G. B. Pergolèse revisité par J. S. Bach

Transcription

G. B. Pergolèse revisité par J. S. Bach
G. B. Pergolèse revisité par J. S. Bach Giovanni Battista Pergolesi, né en 1710 alors que Johann Sebastian Bach avait 25 ans, est mort plus jeune que Mozart puisqu’il a succombé à la tuberculose en 1736. Il a écrit son Stabat mater à la fin de sa vie, lorsqu’il était atteint dans sa santé. La cantate Tilge, Höchster, meine Sünden de Bach est l’une des nombreuses transcriptions de cette composition. Un Stabat mater qui devient un tube Le Stabat mater du Napolitain est l’œuvre isolée qui a connu le plus d’impressions au 18e siècle, et beaucoup d’autres musiciens l’ont adaptée comme l’Allemand J. A. Hiller en 1773, l’Italien G. Paisiello en 1810 ou le Russe A. Lvov en 1831. Pour Jean-­‐Jacques Rousseau, le Stabat mater de Pergolèse était l’une des pages par lesquelles il « a laissé loin derrière lui tous ses rivaux ». Autant dire que l’œuvre a été un tube au niveau européen ! Pergolèse comme incarnation du style italien L’intermezzo La serva padrona de Pergolèse a déclenché la querelle des bouffons à Paris en 1752, qui opposait les défenseurs du style français – derrière Jean-­‐Philippe Rameau – aux adeptes de la manière italienne emmenés par Rousseau. La pièce et son auteur sont ainsi devenus les symboles de l’idiome italien. Comme Pergolèse a connu, en outre, le très rare destin de devenir célèbre peu après sa mort, plusieurs œuvres lui ont été attribuées de manière erronée par la suite. De Marie devant la croix chez Pergolèse… Le Stabat mater de Pergolèse dépeint la douleur de Marie au pied de la croix par des mouvements lents, méditatifs, qui traduisent les affects avec profondeur. La première phrase de l’œuvre semble avoir un souffle extrêmement long, comme si Marie pressentait la durée de son propre chemin de croix. La première partie de Qui est homo, qui non fleret… ? (n° 5) est d’une sublime intériorité. Par ailleurs, au fil de l’œuvre, la lumière semble peu à peu transpercer les ténèbres. … à la contrition chez Bach Dans la cantate Tilge, Höchster, meine Sünden de Bach, le croyant demande à Dieu le pardon de ses péchés. La longue ligne du début n’est pas sans rappeler la couleur, l’esprit, la part d’ineffable que transmet le chœur d’entrée de la Passion selon saint Matthieu du Kantor. Le pendant de Qui est homo… ?, Wer wird seine Schuld verneinen... ?, est tout aussi poignant. Ressemblance très étroite entre les deux œuvres L’oreille moderne peut être frappée par la ressemblance très étroite entre les deux œuvres. L’écriture de Bach est certes plus étoffée. Par exemple, Bach développe sensiblement le registre des altos dans l’orchestre. Il change aussi de nombreux détails et subdivise l’œuvre en quatorze mouvements au lieu de douze. Mais dans l’ensemble il suit la partition de Pergolèse. Cette pratique, la parodie, est tout à fait courante à cette époque (le degré d’adaptation étant variable). Deux autres solistes en contrepoint Le Concerto en ré mineur pour deux violons de Bach apporte un contrepoint instrumental et festif aux deux œuvres vocales. Il date de la période où le musicien travaillait à Köthen, entre 1717 et 1723. © Nicolas Quinche Bibliographie DAUPHIN, Claude éd., Le Dictionnaire de musique de Jean-­‐Jacques Rousseau : une édition critique, Bern : Peter Lang, 2008 DEGRADA, Francesco, Giovanni Battista Pergolesi, in « Musik in Geschichte und Gegenwart », Personenteil 13, Kassel : Bärenreiter, 2005 HUCKE, Helmut, Giovanni Battista Pergolesi, in « The new Grove dictionary of music and musicians », Londres : Macmillan, 1980 SADIE, Stanley éd., Johann Sebastian Bach, in « The new Grove dictionary of music and musicians », Londres : Macmillan, 1980 WALKER, Thomas, Pergolesi, Stabat mater [livret de CD], Sebastian Henning, René Jacobs, Concerto Vocale, Arles : Hamonia Mundi, 2000