Journaliste et historien

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Journaliste et historien
Joseph Roger de Benoist, Bry-sur-Marne, 60 ans de serment
Joseph sur fond de Vile de Gorée (il a participé à deux livres sur Gorée en 1993 et en 2003)
Journaliste et historien
C
inq mois après mon ordination sacerdotale à Carthage, le 1er février 1950, ma première nomination
a été pour l'École Supérieure de Journalisme de
Lille.Et, le 15 mai 1952, j'arrivai àDakar pour faire partie
de l'équipe de Pères Blancs qui, depuis le 15 juin 1947, faisait paraître, à la demande des vicaires apostoliques de
l'Afrique Occidentale Française, l'hebdomadaire Afrique
Nouvelle.
À Dakar, Directeur d'Afrique Nouvelle
D'abord rédacteur, deux ans et demi plus tard, je devais assurerpar intérim la direction de la publication à la suite du
renvoi successif des deux premiers directeurs, les PP Marcel Paternot et Robert Rummelhardt par Mgr Marcel Lefebvre, vicaire apostolique de Dakar et responsable
ecclésiastique du journal. Cet intérim dura jusqu'à la fin de
1959 : Mgr Lefebvre aurait bien voulu me faire partir avant
à cause des positions prises alors par le journal et qui
n'étaient
pas
conformes
aux
siennes, mais il se
heurta au refus de
notre
Supérieur
Général, le P. Volker.
Dès 1952, j'avais
assuré l'aumône-rie
de la Marine
Dakar 1989, en
conversation avec
Abdoulaye Bara
Diop, Directeur
deVLEA.N.
Française au Sénégal et en particulier des routiers africains
qui s'y trouvaient et qui, démobilisés, restaient souvent au
Sénégal dans la Police ou la Douane. Beaucoup, originaires
du Dahomey, étaient en âge de se marier et faute de jeunes
compatriotes, choisirent leur épouse parmi les Cap-Verdiennes, nombreuses à Dakar et avec lesquelles ils se trouvaient des affinités culturelles lusitaniennes. Je devins
rapidement, aux yeux du clergé local, le spécialiste de ces
unions. Cet engagement pastoral aura des conséquences
dans toute ma vie sacerdotale : malgré mes occupations souvent profanes, j'ai réussi à conserver pendant toute mon
existence des activités de ministère. Au début de 1960, je
fus affecté au Mali. Après le stage de langue bambara et
dix-huit mois comme vicaire à Kolon-gotomo, Mgr
Leclerc me rappela à Bamako pour m'occu-per d'action
culturelle.
1er directeur de Peuples du Monde
En août 1963, je fus rappelé à Paris pour remplacer Pierre
Laridan qui retournait au Mali. Pendant cinq ans, je me suis
occupé d'information missionnaire en collaborant à Vivant
Univers, à la télévision et à la radio. En juin 1967, je fis paraître le premier numéro de Peuples du Monde, dont je quittai rapidement la direction par suite d'un désaccord avec le
président du conseil d'administration, un père des Missions
étrangères. Après avoir assuré l'édition des Actes capitulaires de 1967 et fait un voyage à travers l'Afrique pour étudier un projet continental de radio catholique, je fis une
tournée de quatre mois dans toute l'Amérique Latine pour
le compte du Centre de Reportages et d'Informations Catholiques (CIRIC). Ce fut pour moi le commencement de
reportages qui, en vingt ans, m'ont conduit dans tous les
pays d'Amérique du Nord (y compris Hawaï), des Caraïbes,
notamment Porto-Rico, Cuba et les Antilles françaises, dans
la plupart des pays d'Afrique (y compris l'Afrique du Sud),
au Yémen, en Indonésie et aux Philippines. Ces reportages
JV° 252 —
2009
ont été publiés dans La Vie, Croissance des Jeunes Nations, Informations Catholiques Internationales,
Marchés Tropicaux, etc.
Dahomey : la pastorale
de la famille
En septembre 1968, Mgr Gantin, archevêque de Cotonou, avec qui j'étais
très lié depuis 1953, me demanda de
venir au Dahomey (aujourd'hui
Bénin) pour aider à la réinsertion dans
l'Église locale des couples dont j'avais
béni le mariage à Dakar et dont beaucoup revenaient au pays natal du mari.
C'est ainsi que j'ai travaillé au Dahomey de novembre 1968 à juillet 1972,
séjour coupé en été 1971 par les
grands exercices à la Villa Cavalletti
en Italie. Adjoint au directeur national
des œuvres, l'abbé Robert Sastre, futur
évêque de Lokossa, j'étais aumônier
national de l'Action Catholique des
Familles, des Équipes Enseignantes,
des Guides, chargé de la préparation
au mariage, des émissions catholiques
à la radiodiffusion nationale et de la
quelqu'un pour écrire la biographie du
P. Goarnisson ; je fus pressenti pour le
faire. Le Père avait été mêlé à la vie
politique de la région pendant les années précédant l'indépendance, et cela
me conduisit à faire des recherches sur
cette période de l'histoire de l'A.O.F.
Apprenant cela, le président Senghor
me proposa de revenir au Sénégal pour
travailler à l'Institut Fondamental (anciennement Français) d'Afrique Noire
(IFAN). Cette demande, soutenue par
mon Régional, alors Jean-Marie Vasseur, fut agréée par le conseil généralice.
Entre Paris
et l'Afrique de l'Ouest
En 1972-1973, je passai un an à Rome
pour dépouiller la collection d'Afrique
Nouvelle. Puis, inscrit à l'École Pratique des Hautes Études en Sciences
Sociales, je passai cinq ans entre Paris
et les archives nationales des pays
d'Afrique de l'Ouest pour obtenir, en
juillet 1976, le diplôme des Hautes
Études (La balkanisation de l'A. O.P.)
et, en juillet 1978, le doctorat de 3e
cycle (L'Afrique Occidentale Française de 1944 à I960).
Retour à Dakar :
chercheur à l'I.F.A.N.
Dakar 1985, soutenance de thèse
catéchèse dans plusieurs établissements scolaires. Je vivais en communauté à Cotonou avec plusieurs prêtres
dahoméens. En 1971, Mgr Gantin fut
appelé à Rome. Son successeur,
Mgr Adimou me confirma d'abord
dans toutes mes fonctions et me chargea de la préparation d'un synode diocésain. Mais dans le courant de 1972,
il mit fin à mon détachement.
Haute Volta : biographie
du Père Goarnisson
Mgr André Dupont me proposa de
venir à Bobo-Dioulasso, où je fus
chargé de l'aumônerie et de la catéchèse dans des lycées. J'étais sous-employé ; aussi, quand le cardinal
Zoungrana, archevêque de Ouagadougou, demanda à la Maison généralice
£e£ien Af° 252 — nwemfae 2009
En octobre 1978, j'étais de retour à
Dakar où j'entrai comme chercheur à
l'I.F.A.N. Je gravis tous les échelons
pour devenir le premier directeur de
recherches de l'Institut en 1991. En
1985, j'avais soutenu ma thèse de doctorat d'État à Dakar (Église et pouvoir
colonial au Soudan occidental). De
1980 à 1990, je fus secrétaire de rédaction d'une revue Afrique Histoire.
Pendant toute cette période, j'allais
souvent en France et en Europe pour
des colloques, notamment dans le
cadre du Centre d'Échanges et de Recherches sur la Diffusion et l'Inculturation du Christianisme (CREDIC). et
pour donner des sessions dans les Universités de Lyon III et Bordeaux III. À
partir de 1989, je me spécialisai dans
l'histoire de l'Ile de Gorée et je publiai
en 2003 avec un collègue universitaire
sénégalais une Histoire de Gorée. En
1987, le gouvernement français me
nommait chevalier de la Légion
d'Honneur et je fus promu Officier de
1952 à 1959 - Journaliste puis
directeur d'Afrique Nouvelle
11
cet Ordre en 1997. En 2002, à l'occasion d'une cérémonie universitaire pour le cinquantenaire de mon arrivée à
Dakar, je reçus du Sénégal les insignes de Commandeur de l'Ordre National du Lion.
De 1978 à 1993, je logeai dans une maison que j'avais achetée à proximité de la paroisse tenue jusqu'en 1986 par les
Pères Blancs. Peu après mon retour à Dakar, l'Association des Femmes Catholiques Cap-Verdiennes me demandèrent
d'être leur aumônier. Deux ans plus tard, le cardinal Thiandoum me chargea de regrouper les associations catholiques
féminines du diocèse et de les inviter à s'engager dans la pastorale. Ce fut le début d'une action qui dura vingt-cinq
ans et qui aboutit à la création d'une Coordination Nationale des Associations Féminines Catholique du Sénégal. En
1978, je devins conseiller spirituel de l'unique Équipe Notre-Dame de Dakar, entièrement européenne. Quand j'ai
quitté mon engagement dans ce mouvement, 28 ans plus tard, il y avait huit équipes, presque totalement africaines.
Pendant plusieurs années, j'ai donné des cours (histoire de l'Église, islam; nouvelles églises) au symposium de
philosophie créé par plusieurs congrégations religieuses. De 1978 à 1993, j'ai été le chapelain de la maison
généralice des Filles de Saint-Cœur de Marie, congrégation créée en 1858.
L'histoire
de l'Église du Sénégal
Le 1er janvier 1993, je fus mis à la retraite par l'IFAN, tout en continuant à être
conseillé historique du Musée historique du Sénégal à Gorée, ce qui m'a permis
d'y installer une présentation de l'histoire de l'Église catholique au Sénégal.
Les évêques du Sénégal me demandèrent alors d'écrire une histoire de
l'Église au Sénégal, à laquelle j'ai travaillé pendant près de dix ans en allant
chercher des documents au Portugal, à la Propagation de la Foi à Rome et à
Aix-en-Provence. Pendant ce temps, j’ai aussi écrit un livre sur Senghor dans la
collection « Politiques et Chrétiens » chez Beauchesne, et une réédition d’un
livre sur le Mali, que j’avais publié en 1989. Pendant cette période, j’ai habité
avec des confrères sénégalais, d’abord à la Procure du diocèse, puis au
presbytère de la cathédrale dont j’étais vicaire dominical depuis 1976.
Dans le courant de 2006, le manuscrit de l’Histoire de l’Église catholique au
Sénégal du milieu du XVe siècle à l’aube du troisième millénaire était achevé,
j’avais quelques ennuis de santé (embolies pulmonaires, arthrose des genoux) et
le Provincial m’a proposé de quitter le Sénégal avant d’être à charge au clergé
sénégalais. C’est ainsi que je suis rentré définitivement en France le 20
décembre 2006. Opéré en novembre 2007 du genou droit, je suis depuis le mois
suivant à Bry-sur-Marne, et j’ai été opéré le 20 octobre 2008 du genou gauche.
Mes professeurs du Collège Stanislas (Paris) qui m’ont aidé à améliorer mes
rédactions françaises ne se doutaient pas qu’ils étaient les instruments choisis
par la Providence pour me préparer à une vie missionnaire où l’écrit, plus que la
parole, a été mon principal instrument d’apostolat.
Joseph Roger de Benoist
Principaux ouvrages de Joseph Roger de Benoist
0 Docteur Lumière, (préface du Cardinal Paul Zoungrana), 1975 0La balkanisation de l'Afrique occidentale
française, (préface de Léopold Sédar Senghor), 1979
• L'Église catholique et la naissance des nouvelles nations en Afrique occi
dentale francophone, 1981
0 L'Afrique occidentale française de la Conférence de Brazzaville (1944) à l'indépendance (1960) (préface
d'Amadou Mahtar Mbow), 1982
0Les missionnaires catholiques du Soudan français et de la Haute Volta entrepreneurs et formateurs d'artisans,
1983
• Colonisation et évangélisation, 1985
• Église et pouvoir colonial au Soudan français : les relations entre les ad
ministrateurs et les missionnaires catholiques dans la Boucle du Niger, de
1885 à 1945 (préface de Catherine Coquery-Vidrovitch), 1987
• L'hebdomadaire catholique dakarois "Afrique Nouvelle " et la décoloni
sation de l'AOF, 1986
0 Félix Éboué et les missions catholiques, 1987
0 L'Église catholique en Afrique : deux millénaires d'histoire, 1991
• Gorée, Guide de l'île et du Musée historique, 1993 (en collaboration avec
Abdoulaye Camara)
o Le Mali, 1998
• Histoire de Gorée, 2003 (en collaboration avec Abdoulaye Camara, Fran
çoise Descamps, Xavier Ricou et James Searing)
• Léopold Sédar Senghor (avec un témoignage de Cheikh Hamidou Kane),
1998
• Histoire de l Église catholique au Sénégal : du milieu du XVe siècle à
l'aube du troisième millénaire, 2008

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