Shultes est le portrait d`un homme dans le contexte du
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Shultes est le portrait d`un homme dans le contexte du
“Shultes est le portrait d’un homme dans le contexte du destin “ Artur Aristakissian Synopsis Ex-athlète professionnel, Liocha Shultes (25 ans), a subi un traumatisme crânien lors d’un accident de voiture. Aujourd’hui pickpocket, il vit avec sa mère âgée. Aprés son jogging quotidien, il fait ses courses, toujours dans le même magasin et le soir, il regarde invariablement la chaîne des sports. Tous ses actes semblent désormais systématiques… Ou presque tous. Personne ne sait dans son entourage, d’où cet homme secret et taiseux tire ses ressources financières. Et nul ne sait ce qu’il écrit dans le petit bloc-note dont il ne se sépare jamais. Il connaît pourtant une véritable émotion en découvrant un jour, une cassette vidéo d’une jeune femme qu’il a délestée de son portefeuille… Propos de Bakur Bakuradzé Qui est Shultes et pourquoi avez-vous choisi de raconter cette histoire ? J’ai pris un jour conscience - et c’est là qu’est née l’idée du scénario – que l’homme n’est complet que lorsqu’il a un lien avec le passé. Le passé lui trace le chemin vers l’avenir. Le problème de la diminution ou de la perte de la mémoire est un problème insoluble et qui détruit l’homme. Cela se produit subrepticement comme un vol, et l’on en prend conscience tout aussi soudainement que l’on découvre que son sac à été visité ou que sa place de parking est déserte. En perdant la mémoire on perd pratiquement notre lien au monde. Le résultat est qu’on ne peut rien aller puiser dans le passé et qu’il est impossible de le faire dans le futur. Il faut donc aller puiser chez les autres, chez ceux qui ont quelque chose dans leur sac, quelque chose qui s’appuie tant sur le passé que sur l’avenir. En dérobant des objets et des histoires dans l’espace d’autres destins, Shultes comble le vide que représente l’absence de “destin”. Ce voleur est mû par le sentiment du voleur volé… Nous voyons de prime abord un homme que rien ne distingue des autres et qui passe son temps devant des machines à sous, dans les rues de la ville ou se livrant à la rapine. Il n’appartient à aucune sphère sociale. Il est totalement isolé du reste du monde. Nombreux sont les gens comme lui, surtout dans les grandes villes. Simplement, nous ne les remarquons pas. Il n’exprime quasiment pas ses émotions, mais cela ne signifie pas qu’il n’en a pas. C’est son mode de défense. Dans Moscou mon film précédent, je parlais de la vie des Kirghizes qui ne savaient pas quoi faire de leur temps. Dans Shultes, je parle de la vie d’un pickpocket qui, lui aussi, remplit son vide. Mais l’action se situe cette fois dans une très grande ville. C’est elle qui dicte les conduites. C’est ça qui m’intéresse. On peut par exemple, manger un beignet devant l’entrée du métro et se trouver juste à côté de quelqu’un de très intéressant, mais nous ne le soupçonnons même pas. Il peut-être SDF, pickpocket ou prof d’unif avec une vie incroyable, mais nous n’en savons rien. C’est de cela que parle le film. Shultes n’est pas un nom courant. Quelle est sons sens ? J’ai eu envie que cet homme vienne d’ailleurs et je lui ai inventé un nom étranger. La plupart des acteurs sont non-professionnels. Etait-ce une position de principe lors du casting ? Non. Je cherchais simplement des gens aptes à jouer des personnages particuliers. Et il se trouve que la plupart des gens que j’ai trouvés n’étaient pas des acteurs. Mon cinéma n’est vraiment pas un cinéma d’acteurs. Dans une certaine mesure, il m’est même difficile de travailler avec des artistes. Les débarrasser de leurs oripeaux est très compliqués. Par exemple si l’on demande à un champion de natation de nager comme n’importe qui, cela lui sera difficile, car il nage différemment. Avec les artistes c’est la même chose. Or regarder un artiste nager ne m’intéresse pas; ce qui m’intéresse c’est de voir une personne ordinaire nager. Ce qui caractérise une époque, ce sont ses contemporains. Pour ce projet, il était donc plus honnête et plus juste de faire participer de vrais contemporains ayant une totale perception de la réalité et de vrais repères professionnels. Prendre des acteurs professionnels pour ce film n’eut été intéressant que si j’avais eu des rôles d’acteurs dépourvus de toute authenticité. Le rôle de Kostik, le petit vagabond, est tenu par Rouslan Grebenkine, qui vit en orphelinat… Rouslan est un enfant étonnant, très intelligent et très renfermé. Il n’exprime quasiment ni tristesse, ni joie. Il est un peu dans son monde à lui. Shultes, le protagoniste, est comme lui. Ils se ressemblent un peu. Je suis content de l’avoir trouvé. Biographies Bakour Bakouradzé (réalisateur –scénariste) Bakour Lerievitch Bakouradzé est né le 16 mars 1969 à Tbilissi (Géorgie). Il entre en 1986 à L’institut des Ponts et Chausées, effectue son service militaire de 1987 à 1989. En 1993 il entre à l’Institut de l’Etat de la Cinématographie Russe (VGIK), section Mise en scène, dont il obtient le diplôme en 1998. Son documentaire La voie des diamants se voit décerner le premier prix du festival international de la presse des affaires “Pressvanie” dans la catégorie “Meilleur film sur le monde des affaires”. En 2007, son moyen métrage Moscou est lauréat du festival “Kinoteatr.doc” à Moscou, du festival “Kinotavr” de Sotchi et est sélectionné à Cannes dans la section “Short film corner”. Filmographie 1998 – Sans argent (fiction - 35mm – 15’) 2001 – Au prix de sa vie (doc. – 39’) 2002 – Le temps du ministère des des Finances (doc. 30’) 2002 – Viatcheslav Filipenko (doc. – 36’) 2003 – Les mouvements circulaires de Vladimir Olegovitch et Olga Egorova (fiction – 15’) 2005 – La voie des diamants (doc.) 2007 – Moscou (fiction – 35’) 2008 – La route du rêve (doc – 48’) 2008 – Le temps du minsitère des finances (doc. – 26’) 2008 – Shultes (fiction – 100’) Sergueï Selianov Réalisateur en 1988 du Jour de l’ange Sergueï Selianov a produit plus de 40 fictions et documentaires dont Brat 1 et 2, Des monstres et des hommes et Cargo 200 d’Alexei Balabanov, Soeurs et Mongol de Sergei Bodrov ou encore Nirvana d’Igor Volochine. D’après le revue économique russe “Expert” il est “..le seul producteur russe dont le nom soit devenu une marque dans le domaine de la production cinématographique”. Commentaires “Le scénario de Shultes dresse le portrait d’un pickpocket qui rappelle un peu le célèbre film de Robert Bresson de la fin des années 1950 et – ce qui est le plus surprenant – ne lui cède rien en qualité. Ce scénario a une sutructure en strates qui permet de combiner une justesse quotidienne et psychologique à des problèmes sociaux et des réflexions philosophiques sur le sens de la vie.” (Kirill Razlogov) “Shultes est un film remarquable , qui se réapproprie Bresson en lui rendant un juste hommage… Shultes est moins l’itinéraire d’une rédemption individuelle que l’allégorie d’un pays en proie à la désintégration de son identité et à l’oubli de son histoire… (Le film) nous rappelle avec beaucoup de subtilité que l’occultation de l’Histoire conduit ni plus ni moins à sa répétition…La découverte d’un film russe de cette qualité et de cette importance est donc un événement… (Jacques Mandelbaum – Le Monde)