Comment combattre le Mauvais Stress?

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Comment combattre le Mauvais Stress?
Journal Association FSI - USJ 2007
Comment
combattre
le Mauvais
Stress?
Vous vous plaignez fréquemment du stress, pourtant,
sans lui, vous seriez continuellement en danger de
mort. Le stress est généralement assimilé aux soucis et à
l’angoisse: C’est une erreur. Il existe un mauvais stress,
mais aussi un bon, qui nous protège des agressions
extérieures. A vous de combattre le premier, tout en
laissant le second s’épanouir.
Inventé dans les années trente par le chercheur
canadien Hans-Selye (Lecomte, & Patesson, 2002), le
mot stress désigne la réponse, la parade, que trouve
l’organisme contre les agressions ou les stimulations.
Celles-ci peuvent être bénéfiques ou mauvaises, dans
tous les cas, notre corps émet un signal de même nature.
Autrement dit, le stress sera provoqué par des coups, un
chagrin sentimental,… mais il sera également causé par
une déclaration d’amour, par votre dessert préféré sur
un menu, …
Le Dictionnaire de médecine Flammarion définit le
stress ainsi: «mot désignant à la fois toute tension ou
agression s’exerçant contre l’organisme et la réponse
ou réaction non-spécifique de l’organisme à cette
agression.» En d’autres termes, le stress est le résultat
de tout facteur émotif, physique, social, économique
ou autre qui exige une réponse ou un changement.
Il est généralement admis qu’un peu de stress est
acceptable - ce que l’on qualifie de «défi» ou de
«stress positif»-, mais lorsqu’il survient avec une force
que vous ne pouvez maîtriser, il peut se produire des
changements à la fois mentaux et physiques.
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Le «stress en milieu de travail» consiste en des
réponses physiques et émotionnelles nuisibles qui
peuvent se produire lorsqu’il y a conflit entre les
demandes liées au travail de l’employé et le degré de
maîtrise dont dispose cet employé pour répondre à ces
demandes. En général, la combinaison de demandes
élevées dans un emploi et du faible degré de maîtrise
sur la situation peut entraîner du stress.
Beehr et Newman (1978) proposent une
définition du stress au travail qui reprend
l’idée de l’interaction entre le travailleur et son
environnement de travail: «Le stress au travail
réfère à une situation où des facteurs reliés à l’emploi
interagissent avec les travailleurs de manière à
modifier (en augmentant ou en diminuant) les
conditions physiologiques et/ou psychologiques telles
que l’individu est forcé de dévier du fonctionnement
normal.»
«Le stress est un état transitoire de désadaptation
fonctionnelle, dont les symptômes psychiques,
physiologiques et comportementaux manifestent
une tentative d’adaptation non encore réussie et
se manifestant à court ou à moyen terme. Cet état
transitoire, s’il ne se traduit pas par une reconquête
d’un nouvel équilibre psychique, évolue vers le
burnout» (Schaufeli & Enzmann, 1998, dans Selosse,
2006).
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Les différentes
stress
conceptions
du
Les différentes conceptions du stress au travail offrent
une structure qui met en relation les sources et les
symptômes de stress. La plupart de ces modèles
reposent sur des approches d’origines médicales et
psychologiques qui visent à expliquer l’origine du
stress. Ces approches causalistes ont généralement
pour but de dégager quelques traits fondamentaux du
fonctionnement de l’individu lorsqu’il fait face à une
situation stressante. Ainsi, certains aspects du milieu de
travail comme les stresseurs physiques ou chimiques
(bruit, chaleur, exposition à des substances toxiques,
etc.) et les mauvaises conditions matérielles de
travail rappellent plutôt les conceptions physique et
physiologique du stress. Alors qu’une conception
psychosociale fait davantage référence aux aspects
liés à la charge de travail, aux problèmes de rôle, aux
relations dans le travail, à l’organisation du travail, et à
la structure de l’entreprise.
Hans Selye décrit trois stades par lesquelles passe un
individu en état de stress:
-La réaction d’alerte
L’alerte est la perception d’une contrainte
qui initie le processus de réaction non spécifique de
l’organisme, à un stimulus auquel il n’est pas préparé à
répondre. Selye divise la réaction d’alarme en choc et
contre choc.
Le choc est l’état de surprise à l’agression soudaine.
Il peut se manifester par une accélération du rythme
cardiaque, une augmentation de la profondeur
respiratoire, une hypertension ou une hypotension
artérielle, des troubles digestifs (constipation ou
diarrhées), des maux de tête,…etc. L’ampleur de la
phase de choc dépend essentiellement du degré de la
menace, de l’environnement et des caractéristiques du
sujet. Cette phase peut durer de quelques minutes à 24
heures. Elle est ensuite suivie d’un contre choc au cours
duquel l’organisme se ressaisit et met en jeu ses moyens
de défense. A ce stade, l’individu fait face.
- La phase de résistance
Cette phase constitue l’ensemble des réactions
non spécifiques provoquées par l’exposition prolongée
de l’organisme aux stresseurs auxquels il s’est adapté
au cours de la réaction d’alarme. L’organisme y résiste
fortement mais accroît sa sensibilité aux autres facteurs
de stress. C’est là que peuvent survenir des pathologies
fonctionnelles, les troubles du sommeil qui persistent,
l’anxiété… on note également une diminution des
relations aussi bien sexuelles que relationnelles. C’est à
ce stade que l’individu fait toujours face mais dans une
situation de tension.
- La phase d’épuisement
La phase d’épuisement est amorcée lorsque
l’organisme cesse de pouvoir s’adapter aux stresseurs
auxquels il est soumis. Ce stade répète la réaction
d’alarme mais les mécanismes d’adaptation
s’effondrent. Pour Selye, les réactions de l’organisme
agressé constituent avant tout un phénomène favorable
visant à maintenir l’équilibre avec l’environnement. Les
travaux de Selye visaient par ailleurs, à comprendre
le rôle des systèmes hypothalamo-hypophysaire et
surrénalien dans les réactions de stress. A ce stade,
l’individu ne fait plus face,…
En un mot, le stress agit comme un thermostat.
A chaque émotion, à chaque agression extérieure,
notre organisme doit s’adapter, sans quoi il mourrait;
un exemple tout simple: vous débarquez dans un pays
étranger et l’hôtesse, d’une voix monocorde, vous
avertit que la température au sol est de 40°. Pour faire
face à ce brusque changement votre corps va trouver
la réponse biologique adaptée, la sudation notamment.
Or, le premier signal qui l’avertit, qui lui permet de
réagir, c’est le stress. Tout se passe comme si votre
organisme avait décelé un danger inconnu à l’aide
d’une sorte de radar et il cherche à l’identifier pour y
réagir.
Durant la phase d’alerte, le système nerveux envoie
un message à l’hypothalamus qui, en agissant sur
la glande médullo-surénale, libère de l’adrénaline.
Celle-ci fournit à l’organisme l’énergie dont il a besoin
en augmentant le rythme du cœur, donc son débit,
pour mieux oxygéner les muscles et les tissus et en
facilitant la libération du sucre et des graisses par le
foie. C’est un premier stade où la mémoire et la réflexion
sont améliorées. Quelle que soit la nature du
stimulus, la réponse biologique de l’organisme sera
invariablement la même.
Si le stimulus persiste, vous passez à une phase
de résistance. Votre organisme est en position d’alarme
et de mobilisation pour tenter de capitaliser d’autres
ressources afin de trouver un nouvel équilibre. Il se met
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à secréter d’autres hormones: l’endorphine aux vertus
apaisantes, le cortisol, la dopamine, la sérotonine et
enfin des hormones sexuelles. A ce stade, le stress est
considéré, d’un point de vue biologique, comme un
agent stimulant bénéfique pour l’organisme, qui lui
permet de réagir pour survivre à des situations pouvant
le mettre en danger.
Si le stress perdure et que l’organisme est incapable
de faire face car les dépenses énergétiques nécessaires
sont trop importantes, l’individu passe à une phase
d’épuisement, sa soupape de sécurité explose. La
porte d’entrée à toutes les maladies est maintenant
ouverte, sans parler de la fatigue, de la colère, de la
consommation d’alcool, de tranquillisants et d’autres
somnifères,... L’individu est enclin à un certain mal de
vivre, voire une perte de l’envie de vivre et les pleurs,
une absence de projets, de projection sur l’avenir,…
- La structure de l’organisation et son climat:
• Une mauvaise politique et pratique de la communication,
changements majeurs sur le lieu de travail, culture de
l’organisation et manque de participation dans la prise
de décisions.
•Les relations interpersonnelles dans le milieu du
travail: la qualité des relations avec les pairs, les
subordonnés ou les supérieurs.
•Le support: Sentir qu’on n’est pas épaulé par ses
collègues peut rendre encore plus difficile la résolution
de problèmes au travail qui sont sources de stress.
- La nature de l’emploi:
• La quantité d’énergie physique et émotionnelle
requise, charge de travail et lieu de travail.
• Le contrôle: Ce facteur est le plus lié au stress au
travail. Des études ont montré que les personnes qui
ont de nombreuses responsabilités mais disposent
d’un faible pouvoir de contrôle ou de décision dans
leur fonction courent un risque majoré de maladies
cardio-vasculaires et d’autres maladies liées au stress.
- Le conflit et l’ambiguïté du rôle: imprécision de
la définition du rôle, des fonctions, des attentes et des
responsabilités.
- L’interface travail-foyer: des exigences et des
attentes contradictoires en termes de temps et de
disponibilité.
Les causes du stress professionnel
(CII, 2000)
- Les conditions de travail:
• Le travail par équipes/heures de travail, le weekend, des rémunérations inadéquates, les conflits, la
discrimination et le danger présents dans le milieu du
travail.
• Evolution de carrière: mutation vers un poste mal
adapté aux compétences et aux intérêts de la personne,
incertitude dans la carrière, insécurité de l’emploi et
manque de possibilités d’apprendre et de progresser.
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Principales sources du stress des infirmières
- S’occuper des mourants, être confrontées à la mort.
- Conflits avec des collègues, y compris avec des
supérieurs et autres professionnels de la santé
- Préparation inadéquate pour traiter les besoins
émotionnels des patients et de leurs familles
- Manque de soutien au niveau du personnel
- Charge de travail
- Incertitude concernant les plans de traitements.
Gestion du stress
Gérer le stress consiste en fait, à gérer sa vie, la mettre
en équilibre. Il faut travailler sur soi, ne pas se laisser
déborder et envahir, se donner les moyens de résoudre
son propre problème. Tout ce qui permet d’éviter le
surmenage et l’anxiété n’est bon que si vous êtes prêt à
vous remettre en question. C’est le premier pas à faire,
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et certainement pas le plus facile! Sans compter que
gérer le stress ne se fait pas du jour au lendemain, il
faut apprendre à faire face et cesser de se placer en
position de victime passive. Il n’y a pas de remède
miracle, c’est avant tout un travail sur soi pour parvenir
à appréhender les choses différemment. Le stress étant
une réponse de l’organisme à un changement, il faut
donc l’aider à s’adapter sereinement,…
Commes les manifestations du stress sont biologiques,
psychologiques et comportementales, la démarche
pour contrer les stresseurs doit donc relever de ces trois
points.
- Au niveau biologique ou physique
• Commencer par une bonne hygiène de vie, éviter la
sédentarité, prendre des repas équilibrés et réguliers,
certains aliments améliorent notre résistance. Tous les
«sucres lents» que l’on trouve dans les céréales, les
pommes de terre, les fruits secs, sont excellents, ne vous
privez pas non plus de légumes et de fruits frais, riches
en vitamines (B1, B6) et en minéraux et oligo-éléments
(MgSO4) qui consolideront l’équilibre de l’organisme.
Méfiez-vous des «sucres rapides» car ils donnent des
coups de fouet parfaitement inutiles. Et n’oubliez pas: le
café et l’alcool ne sont pas vos meilleurs alliés.
• Respecter les rythmes physiologiques du sommeil, et
retrouver le plaisir des hobbys.
• Gérer le stress par le contrôle de la respiration et la
détente musculaire; tout comme le rire, le yoga et le
chant .Essayer de pratiquer un sport, il peut constituer
une soupape de décompression.
- Au niveau psychologique
• Essayer de changer les relations interpersonnelles en
travaillant les émotions. Ainsi, au lieu d’exploser contre
un collègue pour une raison ou une autre, il faut
essayer de réagir calmement, de dire ce que l’on
ressent sans agresser l’interlocuteur. De même, il est
inutile de s’énerver à un feu rouge ou dans un
embouteillage.
• Essayer de relativiser les soucis qui ont une
importance négligeable, seront ramenés à leur
véritable niveau.
le nomment et qui consiste au refus du droit à l’erreur
(tout ce qui est entrepris doit réussir), engendre des
schémas comportementaux irréalistes et douloureux. Là
encore relativisez! Cela peut paraître un peu «cliché»
ou ressembler à des conseils psychologiques de second
rang, mais cela n’est finalement pas si facile (surtout
que cela implique une réelle remise en question de soi)
et peut vraiment améliorer les relations au quotidien et
donc le climat de l’environnement de travail,…
Dans tous les cas, la meilleure gestion du stress reste
la prévention.
Ce que les organisations de soins de santé
peuvent faire
- Mettre en œuvre le cycle de contrôle d’évaluation
et de gestion des risques qui implique l’identification,
l’analyse et la gestion des dangers ainsi que la protection
des travailleurs.
- S’assurer que les charges de travail correspondent
aux capacités et aux ressources de l’employé, définir
clairement ses responsabilités.
- Solliciter les idées des employés pour l’amélioration
du système des valeurs.
- Améliorer les canaux de communication.
- Prendre des dispositions pour guider, conseiller et
assurer la formation en cours d’emploi.
- Soutenir l’initiative et complimenter le travail bien fait.
- Fournir une sécurité de l’emploi à long terme, des
augmentations salariales.
- Adapter le travail aux travailleurs, notamment en ce
qui concerne l’aménagement du lieu de travail et le
choix de l’équipe de travail.
- Au niveau comportemental
• Essayer d’adopter une attitude alternative plus
apaisante. Dédramatiser, prendre du recul… Le
comportement du «coping actif», comme les spécialistes
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Ce que les infirmières peuvent faire
- Mener une vie saine: dormir suffisamment, avoir un
régime alimentaire équilibré (pas trop de gras, de
sucré, ne pas trop abuser de l’alcool, se méfier du tabac
et des somnifères qui constituent un faux ami en matière
de déstresseur).
- Avoir confiance en soi: déterminez ses points forts et
ses points faibles, les accepter, en tirer parti et faire au
mieux avec ce que nous avons.
- Etablir un budget sensé: les problèmes financiers sont
une source de stress. Souvent, nous dépensons pour
des choses «souhaitées» plutôt que pour des choses
«nécessaires».
- Faire du bénévolat: participer à des activités communnautaires donne souvent un but précis à la vie, et on
en tire une satisfaction que le travail rémunéré ne peut
apporter.
- Identifier les humeurs et leur faire face: nous avons
tous besoin de trouver des façons constructives et
sécuritaires d’exprimer notre colère, notre peine, notre
joie et notre peur.
- Etre en paix avec nous-même: apprendre à nous
connaître, à savoir ce qui nous rend vraiment heureux,
et trouver un équilibre entre ce que nous pouvons
changer en nous et ce que nous ne pouvons changer.
Reconnaître en soi les signes du stress. Identifier les
pensées, les sentiments, et les comportements
développés face au stress. Tâcher de ne pas se taper
la tête contre les murs; les heures d’angoisse hélas, ne
changeront pas le monde; mais elles risquent, à long
terme, de nous rendre malade. Penser certes au travail,
mais aussi à sa vie personnelle; penser aux autres, mais
sans s’oublier et sans se négliger.
- Faire face au stress: apprendre des techniques
efficaces de relaxation (Yoga, Reiki, Chant), penser
positivement, établir des priorités et définir des limites,
et développer le sens de l’humour.
- Avoir une satisfaction professionnelle: connaître le
type de travail et d’environnement convenables et
s’efforcer d’y parvenir.
- Avoir un soutien psychique: partagez ses préoccupations
avec des membres de la famille, des collègues et
des amis qui savent écouter. Si nécessaire,
recherchez le conseil d’un professionnel.
En conclusion, le stress est un phénomène
indispensable, mais s’il est trop intense, il peut se
retourner contre nous.
Le stress professionnel est un problème émergeant dans
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le secteur des soins. Il influe négativement sur la santé
psychologique et physique des individus ainsi que sur
l’efficacité de l’entreprise.
Bien qu’il n’existe pas de solution-miracle pour
combattre le stress nous pouvons commencer par
recenser nos sources de stress pour ensuite, isoler le
problème et prendre du recul. C’est alors qu’il devient
possible de reprendre le contrôle sur ses actes. De plus,
il ne faut pas perdre de vue que, bien souvent, ce n’est
pas la situation stressante qui est en cause, mais plutôt
la valeur qu’on lui accorde.
N’oubliez pas que si vous ne prenez pas soin de vous,
personne ne le fera à votre place! Après tout, l’attention
que l’on se porte et que l’on accorde à son équilibre
intérieur est un investissement que l’on ne pourra jamais
regretter, c’est pourquoi œuvrons à «tuer» le
Stress avant qu’il ne nous tue!
Références
• Conseil International des infirmières. (2000). Le CII et le stress:
Le stress professionnel, une menace pour la santé des personnels.
Récupéré le 20 octobre 2006 http://www.icn.ch/matters_stressf.htm
• DeKock, C. (2006). Stress au travail: comment le gérer
Récupéré le 20 octobre 2006, http://soins infirmiers inter/stress/stress,
responsabilités et craintes au travail avec e-santé_fr.htm.
• Lecomte, N., & Patesson, R. (2002) Stress en milieu de travail.
Récupéré le 20 octobre 2006 http://soins infirmiers inter/stress/ULBCREATIC stress recommandation.htm
• Selosse, S. (2006). Le stress au travail: Le management du stress.
Récupéré le 20 octobre 2006 http://soins infirmiers inter/stress/le stress
au travail, le management du stress- travail entreprise-netPME.htm.
Yvonne HAJJAR
Directrice des soins
Hôpital Tal-Chiha – Zahlé

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