Une question importante pour vous, et pour nous.

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Une question importante pour vous, et pour nous.
Réanimation cardiorespiratoire • Numéro 11 • 2000
À propos
de l’auteure...
Une question importante pour vous,
et pour nous.
Marie-Josée Saine
Médecin
Diplômée de l’Université
de Montréal en 1971
Pratique de médecine
générale à Montréal
• Actuellement au Médi
Club au Sanctuaire
Pratique en CHSLD depuis
1997
• Actuellement au CHSLD
Mont-Royal et au
CHSLD Ste-Rita à
Montréal-Nord
(divisions de Vigi Santé)
• Présidente du CMDP
Mont-Royal en
1999-2000
Membre du Comité aviseur
et membre participant
au Projet Diabète
du CLSC Côtes-des-Neiges
en 1999-2000
On parle souvent du centre
d’hébergement et de soins de
longue durée (CHSLD) comme
étant le lieu de la « dernière
demeure ». Quelques semaines
après une nouvelle admission en
centre d’hébergement, le résident,
un membre de sa famille ou le
répondant aura à aborder avec le
médecin la question de la réanimation cardiorespiratoire.
Le médecin vous
parlera de la
réanimation cardiorespiratoire
ouvertement
dans le but de
vous permettre
de prendre une
décision éclairée. Cette réflexion
se fera dans l’optique du respect
de la vie de la personne concernée
et aussi du respect de la fin de
sa vie.
Décider d’être ou de ne pas être
réanimé peut être un sujet facile à
aborder pour certains qui ont déjà
fait la démarche soit personnellement, soit avec le médecin précédent, mais peut paraître plus difficile pour d’autres parce qu’il présuppose qu’on pense à la mort
d’une personne que l’on aime.
Sujet quelquefois douloureux par
les émotions qu’il engendre. Sujet
pas toujours évident par manque
d’information.
Pour vous aider à y voir clair,
nous avons préparé cette parution
de l’Entre Vous & Moi qui
explique la nature de la réanimation cardiorespiratoire, les conditions de son application et surtout
qui nous permet de réfléchir
ensemble sur une décision que
vous devrez prendre. Nous
voulons que votre choix se fasse
dans la quiétude.
CE QUE C’EST ET QUI L’APPLIQUE
UN PEU D’HISTOIRE…
La réanimation cardiorespiratoire est
l’ensemble des moyens qui visent à ressusciter un résident dont le cœur et la respiration ont arrêté de fonctionner.
Depuis le début des années 60, la réanimation cardiorespiratoire fait partie de
l’arsenal médical. À partir de ce moment,
les médecins tentent de réanimer toute
personne dont la respiration et le cœur
arrêtent. Quelques années plus tard, ils se
rendent compte que cette technique n’est
pas aussi efficace qu’ils l’avaient pensé
au début.
Il y a deux types de réanimation
1 Réanimation de base
Utilisée dans les centres d’hébergement.
Elle comprend le massage cardiaque et
la respiration artificielle.
Elle est pratiquée par le personnel du
centre.
RÉANIMATION CARDIORESPIRATOIRE
2 Réanimation avancée
2
Utilisée par les ambulanciers ou à
l’hôpital.
Dans celle-ci, on a recours à un
appareillage plus complexe : appareil
de monitorage, nécessaire à intubation,
défibrillateur.
Elle est pratiquée par un personnel spécialisé.
En effet, entreprendre une réanimation
ne garantit pas son succès. À cet égard,
les études faites en centre d’hébergement
auprès de 5 535 sujets, concluent que le
taux de survie pour les résidents âgés de
plus de 70 ans varie entre 1 à 10 %.
Plusieurs facteurs expliquent ce taux peu
élevé. Nous énumérons les plus importants :
1 l’état fonctionnel du résident ;
2 les maladies dont il souffre ;
3 le vieillissement physiologique important ;
4 l’état du cœur souvent déjà déficient ;
5 le temps écoulé entre l’arrêt cardiorespiratoire et le début des
manoeuvres ;
6 le temps écoulé avant l’arrivée des
ambulanciers.
Comme on peut le constater, la demande
d’une réanimation pour un résident en
CHSLD exige que le personnel infirmier
débute les manœuvres en attendant
Urgence-Santé ou les services ambulanciers; ceux-ci entreprendront la réanimation avancée et la continueront durant le
transport à l’hôpital.
1 la survie temporaire sous respirateur
aux soins intensifs ;
2 les douleurs liées aux fractures de
côtes et du sternum ;
3 la pneumonie, l’œdème pulmonaire ;
4 les dommages neurologiques permanents ;
5 les dommages cognitifs (mémoire,
jugement) permanents ;
6 la dépression.
DIFFICULTÉS RENCONTRÉES
D’abord, convenons ensemble que la
décision de réanimer ou non une personne qui nous est proche est difficile et
déchirante à prendre. Peu de gens peuvent prendre cette décision pour une personne inapte sans ressentir de la culpabilité. Souvent, se sentant déjà coupable
d’avoir placé la personne dans un centre
d’hébergement, on craint de laisser l’impression de vouloir s’en débarrasser en
refusant la réanimation.
Aussi, pour le résident ou les membres
de la famille, le fait de décider de ne pas
réanimer peut signifier un abandon pur et
simple des soins. Il est bien important de
distinguer ces deux éléments : le niveau
de soins et la non-réanimation.
Les niveaux de soins ont pour but de
donner au médecin un cadre de référence
pour ses différentes interventions ; vous
en êtes informé dans les semaines qui
suivent l’arrivée du résident. Il y a trois
niveaux de soins possibles :
Niveau 1 : Maintien de toute fonction
altérée par tout moyen possible.
Niveau 2 : Correction de toute détérioration
possiblement réversible par tout
moyen proportionné.
Niveau 3 : Intervention limitée au soulagement et au bien-être du résident.
Ces niveaux de soins s’appliquent du vivant
du résident, alors que l’ordonnance de réanimation ou de non-réanimation intervient
lors de l’arrêt cardiaque ou respiratoire. Il
est important de bien comprendre que l’ordonnance de non-réanimation n’a rien à voir
avec les soins ou les traitements à donner à
un résident s’il est malade.
OPINION MÉDICALE
Pour donner son opinion quant à la réanimation, le médecin tiendra compte de
plusieurs facteurs :
➔ les pathologies de base du résident,
➔ son état fonctionnel,
➔ sa qualité de vie,
➔ les désirs du résident ou de sa famille
(quand celui-ci est jugé inapte),
➔ les données de la science médicale
actuelle.
En CHSLD, la réanimation est un traitement
qui ne devrait se donner qu’exceptionnellement aux résidents qui pourraient en bénéficier. On dit qu’un résident a bénéficié d’un
traitement lorsque son état de santé est le
RÉANIMATION CARDIORESPIRATOIRE
De plus, plusieurs parmi ceux qui ont
survécu risquent des séquelles qui diminuent encore leur qualité de vie. Les principales complications à la suite d’une réanimation cardiorespiratoire sont :
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RÉANIMATION CARDIORESPIRATOIRE
même avant et après le traitement. Par
exemple, si le traitement d’une pneumonie
par des antibiotiques rétablit la santé du
résident au niveau antérieur à la pneumonie, on pourra dire qu’il en a bénéficié.
Pour bénéficier d’une réanimation, certains critères sont essentiels : l’absence d’Alzheimer,
l’absence d’atteinte d’organes
vitaux comme le cœur, les
poumons, les reins, le cerveau et
l’absence de maladie chronique.
Dans nos centres, la majorité des
résidents ne répondent pas à ces critères de
bon pronostic pour que le médecin suggère
d’emblée la réanimation.
D’ailleurs, les directives du Collège des médecins du Québec vont en ce sens. Dans un
avis écrit en 1995, le Collège soutient :
« Il est généralement admis que les
malades qui présentent une pauvre qualité
de vie et un pronostic de récupération
presque nul, tels les cas de démence ou de
maladie neurologique débilitante, ne
devraient pas être réanimés. »
De même, une étude américaine ayant porté
sur les arrêts cardiaques d’une population
vivant en centre d’hébergement conclut
aussi que la réanimation cardiorespiratoire
est une manœuvre non appropriée car tous
les résidents qui avaient survécu à la réanimation initiale au centre, étaient par la suite
décédés après leur transfert à l’hôpital.
Pour ces gens, la réanimation les a non
seulement empêchés de vivre leurs derniers
moments dans leur milieu de vie (CHSLD),
mais a aussi entraîné de l’inconfort et prolongé l’agonie.
Tout résident a le droit d’être réanimé.
Cependant, si le médecin juge, en se basant
sur l’étude du dossier et des données de la
science actuelle, que cette pratique ou cette
manoeuvre est futile dans les circonstances,
inutile, souffrante ou même dangereuse
pour cette personne, il se pourrait que la
réanimation ne soit pas appliquée.
ENFIN...
Au delà de toutes ces considérations
éthiques, cliniques, médicales et scientifiques, ce qui nous importe le plus,
c’est d’en parler avec vous, de réfléchir
ensemble, de connaître les significations personnelles de votre hésitation ou
de votre choix et ce, pour en arriver à un
commun accord.
La Collection Entre Vous et Moi est réalisée par un groupe de Comités de résidents (Comité des usagers au sens
de la Loi) intervenant dans des Centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD).
Information : Marc Turgeon, Conseiller en milieu de vie
Vigi Santé Ltée
197, Thornhill, Dollard-des-Ormeaux (Québec) H9B 3H8
téléphone : (514) 684-0930 • télécopieur : (514) 684-0179
Ce fascicule est publié par le Comité des résidents du CHSLD Vigi Yves-Blais (établissement privé conventionné, une division de Vigi Santé). Des traductions anglaise et italienne sont également disponibles.
© Tous droits réservés
Dépôt légal - Bibliothèque nationale du Québec, 2000
Dépôt légal - Bibliothèque nationale du Canada, 2000
ISSN 1481-2924
Le générique masculin est utilisé dans ce fascicule sans aucune discrimination et uniquement dans le but d’alléger le texte.
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