Mat et brillant

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Mat et brillant
Mat et brillant
Mat et Brillant…
C’est un jeu de contraste entre la terre brute, dense et la douceur d’une
glaçure.
C’est un jeu de contraste entre l’opacité d’un engobe ou d’une glaçure
et la luminosité d’une glaçure.
Mat et Brillant…
C’est l’effet irisé d’un engobe vitrifié noir monochrome qui attrape la
lumière pour la restituer avec tous les jeux de la diffraction dus aux
différentes épaisseurs de grains. Le noir profond se fait argenté
comme l’anthracite.
C’est l’effet irisé d’un lustre métallique appliqué avec précision qui joue
à cache-cache avec la lumière pour apparaître et disparaître. Les sels
métalliques de cuivre et/ou d’argent vont, par des savantes cuissons
d’enfumage, faire qu’un simple objet de terre devient un véritable
objet précieux d’orfèvrerie.
Mat et Brillant…
C’est le hasard d’une cuisson brutale comme celle du raku : lorsque
l’objet terre atteint une température voisine de 1 000°C, il est défourné
incandescent puis enfumé avant d’être refroidi brusquement dans
l’eau.
Le choc thermique et l’enfumage dans un récipient clos provoquent
un craquelé caractéristique mais aussi une métallisation aléatoire à la
condition que, la glaçure apposée sur le biscuit contienne les oxydes
métalliques adéquats : le cuivre et/ou l’argent.
Comment… ?
Réserve à la cire
Le décor est exécuté au pinceau avec de la
paraffine ou de la cire liquide sur le biscuit.
La pièce est ensuite trempée dans un bain
d’émail qui n’adhère pas à la cire. A la cuisson,
la cire fond, laissant le décor couleur d’argile
apparaître.
Ces dernières années, la paraffine ou le latex
liquide tendent à remplacer la cire. On peut
dessiner sur le biscuit avec un crayon de
paraffine colorée à l’oxyde. Après la cuisson,
la réserve restera sombre.
Ainsi Karin Heeman, sur l’objet biscuité,
dessine des visages au crayon et superpose un
surlignage de latex pour assurer sa protection
pendant l’émaillage qui sera effectué au
pistolet avec un émail de sa composition.
Après la disparition du latex, elle procède à
une deuxième cuisson à 1 100°C en atmosphère oxydante.
Après refroidissement, l’espace entourant les
dessins est recouvert d’un émail "à froid"
constitué de latex de très haute qualité. Ce
dernier est teinté le plus souvent en noir mais
parfois en d’autres couleurs, selon son choix.
Sur l’ensemble de ses pièces, elle recherche
avant tout l’opposition entre émail et
"peinture" mate ou brillante et le contraste
des couleurs.
Cela constitue l’aspect primordial de son
travail.
Le lustre
Le lustre est une technique de décoration qui
consiste à déposer à la surface de la glaçure
une mince pellicule métallique. Les oxydes
métalliques de cuivre et/ou d’argent sont
appliqués au pinceau sur la glaçure. Le lustre
est dû à une forte réduction durant la cuisson.
L’oxyde de cuivre donne une couleur plutôt
rouge au lustre alors que l’argent va donner
des tons d’ivoire à jaune.
Superposition
C’est une technique d'émaillage constituée de
plusieurs glaçures posées les unes sur les
autres, en recouvrement total ou partiel, afin
qu'à haute température, les couleurs s'interpénètrent et se modifient entre elles.
Engobe vitrifié
Enduit minéral à base d’argiles très finement
décanté, l’engobe vitrifié est un revêtement
dur, mince et brillant.
Sa teinte noire vient de l’oxyde de fer, ou de
l’oxyde de manganèse en cuisson réductrice ;
sa teinte rouge, de l’oxyde de fer en cuisson
oxydante.
Le noir attrape la lumière. Par le jeu de la
diffraction, ce noir profond devient argenté
comme l’anthracite.
Jean-Pierre Thomas, Plat (détail)
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Les artistes
Alain Berthéas, né en 1950.
Pour comprendre, il faut voir, et pour voir il
faut commencer par regarder. Redécouvrir
les origines, c’est donc retrouver les motivations et les émotions fondamentales sur
lesquelles reposent notre manière de penser,
d’imaginer, de créer, de sentir et d’éprouver.
L’art a souvent été une tentative pour
interpréter la nature.
La découverte de l’art préhistorique va
l’amener à s’interroger sur son identité.
Enfant, toutes ses promenades dans la
campagne mâconnaise avaient pour but la
découverte de silex taillés et surtout de
pointes de flèche, cet outil sacré pour un
chasseur de 14 ans. Par une belle journée
d’août, il a trouvé ce fabuleux trésor dans une
vigne de la Roche Vineuse ; sa passion fut
tellement forte qu’il a failli s’évanouir. Depuis
ce jour, une prise de conscience des capacités
imaginatives, créatives et qui trente ans plus
tard continue de nourrir son travail.
Jacques Buchholtz (1943-1998).
« Il crée en 1972 son premier atelier au
Chartron. C’est un prieuré situé sur le chemin
de Saint Jacques de Compostelle, dans le
Quercy blanc, en haut d’une colline, face au
village de Lauzerte (Tarn et Garonne). Il se
passionne alors pour la terre, matériau idéal
pour donner corps à ses idées bouillonnantes :
la beauté circulaire, les villages, les pirogues,
l’art au sol et sur le mur. Magicien du céladon,
l’art des Song n’a pas de secret pour lui. A la
fin des années 70, tout en restant fidèle à cet
art fonctionnel, il transforme la terre en
tableau. La travaillant en plaque, il invente des
panneaux muraux, sortes de falaises murales.
Début 1990, il commence un travail de
pirogues. Il le reprendra après celui des tapis.
D’étranges embarcations aux silhouettes
profilées paraissent sortir de la nuit des
temps. En 1995, une belle exposition à la
Galerie Chevalier à Paris fait le parallèle entre
des tapis textiles anciens, et ceux en grès
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émaillés de Buchholtz. Tissés de son imagination, ils cultivent l’ambiguïté en simulant les
vrais par les mouvances et les reflets de
l’émaillage irrégulier et la petite frange
illusionniste ».
Karin Heeman, née en 1949.
« Originaire des PaysBas et installée dans le
sud-ouest de la France,
Karin Heeman a tant
navigué à travers le
monde
qu’il
est
difficile de repérer une
influence précise dans son travail. […] Si
Karin Heeman modèle la porcelaine, le grès a
ses préférences ; elle le travaille en plaque
fine, posé sur une forme de soutien, avec
certains ajouts au colombin, pieds ou anses
par exemple. Une fois le grès biscuité, elle y
dessine ses motifs au crayon puis le protégeant par places, vaporise un émail, dont elle
a inventé la composition. Après la deuxième
cuisson, elle pose un émail noir qui luit d’un
vif contraste ».
Karin Heeman, Vase aux visages
Les artistes
Patrice Teulières, né en 1947.
« Patrice Teulières s’est donné des règles
strictes : travailler le grès exclusivement et
avec des formes simples, basiques, avec peu
de couleurs, une seule à vrai dire, le noir, qui
trouve ses nuances à être métallisé : il devient
gris, de ce beau gris sourd des fontes
qu’argentent des reflets bleuis ».
Jean-Pierre Thomas, né en 1943.
« Les grands plats : […] Ils sont nés de l’envie
d’utiliser une vaste surface où les émaux
puissent se développer - bien que pour lui
l’émail ne soit pas une fin en soi - de façon à
établir un contraste entre l’émail précieux et
le côté brut de la terre. Il a commencé par des
plaques absolument plates, allant jusqu’aux
limites de la rupture ou de la déformation lors
de la cuisson. Aujourd’hui elles sont incurvées. Sur des coques en plâtre, il pose la terre
par boulettes plus ou moins liées ce qui
accentue encore ses aspects bruts. Les bords
sont fuyants, les arêtes vives […]. La plaque
moulée dans le galbe est biscuitée. Après
séchage et pose de l’émail, elle est cuite à
1 300°C dans le four à gaz. […]
Pour chaque pièce, ce sera le rapport
des couleurs émail/terre qui déterminera
l’enfumage, ce dernier influant évidemment
sur les deux éléments ».
Jacques Buchholtz, Coque (détail)
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Les artistes
Marc Uzan, né en 1955.
(cf. Cristallisations, page 41)
Marc Uzan, Vase boule
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