après la dose, le comportement était meilleur ; mais à
nouveau (janvier 2000), il conteste, provoque ; il tape ses frères ; il a peur de prendre
des coups, alors il ment ; il n'a pas de notion d'argent, les autres (parents) gagnent
plus, il veut tout.
Il aime bien quand il y a du monde, la foule ; il aime bien qu'on le voit, quand il
y a du monde, on n'entend que lui. Je trouve que l'effet du remède précédent n'a pas
duré bien longtemps, je tente donc Veratrum 200, quitte à reprendre le précédent en
cas d'échec.
Effectivement, je le revois quinze jours après car depuis Verat. il est tout
excité, il faut qu'il bouge. Il ne peut plus apprendre. Il prend des crises de pleurs. Je
redonne donc en 200K la dose précédente. Je l'ai revu en mai 2000 pour des
oreillons (oh! le vilain pédiatre qui n'avait pas fait le vaccin) il allait très bien au point
de vue comportement. Puis en octobre pour un début d'acné (Cutacnyl®), le
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comportement ne posait plus de problème. Puis en décembre pour douleur post
traumatique des genoux, qui ne me paraissait pas incompatible avec une nouvelle
prise du remède en 200, bien que le comportement soit toujours excellent.
Péroraison.
L'Anacardium Orientale croît en Inde, et produit un fruit, l'anacarde ou fève de
Malac, dont les propriétés seraient très voisines de celles de son cousin
l'Anacardium Occidentale qui croît en Amérique tropicale et donne la noix d'Acajou,
devenue noix de Cajou. Les principes actifs proviennent d'un suc contenu dans le
péricarpe. Celui de la fève de Malac était appliqué pour guérir les condylomes et
soulager les douleurs des caries dentaires, celui de la noix de Cajou était appliqué
pour détruire les verrues et les cors1. Chez les deux Anacardium l'amande est un
aliment semblant dépourvu d'effet thérapeutique.
Anacardium Orientale (Anac.) de la famille des anacardiacées (comme Rhus
Toxicodendron) fut expérimenté par Hahnemann, (mais n'est pas dans la Materia
Medica Pura) et est présent dans 2181 rubriques du répertoire de Kent.
Déjà Kent dans sa matière médicale avait saisi l'essentiel des troubles
psychiques d'Anac.et je n'ai rien de bien important à rajouter à l'excellente synthèse
de Jacques Lamothe dans "Homéopathie Pédiatrique". Vous pouvez donc aller
directement voir dans ces deux ouvrages qui se doivent d'être dans votre
bibliothèque.
Quelle(s) "morale(s)" tirer de ces observations ?
On peut se demander pourquoi la première prise d'Anacardium n'a eu aucun
effet chez Paul en septembre 1996. Je n'ai pas de réponse à cette question, je ne
sais pas où maman a été prendre la dose, à quel moment elle l'a donnée, s'il y a eu à
ce moment des éléments physiques ou psychiques pouvant faire barrage.
Pourquoi au bout de 15 mois le remède ne fait-il plus d'effet chez Paul ?
Probablement parce qu'il a changé de maladie, même si les manifestations sont
proches de la précédente. Si je pense qu'il n'est pas heureux de donner plus d'un
médicament pour un état pathologique donné à un moment donné, je n'ai jamais
pensé qu'un individu répondait toute sa vie au même remède. Une fois guéri de sa
première maladie il a le droit d'en faire une autre différente, et n'est pas obligé de
rechuter la même. Même si le cas n'a pas "tenu" deux ans, je m'estime parfaitement
le droit de considérer les manifestations du patient qui ont disparu pendant cette
période comme des symptômes du médicament.
Il y a certains points communs. Dans les deux cas on trouve des troubles
sphinctériens, mais ils ont été résolus par d'autres médicaments (Nat-m. et/ou Verat.
pour Paul et Ars. Pour Matthieu), on ne peut donc les attribuer à Anacardium.
Dans les deux cas ce sont deux familles irréprochables au plan moral, qui
cherchent à donner la meilleure éducation possible à leurs enfants. Et ce qui
désespère les parents, plus que les difficultés scolaires, c'est leur immoralité : Paul
qui "viole" les filles, alors que visiblement dans cette famille "on ne pense pas qu'à
ça", Matthieu qui veut toujours plus d'argent, alors que papa et maman sont ouvriers,
scrupuleusement honnêtes et ne dépenseraient jamais plus que ce qu'ils peuvent
engager.
On trouve des éléments de comportement communs : ils sont très agités, très
dissipés, insensibles aux punitions, ils dissipent les autres enfants, se bagarrent ou
se brouillent avec les copains. Dans les deux cas les souffre-douleur préférés sont
les membres de la fratrie. En même temps ils sont très câlins, avide de
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manifestations affectueuses, surtout de maman. Et le point commun qui me paraît le
plus caractéristique c'est qu'ils font tout pour se faire remarquer, car quand ils sont le
centre du monde, là, tout va bien.
Ce qui fait courir Anacardium, c'est le cas de le dire, c'est qu'il veut être le
premier, le seul, au centre du monde, c'est à dire au coeur de maman. Tout ce qui
l'en empêche doit être impitoyablement chassé (y compris le père), sans tenir
compte des lois ni des règles de la vie en société, tous les moyens sont bons. En
agissant ainsi il attire certes l'attention de maman, mais aussi ses reproches, et il voit
sa peine, et je pense que là est l'ambiguïté d'Anacardium : ange, je fais plaisir à
maman, et j'ai enfin des câlins, mais je laisse la place aux autres, ce qui est
intolérable et me transforme en démon. Le problème du choix, est certes présent,
mais me paraît la conséquence, plutôt que le moteur. Je pense que leur souffrance
est très importante, car il me semble qu'ils sont plutôt gentils au départ et deviennent
méchants "malgré eux".
Bien sûr tout ceci n'est qu'une interprétation destinée à aider à organiser les
symptômes et mieux les mémoriser. Ce n'est qu'une représentation travestie de la
réalité. Il vous appartient d'en chercher une qui correspondra mieux à votre propre
vision du monde.
Dr J. Moreau
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