fiche pedagogique virtuelle cas pratique la preuve sommaire
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La Faculté de Droit Virtuelle est la plate-forme pédagogique de la Faculté de Droit de Lyon www.facdedroit-lyon3.com Fiche à jour au 14 décembre 2011 FIICCHHEE PEEDDAAG GO OG GIIQ QU UE E VIIR RTTU UE ELLLLE E Matière : Introduction générale au droit Web-tuteur : Béatrice Kan-Balivet Mise à jour : Mathias MURBACH-VIBERT CAASS PPRRAATTIIQ QU UE E LAA PPRREEUUVVEE SO OM MM MA AIIR RE E I. ENONCE 2 II. PROPOSITION DE CORRECTION 4 Date de création du document : année universitaire 2008/09 Consultez les autres fiches sur le site de la FDV : www.facdedroit-lyon3.com 2 I. Enoncé Camille est l’aînée d’une famille de cinq enfants. Elle a un peu plus de dix années d’écart avec son plus jeune frère, Aristide, dont elle s’est occupée dès son plus jeune âge. Il a cumulé très rapidement les bêtises qu’elle a toujours eues à coeur de réparer. Elle se sent rassurée depuis cinq ans. Il semble enfin avoir trouvé la sérénité avec Juliette qu’il a épousée en mars 2006. Ils ont décidé de fonder une famille et pour se faire, Aristide a cherché pendant plus d’un an après leur mariage un appartement avec deux ou trois chambres sur Lyon. Mais la situation n’est pas facile. Juliette a été licenciée pour motif économique et Aristide travaille dans une usine de nuit où il peut gagner 1500 euros nets par mois. Les banques ne sont donc pas prêtes à prendre le risque de lui prêter une somme trop importante compte tenu de la conjoncture. Voyant son frère assez déprimé par cette situation qui n’a pas encore évolué, Camille a finalement décidé de lui prêter 50 000 euros pendant l’été 2007 afin de lui permettre de réunir la somme nécessaire à l’achat d’un petit appartement situé à Villars les Dombes. Son frère lui avait promis de lui rembourser chaque mois 500 euros. Elle avait accepté que les remboursements ne débutent que le 1er septembre 2008 pour laisser à sa belle-sœur le temps de retrouver un travail. Mais le 17 novembre 2008, aucun remboursement n’est encore intervenu. Après de vaines tentatives pour joindre son frère, Camille commence à s’inquiéter pour lui et pour elle-même. Cela ne lui ressemble pas de la laisser ainsi sans nouvelles pendant plusieurs jours et elle, habituellement si prudente, n’a pas pris soin de réaliser la moindre reconnaissance de dette. Elle avait néanmoins photocopié le chèque de 50 000 euros dressé à l’ordre d’Aristide, ainsi que la lettre qui accompagnait le chèque dans laquelle elle leur souhaitait tout le bonheur du monde dans ce nouveau nid qui, elle l’espérait, accueillerait bientôt un nouveau-né. Elle rappelait dans cette lettre qu’elle était heureuse d’avoir pu les aider et qu’il ne s’inquiète pas pour elle pour le caractère tardif du remboursement. Le 28 novembre, elle finit par contacter l’une de ses sœurs, Jacqueline, pour savoir si elle n’a pas eu de nouvelles d’Aristide. Elle apprend alors qu’il y a une semaine, Aristide a découvert le journal intime de sa femme, ainsi que des lettres enflammées adressées à sa femme par un certain, Alain. Il est complètement effondré car sa femme venait de lui apprendre qu’elle était enceinte de deux mois. Il ne se considère pas que le père de cet enfant, mais sa femme lui a indiqué qu’elle mettra son nom sur l’état civil de l’enfant et il a immédiatement introduit une demande 3 de divorce, conservant toutes les lettres et le journal intime de sa femme pour s’en servir pour démontrer les fautes de son épouse. Jacqueline se montre par ailleurs très surprise par la situation que lui présente Camille concernant les 50 000 euros. Aristide lui avait toujours indiqué que Camille lui avait donné cette somme-là. Camille vient alors vous consulter pour avoir vos conseils sur l’ensemble de ces situations. 4 II. Proposition de correction Ce cas pratique pose trois questions qu’il conviendra de présenter successivement, relatives respectivement à la preuve d’un contrat de prêt qui aurait été conclu entre Camille et Aristide, à celle de la paternité d’un enfant dont est enceinte la femme d’Aristide et enfin à l’adultère commis par la femme d’Aristide. A. La preuve du contrat de prêt D’abord, Camille a remis à son frère la somme de 50 000 euros. Selon elle, son frère, emprunteur, s’était engagé, à rembourser 500 euros par mois à compter du 1er septembre 2008. Cependant, son frère ne s’est pas exécuté et elle apprend qu’il prétend qu’il s’agissait d’une donation. Pour obtenir l’exécution de l’obligation, au besoin par la voie de la contrainte, il convient de déterminer qui devra prouver la nature du contrat, c’est-à-dire régler la question de la charge de la preuve, avant de s’intéresser à la manière dont la nature du contrat devra être rapportée. 1- La charge de la preuve de l’existence du contrat de prêt Quant à la question de la charge de la preuve, il résulte de l’article 1315 alinéa 1 du Code civil que la charge de la preuve incombe au demandeur à l’action. Si Camille souhaite agir en justice contre son frère pour le contraindre à exécuter son obligation de remboursement, elle aura la qualité de demandeur. Camille devra donc rapporter la preuve de la nature du contrat passé entre elle et son frère. 2- Les modes de preuve de l’existence et du contenu du contrat de prêt Quant aux modes de preuve de la nature du contrat, aux termes de l’article 1341 du Code civil, les actes juridiques se prouvent par écrit. Les actes juridiques sont des manifestations de volonté ou des accords de volonté destinés à produire des effets de droit. 5 Le prêt est un accord de volonté entre un prêteur et un emprunteur, aux termes duquel l’une des parties, l’emprunteur, s’engage à rembourser la somme empruntée. Le contrat de prêt est donc un acte juridique devant s’établir par un écrit. Camille n’ayant pas pris le soin d’en établir un, elle ne pourra pas établir ses prétentions par ce mode de preuve. Pour se dégager de cette exigence de preuve littérale, deux voies peuvent être envisagées. En premier lieu, Camille pourrait penser à invoquer un commencement de preuve par écrit sur le fondement de l’article 1347 du Code civil. Il convient ainsi d’examiner plus précisément si le chèque et la copie de sa lettre d’accompagnement pourraient être considérés comme un commencement de preuve par écrit. Le commencement de preuve par écrit se définit comme tout écrit émanant de celui contre lequel la demande est formée et qui rend vraisemblable le fait allégué. Or, le chèque et la lettre émanent tous les deux de Camille et non d’Aristide. La première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 11 avril 1995, avait ainsi décidé qu’un chèque émanant du prêteur ne pouvait être invoqué à l’encontre des bénéficiaires comme commencement de preuve par écrit du prêt. Ils ne pourront donc pas constituer un commencement de preuve par écrit. En second lieu, la preuve du prêt peut devenir libre, si l’écrit ne peut être produit en raison d’une impossibilité morale de se le procurer en vertu de l’article 1348 du Code civil. Les juges du fond apprécieront souverainement « le point de savoir si une partie s’est trouvée dans l’impossibilité morale d’exiger un écrit », aux termes d’un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 24 octobre 1972. La personne avec laquelle Camille a contracté étant un membre de sa famille avec lequel elle a toujours eu un lien particulier, l’impossibilité pourra être vraisemblablement retenue. Il lui appartiendra alors de mettre en avant des témoignages ou tout autre moyen de preuve pour emporter la conviction du juge. Faute de précisions suffisantes dans le cas pratique, il n’est pas possible de savoir si elle disposera de ses moyens. Mais il est possible de préciser que la charge de la preuve lui incombant, le doute profitera à son frère, si elle ne parvient pas à emporter la conviction du juge. 6 B. La question de la paternité de l’enfant de Juliette Aristide est marié avec Juliette qui lui a annoncé être enceinte de deux mois. Il a engagé une procédure de divorce en raison d’un adultère réalisé par sa femme, mais sa femme lui précise que l’enfant sera déclaré à l’état civil sous son nom. Il est convaincu qu’il n’est pas le père de l’enfant et se considère comme tel. La question qui se pose est de déterminer si Aristide devra prouver son absence de paternité ou s’il suffit qu’il ne se considère pas comme le père de l’enfant de son épouse pour qu’il ne le soit pas. 1- Existence d’une présomption de paternité Aux termes de l’article 312 al. 1er du Code civil, une présomption de paternité est posée. « L’enfant conçu « ou né » pendant le mariage a pour père le mari. » La période de conception étant précisée à l’article 311 du Code civil, il peut en être déduit que l’enfant a pour père le mari de la mère qui a accouché à compter du 180ème jour jusqu’au 300ème jour après la dissolution du mariage. Compte tenu des dates annoncées par Juliette, l’enfant a été conçu pendant le mariage. En fonction de la durée de la procédure, il est pourra peut-être même naître pendant le mariage. La présomption de paternité joue donc. Ainsi Aristide est présumé être le père de l’enfant de Juliette. 2- Renversement de la présomption de paternité Néanmoins, aux termes des articles 334 et 321 du Code civil, la présomption de paternité peut être renversée dans un délai de dix ans à compter de la naissance de l’enfant par toute personne y ayant un intérêt, si la filiation ainsi établie n’est pas corroborée par une possession d’état, c’est-à-dire si le mari ne se comporte pas comme un père notamment. Aristide n’entendant pas se comporter comme le père de l’enfant…, il pourra agir en contestation de paternité. La preuve de son absence de paternité se fait par tous moyens. Généralement cette preuve sera rapportée par expertise biologique. 7 C. La question de la preuve de l’adultère Aristide a découvert, par la lecture du journal intime de son épouse, ainsi que de lettres qui étaient adressées à son épouse par Alain, que sa femme, Juliette, le trompait. Aristide introduit immédiatement une procédure de divorce et entend conserver le journal intime, ainsi que lesdites lettres pour démontrer la faute de sa femme. Il convient donc de déterminer si de tels modes de preuve, ainsi découvertes et conservés, seraient recevables devant le juge. L’adultère étant un fait, il peut être prouvé par tous moyens aux termes des articles 1341 relatifs au droit commun de la preuve et 259 relatifs au droit spécial de la preuve en matière de divorce du Code civil. Le journal intime, ainsi que les lettres visées, bien que revêtant un caractère éminemment personnel, sont des documents généralement recevables à titre de preuve (Civ. 2ème, 3 octobre 1957, Bull. civ. II, n°587). Néanmoins un époux, aux termes de l’article 259-1 du Code civil, ne peut verser aux débats les lettres échangées entre son conjoint et un tiers ou un journal intime qu’il aurait obtenus par violence ou fraude. Il appartient, comme le précise cet article, à l’époux qui invoque la fraude ou la violence d’en rapporter la preuve (Civ. 2ème, 29 janvier 1997, D. 1997, p. 296, note A. Bénabent ou encore Civ. 2ème, 6 mai 1999). Aristide semble avoir trouvé ces documents par hasard. Ces procédés de preuve sont donc licites dès lors que Juliette n’a pas démontré qu’ils ont été obtenus de manière déloyale. 8 Cette création est mise à disposition sous un contrat Creative Commons. Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale 2.0 France Vous êtes libres : • de reproduire, distribuer et communiquer cette création au public • de modifier cette création Selon les conditions suivantes : Paternité. Vous devez citer le nom de l'auteur original de la manière indiquée par l'auteur de l'oeuvre ou le titulaire des droits qui vous confère cette autorisation (mais pas d'une manière qui suggérerait qu'ils vous soutiennent ou approuvent votre utilisation de l'oeuvre). Pas d'Utilisation Commerciale. 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