Rhinites et sports
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Rhinites et sports
Rhinites et sports J. Percodani (Toulouse) Réunion de l’AART 19 Novembre 2013 • L’activité physique – « Fait du bien » – Maintient en forme – Gage de bonne santé – Prévient certaines pathologies (cardiovasculaires, cancers, dépression…) • Qu’en est-il de ses effets sur le nez ? Plan • Prévalence de la rhinite chez le sportif • Impact de l’exercice physique sur le système immunitaire • Impact de l’exercice physique sur la fonction respiratoire • Impact du sport chez le patient porteur d’une rhinite • Impact de la rhinite chez le sportif • Prise en charge de la rhinite chez le sportif Prévalence de la rhinite chez le sportif Prévalence de la rhinite chez le sportif • S’il est démontré que l’activité sportive intense augmente le risque d’HRB, les données sont plus contradictoires dans la rhinite allergique • Rhinite allergique = 10-25% de la population générale • Fréquence plus élevée chez les athlètes variable en fonction des critères diagnostiques utilisés • Rhinite allergique / Dysfonctionnement nasal chronique / rhinites infectieuses Prévalence de la rhinite chez le sportif • • • • Les athlètes rapportent plus de symptômes à type de rhinorrhée ou de sécrétions pharyngées que la population générale [Langdeau et al, Am J Crit Care Med 2000] (dysfonctionnement nasal chronique) Hélénius et al J All Clin Immunol 1998 : 29.6% de RCA chez 162 athlètes (dont 42 nageurs) vs 13.3% chez 45 témoins Katelaris et al (2000) : sur 214 athlètes de haut niveau : 56% symptômes de rhinoconjonctivite allergique, 41% prick tests positifs pour au moins un allergène Mittaine et al 2009 : – 153 sportifs, 49% atopiques, 32% rhinite allergique 64 % DNC – Pas de relation entre temps de pratique sportive et RA ou atopie – RA plus fréquente chez les sportifs s’entraînant à l’intérieur + Prévalence de la rhinite chez le sportif • Helbling et al (1991) : 16,8% de 2060 athlètes suisses pratiquant 68 sports différents présentent une rhinite pollinique • 265 athlètes sélectionnés aux JO de Sydney : 32,6% de prick tests positifs, 25,3% de signes cliniques de rhinite (Lapucci et al, 2003) • Les coureurs occasionnels rapportent plus d’allergie que les athlètes olympiques (Randolph et al, 2006) • L’inactivité est un facteur de risque de rhinite allergique (Kohlammer et al, 2006) - Impact de l'exercice physique sur le système immunitaire Impact de l'exercice physique sur le système immunitaire • Sur des modèles expérimentaux exercice physique intense = stress => impact sur l’immunité (Nieman et al, 1999, Bene et al 2001) – PNN – cellules B et T – production d’IgA et IgM – cellules NK – cytokines pro-inflammatoires – Capacité de production d’IT (rôle ++ dans les défenses anti-virales) (Northoff et al, 1998) serait à l’origine de l’augmentation du risque d’infections des VAS du sportif de haut niveau Impact de l'exercice physique sur le système immunitaire • Les rhumes à répétition représentent la pathologie la plus fréquemment rapportée chez les sportifs (Boulet 2012, Gil et al, 2005, Béné et al 2001) • Aux JO de Los Angeles : 13% des marathoniens ont présenté des épisodes infectieux respiratoires dans les semaines qui ont suivi contre 2% qui n’avaient pas participé pour des raisons autres que maladies • Il existe une nette relation entre le surentraînement et la survenue d’infections des VAS Est ce pour autant la preuve d’un déficit immunitaire ? Rappel système immunitaire • Immunité innée : – téguments, facteurs mécaniques (cils, flux liquidiens…), facteurs chimiques (pH), inflammation, substances bactériostatiques ou bactéricides (lyzozyme, lactoferrine, défensines, système du complément…), cellules (épithéliales, endothéliales, PN, macrophages…) -> infections • Immunité adaptative : – Immunité humorale : production d’AC par les plasmocytes (LCB) -> Pathogènes extra-cellulaires -> germes pyogènes – Immunité cellulaire : réponse cytotoxique (LCTc) -> pathogènes intra-cellulaires : virus, bactéries intra-cellulaires Rappel système immunitaire • Les LCTh (interagissent avec les macrophages / produisent des cytokines) peuvent favoriser – Une réponse à médiation cellulaire (génération de cellules cytotoxiques) (Th1) – Une réponse à médiation humorale avec production d’AC (Th2) Th1 Th2 Impact de l'exercice physique sur le système immunitaire • Chez les athlètes de haut niveau : – du risque d’infections (en particuliers des VAS) serait du au déséquilibre de la balance Th1/Th2 au profit des Th2 (Lapucci et al, 2003, Boulet Br J Sports Med 2012, Navarro et al, 2013) ? Impact de l'exercice physique sur le système immunitaire • Les effets de l’exercice physique sur le système immunitaire s’expliquent aussi par les interactions entre système immunitaire et système neuro-endocrine hypothalamus CRH locus caeruleus hypophyse oΣ (nAd) ACTH Adrénaline Cortisol TNF-α Exercice musculaire aigu Il-10 Impact de l'exercice physique sur la fonction respiratoire Impact de l’exercice physique sur la fonction respiratoire • Dans la pratique sportive, les voies respiratoires sont soumises à des situations inhabituelles • En effet, l’inhalation d’agents nocifs (allergènes, polluants, irritants) => cascade inflammatoire => processus de réparation => HRN + HRB (Kippelen et al, 2012, Schwartz et al, 2008) Impact de l’exercice physique sur la fonction respiratoire • Fonction de conditionnement de l’air inspiré régulée par le système nerveux autonome • Lors de l’exercice dynamique il y a une augmentation du tonus nasal sympathique => contraction des vaisseaux sanguins par stimulation des récepteurs adrénergiques => diminution des résistances nasales => amélioration de la rhinite • Les exercices isométriques : peu de retentissement nasal chez le sujet normal mais augmentation des résistances nasales chez le sujet rhinitique • L’air froid => hypersécrétion glandulaire et rhinorrhée (sous contrôle para-sympatique) chez le sujet sain, ceci est accentué chez le sujet rhinitique (Mygind et al, 1996) Impact de l’exercice physique sur la fonction respiratoire • Certaines anomalies architecturales nasales résultant de la pratique de certains sports peuvent aussi avoir un impact négatif sur la fonction ventilatoire nasale et entraîner une rhinite (boxe +++) Impact du sport chez le patient porteur d’une rhinite Impact de la natation sur le nez • Nageurs de compétition (> 30 heures / semaine) : inhalent de grandes quantités de chlore et de liquide d’hypochlorite juste au dessus de l’eau + pH + concentration en sel + température => « allergie à l’eau chlorée » (Passali et al, 2004) – Obstruction nasale – Rhinorhée acqueuse – Éternuements • => Altération du transport mucociliaire • Rhinosinusite chronique • Rhinosinusite barotraumatique chez les plongeurs (Uzun et al, 2009 / Bougault et al, 2012 / Alves et al, 2010) Impact de la natation sur le nez • Gelardi et al, 2012 : – Exposition au chlore : -> exacerbation d’une rhinite allergique préexistante -> irritation non spécifique -> étude cytologique : augmentation des PNN Influence sur les performances non claire Impact du ski sur nez • Froid => activation d’un réflexe parasympathique => écoulement nasal suivi d’une congestion nasale due à la dilatation des vaisseaux turbinaux (Mason et al, 2007) • Une étude faite sur 24 skieurs d’élite a montré une altération des résistances nasales, du diamètre nasal, du transport mucociliaire à l’état de base chez tous les sujets avec retour à la normale après décongestionnant nasal (Passali et al, 2004) Impact de la boxe sur le nez • L’essentiel de la pathologie rhinosinusienne des boxeurs est d’origine traumatique • Une étude sur 17 boxeurs avec RMM, RMA et TMC a montré : – une augmentation des résistances nasales, une diminution du diamètre des fosses nasales et une augmentation de la clairance mucociliaire – Traumatismes répétés => utilisation accrue des produits hémostatiques => hyper sécrétion glandulaire d’origine réflexe, œdème muqueux => risque accru d’infections rhinosinusiennes – Une incidence accrue des troubles olfactifs (état oedémateux chronique post traumatique + déchirures traumatiques de la muqueuse des zones olfactives) (Navarro et al, 2013) Impact de la course sur le nez • Les résistances nasales diminuent de moitié pendant la course probablement par décongestion des cornets inférieurs due à la vasoconstriction des vaisseaux de capacitance débutant juste après le début de l’activité physique, maximale après une demi heure et revenant à la normale une demi-heure après l’arrêt de l’activité (due à l’augmentation des besoins en oxygène de l’organisme pendant l’exercice) Impact de la course sur le nez • Ces altérations chroniques des résistances nasales => sécheresse excessive de la muqueuse nasale => altération du transport muco-ciliaire avec épaississement des sécrétions et augmentation de la prédisposition aux infections, augmentation du risque d’épistaxis + augmentation compensatrice des sécrétions nasales (réaction physiologique à la déshydratation) : « runner’s nose » Impact de la rhinite chez le sportif Impact de la rhinite chez le sportif • La respiration nasale est essentielle à l’effort => la rhinite peut altérer les performances, la récupération du sportif : – – Diminution des capacités à faire face aux besoins accrus en oxygène pendant l’effort Altération du sommeil => fatigabilité diurne => diminution des performances => importance du bilan et du traitement (Fisher et al, 2005, Alaranta et al, 2005, Serrano et al, 2001) Prise en charge de la rhinite chez le sportif Prise en charge de la rhinite chez le sportif • Corticothérapie par voie générale contre-indiquée • Corticothérapie nasale autorisée (Matabosch et al, 2011) • Éviction allergénique si possible • Anti H2 de 2ème génération non sédatifs +++ (Dijkstra et al, 2011) • Antihistaminiques locaux (gouttes nasales, collyres) • Bromure d’ipratropium avant la pratique sportive en cas de rhinite au froid Prise en charge de la rhinite chez le sportif • Penser à l’ITS si indiquée (Katélaris et al, 2003, Keles 2002) • En cas d’ITS par voie injectable, éviter l’exercice physique juste après l’injection • Traitements chirurgicaux (cautérisation des cornets inférieurs, turbinectomie inférieure, septaplastie) • Bandelettes nasales (en cas de syndrome de la valve nasale) Recommandations • Diagnostic précoce • Bilan allergologique (questionnaire d’allergie validé pour les athlètes AQUA) • Dépistage d’un éventuel asthme associé • Éviction de l’exposition aux allergènes et aux polluants • Traitement pour améliorer les symptômes nasaux et prévenir la broncho-constriction induite par l’effort sans affecter les performances et en tenant compte de la réglementation anti-dopage Conclusion • L’augmentation de la fréquence des infections respiratoires hautes chez le sportif ne signifie pas que l’activité physique déprime le système immunitaire • Les voies aériennes du sportif sont exposées à des facteurs : – Extrinsèques : température, humidité, aéro-allergènes, irritants, pollution, traumatismes – Intrinsèques : atopie, rhinite allergique, asthme, variations anatomiques (Sacha et al, 2014, Kippelen et al, 2012) Dysfonction des VAS Conclusion • Le sport peut exacerber ou induire une rhinite mais cela ne représente pas une limitation à l’activité physique intensive – Connaissance de la pathologie – Éducation du sportif – TRT adapté (Garri et al, 2003)