Grégory, « une leçon de vie

8 SEPT 08
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SCOLARISATION DES ELEVES HANDICAPES
Grégory, « une leçon de vie »
Grégory Maillot est atteint de myopathie. Agé de 16 ans, il suit les cours en
première scientifique, option sciences de l'ingénieur au lycée Bel-Air à
Sainte-Suzanne. Son fauteuil roulant et l'auxiliaire de vie scolaire qui
l'accompagne mis à part, Grégory effectue une scolarité ordinaire.
Avec des rêves de carrière plein la tête.
Grégory Maillot, 16 ans, est
atteint de myopathie Cette maladie provoque une dystrophie
musculaire. « Pour reprendre le
terme scientifique, je souffre du
syndrome d'Ulnch», indique l'adolescent.
La science et son vocabulaire
représentent une passion pour
Grégory Maillot «J'ai toujours
eu l'espnt scientifique. Petit, je
démontais les voitures pour voir
ce qu'il y avait dedans »
Cette bosse des maths, il la
met à l'œuvre dans ses études.
En
première
scientifique,
sciences de l'ingénieur au lycée
Bel-Air de Sainte Suzanne, il
noumt le rêve de devenir ingénieur en informatique « ]'ai
beaucoup hésite entre l'informatique et l'électronique, maîs
comme par rapport à mon handicap je ne peux réaliser des
soudures, j'ai opté pour l'informatique Je peux me glisser sous
la table où est posé l'ordinateur. »
Cette ambition le guide jus
qu'au choix de son lycée. «J'étais au collège Auguste-de-Lacaussade à Salazie Lors de mon
onentation en seconde, j'avais
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deux exigences . l'accessibilité
de l'établissement et la présence
de l'option sciences de l'mgé
meur. Il y avait deux lycées qui
répondaient aux conditions ]'ai
postulé pour Bel-Air parce que
l'établissement est plus neuf
puis c'est allé très vite.»
Son projet de carrière grandit
dans sa tête II y réfléchit beau
coup et pense déjà à l'après-bac
« Le mieux, ça aurait été d'effectuer une prépa maîs, si je peux
suivre intellectuellement, je ne
me sens pas capable de suivre
physiquement le rythme ardu
de la prépa. Il existe des écoles
d'ingénieurs reconnues par le
CT! (Commission de titres d'mgémeurs) en métropole maîs, avec les problèmes de logement
et de l'accessibilité des écoles, je
ne pense pas pouvoir m'y inscrire J'ai une autre possibilité,
plus à ma portée Celle de rejoindre Sup info à Saint-Benoît.
Pour moi, cela crée des avantages. L'emploi du temps y est
plus allégé et ça me permettrait
de me consacrer à ce que j'aime
vraiment : l'informatique. »
Même si son discours est parsemé de « maîs », Grégory Mail-
lot fait preuve d'un grand aplomb et d'assurance dans ses
propos
Une qualité que le proviseur
du lycée lui accorde bien volontiers. « En seconde, il était le
meilleur de sa classe, raconte
Michel Liegey II est très mature
et c'est quelqu'un qui s'accroche. Il représente un élément
stabilisateur dans sa classe et
tire les autres vers le haut. Studieux, il devient on exemple
pour ses camarades qui se disent que travailler en cours est
important pour réussir. C'est
une belle leçon de vie pour
tous. »
« On appréhende
toujours
ce qu'on
ne connaît pas »
Grégory doit partir dans
quèlques semaines en métropole
pour une intervention chirurgicale Dans sa situation, une ope
ration n'est jamais anodine. S'il
manifeste un peu d'anxiété par
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Le lycée Bel-Air à Sainte-Suzanne est accessible aux élèves handicapés.
rapport à l'événement, il pense lement accompagné d'une auxidéjà à son organisation concer- liaire de vie (AVS). En réalité de
nant ses études. «On verra com- deux AVS qui se remplacent mument cela se passe mais peut- tuellement.
être que des professeurs béné« J'ai 40 heures de cours par
voles pourront me donner des semaine et les AVS n'ont des
cours. »
contrats que de 23 heures, exL'accueil de Gregory s'est fait plique le lycéen. Je bénéficie
pour le proviseur de façon natu- donc deux AVS pour me suivre
relle. Le lycée Bel-Air est récent toute la semaine. Elles prennent
et bénéficie de toute l'accessibili- les notes pour moi, explique le
té et de l'équipement nécessaire lycéen. Je n'écris pas assez vite.
à l'accueil d'un élève handicapé. Elles m'aident aussi pendant
Gregory se déplace en fauteuil mes " repas, pour couper la
roulant électrique, il arrive en viande par exemple. »
ambulance et utilise l'ascenseur
«J'ai un déficit musculaire qui
du lycée. « Nous lui évitons le m'empêche de le faire. Lors des
maximum de déplacement. Si ateliers de •physique-chimie, de
l'ascenseur est en panne, les travaux pratiques de mécanique
cours vont à Gregory. »
ou d'électronique, je ne peux
Le fauteuil de Gregory est do- pas faire de manipulations. On
té d'une tablette en bois qui lui est partage entre petits groupes.
sert de table pour suivre les Avec les autres élèves, on se
cours ou écrire. Gregory est éga- répartit les tâches. J'observe, je
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prends les notes pendant qu'il
manipulent», poursuit Gregory.
Les relations avec les enseij
gnants et les autres élèves $4
déroulent bien : «En général, les
enseignants sont très compréhensifs. Un peu anxieux au départ parce qu'ils n'ont jamais eu
d'élève handicapé, mais ça passe
vite. Pareil pour mes camarades
de classe. Ils appréhendent toujours un peu au début. On ap*
préhende toujours ce qu'on M
connaît pas. »
j
Du point de vue de Grégory,
la scolarisation des enfants handicapés semble être si évidente :
« J'ai toujours eu la chance
d'être inscrit dans des écoles
récentes avec des directeurs très
compréhensifs. Je n'ai jamain
rencontre d'obstacles dans ma
scolarité.»
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Jennifer BODEREAU
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« On fait des progrès »
]osiane Volck est directrice
de l'inspection de l'Education
nationale chargée de l'adaptation et de la scolarisation des
élèves handicapés (IEN Ash)
Comme son nom l'indique,
cette instance supervise et coordonne tous les acteurs de la
scolarisation des enfants handicapés.
La loi du ll février 2005, dite
également loi handicap, fait de
la scolarisation de tous ces enfants porteurs d'un handicap
une priorité afin de rendre accessible l'enseignement à un
maximum de marmailles, quels
que soient leurs besoins et leurs
spécificités.
Une lourde entreprise qui
s'est mise en marche depuis
maintenant un peu plus de
deux ans « Aujourd'hui, on
peut dire que cette machine est
sur les rails et qu'elle avance,
commente avec optimisme Josiane Volck On fait des progrès »
45AVS
attendus cette année
Ces progrès sont illustrés tout
d'abord par la création de cinq
nouvelles UPI dans les collèges.
Ce sont des unités pédagogiques d'intégration dans le second degré. « L'année dernière,
nous avions 77 gamins sur une
liste d'attente pour une UPI.
Cette année, nous comptons
entre 20 et 50 enfants. Même si
c'est beaucoup moins, on sait
que c'est encore trop. Pour
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ceux-là, nous cherchons des solutions. Nous les intégrons dans
des classes ordinaires avec un
accompagnement spécifique
Nous avons recruté pour cette
année des EVS, soit des emplois
de vie scolaire. Us peuvent avoir
la charge de deux ou trois élèves à la fois. »
Et de poursuivre : «Pour l'année prochaine, des collèges se
sont déjà positionnés pour accueillir des UPI Cela présage
une nouvelle diminution des
listes d'attente. C'est en cela
que je peux dire qu'on avance. »
Pour rester dans les bonnes
nouvelles, Josiane Volck souligne l'arrivée de 45 AVS (auxiliaires de vie scolaire) cette année. Ces auxiliaires accompagnent de manière individuelle
les enfants handicapés. «De 177
AVS, nous sommes passés à
212. Nous pouvons couvrir bon
nombre des besoins révélés
l'année dernière. »
Josiane Volck dévoile également les nouveautés en ce qui
concerne l'adaptation des élèves handicapés «Nous réflé
chissons à construire un lien
entre les élèves handicapés et le
monde du travail qu'ils ne connaissent pas Pour ce faire,
nous avons trois pistes La première est d'étendre l'ouverture
des instituts médico-professionels (Impro). La deuxième consiste à augmenter les places
dans les Sessad (Structure d'enseignement spécialisé et de
soins à domicile) La troisième,
pour laquelle nous sommes en
pourparlers, serait la création
d'une UPI dans les lycées professionnels Pour cela, il faut
former des enseignements du
second degré. »
« Manque d'enseignants
spécialisés»
L'autre initiative de l'IEN Ash
est de créer un lien entre les
établissements médico-éducatifs avec les écoles ordinaires.
« Nous avons créé des unités
d'enseignements dans deux écoles de l'île Ces unités bénéficient de toute l'équipe d'éduca
teurs spécialisés des instituts
avec une implantation dans les
écoles. Mon but est de rapprocher au maximum l'enfant du
milieu ordinaire »
«Nous constatons encore un
manque d'informations et de
campagnes de communication
auprès du second degré II faut
rassurer les chefs d'établissements et les enseignants et dédramatiser la pnse en charge
d'un élève handicapé. D'ailleurs, nous constatons toujours
un manque d'enseignants spécialisés et aussi un manque de
psychologues scolaires. »
Et de conclure a l'aide d'une
image • « La scolarisation des
élèves handicapés, ce n'est pas
du prêt à porter, c'est du surmesure, voire du cousu-main.
Le problème c'est que nous n'avons pas assez de petites mains
couturières. »
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« On s'adapte au fur et à mesure »
Pour que leur enfant fasse les
études qu'il désire, les parents
sont souvent prêts à faire des
sacrifices. Les parents de Grégory ne sont pas les derniers.
La famille
a dû déménager
Originaire de Salazie et propriétaire d'une maison à Grand-Ilet, toute la petite famille a dû
quitter leur cirque pour Saint-André.
«Gregory a fait toute sa scolarité, jusqu'en 3e, à Salazie, ra-
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conte Nadine Maillot, sa maman. Dans l'urgence, nous avons trou- son activité de maçon pour pouAu lycée, il voulait suivre les vé une petite maison de plain- voir s'occuper de son fils Tout
sciences de l'ingénieur. Cette pied à Saint-André. Les pièces un quotidien chamboulé pour
branche ne se trouve pas par- sont suffisamment spatieuses permettre à Gregory de pourtout. Il ne peut pas être placé en pour qu'il puisse circuler maîs suivre ses études de sciences de
internat car il a des soins le soir nous devons le soulever et le l'ingénieur dans de bonnes conet il dort avec un appareil de porter de son lit aux toilettes », ditions.
poursuit la maman.
ventilation.»
« Nous ne faisons pas de projet. Nous vivons plutôt dans le
«Nous nous sommes donc rapLe père arrête
flou, au fur et à mesure des
prochés de son lieu d'études, le
de travailler
besoins de Gregory On s'adapte.
lycée Bel-Air de Sainte-Suzanne.
Vu son âge, 16 ans, la maman Après son bac, on ne sait pas ce
Nous avons fait une demande de
logement social plus adapté à de Gregory ne peut plus s'en qu'il veut faire. Peut-être partir
l'handicap de Gregory maîs nous occuper II est trop grand et trop en métropole. Au moment venu,
n'avons toujours pas de réponse. lourd. Son papa a donc arrêté enverra»
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Gregory Maillot rève d'ingénierie informatique. A travers ses ateliers dè sciences de I ingénieur, ii veut se donner les moyens de
réaliser ce rêve. (Photos Thierry Villendeuil)
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