dp section speciale - Ville de la Courneuve
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dp section speciale - Ville de la Courneuve
DANS LE CADRE DU FESTIVAL « LA RESISTANCE AU CINEMA » AU CINEMA l’ETOILE VENDREDI 1er AVRIL 2011 à 20h30 Séance animée par Loic DAMIANI, historien Synopsis En juin 1941, Hitler attaquant l'URSS, les communistes finissent par rejoindre la Résistance. Le 21 août 1941, un jeune militant communiste – ultérieurement connu sous le nom de colonel Fabien – abat dans le métro parisien un militaire allemand, l'aspirant de marine Alfons Moser[2] . Cet épisode est connu sous le nom d' « attentat du métro Barbès »[3] . Redoutant les représailles allemandes dans la population parisienne, le gouvernement de Vichy décide de prendre les devants. Avec l'aval de l'amiral Darlan (vice-président du Conseil), Pierre Pucheu, ministre de l'Intérieur, propose au Conseil des ministres présidé par le maréchal Pétain, d'adopter une loi[4] d'exception pour juger, dans le but d'obtenir une condamnation à mort, six Français en échange de la vie de l'aspirant Moser, et ainsi satisfaire la marine de guerre allemande. Ces six accusés seront évidemment choisis parmi les ennemis ou les indésirables du régime de Vichy : communistes et Juifs. Autour de la table, outre Pétain, Darlan et Pucheu, Joseph Barthélemy, ministre de la Justice, le général Huntziger, secrétaire d'État à la Guerre, le général Bergeret, secrétaire de l'Air, Yves Bouthillier, ministre de l'Économie, etc. Pétain laisse faire Pucheu, mais Barthélemy – professeur de droit – se cabre, puis finit par se soumettre aux injonctions du maréchal ; les autres ministres suivent. Cette loi d'exception doit être rétroactive (puisque les condamnations doivent être prononcées et exécutées dans les plus brefs délais), si bien que les ministres, peu habitués à ce type d'exercice, la signent en laissant un article entier en blanc, lequel article sera plus tard rédigé à Paris par le procureur de l'État Maurice Gabolde avant sa publication au Journal officiel. Outre son caractère rétroactif, cette loi a ceci de particulier que les condamnations ne doivent pas être motivées, et qu'aucun recours n'est possible ; elle attribue compétence à des « sections spéciales » de la courd'Appel (d'où le titre du film). Après la mascarade législative (la loi est même antidatée pour donner l'impression qu'elle a été adoptée avant l'attentat) et la parodie de justice (un des prévenus a déjà été jugé en appel), s'engage alors une double course contre la montre : du côté des autorités françaises pour faire guillotiner les six prévenus, et du côté de la défense pour les sauver, notamment via un recours en grâce introduit auprès du chef de l'État, le maréchal Pétain, celui-là même qui a signé la loi. Le film montre également comment les scrupules moraux du garde des Sceaux, Joseph Barthélemy, puis des magistrats, sont progressivement étouffés par la menace – brandie par des Français – de représailles allemandes aveugles parmi des « notables » et l'invocation abusive de la réquisition patriotique. Il débute par la diffusion du discours de Pétain[5] dit « du vent mauvais » en plein casino de Vichy, lors d'une représentation de l'opéra Boris Godounov. Fiche technique • • • • • • • Réalisation : Costa-Gavras Scénario : Costa-Gavras, Jorge Semprún, d'après l'oeuvre de Hervé Villeré Musique originale : Éric Demarsan Montage : Françoise Bonnot Pays d'origines : France, Italie et Allemagne Genre : Drame Date de sortie : France : 23 avril 1975 Distribution Hommes politiques et hauts fonctionnaires • • • • • • Michael Lonsdale : Pierre Pucheu, le ministre de l'Intérieur Louis Seigner : Joseph Barthélemy, le garde des Sceaux François Maistre : le délégué général Fernand de Brinon Roland Bertin : Georges Dayras, le secrétaire général du ministère de la Justice Ivo Garrani : l'amiral François Darlan, vice-président du Conseil Henri Serre : le préfet Ingrand, délégué du ministère de l'Intérieur en zone occupée Magistrats et avocats • • • • Pierre Dux : le procureur général Cavarroc Jacques François : Maurice Gabolde, le procureur de l'État français Claudio Gora : le premier président de la cour d'appel Claude Piéplu : Michel Benon, le président de la Section spéciale • Jacques Perrin : maître Lafarge • Michel Galabru : le président Cournet • Julien Guiomar : le substitut général « réfractaire » • Jean Bouise : le conseiller Linais • Hubert Gignoux : le juge « en noir » • Julien Bertheau : le chef du Service central du Parquet • Jacques Ouvrier : le conseiller • Alain Nobis : le premier conseiller • Jean Champion : l'avocat général • Maurice Teynac : le substitut général • Julien Bertheau : un magistrat • Jean-Pierre Miquel : un avocat Section spéciale (film) 3 Les Allemands • Heinz Bennent : le major Beumelburg • Hans Richter : le général Otto von Stülpnagel • Romain Bouteille : le tankiste allemand dans le métro Les Résistants • Jacques Spiesser : Frédo (plus tard le colonel Fabien) • Patrick Raynal : un résistant Les prévenus • • • • • • Bruno Cremer : Lucien Sampaix, le journaliste ancien secrétaire général de L'Humanité Yves Robert : Bastard, l'un des condamnés à mort Guy Rétoré : Bréchet, l'un des condamnés à mort Jacques Rispal : Abraham Trzebrucki, l'un des condamnés à mort Éric Rouleau : Friedmann Guy Mairesse : Redondeau Petits rôles • • • • • • • • • • • • • • • • • • • Louis Daquin Maurice Baquet : un secrétaire Nicole Desailly : la femme au téléphone Serge Marquand : l'aide bourreau Didier Albert Robert Benoît Daniel Breton Agnès Château Fanny Delbrice Maurice Dorléac Jean-François Gobbi Patrick Lancelot Carole Lange Éric Laborey Denis Le Guillou Thérèse Liotard Henri Marteau Jacques Monnet Roland Monod Simple apparition • Yves Montand, Bob Castella et Costa-Gavras : des soldats mangeurs de soupe • Patrick Feigelson, Jacques Mathou Autour du film Section Spéciale s'inscrit dans le cycle des films politiques de Costa-Gavras : Z (1969), L'Aveu (1970), État de siège (1973), ainsi que le film d'Henri Verneuil, I... comme Icare (1979) tous les quatre avec Yves Montand dans le rôle principal, alors qu'ici ce dernier n'apparaît ici que de manière fugace. Ces films ont pour fil conducteur les rapports entre le monde politique et la justice, et Section Spéciale n'y fait pas exception. Cependant, contrairement à ses prédécesseurs, Section Spéciale n'est pas une demi-fiction réalisée au départ d'événements réels, mais une reconstitution minutieuse d'événements historiques, essentiellement établie sur base de l'oeuvre de Hervé Villeré qui s'est basé non pas sur les archives judiciaires françaises – dont l'accès lui a été refus – mais sur des archives allemandes. L'affaire des sections spéciales sera pour beaucoup dans la condamnation à mort de Pierre Pucheu à Alger, en mars 1944[6] . Elle constitue une base de départ pour une discussion à caractère historique sur la politique de collaboration : les collaborateurs y voyaient un moyen de limiter les représailles des Allemands, et surtout de diriger celles-ci vers des Français « d'une moindre qualité » ; les partisans de De Gaulle lui reprochaient non seulement de soumettre la Justice française à l'occupant, mais surtout d'établir d'odieuses distinctions entre Français. Cette affaire met en évidence le rôle personnel joué par Pétain. Il ne subit en cette occasion aucune pression directe des Allemands, contrairement aux événements du 13 décembre 1940[7] par exemple. Costa-Gavras « représente » Pétain en ne le montrant pas : on entend sa voix, on voit ses mains et ses manches (constellées d'étoiles), mais on ne voit jamais son visage. L'effet de ce procédé est assez inhabituel et impressionnant. Costa-Gavras dépeint l'atmosphère très particulière de Vichy en 1941. Trois aspects sont mis en exergue : le caractère presque ridicule de l'entassement d'un gouvernement dans une petite ville de province, l'importance capitale, pour la population des deux zones, des décisions prises dans un contexte aussi inapproprié, et la quasi-déification de Pétain, paraissant planer au-dessus des événements. Alors que le sujet du film est plutôt « ciblé », pratiquement toutes les « personnalités » du régime de Vichy défilent à l'écran, y compris Fernand de Brinon (dont on précise qu'il a restauré son château de la Chassagne grâce aux fonds secrets), Jean-Pierre Ingrand[8] et Georges Dayras pour la zone occupée. Même l'ambassadeur des États-Unis, l'amiral William Leahy apparaît dans le film. Les rôles les plus importants ne sont pas dévolus aux acteurs les mieux connus : des célébrités comme Michel Galabru, Yves Robert, Pierre Dux, Bruno Crémer et Jacques Perrin n'y tiennent que des seconds rôles. Détails corrects et erronés • Bien que très ressemblant, le discours de Pétain diffusé à l'issue de Boris Godounov n'est pas l'enregistrement originel, lequel comporte trop de grésillements. Le texte d'origine se termine par « c'est de vous-mêmes que je veux sauver », tandis le discours du film se termine par « c'est de vous-mêmes que j’entends vous sauver ». • Contrairement à ce que prétend un dialogue du film, Pierre Pucheu ne s'est jamais battu dans les rangs nationalistes durant la guerre civile espagnole • La tenue de l'amiral Darlan ne semble comporter que quatre étoiles sur les manches et une seule couronne de feuilles de chêne sur le bandeau de la casquette : pour un amiral de la Flotte, ces nombres devraient normalement être, respectivement, cinq et deux. • La décoration de la Francisque, portée notamment par Pucheu et Brinon ne correspond pas au modèle officiel, dépourvu d'anneau et d'argent. • La dague portée par Alfons Moser semble être du modèle de la Heer (armée de terre) et non de la Kriegsmarine. • Devant l'hôtel du Parc, les « plaques » portant ce nom sont en réalité des panneaux de carton placés trop loin, de part et d'autre de l'entrée. En outre, l'hôtel précédant l'hôtel du Parc en venant des sources est le Majestic et non l'hôtel Thermal (actuel hôtel Aletti Palace). De même, l'hôtel des Célestins n'est visible ni depuis l'hôtel du Parc ni depuis le Pavillon Sévigné (lors d'un Conseil des ministre, l'un de ses membres regarde par la fenêtre et « voit » l'hôtel des Célestins). • Au début du film, on parle de conseils des ministres restreints, tenus hors la présence du garde des Sceaux : cela ne correspond pas à la réalité. • On voit que le procureur de l'État, Gabolde, est affecté d'une boiterie : il avait effectivement été amputé d'une jambe durant la Grande Guerre. • Il est assez étonnant de voir, lors de l'arrivée de Me Lafarge à Vichy, la loge du maréchal Pétain gardée par des soldats baï onnette au canon portant à l'été 1941 la lourde capote et le casque de 1940 : le maréchal disposait de sa Garde personnelle revêtue d'un uniforme spécifique (casque et tunique de cuir des troupes de cavalerie, notamment). De même, l'officier présent à ce moment aurait été un officier de gendarmerie. • Les noms et les prénoms des prévenus sont exacts. On les trouve sur des plaques commémoratives ou parmi les 13 fusillés de Caen. Notes et références [1] Allociné.com, Section spéciale (http:/ / www. allocine. fr/ film/ fichefilm_gen_cfilm=34266. html). [2] L'aspirant Moser était un simple assistant d'intendance. [3] « Histoire, 1941 : l'attentat au métro Barbès, les débuts de la résistance en France » (http:/ / www. lescommunistes. org/ spip. php?article339), 18 août 2001. Repris de Jean Morawski, L'Humanité, sur le site lescommunistes.org, consulté le 28 septembre 2007. [4] À ce moment, Pétain exerçait le pouvoir législatif en Conseil des ministres. [5] Le discours – et donc le film – commencent par un retentissant : « Français ! J'ai des choses graves à vous dire [...] je sens se lever un vent mauvais. » [6] Pierre Pucheu, Ma Vie, éd. Amiot-Dumont, Paris, 1948. [7] Lors du renvoi de Laval, l'ambassadeur Abetz était venu en personne à Vichy, entouré de SS, exiger sa réintégration. [8] Éric Conan, « Jean-Pierre Ingrand – Les regrets d'un serviteur de Vichy », L'Express, 8 août 1991 . Bibliographie • Suzane Langlois, La Résistance dans le cinéma français, 1944-1994 : De La libération de Paris à Libera me, éd. L'Harmattan, Paris, 2001, 444 p. (ISBN 2747507750 et 9782747507752) , p. 292-300 Annexes Liens externes • Hervé Villeré, L'Affaire de la Section spéciale (http:/ / denistouret. fr/ textes/ Villere. html) • Section spéciale (http:/ / french. imdb. com/ title/ tt0073679/ combined) sur l'Internet Movie Database • DvdToile.com, Section spéciale (http:/ / dvdtoile. com/ Film. php?id=9849) • les 13 fusillés de Caen (http:/ / www. ouest-france. fr/ 2001/ 12/ 14/ caen/ -Il-y-a-60 ans-les-treize-fusillés-de-Caen--15320317. html) • Plaque commémorative : Redondeau Léon mort en déportation (http:/ / www. memorial-genweb. org/ ~memorial2/ html/ fr/ resultcommune. php?idsource=22223& table=bp04& dpt=92& insee=92046& pays=France) Vichy et la déraison d’État Août 1941. Un jeune militant communiste tue un officier allemand dans le métro parisien. En représailles, les Allemands menacent d’exécuter des otages. À Vichy, les collaborateurs, parmi lesquels Fernand de Brinon et le ministre de l’Intérieur Pierre Pucheu, prennent les devants et proposent de mettre en place une juridiction d’exception qui se chargera de juger et de condamner des ennemis du régime et des résistants. Satisfaits, les Allemands laissent faire. Une loi rétroactive rétroactive est promulguée à la hâte et cinq magistrats nommés à cette « section spéciale » par le garde des Sceaux. Le procès de trois communistes est sommairement instruit à huis clos : bien qu’ayant déjà été jugés, trois d’entre eux, dont un juif, sont condamnés condamnés à mort et exécutés. prennent part à cette «Révolution nationale» de la justice, on approfondira les recherches sur le contexte social dans lequel ils vivent, leurs options idéologiques, leur passé de juges sous la IIIe République. On relèvera enfin les nombreuses entraves aux règles élémentaires du droit que comporte la loi qui institue les sections spéciales: cette loi est antidatée pour laisser accroire qu’elle a été adoptée avant l’attentat; les condamnations ne sont pas motivées; un des prévenus avait déjà été jugé; le recours en grâce est rejeté, non par le chef de l’État, mais par un ministre… Pour en savoir plus • BARTHÉLÉMY Joseph, Ministre de la Justice, 19411943, Pygmalion, 1997. Les mémoires d’un des protagonistes. • BANCAUD Alain, Une exception ordinaire. La magistrature en France 1930-1950, Gallimard, coll. «NRF Essais », 2002. • S’interrogeant sur la fonction sociale de l’appareil judiciaire et ses liens étroits avec le pouvoir, on mettra en avant une notion centrale dans la décision du régime de Vichy: la raison d’État, au nom de laquelle les règles de fonctionnement qui, en d’autres temps, différencient justice et violence, doivent être dépassées en cas de «mobilisation patriotique». Opposant les arguments des collaborateurs aux scrupules moraux qui agitent le garde des Sceaux, on débattra du «dilemme» qui a saisi Vichy en août 1941: épargner l’exécution de «bons Français» justifie-t-il de concéder à l’occupant l’adoption d’une justice de violence? Affirmer l’autorité de l’État sur le pays légitime-t-il un durcissement de la répression, même quand les crimes sont perpétrés contre l’occupant? • Le dossier de presse du film Section spéciale lors de sa sortie en 1975 faisait état des résultats d’un sondage sur la justice effectué par l’Ifop auprès des Français: «Peut-on justifier une action injuste en invoquant la raison d’État définie comme des ‘’considérations d’intérêt public’’? Oui, 20%. Non, 50%.» «Est-il préférable que les délits commis pour des raisons politiques soient jugés par des tribunaux spécialisés? Oui, 53%.» «Existe-t-il aujourd’hui en France un tribunal spécial pour juger les délits politiques? 49% l’ignorent et parmi les personnes qui se prononcent, celles qui estiment qu’un tribunal politique n’existe pas sont trois fois plus nombreuses que celles qui affirment son existence.» (C’était, il est vrai, avant la suppression de la Cour de sûreté de l’État en 1981.) Un semblable sondage serait intéressant à soumettre aujourd’hui pour mesurer la méconnaissance des sondés… Yves Robert et au fond Bruno Cremer Michael Lonsdale ENTRETIEN AVEC COSTA – GAVRAS Il semble que vous vous soyez efforcé que le film soit le moins daté possible, pour laisser le moins de place à la reconstitution, reconstitution, à l’anecdote, bref pour qu’il ait une portée actuelle. […] Il n’est pas question de condamner Pucheu: il a été condamné à mort et exécuté. Ni Bretonneau : il est mort. C’est le mécanisme du pouvoir et de la justice qui est en cause. Et il y a une continuité des rapports pouvoir-justice qui n’a pas cessé d’exister. Je pense que dans Section spéciale il y a une part de la France d’aujourd’hui de même que dans Z, L’Aveu ou État de siège, il y avait des aspects qui nous concernaient : ce sont des sujets cosmopolites. Je suis fasciné par les mécanismes que nous créons, ces machines que nous mettons en place et qui nous broient. Pucheu a inventé la section spéciale, un tribunal d’exception. Il a été jugé et condamné à son tour par un tribunal d’exception. Ainsi de suite… Chez le juge, il y a probablement un idéal derrière tout ça. Dans L’Aveu aussi : au départ, les communistes ne sont pas partis faire la révolution en disant on va écraser tous les autres. Mais les mécanismes que ces gens ont créés ont abouti à la répression. Avez--vous eu des problèmes particuliers Avez d’adaptation pour Section spéciale ? Oui. D’abord parce qu’il n’y a pas de personnage central dans le récit. Les personnages traversent le film. Le seul fil conducteur, c’est cette loi, ses raisons d’être et son application. C’était une difficulté majeure. Il ne fallait ni grandes vedettes, ni acteurs inconnus : le coup de feu qu’a donné Fredo est très important ; il faut qu’à la fin du film, le personnage de Spiesser ne soit pas oublié. Pour un metteur en scène, il est plus facile de prendre un acteur central et de le moduler au fur et à mesure que l’action avance. Ici, l’acteur changeait tous les jours ou toutes les semaines. Cela exigeait une attention croissante. Quel rôle joue le spectacle dans vos vos films ? Un rôle primordial, au même niveau que l’histoire qu’on raconte. Il est capital que le spectateur soit pris, qu’il ait en même temps la connaissance et l’exaltation. Il est évident que cette histoire peut être racontée en dix minutes de façon très plate ou en six heures avec une accumulation de détails techniques. Dans Section spéciale, cependant, le metteur en scène s’est retiré par moments pour laisser les acteurs dans une simplicité de cadrage sans recherches particulières. En termes de métier, je n’ai pas voulu « faire joujou avec la caméra ». Le décor, l’éclairage, les mouvements de caméra devenaient secondaires, complètement fonctionnels. L’important, c’est ce que les gens disaient. Presque une mise en scène de télévision… Oui, si parler de télévision veut dire placer la caméra là où les choses se passent. Elle surprend et montre ces choses. Le spectateur en tire les conséquences. Avec le sujet de Section spéciale, vous avez pris une période l’histoire de France dont tout pour le monde s’accorde po ur dire qu’elle n’est pas défendable. Et une situation où tous les personnages qui représentent le pouvoir n’ont pratiquement pas d’excuses, sauf celle d’être lâches. Est--ce que ce n’est pas enfoncer une porte Est Est--ce que le courage politique du ouverte ? Est film est évident ? On n’a pas cherché à faire preuve de courage. Et je ne suis pas sûr que tout le monde soit d’accord. Hier soir, lors d’une projection du film devant les grands corps de l’État, un très haut fonctionnaire s’est levé, a parlé du film de Kubrick, Les Sentiers de la gloire, et a dit : «Voilà des films qu’on ne devrait pas laisser faire parce qu’ils salissent l’armée et la magistrature. » Évidemment, d’autres magistrats lui ont répondu. Mais je pense que cela existe. Je pense aussi, pour reprendre le mot d’un magistrat qui était présent, que c’est très bien de faire des films sur cette époque parce que cela nous aide à nous revoir. On ne parle jamais assez de l’histoire. L’histoire, c’est le miroir devant lequel nous devrions nous regarder constamment. C’est un peu la raison du film. «Ces machines que nous créons et qui nous broient» Propos de Costa-Gavras, réalisateur de Section spéciale Propos recueillis par JeanJean-Pierre Bouteillier et Denis Offroy, in Cinématographe, maimai-juin 1975. TELEDOC TELEDOC EXTRAITS DU LIVRE : Le mardi 19 août (1941), au soir, Ingrand [un représentant du ministre de l’Intérieur] communique le projet de loi […] au général von Stulpnagel [commandant les troupes d’occupation allemandes], le lendemain 20 août, accompagné par le commentaire suivant […] : « Cette nouvelle loi constitue un progrès décisif dans l’évolution des mesures prises par le gouvernement français, non seulement dans le développement de la lutte anticommuniste, mais aussi sur le plan de l’évolution des conceptions juridiques qu’elle exprime. Les principaux éléments de cette loi sont les suivants : 1. Les Sections Spéciales auront autorité pour juger de toutes les menées communistes ou anarchistes. Ces Sections siégeront en zone non occupée auprès des tribunaux militaires ou maritimes, et en zone occupée auprès des Cours d’Appel. 2. Les individus arrêtés en flagrant délit seront immédiatement jugés, sans instruction préalable. À défaut de défenseur choisi par l’inculpé, un défenseur d’office sera immédiatement désigné. 3. Hors les cas de flagrants délits, la procédure sera instruite dans les huit jours. Aucune voie de recours ne sera admise contre les ordonnances du juge d’instruction qui renverra directement l’affaire et le prévenu devant la Section Spéciale qui statuera dans les deux jours de la réception du dossier. 4. Une procédure spéciale sera utilisée pour les jugements par contumace. 5. Les jugements rendus par les Sections Spéciales ne sont susceptibles d’aucun appel, recours ou pourvoi. Ils sont immédiatement exécutables. 6. Les peines prononcées peuvent aller jusqu’à la peine de mort. Les militaires ou fonctionnaires français reconnus coupables ne pourront être condamnés qu’au maximum de la peine : la mort. 7. Les dispositions habituelles du Code pénal ne sont pas applicables aux individus visés par cette loi. » Hervé VILLERÉ, L’Affaire de la Section spéciale, Fayard, 1973, p. 144-146. Pour aller plus loin : Sections spéciales en France pendant la Seconde Guerre mondiale Après l'attentat du métro Barbès du 21 aout 1941, l'occupant allemand réclame des représailles, qui sont organisées par les autorités françaises du régime de Vichy. Auprès de chaque Cour d'appel, se mettent en place des sections spéciales, spéciales tribunaux d'exception chargés de juger les communistes et les anarchistes. Création Le 21 août 1941, un jeune militant communiste, Pierre Georges (colonel Fabien) tue l’aspirant de la Kriegsmarine Moser, station Barbès, dans le métro parisien[1] ,[2] . Hitler demande l'exécution d'otages[2] . Pierre Pucheu, ministre de l’Intérieur, et Joseph Barthélémy, ministre de la Justice, mettent en place un tribunal spécialisé[2] . Le texte est rédigé le 22 août, mais pour sauver les apparences, la loi est antidatée du 14 août 1941[2] . Cette loi est publiée dans le Journal officiel du 23 août. Par ce texte, le régime de Vichy institue une section spéciale auprès des tribunaux militaires en zone libre et auprès des Cours d’appel en zone occupée. Ces sections spéciales sont spécialement chargées de réprimer les activités communistes et anarchistes (article 1), elles jugent en dernière instance, aucun recours n’est possible (article 7). La section spéciale est un tribunal d’exception, dont l’activité viole plusieurs règles de droit : absence d'énonciation des motifs, aucun recours ni pourvoi, rétroactivité (la loi réprime même les activités antérieures à sa promulgation). La première décision de cette juridiction est la condamnation à mort de trois communistes (Émile Bastard, Abraham Trzebrucki et André Bréchet)[2] , exécutés le 28 août, et une condamnation aux travaux forcés à perpétuité (le journaliste communiste Lucien Sampaix, qui sera fusillé plus tard, le 15 décembre 1941, par les Allemands)[2] . Installation En pratique l’installation des sections spéciales ne fut pas toujours aisée, les candidats ne se bousculant pas pour présider ou siéger dans un tribunal dont l’objet principal est la répression de la résistance d’extrêmegauche. La section spéciale auprès de la Cour d’appel de Paris connaît les mêmes déboires, Joseph Barthélémy lui-même doit désigner ses membres. Le 23 août, dans une circulaire aux chefs de Cour, le ministre précise les critères de dévouement devant faciliter le choix des membres des sections spéciales : « Vous vous attacherez à faire porter votre choix sur ceux qui vous seront connus par la fermeté de leur caractère et par leur dévouement total à l’État »[3] . Vichy donne une prime à la répression à ceux qui veulent bien l’exercer. Dans l’urgence, le 27 août, la section spéciale se réunit pour condamner trois personnes à mort et contenter les Nazis. Répression et Résistance Les sections spéciales de province prononcent neuf condamnations à mort. Ainsi le 21 mars 1943, Mendel Langer[4] , appelé Marcel Langer, chef des FTP-MOI de la région toulousaine est condamné à la peine requise par l’avocat général Lespinasse. La guillotine met fin à la vie de ce communiste, ancien officier des Brigades internationales, le 23 juillet 1943. Mais le procureur Lespinasse est exécuté en représailles le 10 octobre 1943. Quatre autres magistrats servant les sections spéciales auraient connu le même sort. Sections spéciales en France pendant la Seconde Guerre mondiale 2 Gaffe sémantique À la Libération, le Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) organise l’épuration. Certaines activités des collaborateurs de l’occupant allemand ne sont pas des crimes prévus dans le code pénal. Aussi, l’Ordonnance du 26 août 1944, institue un nouvel état juridique : l’indignité nationale. Pour juger si les prévenus doivent être placés en état d’indignité nationale, l’article 2 de l’ordonnance crée les sections spéciales des cours de justice. Elles sont chargés d’instruire et de juger les affaires relevant uniquement de l’indignité nationale. Cependant le lien avec les sections spéciales des Cours d’appel est très vite fait par les résistants. Alors, l’Ordonnance du 30 septembre 1944 transforme les sections spéciales en chambres civiques. Notes et références [1] « Histoire, 1941 : l'attentat au métro Barbès, les débuts de la résistance en France » (http:/ / www. lescommunistes. org/ spip. php?article339), 18 août 2001. Repris de Jean Morawski, L'Humanité, sur le site lescommunistes.org,, consulté le 28 septembre 2007. [2] Marc Ferro, Pétain, éd. Fayard, Paris, 1987, 789 p. (ISBN 2213018332 et 978-2213018331) ; rééd. Hachette littérature, coll. « Pluriel », Paris, 2009, 789 p. (ISBN 978-2-01-270518-0), p. 340-343. [3] Alain Bancaud, « La haute magistrature sous Vichy », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, no 49, janvier-mars 1996, p. 55. [4] asso.acer.free.fr, Biographie de Marcel Langer par Rolande Trempe (http:/ / asso. acer. free. fr/ Documents/ Biographie/ Marcel Langer. html) Bibliographie • Hervé Villeret, L'Affaire de la Section Spéciale, éd. Fayard, Paris, 1973 • Joseph Barthélemy, Mémoires, Éditions Gérard Watelet/Pygmalion, 1989 • Sous la direction de Michèle et Jean-Paul Cointet, Dictionnaire historique de la France sous l'Occupation, éd. Taillandier, 2000, p. 410-411, article : « Justice ». Filmographie Filmographie • Section spéciale, de Costa-Gavras, 1975 • Nuit et brouillard (film). Lien externe • Le témoignage d’un jeune communiste de Clermont-Ferrand traduit devant la Section spéciale (http:/ / www. fndirp. asso. fr/ les policiers de petain. htm). Au fond, Julien Guyomar, Devant Jean Bouise, à droite Claude Piéplu. A BIENTOT à L’ETOILE !!!!