Fiche technique Frère Xavier
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Fiche technique Frère Xavier
Trappistes L’Echo 35 Le tour des bra sseries trappis tes Tilburg Westmalle Orval, une bière unique aux confins de trois cultures Achel Westvleteren Rochefort Chimay 2 /7 Orval L cienne brasserie…) des ruines de Villers-la-Ville. Tertio, la bière d’Orval est produite selon une recette unique au monde, née de la rencontre à l’abbaye de personnalités à la culture brassicole très différente: le maître brasseur allemand Martin Pappenheimer et les Belges Honoré Van Zande et John Van Huele ont en effet réuni leur savoir-faire pour mettre au point ce breuvage à nul autre pareil, très chargé en houblon (une pratique allemande) grâce à une technique (d’origine anglaise) de houblonnage à cru: un procédé par lequel les cônes de houblon sont mis à tremper dans la bière en fermentation, à froid, conférant ainsi une amertume particulière à la bière. «Elle est la plus houblonnée que la communauté trappiste a toujours dirigé l’activité brassicole, ce qui est, rappelons-le, une des conditions sine qua non pour pouvoir afficher le label «Trappist». Aujourd’hui, c’est Frère Xavier qui assume ce rôle à Orval avec le titre d’administrateur délégué. Sexto, pour des raisons historiques, Orval est davantage perçue comme une entreprise belge que wallonne. Une dimension qui renvoie à Dom Marie-Albert van der Cruyssen: ce Gantois avait d’abord été un grand entrepreneur et une personnalité politique marquante avant et pendant la guerre 14-18, avant d’entrer dans les ordres à l’abbaye de la Trappe, en France, puis de rallier Orval. C’est sous sa houlette qu’a débuté la reconstruction de l’abbaye en 1926. De par sa stature, il a réussi à impliquer l’ensemble du pays dans son financement, notamment par la souscription à une émission de timbres (2). «Il s’est créé à l’époque un mouvement d’identité nationale autour d’Orval, lieu emblématique, face à l’occupant», souligne François de Harenne, directeur commercial de la Brasserie. La dimension multiculturelle de la nouvelle Orval a encore été enrichie par le rôle moteur joué à l’époque par le Français Dom Jean-Baptiste Chautard: abbé du monastère trappiste de Sept-Fons, dans l’Allier, qui avait brassé de la bière jusqu’à l’arrivée au pouvoir des radicaux (1905), c’est lui qui envoya un premier groupe de moines à Orval, en 1926, pour y reconstituer une communauté après que la famille belge de Harenne eut rendu les ruines à l’Ordre de Cîteaux. au monde», commente l’historien Philippe Voluer. Quarto, la brasserie garde ses secrets de fabrication mais se montre aussi généreuse: elle fournit en levure les autres brasseries de la région, Rulles et Sainte-Hélène, avec lesquelles elle partage aussi son labo. Quinto, et contrairement à plusieurs autres abbayes trappistes, les moines d’Orval n’ont jamais travaillé eux-mêmes à la brasserie. «A Orval, la brasserie a été d’emblée le travail de laïcs, explique Frère Xavier. Nous ne sommes jamais intervenus en production, même si durant de nombreuses années un de nos membres, Frère Dominique, a travaillé au laboratoire – c’était un cas particulier.» Ce qui n’empêche Photo Philippe Voluer a Brasserie d’Orval cumule plusieurs qualités qui, au sein même de l’ensemble des communautés trappistes, en font une entreprise unique en son genre. Primo, elle est monoproduit: l’abbaye gaumaise brasse une seule et même bière depuis ses débuts en 1931. Secundo, la politique de communication d’Orval sur et autour de la bière se déploie au départ d’un même graphisme depuis ses origines: le blason de la truite légendaire, les sous-bocks, l’étiquette, le verre, la forme de la bouteille (1) et les plaques émaillées ont tous été conçus dans les années 1930 par l’architecte Henry Vaes, celui-là même qui dessina les plans de l’abbaye moderne en s’inspirant, entre autres, de bâtiments (l’an- Jusque dans la salle de garde de la brasserie, le logo de la truite dessiné par l’architecte Henry Vaes est omniprésent. Frère Xavier ADMINISTRATEUR DÉLÉGUÉ DE LA BRASSERIE D’ORVAL Quel sens et quelle valeur a le travail pour votre communauté monastique? Le travail est au cœur du style de vie, du choix de vie de toute personne qui entre dans une communauté cistercienne. Je dirais «cistercienne» avant «trappiste», puisque l’histoire de la vie monastique se présente comme un arbre généalogique avec une série de ramifications: il y a une branche au XIIe siècle qui a relu la règle de saint Benoît dans le contexte de la féodalité, avec une répartition des tâches par branche sociale. Et dans une communauté cistercienne, trappiste, dans la lignée du XIIe siècle l’intuition est de dire que tous les frères participent à toutes les tâches, ou sont susceptibles d’effectuer toutes les tâches de la communauté. Le travail est un lien essentiel dans l’équilibre de la vie personnelle du moine et de la communauté comme telle. Il façonne les relations humaines à travers un certain sens du concret et du partage des soucis et des joies.Tout cela correspond bien à ce charisme initial, même s’il ne s’exprime plus de la même manière qu'aux origines.A Orval, nous avons été en ce sens une communauté emblématique: quand les moines y sont revenus, en 1926, ils ont exercé principalement et quasi exclusivement une activité agricole et ce, jusque dans les années 1960. De là a découlé une activité artisanale et strictement monastique: la fromagerie, qui a été lancée en 1928. L’activité brassicole à Orval a vu le jour en 1931 dans un contexte particulier puisqu’il s’agis- sait de financer la reconstruction de l’abbaye - il y eut d’autres sources de financement aussi, en particulier des séries de timbres.Au fil des générations de frères, l’activité agricole a été mise en veilleuse puis arrêtée, parce que les terres environnant le monastère ne s’y prêtaient pas: ce sont des fonds de vallée et des forêts… Il faut savoir qu’historiquement, les fermes et les granges de l’abbaye d’Orval se trouvaient toutes du côté français. L’activité fromagère est devenue l’essentiel du travail des frères et ce, jusqu’au tournant des années 2000 et 2001, où nous avons fait le choix de nous retirer. Depuis, la fromagerie forme, économiquement parlant, une autre activité au sein de la SA Brasserie d’Orval. 2 Quel est le principal travail des frères aujourd’hui? Nous sommes surtout présents dans l’accueil. Les bâtiments de l’abbaye le permettent en offrant un grand nombre de chambres.Trois frères s’en occupent… Et puis, par le fait que nous sommes la seule communauté trappiste active en Belgique à habiter un site médiéval, nous occupons un lieu emblématique de l’histoire cistercienne qui attire les visiteurs. Les forces vives de la communauté se trouvent dans ce secteur-là, même si en tant qu’administrateur délégué, je suis impliqué dans la gestion quotidienne de la brasserie; je suis attentif en particulier à tout ce qui touche à la communication, à l’image du produit, à l’accueil des personnes à la brasserie… Mais revenons-en aux sources… L’histoire de l’Orval ancienne a commencé en 1070, lorsque le comte Arnould de Chiny octroya quelques-unes de ses terres à un groupe de bénédictins venus d’Italie. Des chanoines leur succédèrent rapidement et demandèrent ensuite leur rattachement à l’Ordre des cisterciens naissant. En accédant à leur demande, saint Bernard plaça le site sous la responsabilité de l’abbaye de Trois-Fontaines (Champagne), fille de Cîteaux et dès lors mère d’Orval. Les premiers moines cisterciens arrivèrent à Orval en 1132. L’abbaye développa au fil des siècles un important domaine agricole, se diversifia dans le travail du fer. Fin XVIIe sous la direction de l’abbé Charles de Bentzeradt, elle s’inspira de la réforme initiée à la Trappe, en France, et connut alors son apogée, la communauté comptant 130 membres en 1723. Puis ce fut la Révolution française et dans son sillage, en 1793, la mise à sac et la destruction de l’abbaye. Quelque 130 ans passèrent avant que ne se produise un petit miracle qui mena à la construction de la Fiche technique Trois questions à... 1 SEPT SIÈCLES D’ACTIVITÉ PUIS 130 ANS DE SILENCE Photo Reporters L’activité brassicole a permis de financer la reconstruction de l’abbaye vers 1930. Parallèlement, depuis près de trois ans, très simplement, très modestement, nous avons un atelier communautaire à la brasserie le vendredi après-midi. On s’y retrouve à sept ou huit frères pour faire de la manutention, préparer des emballages… 3 Quel objectif poursuivezvous en tenant cet atelier communautaire? Il s’agit de répondre à cette intuition d’un lieu de travail simple pour les frères, où nous puissions nous retrouver. C’est un travail qui se fait en silence entre nous, parce que nous avons un style de vie, une dimension presque érémitique de solitude. Le premier mot de la règle, c’est «écoute»: le contexte de silence est très important… Cela permet d’avoir une attention aux gestes du frère. C’est aussi un lieu d’intégration à la brasserie. Celle-ci est certes une PME comme n’importe quelle autre avec une logique d’efficacité, de rentabilité, mais elle est aussi un espace d’intégration où l’on peut vivre, à un autre rythme au travail, une autre relation entre frères. Et c’est aussi un lieu d’accueil pour les novices; ils peuvent y découvrir les membres de la communauté. L’initiation à la vie monastique n’est pas quelque chose de théorique, ce n’est pas une question de connaissances, c’est un lieu de style de vie, de compagnonnage et, selon l’intuition de la règle de Saint Benoît, c’est un ordonnancement, une manière de réguler les différents temps de la journée, les M.Lw. différents lieux de vie. 앳 쑺 Dernier investissement: nouvelle salle de brassage, en cours de finalisation 쑺 Effectif: une trentaine de personnes à la brasserie, quatre à la fromagerie. L’administrateur délégué de la SA est un moine 쑺 Formes de sociétés: société anonyme et asbl, cette dernière étant propriétaire du site et du nom de la marque 쑺 Distribution: réseau de concessionnaires 쑺 Date de fondation du domaine: 1070 쑺 Première implantation de moines cisterciens: 1132 쑺 Débuts de la reconstruction de l’abbaye moderne: 1927-28 (fin des travaux en… 1948!) 쑺 Date du premier brassin de la brasserie moderne: 1932 쑺 Site internet: www.orval.be 쑺 Visites: on ne visite pas la brasserie, mais bien les ruines et le musée de l’ancienne abbaye. Heures de visite en été: de 9h30 à 18h30. L’hôtellerie propose des séjours de retraite et de recueillement.Tél.: 061 31 10 60. L’Auberge de l’Ange gardien, à l’entrée du domaine, appartient également à l’abbaye. «PERSONNE DE TROP» Aujourd’hui, Orval est animée par une communauté de 15 moines trappistes. Ils gèrent l’activité d’accueil dans l’abbaye nouvelle et les ruines de l’ancienne. Et ils contrôlent la Brasserie d’Orval SA via une ASBL qui possède le site et le nom de marque et à qui l’entreprise verse une redevance. Ces revenus servent d’une part à maintenir le domaine en l’état et d’autre part à financer des œuvres caritatives et à venir en aide à d’autres commu- 쑲 (1) Selon l’historien de la bière Philippe Voluer, la forme en quille de la bouteille d’Orval lui permet de mieux résister à la pression qui est deux fois plus élevée que dans le cas d’une pils. Elle permettait également de retenir le dépôt de levure dans le ventre de la bouteille au moment de servir la bière (aujourd’hui, il n’y a quasi plus de dépôt). 쑲 (2) Une exposition sur «Les séries de timbres d’Orval» sera organisée à l’abbaye du 4 au 15 août prochain. Goûté pour vous 쑺 Production de bière: 53.000 hectolitres en 2006, en hausse de 7,5% par rapport à 2005 쑺 Production de fromage: 170 tonnes en 2006 nouvelle Orval sur les ruines de l’ancienne. Comme dans le cas de Saint-Remy à Rochefort, un mécène, en l’occurrence la famille de Harenne, racheta le bien afin de le restituer à l’Ordre de Cîteaux dans l’espoir qu’il y relance une communauté. Le miracle, on l’a vu, s’est produit en 1926-32 avec la convergence, à Orval, d’une série de personnalités inspirées: Dom Chautard, Henry Vaes, Marie-Albert van der Cruyssen et les trois brasseurs. nautés monastiques, en Asie et en Afrique notamment. La brasserie produit 53.000 hl (chiffre de 2006) et emploie une trentaine de personnes, tandis que la fromagerie, intégrée dans la même SA, fabrique 170 tonnes de fromage par an avec 4 personnes à bord. Orval distribue ses produits via un réseau de concessionnaires. La direction prône une croissance maîtrisée, pour répondre à la demande en hausse sans tomber dans l’ornière du business à tout prix. Elle parachève actuellement une série d’investissements destinés à moderniser l’outil: la nouvelle salle de brassage sera inaugurée en septembre prochain. Elle sera ensuite enrichie d’une série de vitraux reprenant des images symboliques de la brasserie et du lieu: l’abbaye a passé commande auprès d’un maître verrier de la région et d’un dessinateur spécialisé. Et l’avenir? Certains s’inquiètent de la diminution du nombre de moines et de ses conséquences éventuelles sur l’activité. A cela, Frère Xavier répond en citant l’abbé général Dom Bernardo: «Dans une communauté monastique, il ne manque personne et il n’y a personne de trop.» 앳 Michel Lauwers Nasser Eftekhari Propriétaire du Beer Mania à Bruxelles piste de Rochefort à la côte belge.» Mais le «made in Belgium» brassicole fait peu à peu recette jusqu’aux États-Unis. Et la clientèle internationale passe de plus en plus facile- quartier des spécialistes de bande dessinée connu par tous les passionnés belges et étrangers. Bière et BD... c’était vraiment un mélange de rêve.» Propriétaire du magasin Beer Mania, Aujourd’hui, le quarchaussée de Wavre tier a changé. Mais à Bruxelles, Nasser «La bière des quatre saisons» Beer Mania y a fait Eftekhari propose à son trou dans un essa clientèle une sé«Si j’aime l’Orval? J’en faut laisser vieillir, pace de 500 m².Aux lection de 400 bièbois quatre tous les comme le vin. De mon côté, je ne la bois jares belges - et unirayonnages sont vesoirs. C’est ‘ma’ mais moins d’un quement belges ! bière. J’apprécie nus s’ajouter un esan après sa mise brassées de mason côté fortement pace de dégustation en bouteille. Mais nière professionhoublonné qui lui et même un rayon on peut franchenelle. «Il faut qu’eldonne son amer«vieilles cuvées» rément la laisser les aient fait leurs tume. servé aux amateurs vieillir trois, cinq preuves depuis Elle se boit très facide bières plus âgées. voire dix ans. quelques années, lement. En été, on Mais il y a 10 ans, Dans ma collecexplique-t-il. Je ne l’apprécie pour pour séduire une tion, j’en consercours plus les quason côté désaltéclientèle internatiove même une tre coins de la Belrant, en hiver on nale «qui boit plus de qui a 45 ans. gique pour propola boit tempébières belges que les Enfin, pour ser des bières qui rée. C’est une Belges eux-mêmes», ceux qui douposent des problèbière des quail a lancé un site de tent, c’est mes de qualité.» tre saisons. vente en ligne. «Le aussi une D’origine iranienne, C’est la clé premier magasin virbière digeste il avoue qu’il buvait anglaise de tuel de bière», insisteet qui, par sa déjà de la bière «en toutes les t-il. contenance cachette»dans son bières, elle Enfin, dernière nouen houblon village. En Belgique, passe vraiveauté, la bière maine fait pas sa passion ne fait ment bien son: la «Mea Culpa», grossir. Elle que croître.Au partout. réalisée avec la collacontient point qu’il y a 20 Je conseille boration d’une petite moins de suans il lance «le preen tout cas brasserie après deux cre que les mier magasin de de ne jamais années de tests. Elle autres bières bières au monde». la boire trop mérite aussi le détour fortement al«La bière belge jeune. C’est pour son verre en criscoolisées.» connaissait seuleune bière qu’il tal ciselé de Bohême. Photo Doc ment ses premiers 앳 succès, note-t-il. J.-M. L. Quelques années ment la porte de son magasin. «A plus tôt, toutes les bières étaient enBeer Mania, chaussée de Wavre, l’époque, nous étions idéalement sicore consommées régionalement. 174-176, 1050 Ixelles. Vous n’auriez pas trouvé une traptués, pointe-t-il. Nous étions dans le www.beermania.be Chaque semaine, un passionné de la bière trappiste nous livre ses impressions sur la brasserie visitée.