FMR Pierre Sullivan Le fantasme masturbatoire central occupe une

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FMR Pierre Sullivan Le fantasme masturbatoire central occupe une
FMR
Pierre Sullivan
Le fantasme masturbatoire central occupe une place insigne dans la théorie de
Mosès et Eglé Laufer. Il devient ici, l'espace de ces quelques réflexions, le
fantasme masturbatoire radieux (FMR). Du centre au rayon, il n'y a qu'une très
légère dérive de sens qui est la mesure même de la distance minime que nous nous
accordons pour considérer, et sur ce seul point, aussi convergent soit-il, la pensée
des Laufer.
Une radieuse partie d’échecs.
Le jeu d'échecs est pour nous occidentaux, en-dehors de toutes les
significations accumulées par les divers personnages au cours des siècles, la
rencontre et la tension la plus grande entre la pensée et l'aléatoire. Il s'agit de
prédire avec la plus grande exactitude et sur la plus longue durée les multiples
possibilités de déploiement de forces inopinément entrées en jeu. Le plaisir du jeu
tient précisément dans l'assurance quasi-illimitée que le hasard, en dernier lieu,
aura toujours raison de la raison elle-même.
Le plus essentiellement joueur d'échecs de notre temps, sinon le plus célèbre,
est sans doute Marcel Duchamp. Pour ne s'être proclamé champion, pour n'avoir
voulu vaincre le hasard mais bien au contraire pour s'être détourné de l'art, tel qu'il
se pratiquait à son époque pour se consacrer au service de l'aléatoire, Duchamp est
devenu ainsi que les quelques « œuvres» qu'il a laissées, l'emblème d'une vie, voire
d'une religion, fondée sur le plaisir de l'imprévisible. En déclarant « Je ne peins
plus, je joue aux échecs »,
Les textes du Centre Alfred Binet, N° 13, Décembre 1988.Duchamp a fourni à
notre temps l'un de ses slogans les plus provocants. Et des plus suivis (1).
La Mariée mise à nue par ses célibataires, même dite Le Grand Verre (2),
plutôt qu'une œuvre, est une contradiction d'œuvre, une parodie de la transparence.
Édifiée sur du verre, elle se préente d'emblée comme un support de sens à travers
lequel tout spectateur passera facilement. Pourtant toute son éloquence vient de ce
que l'écheveau de ses implications est inépuisable : son opacité est à la mesure de
sa transparence. Définissez la première, vous aurez la seconde. A première vue, la
Mariée pourrait être une femme bien sûr, mais également le plan d'une ville,
signification qui n'est pas très éloignée de la première et qui a le mérite de se relier
très directement au second titre de l'œuvre.
Le Grand Verre. Il faut savoir que Duchamp architecte a suivi de près son
grand contemporain Le Corbusier, fondateur entre autres, d'une revue intitulée La
Ville Radieuse, dont Duchamp n'aura retenu que les initiales VR pour composer
son propre Verre. La ville est radieuse d'abord et avant tout quand elle a été conçue
par une pensée de l'architecture; elle rayonne vraiment quand le moindre de ses
modules est décidément une fonction de l'être humain. Prédiction, la ville radieuse
est ce que l'homme sera. A ce niveau, l'architecture perd son caractère ornemental
pour devenir une psychologie de l'homme : construire un placard équivaut à définir
rationnellement un besoin, un désir, une aspiration.
Si l'on en juge par l'aspect actuel de nos ville et de notre habitat, force est de
constater l'empire et la séduction exercés par cette rationalité. Qui ose encore dire
que les villes vivent mieux de leur bourgeonnements spontanés que de tous les
plans dont elles font l'objet. Il ne s'agit pas là de promouvoir quelque mouvement
d'arrière-garde, par opposition à toutes les avantgarde progressistes, mais de
constater à quel point nous sommes aujourd'hui incapables de penser notre monde
sans le recours à une quelconque planification. Y renoncer exige un retrait, un
semblant d'ascèse, une aventure intérieure dont Duchamp a voulu donner
l'exemple.
Bifurquant, Duchamp a du même coup engagé une partie d'échecs avec l'espoir
rationnel et radieux de son époque. L'avenir radieux, à mettre au compte également
de la ville radieuse, devient trafiqué par notre amateur de hasard, une affaire
louche et transparente à la fois où une mariée trop belle se trouve aux prises avec
une bande de célibataires fous de machines, dévoilant par là la face cérébrale
masturbatoire et compulsive de tout cet amour de la technique.
1.- Il Y aurait beaucoup à dire sur la descendance de DUCHAMP. Comme le
personnage lui-même, eUe fut contradictoire. Bien des courants artistiqùes
opposés se réclament du joueur d'échecs, qui devient ainsi malgré lui un
personnage fort étranger à ce qu'il souhaitait être: un chef. Et sans doute faut-il
aller jusqu'à dire qu'il ne fût ni ne désirât être un « grand artiste" : «
déconstructeur» hors pair de son époque, Duchamp n'est pas et pour cause un
homme d'œuvres. Pour une compréhension de son œuvre, telle qu'il l'aurait
souhaité, voir Dubay, Philippe, J.J. Legueu, Une énigme, Paris, Hazan 1987.
2.- Philadelphia Museum of Art,
Katharine, S. Dreyer.
FMC OU FMR
Que le fantasme masturbatoire central devienne d'un parodique coup de plume
un fantasme masturhatoire radieux, et l'on comprend immédiatement que ce n'est
là qu'un autre coup de la même partie engagée par Duchamp certes, mais
également par d'autres joueurs dans de multiples disciplines. Et d'ailleurs, il n'est
pas interdit de se demander, le plus souvent sera le mieux, à quel tirant de pensée
appartient la stratégie analytique. La psychanalyse est-elle radieuse ? Peut-elle,
fidèle à elle-même, seulement rayonner, être un soleil non seulement pour les
autres sciences de l'homme comme elle a cru inutilement pouvoir l'être il y a peu,
mais également en elle-même dans sa propre organisation interne ? La question du
fantasme masturhatoire central permet dans une certaine mesure de poser cette
question, de remettre la psychanalyse sur l'échiquier.
Lors des entretiens prolongés et fructueux des Laufer avec les thérapeutes du
Centre Alfred Binet, le premier sujet de discussion soulevé par les participants, il
n'est pas inutile de le remarquer, s'articula d'emblée autour de ce curieux objet
qu'est le fantasme masturhatoire central. Il s'agissait là comme d'une épreuve: de
passage pour les auteurs de ce concept qui tiennent avant tout à l'accréditer et de
désir pour leurs interlocuteurs qui en un sens ne souhaiteraient rien de mieux qu'on
leur assure qu'il y a bien quelque chose d'aussi central qu'un fantasme, fût-il
masturbatoire.
Le fantasme masturbatoire central (le FMC), pour le Centre Alfred Binet, c'est
un peu comme la mariée, si évidente dans sa beauté que chacun cherche à la
toucher, à la prendre. Pourtant, en même temps, précaution nécessaire, l'on
s'interroge sur sa naissance, voire ses antécédents familiaux. Il est toujours sage de
savoir avec qui l'on fait alliance. Interrogé sur l'origine de ce concept, Mosès
Laufer nous apprend qu'il est issu de la clinique ellemême, ce qui, il faut en
convenir, constitue le foyer le plus aristocratique que l'on puisse trouver en
psychanalyse. C'est en écoutant des adolescents très perturbés, c'est pour
comprendre un mécanisme très particulier de leur fonctionnement que ce concept
est devenu nécessaire. Mais soyons plus précis. Mosès Laufer nous décrit très
exactement la venue en lui de l'exigence du FMC. « Il serait peut-être utile que
nous décrivions comment cette idée nous est venue. Dans le traitement analytique
d'un certain nombre d'adolescents gravement perturbés - ceci remonte à quelques
années - il nous est apparu évident, et le concept de fantasme masturbatoire central
n'existait pas à ce moment-là ... mais ce qui est devenu clair, c'est qu'avec certains
adolescents il devenait possible, une fois que nous les connaissions
analytiquement, de prédire l'acting-out. Nous pouvions presque commencer à
imaginer ce qu'ils allaient faire ... » (3). C'est donc la prédiction qui est mère du
FMC, comme de toutes les architectures d'avenir; c'est au moment où le thérapeute
ressent la possibilité d'imaginer le futur de son patient que
3.- Colloque LAUFER, Octobre 1986, Centre Alfred Binet (non publié). C’est
nous qui soulignons.
ce concept vient à l'existence comme s'il marquait, tel un sceau, ce moment
privilégié de la relation thérapeutique où l'analyste a une longueur d'avance sur son
patient: il sait avant lui ce qui doit lui arriver.
L'avenir, conçu ici essentiellement en termes d'acting out destructeurs, n'est
pas un avenir radieux pour ces adolescents. Par ailleurs, il n'est pas de catégorie
d'âge plus directement centrée sur le futur que l'adolescence et l'on comprend
l'effroi du thérapeute à voir cette vie encore si jeune déraper devant lui
inexorablement ... à moins qu'il ne permette par sa pensée à ces trajectoires de
suivre un autre cours, un autre rayon. Tout effort thérapeutique vise sans doute à
un changement, mais aucun n'est aussi vital que lorsqu'il implique des adolescents.
Il est probable que la notion de fantasme masturbatoire central en un sens si
définitive, si obligatoire tire son caractère contraignant de la situation d'urgence
dans laquelle il a été élaboré. Et les auteurs ne s'en cachent pas: la partie engagée
est telle que la marge de jeu, entendez la marge de pensée qui n'est pas jugulée par
les affects, est infiniment réduite.
Né d'une prédiction qui a trop souvent le visage de la mort, le FMC en est
comme la limite: une pensée au bord du gouffre. «Je voudrais juste ajouter quelque
chose : avec des patients comme ceux-là, il est assez fréquent qu'on se rende
compte que ce que l'on fait une bonne partie du temps, c'est de leur courir après
pour ne pas qu'ils fassent de tentative de suicide. Mes patients peuvent faire des
tentatives de suicide; ce que je ne veux pas, c'est qu'ils se tuent» (4). Sans insister
maintenant sur la différence pourtant fondamentale à la compréhension du FMC,
entre se tuer et une tentative de suicide, retenons que l'époque ou le climat au cours
duquel se développe ce concept sont en crise ou en « breakdown )). Comme 1
'histoire le montre trop souvent, les systèmes les plus grandioses, toujours
coercitifs ne serait-ce que parce qu'ils sont systématiques, naissent dans des
moments de trouble et cette analogie devrait nous montrer qu'un concept a d'autant
plus besoin d'être «central» ou «centralisateur» qu'il entend s'opposer plus
fermement au néant et à la destruction.
S'il est nécessaire, pour en comprendre l'emprise, de dessiner l'environnement
qui a donné naissance au FMC, il ne faudrait pas négliger pour autant un autre
facteur, celui-là directement assimilable au fonctionnement interne de l'analyste. Si
ce dernier craint à juste titre la violence et la destruction que les adolescents
tournent contre eux-mêmes ou contre leur analyse, narcissiquement investie
comme une possibilité nouvelle d'être ce qu'ils sont, la peur qu'il éprouve devant
les dérèglements du sens est déjà moins compréhensible. C'est probablement ici,
devant ou à cause de la perte de sens que le FMC devient FMR. L'un des points
fondamentaux en même temps que des plus vrais de la théorie des Laufer, et qui
pourrait servir de maxime à tous les analystes, apparaît tout entier sous le terme
unique de responsabilité. L'analyste est responsable du discours et du
comportement de ses patients.
4.- Idem
Cependant pour les Laufer, cet accueil en soi-même et cette tenue de l'autre vont
de pair avec le patient assemblage de ce qui deviendra le fantasme masturbatoire
central. «Si vous ne vous confrontez pas à certaines choses, vous ne prenez pas vos
responsabilités; vous laissez l'analyse partir dans tous les sens et rien ne se passe ...
» (5). L'analyste a pour tâche et pour responsabilité d'éviter la dérèglementation du
sens: il ne faut pas que ça parte «dans tous les sens. Je fais très attention dans mon
travail avec un patient, quand je commence à mettre les choses ensemble, parce
que je ne peux pas me permettre de me tromper. Je ne peux pas égarer le patient.
C'est alors seulement que je peux commencer à donner du sens en assemblant les
choses. C'est très important» (6). Le FMC, c'est le sens unique donné à «toute une
gamme d'activités et sentiments divers» (7).
Le FMC devient ainsi une stratégie de rassemblement du sens de même que le
résultat final de sa mise en œuvre. Mais par sa structure et sa fonction même, le
FMC exclut toute autre possibilité de sens. Il ne saurait y avoir deux FMC parce
qu'il ne saurait y avoir deux centres. Si Freud est invoqué pour accréditer
l'existence d'un sens à tous les faits humains, il ne saurait l'être, sans que sa pensée
ne soit par là même forcée, pour démontrer qu'une vie psychique est dominée toute
entière par un seul sens (8). Freud aimait, malgré les contrariétés de pensée
engendrées par un tel amour, les multiplications et les bifurcations de sens. S'il a
indéniablement cherché quelque chose d'analogue au FMC, il ne s'est jamais
vraiment résolu à le trouver.
Par ailleurs le parrainage de Freud n'est pas absolument essentiel et nous
pourrions sans peine nous en passer pour admettre jusqu'à ses implications
dernières le FMC, si par là justement nous ne risquions pas de nous priver de l'un
des enseignements premiers de Freud, à savoir que le développement du sens par le
psychisme soit indéfini. Le paradoxe du fantasme masturbatoire central à cet
égard vient de ce qu'il emprunte l'un de ses caractères essentiels à la pathologie
même qu'il décrit. Les adolescents perturbés dont il est question ici souffrent
précisément de ce qu'ils ne parviennent plus à produire de sens nouveaux, tant et si
bien que leur vie est tout entière centrée sur un seul rayon. Autrement dit, ce qu'un
analyste doit redouter avant tout ce n'est pas l'égarement ou que l'analyse aille dans
tous les sens, mais bien au contraire, comme les Laufer l'expriment malgré tout très
bien eux-mêmes, que l'analyste puissent prédire le sens à venir. C'est quand
l'analyste sait par avance ce qu'il adviendra, c'est quand il est ligoté par l'univocité
du sens qu'advient cette monstruosité qu'est le FMC.
Monstre, certains verront là une exagération, pourtant à transformer une
situation pathologique en référence théorique, avec toute la part de généralisation
que cela implique ou pour reprendre notre métaphore à
5.- Ibid.
6.- Ibid.
7.- Ibid.
8.- "Je ne peux pas citer Freud exactement ... pour être clair, il n'existe pas de
conduite accidentelle. Toute conduite a un sens». Ibid.
donner du rayonnement, du radieux à ce fantasme compulsif, il est possible que
l'on se méprenne sur l'usage que l'on peut faire du FMC : que l'on se mette
positivement à sa recherche et que l'on oublie de ce fait qu'il doit avant tout être
détruit. FMC peut-être, FMR jamais.
TS OU ST
Ces réflexions, bien sûr, découlent d'un soupçon, mais peut-être vaudrait-il
mieux dire d'une impression, que parfois dans leurs déclarations et leurs écrits les
Laufer délaissent l'échiquier psychanalytique pour édifier au double sens de ce
mot. La mise au rang des concepts organisateurs de la psyché, du FMC
correspondrait au premier sens de ce terme, à l'édification d'une théorie.
L'insistance mise tant sur les contrôles, les réunions fréquentes et assidues, que sur
l'assemblage patient et surveillé des indices qui composeront le FMC trace elle une
stratégie édifiante de l'analyse. Il est cependant difficile de l'extérieur de décider si
cette pratique qui néglige, malgré son sérieux voire sa nécessité, la part de jeu, la
part-Duchamp de l'activité analytique, équivaut à autre chose qu'à un rituel
rassurant. Mais laissons cette question un peu formelle elle-même pour revenir à
un point beaucoup plus énigmatique et chargé d'imaginaire, soulevé par les Laufer
: on se suicide mais on ne se tue pas (TS vs ST).
Qu'un analyste n'ait pas à redouter les multiples tentatives de suicide de ses
patients, mais uniquement qu'ils se tuent, qu'est-ce à dire? Et entendons-nous, il
n'est pas ici à proprement parler question de la mort; tout homme, analyste ou pas,
craint la disparition de son prochain, ne serait-ce que parce que le deuil est un état
toujours pénible, cause d'une perte de soi importante. Par contre, ce qui est visé par
cette phrase, c'est l'acte de s'enlever la vie, avant et en-dehors de tout processus de
deuil. La tentative de suicide (TS) appartient encore au domaine du fantasme,
même si elle met en cause son existence même de fantasme; l'acte de se tuer (ST)
signale le passage de l'autre côté de la psyché. Ou pour revenir à notre partie
d'échecs, un adolescent qui vous lance sa tentative de suicide persiste dans sa
relation avec vous, malgré la violence et la cruauté d'un tel mouvement. Quand un
adolescent est mort, il a fait plus que mettre un terme à sa vie, il a, par son suicide
réussi, annulé la possibilité justement vitale de jouer sa partie avec un monde aurre
que le sien propre.
Cette distinction à première vue énigmatique entre TS et ST, plus que le
fantasme masturbatoire central (FMC) toujours trop vite radieux et sérieux dans sa
structure et ses applications, a le mérite trop rare, et c'est au flair clinique des
Laufer que nous le devons, de nous informer sur la substance même du psychisme.
Si le FMC par son contenu, les personnages et le scénario de désir qui les lie, aussi
bien que par la recherche et l'attention qu'il suscite, constitue en quelque sorte une
matière de représentations plus ou moins stratifiées et toujours verbalisables, au
contraire la différence entre TS et ST pourtant essentielle puisqu'elle délimite la
frontière entre la
vie et la mort, l'existence avec autrui et l'existence de l'absolue solitude, pourtant
cette différence est purement évanescente. Entre avaler des cachets, tenter de se
suicider,et, prendre les mêmes cachets, se tuer, il n'y a, saisie de l'extérieur, aucune
distinction possible. C'est la même chose et pourtant nous savons avec les Laufer
que c'est toute la différence: TS n'est pas ST.
Dire cette différence qui n'a pas lieu reviendrait sans doute à comprendre le
détail d'une partie d'échecs, là où la logique rejoint la psychologie, tâche qui
jusqu'à présent n'a provoqué le zèle que de quelques artistes de génie, dont E.A.
Poe. Il n'est pas certain que les psychanalystes se soient montrés plus zélés, ni
même à vrai dire qu'ils aient les moyens conceptuels d'effectuer un tel travail. Si un
analyste sait repérer un fantasme, s'il est adroit au jeu des réminiscences et des
répétitions, il est beaucoup plus démuni quand il s'agit de décrire théoriquement et
non seulement empiriquement, les relais entre son patient et lui qui lui font savoir
avec une extrême exactitude que ce dernier tente de se suicider ou qu'il va se tuer.
Il n'est d'ailleurs pas impossible que l'insistance mise sur le fantasme, la
centralisation dont il est l'objet, découlent de la pauvreté de notre science à
traduire les états conjugués des psychismes de l'analyste et de son patient au
moment où justement le système hallucinatoire de celui-ci est chargé au point
d'annihiler ce que nous avons coutume d'appeler la réalité.
De ces deux couples, le second a certes la prééminence parce qu'il renferme le
plus d'énigme. Il est essentiellement opposition et comme tel il s'accorde au mieux
avec la psychanalyse, science du relationnel, de la partie engagée de soi dans
l'autre. Quant au fantasme masturbatoire central (notre FMC), plutôt qu'un terme
à une quête laborieuse, il faudrait lui souhaiter sort moins radieux pour devenir un
indicateur (9), une manière de signal en quelque sorte qui nous prévient de la
bascule imminente du psychisme dans un ordre où il risque bien de disparaître.
FMC deviendrait alors vraiment FMR, éphémère.
9.- SULLIVAN P., « E.A. Poe, Les interrupteurs de réalité», Cahiers du Centre de
Psychanalyse et de Psychothérapie, n° 15, 1987.

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