Dossier de présentation

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Dossier de présentation
DOSSIER PÉDAGOGIQUE
AVEC LE SOUTIEN DE LA FONDATION JULIUS BAER
FELLINI, LA GRANDE PARADE
TABLE DES MATIÈRES
INFORMATIONS PRATIQUES
3
SPÉCIAL ENFANTS
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Federico Fellini, mars 1955
Collection particulière
MUSEE DE L’ELYSEE
T + 41 21 316 99 11
UN MUSEE POUR LA PHOTOGRAPHIE
F + 41 21 316 99 12
18, AVENUE DE L’ELYSEE
[email protected]
CH–1006 LAUSANNE
WWW.ELYSEE.CH
TABLE DES MATIERES
CHRONOLOGIE
5
FELLINI EN QUELQUES MOTS
7
EXPOSER LE CINEMA
8
L'EXPOSITION PAS A PAS
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2
INFORMATIONS PRATIQUES
Heures d’ouverture
Le Musée de l’Elysée est ouvert du mardi au dimanche de 11 h à 18 h,
ainsi que les jours fériés
Adresse
18, avenue de l’Elysée, 1014 Lausanne
T + 41 21 316 99 11
F + 41 21 316 99 12
E [email protected]
www.elysee.ch
Transports
bus n°4 et n°8, Montchoisi / Musée Olympique ; n°2, Croix-d’Ouchy ;
n° 25, Elysée. Métro M2, Délices.
Visites
L’entrée au musée est gratuite pour les élèves et leur enseignant/e.
Ce dernier bénéficie de la gratuité s’il souhaite préparer sa visite.
Ce dossier est téléchargeable sur www.elysee.ch, rubrique médiation culturelle.
Des visites commentées – en français, allemand ou anglais – sont proposées
aux groupes (maximum 25 personnes).
La visite est facturée CHF 60.- (au lieu de 85.-) pour les écoles. Prière de
s’inscrire à l'accueil 10 jours à l’avance, par téléphone au 021 316 99 11 ou par
e-mail à l’adresse [email protected]
Visites Guidées
Dimanche 3 juillet 16 h
Visite guidée par un guide du musée
Dimanche 10 juillet 16 h
Visite guidée par un guide du musée
Dimanche 17 juillet 16 h
Visite guidée par un guide du musée
Dimanche 7 août 16 h
Visite guidée par un guide du musée
Dimanche 14 août 16 h
Visite guidée par un guide du musée
Conférences
CHF 15.- / 5.Dimanche 19 juin, Salle Lumière, 16 h
Cycle "Histoire de la photographie en 10 leçons"
Luc Delahaye
par Radu Stern
Dimanche 26 juin, Salle Lumière, 16 h
Cycle "Histoire de la photographie en 10 leçons"
Barbara Kruger
par Radu Stern
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La photographie en questions
Posez vos questions, le responsable des activités pédagogiques
se tient à votre disposition
Samedi 2 juillet, 16 h
SPÉCIAL ENFANTS
En famille au musée
Pendant que les parents visitent l'exposition, les enfants la découvrent à
travers des propositions ludiques.
Dimanche 3 juillet
Dimanche 10 juillet
Dimanche 17 juillet
Dimanche 7 août
Dimanche 14 août
16 h
16 h
16 h
16 h
16 h
Stages pour enfants
Jeux d'images
Les 5, 6, et 7 juillet 2011 de 14 h à 17 h
Une exploration ludique du monde de l’image photographique pour les enfants de 6 à 12 ans.
Le stage se déroule sur les trois jours, sur inscription uniquement
Prix ; 10 CHF pour les trois jours
Inscriptions et contact
Radu Stern
021 316 99 11
[email protected]
Rédaction du dossier
: Radu Stern, responsable des programmes éducatifs
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CHRONOLOGIE
1920. 20 janvier
Naissance de Federico à Rimini.
1927
Fugue de l'internat pour rejoindre le cirque
du clown Pierino.
1930
Suit les cours du lycée Jules-César.
1937
Publie ses premières caricatures.
1938
S'inscrit à la faculté de droit de l'université de
Rome, mais il ne suit pas les cours.
1939
Commence à collaborer au hebdomadaire
satirique Marc'Aurelio. Rencontre avec Ettore
Scola.
1941-1943
Ecrit des sketches pour la radio.
1942
Débute comme scénariste pour le cinéma.
Rencontre avec Giulietta Masina.
1943, 30 octobre
Mariage avec Giulietta Masina.
1945
Collabore au scénario de Rome ville ouverte de
Roberto Rossellini.
1946
Co-scéenariste et assistant de Roberto Rossellini
sur Paisa.
1947
Rencontre Marcello Mastroianni.
1950
Les Feux du music-hall, avec Alberto Lattuada.
1953
Les Vitelloni, obtient le lion d'argent à Venise
1954
La Strada, oscar du meilleur film en langue
étrangère.
1957
Les Nuits de Cabiria, oscar du meilleur film en
langue étrangère. Giulietta Masina, prix
d'interprétation féminine au Festival de Cannes
pour le rôle de la prostituée Cabiria.
1960
La Dolce Vita, palme d'or au Festival de Cannes
et oscar pour les meilleurs costumes.
1963
Huit et demi, grand prix du Festival de Moscou.
1969
Satyricon.
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1972
Fellini Roma.
1973
Amarcord, oscar du meilleur film étranger.
1976
Le Cassanova de Fellini
1980
La Cité des femmes.
1983
Et vogue le navire.
1986
Ginger et Fred.
1987
Intervista, prix du 40ème anniversaire du Festival
de Cannes.
1990
La Voix de la lune.
1993
Oscar d'honneur à Hollywood pour l'ensemble de
son œuvre.
1993, 31 octobre
Décès de Federico Fellini à Rome.
2003
Un musée Fellini ouvre à Rimini.
2009
Exposition Fellini, la grande parade au Musée du
Jeu de Paume, Paris.
2011, 6 juin
Vernissage de Fellini, la grande parade, au
Musée de l'Elysée.
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FELLINI EN QUELQUE MOTS
ème
Autodidacte, Federico Fellini a eu beaucoup plus d'influence sur le cinéma du 20
siècle que bien de
réalisateurs issus des plus réputées écoles de cinéma du monde. Auteur d'un œuvre impressionnant,
vingt-quatre longs-métrages, dont de nombreux chefs-d'œuvre, comme La Strada, La Dolce Vita,
Satyricon ou Et vogue le navire, croulant sous les prix et les honneurs, Fellini fait partie du club très
restreint de réalisateurs qui ne sont pas contentés de faire des films à succès, mais ont créé des univers
cinématographiques personnels. Le sien est tellement personnel, tellement singulier que son nom de
famille a donné naissance à un adjectif pour le désigner, celui de fellinien.
Devenu presque un éponyme, l'adjectif est aussi utilisé de plus en plus aussi en dehors du monde du
cinéma pour décrire des situations qui ressemblent aux scènes de rêve éveillé des films du Maître.
Parfois, à tort, à l'instar d'ubuesque ou de surréaliste, il est associé à des exubérances démesurées, à des
excentricités sans bornes et même à des orgies.
Même si certains de ses films ont plus que cinquante ans, ils n'ont pas perdu une miette de leur intérêt,
car Fellini continue à être un des cinéastes les plus actuels. En effet, la filmographie de Fellini est une
quête continuelle pour trouver une nouvelle manière de raconter une histoire en images et, surtout, une
préoccupation constante de repenser le langage cinématographique. L'obsession avouée du Maestro a
été celle de trouver quelle était la nature propre, l'essence de l'image filmique :
Arriver une bonne fois à l'essence dernière du cinéma, à ce qui, selon moi, est le film total : faire d'un
film un tableau. Si quelqu'un se place devant un tableau, il peut avoir une jouissance complète et
interrompue. S'il se place devant un écran, un film, non. Tout est dans le tableau, il suffit de le regarder
pour l'y découvrir. Le film est un tableau incomplet ; ce n'est pas le spectateur qui regarde, c'est le film
qui se laisse regarder par le spectateur. En voulant se rapprocher le plus possible du film total, Fellini n'a
cessé d'interroger le mode de formation des images, leur origine profonde et leur complexe et
compliqué rapport avec la réalité. Pour comprendre d'où viennent les images, le cinéaste n'a pas hésité à
se soumettre à une longue psychanalyse et, les clefs de lecture de ses rêves ainsi obtenues, il les intègre
dans ses productions. Ainsi, Fellini se soucie peu d'une "vérité" brute, immédiate, ayant peu de
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signification et s'oriente vers une réflexion poussée sur l'interprétation que le cinéma ne peut pas éviter.
Le but de sa vie : comprendre les mécanismes de l'illusion cinématographique afin de nous régaler avec
des films qui incorporent des images de rêve, mais qui sont, comme il le dit lui-même : des images qui
sont plus vraies que la vérité.
EXPOSER LE CINEMA
Faire entrer le cinéma dans le musée n'est pas une opération banale. La légitimité même de la démarche
a été mise en cause. Pour certains, une exposition du cinéma serait un non-sens car, disent-ils, le cinéma
1
ne s'expose qu'en tant que le film est projeté dans une salle. A leurs yeux, toute exposition de cinéma
ne peut être que très impure, parce qu'on y montre des œuvres cinématographiques qui ne sont que des
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extraits ou des détails et qui, de plus, sont des duplications. En effet, à la différence d'une exposition de
peinture, dans laquelle les œuvres sont présentées en leur totalité, dans une exposition de cinéma on ne
peut que présenter des extraits de films, or une citation ne peut donner qu'un aperçu partiel d'une
œuvre ! Dans l'exposition, le visiteur ne peut avoir qu'au mieux une succession des fragments qui, même
s'ils sont bien choisis, ne remplaceront jamais la confrontation avec la totalité du film en question.
Finalement, le meilleur lieu pour comprendre un film ne serait-il la traditionnelle salle de cinéma ?
3
Nonobstant ces arguments, l'exposition de cinéma est à la mode. Après la photographie, le cinéma est
entré de plein pied parmi les arts visuels et, par conséquent, a sa place de droit dans la salle d'exposition.
De plus en plus, la salle de projection perd son monopole d'espace privilégié pour montrer le cinéma.
Toutefois, l'exposition du cinéma reste problématique, au point de constituer un des enjeux curatoriaux
les plus actuels. Comment faire co-exister dans le même espace muséal des extraits de films avec
d'autres types d'images ? Comment concilier l'attrait des images en mouvement par rapport aux images
fixes ? Comment maîtriser le rapport entre ce qui est cinématographique et le "non filmique" ?
1
Dominique Païni, "Visiter l'histoire de l'art du film ?", 1895 Mille huit cent quatre-vingt-quinze, Revue de l'association
française de recherche sur l'histoire du cinéma, No. 41, 2003, p. 40.
2
Id.
3
Voir le numéro spécial "Images mouvantes : entre la salle de cinéma et l'espace de l'exposition. Une tentative d'état des
lieux" de la revue Pratiques. No. 20, 2010.
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Pour Sam Stourdzé, le commissaire de l'exposition Fellini, La grande parade, l'exposition du cinéma est
un des défis les plus stimulants. Récidivant après une précédente exposition dédiée à Charlie Chaplin –
Chaplin et les images, présentée en 2006 au Musée de l'Elysée – Sam Stourdzé refuse
les solutions simplistes, comme celle, facile, consistant à montrer les cent cinquante meilleures
photographies de Fellini. Fruit de quatre années de recherches, l'exposition évite toute hagiographie et
joue sur une saturation visuelle proche de l'esprit fellinien, en présentant plus de quatre cents
documents très variés, la plupart inédits. Au lieu de répertorier les films de Fellini, l'exposition renonce à
la chronologie et permet un parcours libre du visiteur, à qui il est proposé une immersion individuelle
dans l'univers fellinien. Déambulant à sa guise, il découvre les associations d'images, parfois
surprenantes, qui permettent de comprendre les mécanismes créatifs de Fellini. Conscient que la
production du sens est donnée par la relation avec le contexte, le commissaire a voulu présenter le
cinéma en train de se faire, qui enrichit notre vision du cinéma déjà fait, les séquences célèbres, mais
aussi leurs origines, les sources d'inspiration fellinienne : la caricature, les bandes dessinées, l'imagerie
populaire, la publicité, le roman photo, la presse illustrée, le monde du cirque, la télévision et aussi, tout
simplement, la richesse visuelle de la rue italienne. A tout ceci, il faut ajouter, bien sûr, les propres
fantasmes du Maître, ses rêves, qu'il a magnifiquement dessinés. Toute une diversité d'images fixes est
donc mise en dialogue avec les images animées.
Cependant, l'espace de l'exposition n'est pas seulement visuel, mais aussi sonore. Sur les traces de
Fellini, qui soignait particulièrement le son de ses films, Sam Stourdzé a voulu créer une expérience
auditive étonnante, en décalant parfois le son et l'image. Le tout pour arriver à une relecture de l'œuvre
du grand maître, étiquetée un peut trop rapidement comme baroque ou néo-baroque, mais qui se
révèle résolument moderne.
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L'EXPOSITION PAS A PAS
Le titre de l'exposition a été inspiré par la présence récurrente des parades dans la création fellinienne,
qui peut être considérée comme une "grande parade".
Organisée thématiquement, l'exposition est structurée autour de quatre sujets principaux : La culture
populaire, Fellini à l'œuvre, L'invention biographique et La cité des femmes.
1, La culture populaire
La caricature.
Federico Fellini, Caricature d'Italo Roberti, 1938
Collection Federico Fellini, Rimini
Cette première section, présentée dans les premières salles du musée, est consacrée aux sources
d'inspiration de Fellini. Dans sa jeunesse, le premier gagne-pain de Fellini a été la caricature. Il a publié
ses dessins dans des journaux satyriques comme Marc'Aurelio et Travasso. Pendant l'été 1944, il ouvre
même une boutique de caricatures, le Funny Face Shop, ayant comme clients les soldats de l'armée
américaine. Vus rétrospectivement, les débuts de caricaturiste de Fellini annoncent déjà la prédilection
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du maître pour les personnages pittoresques, truculents, cocasses ou tragiques, mais presque toujours
avec des traits psychologiques exacerbés.
Brunella Bovo, Le Cheik blanc, 1952
Photographie d'Osvaldo Civirani
Courtesy Cineteca di Bologna
Le ciné-roman et le roman-photo
Une autre source d'inspiration ont été les ciné-romans et les romans-photo, dont les Italiens étaient très
friands. Le deuxième film de Fellini, Le Cheik blanc (1952), réalisé avec Tullio Pinelli, raconte le voyage de
noces à Rome d'un jeune couple provincial. La mariée, Wanda, échappe à son mari pour se rendre
auprès du Cheik blanc, le héros de son roman-photo favori et découvre le monde fascinant du spectacle.
Dans cette œuvre déjà, Fellini mélange les différents mondes et les niveaux de réalité, ce qu'il fera
souvent dans sa création.
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Mandrake et la bande dessinée
Fellini a été un grand amateur de comic strips : de très courtes bandes dessinées. Parmi elles, sa favorite
était celle créée en 1934 par Lee Falk, ayant comme personnage principal le magicien Mandrake.
Maintes fois, Fellini a voulu porter les aventures de Mandrake à l'écran, sans réussir.
Toutefois, pour le numéro spécial de Vogue de décembre 1972,
Fellini crée un roman-photo avec Mandrake incarné par Marcello
Mastroianni. La star, vieillie, apparaîtra à nouveau dans le rôle de
Mandrake dans Intervista (1987).
La passion de Fellini pour les bandes dessinées a été présente toute
sa vie. Un projet de film, plusieurs fois commencé et finalement
abandonné, Mastorna, est devenu une bande dessinée, signé par
Fellini et publiée par Vogue en décembre 1972.
Mandrake, mai 1972
Collection particulière
Le rock'n'roll
A la fin des années 1950, la jeunesse italienne se passionne pour le rock'n'roll. Fellini fait entrer le rock
dans ses films, en demandant à un chanteur inconnu de chanter dans La Dolce Vita (1960). L'inconnu
deviendra Adriano Celentano ! Plus tard, le hard rock sera présent dans La cité des femmes (1980) et
dans Ginger et Fred (1986).
Le cirque et le music-hall
La fascination de Fellini pour le cirque date de sa jeune enfance quand, dit-on, il aurait fugué attiré par
un cirque. J'ai regardé le chapiteau comme une usine de prodiges, un lieu où s'accomplissaient des
choses irréalisables pour la majeure partie des hommes. Je veux dire, enfin, que ce type de spectacle
fondé sur l'émerveillement, la fantaisie, la grosse plaisanterie, la fable, l'absence de significations
intellectuelles est justement le spectacle qui me convient. Le fantasque de l'univers fellinien doit
beaucoup au monde plein de paillettes du cirque et du music-hall.
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Fellini, c'est moi
Très attentif aux détails, Fellini surveille personnellement le casting des figurants pour ses films.
Recrutés par une petite annonce, tous les candidats sont passés en revue par le Maestro en personne :
Federico Fellini est prêt à rencontrer tous ceux qui veulent les voir…Tous les fous de Rome arrivent et la
police avec eux…J'en vois mille pour en mettre deux dans mon film, mais j'assimile tout. Il conserve les
photos de tout le monde et les classe soigneusement dans une photothèque personnelle des gueules
felliniennes.
Souvenirs d'enfance
Les souvenirs d'enfance réapparaissent parfois dans les films
de Fellini. Un des plus marquants est celui d'un poissonlune, véritable monstre marin, mesurant trois mètres de
long et pesant plus d'une tonne, qui s'est échoué sur la
plage de Rimini quand Fellini avait quatorze ans. Le Maestro
va reprendre l'épisode dans la scène finale de La Dolce Vita,
en s'inspirant de la couverture de La Domenica del Corriere
du 29 avril 1934. Dans le film, l'évocation du monstre marin
dépasse l'anecdotique et devient hautement symbolique de
la monstruosité du monde.
LaTribuna Illustrata, 23 septembre 1928
Collection particulière
Fellini et l'actualité
L'actualité immédiate représente pour Fellini une source d'inspiration inépuisable. Il s'intéresse au
phénomène des apparitions mariales. En 1958, la Madone apparaît à deux enfants dans la région de
Terni et l'événement sera repris dans La Dolce Vita. Ce qui intéresse Fellini n'est pas tant l'événement en
soi que son traitement médiatique, sa transformation en spectacle.
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Un autre épisode qui avait fait scandale, le strip-tease de l'actrice Aiché Nanà, un soir de novembre 1858
à Rugantino, une boîte de nuit chic, est repris dans La Dolce Vita, dans la scène du strip-tease de l'actrice
Nadia Gray.
er
La célèbre scène inaugurale du film est aussi inspirée d'un fait d'actualité : le 1 mai 1956, un
hélicoptère atterrissait Piazza del Duomo à Milan pour transporter une statue de Christ au Vatican.
Paparazzo et les paparazzi
Tazio Secchiaroli et Luciano Mellace photographiant une manifestation anti-américaine
Piazza Colonna, Rome, 17 juin 1952
Collection Christophe Schifferli, Zurich
A part l'adjectif "fellinien", Fellini est à l'origine d'un autre éponyme, paparazzi, du nom du personnage
Paparazzo dans La Dolce Vita. Il représente une nouvelle catégorie des photographes, ceux qui volent les
images pour la presse people.
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Fellini, la télévision et la publicité
Pour Fellini, la télévision, surtout celle privée, n'est qu'un instrument d'abrutissement de la population.
Sa médiocrité la rend très différente du cinéma : Pour moi, la télévision n'a rien à voir avec le
cinéma…La télévision est un appareil ménager, elle ne peut pas restituer les images d'un authentique
cinéaste. Ginger et Fred (1986) est une acerbe parodie de la publicité télévisuelle. Le film est truffé des
faux spots publicitaires. A nouveau, Fellini se réfère à l'actualité immédiate : les années 1980 connaissent
la privatisation de chaînes publiques en faveur de l'empire berlusconien.
Afin de montrer le caractère inauthentique de la télévision, Fellini fait paraître dans le film un grand
nombre de sosies de personnages célèbres : Woody Allen, Brigite Bardot, Marcel Proust ou Franz Kafka.
2. Fellini au travail
Fellini acteur
Parfois, Fellini n'hésite pas de passer de l'autre côté de la caméra, Dans Le Miracle (1948) de Roberto
Rossellini, il joue le rôle du vagabond, faisant ainsi sa première apparition au cinéma. Dans Fellini Roma
(1972), le Maestro réapparaît à l'écran, cette fois-ci sous sa vraie identité, accompagnant l'actrice Anna
Magnani, qui lui lance la fameuse réplique : Ciao Federico, va te coucher…
Fellini, Rota et la musique
Toutes les musiques des films de Fellini ont été créées par Nino Rota.
Fellini apprécie tout
particulièrement l'humilité du compositeur, sa capacité de faire une musique "extrêmement
fonctionnelle". Pour le Maître, la musique de film n'est qu'un "élément marginal secondaire", le canal
principal de communication étant l'image.
La direction d'acteurs
Les films de Fellini sont à l'opposé du théâtre filmé. L'accent est toujours mis sur l'image. Dans la
direction d'acteurs, Fellini met l'accent sur les émotions, qui sont visualisées. L'importance des dialogues
est moindre et la prise de son ne se fait qu'en post-production : J'introduis les dialogues dans le film
après le tournage. L'acteur joue mieux ainsi, n'ayant pas le souci de se souvenir du texte. Parfois, Fellini
utilise des voix différentes qui, d'après lui, collent mieux au personnage que la voix de l'acteur qui joue.
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Le travail d'écriture
Le réalisateur affirme craindre le scénario qui reste odieusement indispensable. Pour tous ses films, Fellini
choisit les scénaristes parmi ses copains : Tullio Pinelli, Ennio Fiaiano, Bernardino Zapponi ou Brunello
Rondi. Le Maestro a besoin d'une osmose presque totale, d'une complicité de camarades d'école, pour
pouvoir travailler avec quelqu'un. La collaboration de Pier Paolo Pasolini au scénario des Nuits de Cabiria
(1957) finit par une profonde amitié entre les deux.
Le costume, reflet du personnage
Le maquillage et le costume ont une importance
énorme pour Fellini, car ils aident à mettre en
évidence la psychologie de la personne. Le travail
commence par les gribouillages de Fellini même, pour
qui le dessin reste un moyen d'expression plus
immédiat que la parole.
sommaires
passent
entre
Ces esquisses très
les
mains
des
ses
collaborateurs : le décorateur, le costumier et le
maquilleurs, qui vont les affiner. Son décorateur et
costumier préféré, Piero Gherardi, qui a travaillé plus
de vingt ans avec Fellini, a reçu deux oscars pour les
costumes de La Dolce Vita et de Huit et démi (1963).
Pina Gualandri, Essai de costume pour le rôle de la
prostituée Mathilde, Les Nuits de Cabiria, 1957
Courtesy Cineteca di Bologna
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3. La cité des femmes
Fellini, cinéaste catholique ?
La Strada (1954) représente un tournant dans la création fellinienne. L'abandon évident du néoréalisme,
soutenu par l'église lui attire les foudres d'une gauche qui l'accuse d'ignorer les réalités socioéconomiques du pays, le taxe d'escapisme et l'affuble de l'étiquette de cinéaste catholique. Délaissant la
lutte des classes en faveur du destin individuel, Fellini crée dans les années 1950 des "films de la
rédemption" : La Strada, Il Bidone (1955), et Les Nuits de Cabiria. Les trois films ont en commun la
même quête de la délivrance de l'âme grâce à "une force irrésistible et providentielle, innée en nous".
Obsessions
En recoupant les physiques et les comportements de certains personnages féminins, on peut arriver à
déceler certaines obsessions chez Fellini, Le Maestro semble intrigué par les nymphomanes, comme
Saraghina de Huit et demi et Volpina d'Amarcord (1973). Physiquement, il est attiré par les très grosses
poitrines, comme celle de la buraliste d'Amarcord ou la fermière de La Cité des Femmes (1980).
Sex-symbols
Parmi les sex-symbols du moment, Fellini choisit Anita
Ekberg. Miss Suède en 1950, cover girl, elle débute dans
le cinéma. Les contemporains lui trouvaient une beauté
surhumaine. Son partenaire Bob Hope a dit : Anita
Ekberg ? C'est à ses parents qu'il faudrait donner le prix
Nobel d'architecture !
Anita Ekberg, Couverture de Tempo, 29 février 1958
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Prostituées
La psychologie des prostituées intéresse Fellini, qui consacre un film à ce sujet, Les Nuits de Cabiria. Pour
le cinéaste, la prostituée est le contrepoint essentiel de la mère à l'italienne. On ne peut concevoir l'une
sans l'autre. Et tout comme notre mère nous a nourris et habillés, de même, je parle pour ma
génération, la putain nous a initiés à la vie sexuelle, avec la même inéluctabilité.
Histoire d'affiches
Il est intéressant de comparer les affiches italienne, française et américaine de Fellini Roma. Détournant
le mythe de la fondation de Rome raconté par Tite-Live, la première affiche la louve est remplacée par la
prostituée Lupa (la Louve), qui aurait élevé Romulus et Remus. L'affiche française présente une belle
femme nue en tant que nourrice, sans que Romulus et Remus soient présents. Enfin, l'affiche américaine
est la seule ou la louve est un animal.
Casanova
Fasciné par les femmes, Fellini s'intéresse naturellement au
processus de séduction. Etrangement, Fellini ne connaissait
l'histoire de Casanova quand il a signé le contrat du film. Il
n'aiment pas le personnage : Casanova ? Je le déteste…Le
mâle italien dans sa version la plus trister, un lâche, un
fasciste…Casanova est un super vitellone, qui plus est
antipathique. Néanmoins, Casanova tel qu'il ressort du film est
un personnage on ne peut plus fellinien.
Donald Sutherland et Leda Lojodice,
Le Casanova de Fellini. 1976
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Fellini et son double
Fellini et Marcello Mastroianni eurent une relation très proche. Certains ont dit même que Mastroianni
serait le double de Fellini à l'écran. Dans Huit et demi (1963) Mastroianni joue le personnage d'un
réalisateur en mal d'inspiration qui ressemblait beaucoup à Fellini lui-même. En revanche, dans Blocnotes d'un cinéaste (1969) et Intervista, Mastroianni joue son propre rôle, pièce maîtresse de la pratique
fellinienne du film sur le cinéma.
La construction d'un mythe
Anita Ekberg et Marcello Mastroianni, La Dolce Vita, 1960
Il est intéressant de disséquer la réalisation d'une des scènes les plus célèbres de la création
cinématographique de Fellini, celle d'Anita Ekberg se baignant dans la fontaine de Trevi. Le Maestro
s'est inspiré des photographies de Pierluigi et publiées dans Il Tempo en septembre 1958.
Dans La Dolce Vita, l'actrice se baigne en robe de soirée, sous les yeux de Marcello Mastroianni. Prises en
utilisant un angle décalé, les photographies de promotion du film ont essayé de donner l'illusion d'un
baiser des deux monstres sacrés, dont les lèvres ne se sont jamais effleurées à l'écran.
Dans Intervista, Anita Ekberg et Mastroianni, vieillis, regardent la fameuse séquence du film, une
confrontation avec leur image de stars et, simultanément, avec leur jeunesse passée.
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4. L'invention biographique
L'univers fellinien entretient une relation complexe avec la réalité. Le cinéaste n'hésite pas à se mettre en
scène et utilise sa propre biographie dans ses films. Mais il s'agit d'une biographie qui n'est pas que
factuelle. Certaines séquences sont ce que Fellini appelle des visions, des images inspirées par des
souvenirs d'enfance, mais aussi par ses fantasmes et/ou ses rêves.
Au début des années 1960, le Maestro s'intéresse sérieusement à l'œuvre de Carl Gustav Jung et
commence une longue psychanalyse avec Ernst Bernhard. Ce dernier lui demande de dessiner ses rêves.
Fellini suit le conseil avec assiduité. Il ne s'agit pas de croquis sommaires, mais de merveilleuses gouaches
peintes très soigneusement, qui nous offrent de possibles clés pour comprendre ce mélange entre le
rêve et la réalité exprimé par l'adjectif de fellinien.
Pour approfondir le sujet :
Sam Stourdzé, Fellini-La grande parade,
Paris : Editions Anabet ; Jeu de Paume, 2009
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