ivoirier - Institut National des Métiers d`Art

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ivoirier - Institut National des Métiers d`Art
IVOIRIER
IVOIRIER
MÉTIER
Les métiers d’art de la tabletterie consistent en la fabrication et la restauration
d’objets de petite taille réalisés en matière rare et précieuse, et notamment en
matière protégée par la « Convention de Washington » sur la protection des
espèces en voie d’extinction et notamment de l’ivoire. La réalisation de ces objets
luxueux et raffinés requiert un savoir-faire pointu. La plupart des techniques de
tabletterie a ainsi abouti à la spécialisation des artisans selon le type d’objets
réalisés et souvent selon la matière dont ils sont constitués et dont le maniement
est très spécifique. En effet, au Moyen-âge, la tabletterie concernait la fabrication
des tablettes à écrire, formées d’un côté d’ivoire, de bois, de corne, ou de métal
sculpté et de l’autre de cire sur laquelle on pouvait écrire à l’aide d’un « style ». Ce
savoir-faire a conduit certains artisans à se spécialiser sur le travail de l’ivoire.
Ainsi « l’ivoirier » fut-il le tabletier spécialisé, tour à tour ou spécifiquement, dans
le façonnage (forme « plates »), le tournage (formes en « volume ») ou la
sculpture sur ivoire. Il faut néanmoins noter qu’aujourd’hui, le tournage et la
sculpture sur ivoire sont des spécialités à part entière et non le fait des seuls
tabletiers.
Les objets façonnés serviront au plaquage ou à la tabletterie (plaquettes, cadrans,
touches de piano etc), les objets tournés seront par exemple des boules de billard,
des flûtes ou pièces d’instruments de musique, des pièces de jeux, des boutons,
des pommeaux de cannes… Les sculptures auront quant à elle tout d’abord été
religieuses (Christs de crucifix notamment) puis tout à fait profanes (bateaux,
statuettes, bustes, sculptures abstraites etc.). Un certain degré d’industrialisation
aura lieu aux XVIIIème et XIXème siècles, les Christs (notamment de Dieppe) étant
reproduits « en série », les sculpteurs suivant scrupuleusement les cotes ; à la
Couture-Boussey, se furent les flûtes et touches de piano et à Ezy-sur-Eure, les
peignes d’ivoire et de corne ainsi que le travail de l’os. Néanmoins de nos jours, la
sculpture sur ivoire sera la plupart du temps, du fait de sa rareté et de son
originalité (plus aucune pièce de série), assimilée au domaine artistique.
L’ivoirier maîtrise le débitage de l’ivoire ou « dentine », cette matière organique
et minérale d’origine osseuse, dure et dense, qui compose les dents ou défenses
d’animaux. L’ivoire a en outre la spécificité d’être constitué de fibres en longueur
ainsi que d’un creux conique se prolongeant jusqu’à l’extrémité de la défense par
une petite cavité appelée le « cœur », dont l’ivoirier devra tenir compte afin
d’optimiser les pièces à réaliser. Il devra également s’accommoder de la forme de
la défense en arc de cercle. Il pourra ainsi dégager des parties pleines utilisées
pour la sculpture ou le tournage, et des parties plus plates pour des assemblages,
des reliefs ou le débit de plaquettes. Pour cela il utilise la scie à eau afin de ne pas
altérer la matière (échauffement, accumulation de matière) : à ruban, circulaire
ou alternative.
Les professionnels pourront également être amenés à utiliser des matériaux tels
que bois des cervidés, dents d’hippopotames ou de morses ou autres défenses de
mammouths. Ils travailleront en outre parfois des matériaux plus accessibles
comme l’os de bovins d’origine française (fémurs, plus rarement tibias) : dégraissé
à l’eau bouillante, l’os est libéré des « boulacs » (extrémités arrondies) puis
découpé à la scie alternative sous jet d’eau.
Les « sculpteurs » sur ivoire et autres matériaux équivalents (bois de cervidés,
dents et défenses) utilisent les mêmes outils et méthodes. Tout comme la
sculpture sur bois, le sculpteur travaille la matière en ronde-bosse ou en relief : il
détache à la gouge des copeaux dans le sens du fil afin de dégager la forme
générale de la sculpture, puis effectue les détails et les finitions aux grêles (limes)
et burins d’ivoirier (grattoirs) grâce à un mouvement de va-et-vient délicat vers
l’avant. Il devra être attentif à ne pas altérer la matière qui marquera très
facilement les faux mouvements. La plupart de ses outils seront fabriqués par ses
soins (burins, chevilles, grêles etc.).
Il peut également utiliser des outils mécaniques tels que la fraiseuse d’ivoirier. La
sculpture peut alors être poncée et polie à la brosse et à la ponce mouillée en
prenant soin de ne pas lisser les formes et reliefs. Elle aura ainsi un brillant
unique sans besoin de verni.
Le « graveur » sur ivoire et autres matériaux d’origine animale (dont la corne, l’os
ou la nacre) utilise également des outils similaires afin de décorer les pièces :
onglets, échoppes, rifloirs et compas à griffer. Il peut renforcer les tonalités des
gravures par application d’encre (techniques appliquées aux anciens cadrans
solaires par exemple). Ce métier n’existe plus à titre autonome mais est inclus
dans le savoir-faire de l’ivoirier ou dans celui de graveur sur métal.
Le « tourneur en ivoire » utilise le tour afin de réaliser des pièces en volume et
symétriques qui peuvent prendre un nombre infini de formes : spirales, boules,
étoiles, socles, coupes, bougeoirs etc.
Le travail de la graine de corozo, surnommée « ivoire végétal », a donné quelque
espoir aux artisans pour palier à la raréfaction de l’ivoire animal. Mais la petite
taille de cette graine et ses altérations avec les années la rendent difficilement
exploitable et l’on voit son abandon progressif des ateliers.
Lors de la restauration de pièces anciennes, l’ivoirier devra remplacer les parties
manquantes ou abîmées en utilisant un ivoire approprié (grain, couleur). Il
effectue également le suivi et les réparations sur les pièces modernes qu’il aura
réalisées pour des particuliers.
L’ivoire étant parfois utilisé dans les métiers tels que coutelier, joaillier,
marqueteur, orfèvre ou pipier, les fiches présentant ces métiers pourront être
consultées au centre de ressources ou sur le site Internet de l’INMA. De même la
technique du maniement du tour à bois pourra également être consultée dans la
fiche métier « Tourneur sur bois » et celle de la gravure dans la fiche métier
« Graveur sur métal ».
FORMATIONS
Aucune formation spécifique n’est dispensée en France pour les ivoiriers du fait
du coût important des matières premières et de leur technicité. Les techniques de
travail de l’ivoirier pourront néanmoins être abordées dans les domaines
spécifiques tels que coutellerie, joaillerie, marqueterie, ou orfèvrerie qui utilisent
parfois cette matière première et les techniques du maniement du tour dans le
domaine du tournage ou de la sculpture sur bois. L’apprentissage ne pourra ainsi
se faire qu’exclusivement en atelier d’ivoirier. Rares sont malgré tout de nos jours
les ivoiriers à former des apprentis.
Retrouvez toutes les adresses des organismes de formations initiales
et professionnelles continues dans les métiers d’art en consultant
notre base de données sur notre site Internet : http://www.institutmetiersdart.org/
Retrouvez le schéma des formations aux métiers d’art sur notre site
Internet : http://www.institut-metiersdart.org/
Sur le site http://www.moveart.org/, retrouvez toutes les adresses
des centres de formations en Europe.
ENVIRONNEMENT
Une corporation de tabletiers s’est développée en France dès le Moyen-âge. La
tabletterie est quant à elle beaucoup plus ancienne : les aiguilles en os
préhistoriques pouvant être considérés comme des objets de tabletterie et les
gallo-romains pratiquants également l’industrie de la tabletterie à grande échelle.
Une spécialisation s’est rapidement effectuée par région : à Méru (dominoterie,
éventails et boutonnerie), à Thiers (tournerie et coutellerie), à Nogent
(coutellerie), dans le Jura (tabletterie, tournerie, bijouterie et piperie), à Dieppe
(ivoirerie), dans l’Oise (brosserie), dans la vallée de l’Hers (peignerie)…
Paris et Dieppe furent dès le XVIème siècle deux pôles du travail de l’ivoire : l’un
grâce à un marché de l’art florissant, l’autre grâce à sa situation remarquable de
port de commerce. Les ivoiriers avaient ainsi des approvisionnements en
provenance directe des bateaux revenant des côtes africaines les soutes chargées
de défenses d’éléphants.
Il existe aujourd’hui peu d’ivoiriers, la plupart envisageant en outre de prendre sa
retraite sans succession. Un ivoirier en activité pourra désormais travailler pour
l’industrie du luxe (joaillerie, orfèvrerie, lutherie, art de la table…) ; dans la
restauration pour les musées nationaux à condition d’être diplômé d’Etat ou pour
les musées régionaux ; mais surtout dans la création ou la restauration pour une
clientèle privée (collectionneurs, antiquaires, particuliers) désirant voir sauvées
des pièces d’orfèvrerie anciennes (fabrication de nouveaux manches et anses),
joaillerie ou tout autre objet d’art en ivoire et autres matières similaires. Quelques
noms d’ivoiriers et sculpteurs : Asselin, Bosse, Colette, Hamel, Heckmann,
Migeon Père et Fils, Meyer, Ragault…
En Europe, il faut noter l’importance de la ville d’Erbach, en Allemagne, réputée
dans le travail de l’ivoire : ivoiriers, formations et musée de l’ivoire
(Elfenbeinmuseum).
L’approvisionnement en matière première est le point clé pour la survie des
ivoiriers car leur matériau de travail est extrêmement protégé. Le travail de
l’ivoire est effectivement soumis à la Convention sur le commerce international
des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) appelée
également « Convention de Washington ». Des contrôles sont dans ce cadre
effectués lors de l’utilisation de l’ivoire. Les artisans doivent par exemple signaler
leurs stocks qui devront obligatoirement être constitués de matériau prélevé dans
la nature avant la Convention en 1976. Seule l’importation est interdite en
France. Un certificat accompagnera dès lors tout objet en ivoire. Les ivoiriers
s’approvisionnent en général auprès de quelques fournisseurs spécialisés en
matières premières rares ou auprès du grand public qui détient encore des stocks
personnels d’ivoire (défenses d’éléphants datant de l’époque coloniale etc.). Deux
défenses d’éléphant permettent à un ivoirier de travailler pendant environ une
année, une tonne suffirait ainsi à l’ensemble de la profession.
Les stocks d’ivoire diminuent donc inéluctablement sans pouvoir être renouvelés
et condamnent ainsi la profession d’ivoirier particulièrement pessimiste face à son
avenir. Une situation dramatique malgré des ventes considérables en provenance
d’Afrique (cent dix tonnes d’ivoire mises en vente par lots de 10 à 50 tonnes)
achetées par les marchés asiatiques et notamment chinois et japonais dont la
tradition est forte (et protégée) dans la réalisation de statuettes en ivoire
(statuettes japonaises « okimono » et « netsuke »). Malheureusement, les artisans
français n’ont pas accès à ces stocks pour cause de volumes trop importants et de
réglementation drastique à l’importation.
L’association COMURNAT avait été créée en France afin de protéger et faire
valoir les droits des artisans dont la survie dépend de l’utilisation de ces matières
vivantes. Elle n’est aujourd’hui plus en activité.
ORGANISMES PROFESSIONNELS
La Chambre Syndicale de l’Ivoire garde une activité limitée exclusivement aux
professionnels consommateurs d’ivoire brut.
Chambre Syndicale de l’Ecaille et de l’Ivoire
5 avenue de la Trémouille, 94100 Saint Maur
[email protected]
Créée durant l’entre-deux-guerres, la Chambre Syndicale de l’Ivoire avait pour
mission de rassembler l’ensemble des professionnels de l’ivoire : importateurs
(profession qui a disparu), artisans ivoiriers (sculpteurs et tourneurs sur ivoire) et
distributeurs (boutiquiers qui diffusaient le travail des artisans, profession
devenue rare). Elle regroupe aujourd’hui l’ensemble des consommateurs
d’ivoire brut : tabletiers, ivoiriers, couteliers etc. ce qui représente une trentaine
de professionnels. Organe de liaison entre les différents artisans, elle les informe
des actualités et défend leurs intérêts auprès des pouvoirs publics.
Syndicat national des sculpteurs et plasticiens (SNSP)
11, rue Berryer, 75008 Paris.
Tél. : 01 42 89 34 14.
[email protected]
http://www.sculpteurs-plasticiens.org/
Le Syndicat national des sculpteurs et plasticiens représente, auprès des pouvoirs
publics, l'ensemble des sculpteurs et plasticiens quel que soit leur matériau
d'élection : bois, métal, papier, plastique, pierre, terre, textile, verre et également
ivoire. Certains de ses services sont exclusivement réservés à ses membres. Il
informe sur l'ensemble des données relatives à la profession : métier, formation,
environnement économique, débat d'actualité, législation, événement, adresses
utiles. Il a une mission de conseil fiscal et juridique auprès de ses adhérents. Un
bulletin "Sculpteurs" est également édité.
SALONS ET MANIFESTATIONS
Journées européennes des métiers d’art - JEMA,
Annuel, avril
Institut National des Métiers d’Art - 23, Avenue Daumesnil, 75012 Paris.
Tél. : 01 55 78 85 85. Fax : 01 55 78 86 17.
http://journeesdesmetiersdart.fr/
Les Journées Européennes des Métiers d’Art (JEMA), initiées et coordonnées
par l’INMA, portent pour ambition la valorisation du patrimoine immatériel et
vivant. Elles fédèrent et mobilisent l’ensemble des acteurs du secteur. Les
professionnels des métiers d’art sont au cœur de l’événement : portes ouvertes
d’ateliers et de centres de formation, expositions, rencontres, démonstrations de
savoir-faire, circuits de découverte, etc. Elles ont lieu tous les ans, le premier
week-end d’avril, pendant trois jours et dans toutes les régions de France.
CONCOURS
Prix Avenir Métiers d’Art - INMA
Annuel, remise de prix : date variable.
Remise des dossiers : 31 mai de l’année en cours.
Institut National des Métiers d’Art - 23, Avenue Daumesnil, 75012 Paris.
Tél. : 01 55 78 85 85. Fax : 01 55 78 86 17.
[email protected]
http://www.institut-metiersdart.org
Les Prix Avenir Métiers d’Art – INMA, organisés par l’Institut National des
Métiers d’Art, avec le soutien de la Fondation Michelle et Antoine Riboud et de
Banque Populaire, sont destinés à mettre en valeur de jeunes talents, futurs
acteurs de la vie économique dans ces métiers de passion et de création. Ils ont
pour objectif d'encourager les élèves de la filière Métiers d’Art, du niveau CAP
au niveau Bac +2 (niveaux V, IV et III) en mettant en lumière leur créativité et
leur maîtrise technique.
Le 1er Prix de chaque région et de chaque niveau reçoit un chèque d’une valeur
de 250€ (pouvant être complété par des partenaires régionaux) ainsi qu’un
diplôme. Les lauréats régionaux bénéficient également des avantages du CLUB
Avenir : séjour de deux jours à Paris en vue du jury national, rencontres avec des
professionnels, visite de musées, ateliers, etc.
Chaque premier prix national reçoit une dotation de 4500€. La dotation des 2èmes
Prix s’élève quant à elle à 2000€ et à 1000€ pour les 3èmes Prix.
Les lauréats du Prix bénéficient également d’un accompagnement privilégié de
l’INMA dans la suite de leurs parcours ainsi que d’un appui en termes de
communication et de promotion.
SOURCES D’INFORMATION
ORGANISME
Les Grands Ateliers de France
http://www.grandsateliersdefrance.com
Créée en 1993, l’association est une sélection de Maisons de tradition du haut
artisanat, dans le domaine des arts, des arts décoratifs et des arts de vivre et
notamment dans le domaine de la tabletterie et de la sculpture sur ivoire.
LIEUX RESSOURCES
Outre le musée du Louvre qui accueille une collection d’ivoires remarquable,
deux musées font référence dans le secteur :
Musée de la céramique et de l’ivoire à Commercy,
7, avenue Carnaco, 55200 Commercy.
Tél. : 03 29 92 04 77.
Le musée de l’ivoire présente une collection importante d’ivoires européens et
asiatiques du XIXème siècle ainsi que les aspects techniques (propriétés du
matériau, gestes techniques etc.) et les enjeux de son utilisation.
Cité de l’ivoire à Dieppe,
Château-musée de Dieppe, rue de Chastes, 76200 Dieppe.
Tél. : 02 35 06 61 99. Fax : 02 32 90 12 79.
[email protected]
http://www.musees-haute-normandie.fr
La collection du château-musée est l’une des plus prestigieuses collections
européennes d’ivoires, présentant environ mille pièces datant du XVIème siècle
au XIXème siècle.
SITES INTERNET
http://www.cites.org
Le site de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et
de flore sauvages menacées d’extinction présentant les objectifs, le
fonctionnement et les textes officiels de la CITES.
http://www.developpement-durable.gouv.fr
Le site du ministère de l’Ecologie permettant, entre autres informations, de
trouver les coordonnées des Directions régionales de l’environnement (DIREN)
auprès desquelles les autorisations (utilisation, vente ou achat) pourront être
demandées. Les ivoiriers pourront également effectuer leur requête auprès de la
préfecture de leur département.
http://www.maitresdart.com/francis_migeon-41/presentation.html
Le site propose une vidéo présentant les techniques du travail du maître d’art
Francis Migeon.
Les listes d’informations sont proposées à titre indicatif et ne sauraient
prétendre à l’exhaustivité.
POUR EN SAVOIR PLUS…
Consultez le Centre de ressources de l’Institut National des Métiers
d’art, une ressource unique sur les métiers d’art :
- Des bases de données documentaires sur l’actualité des métiers
d’art et des bases de données sur les formations, accessibles sur son
site internet.
- Un fonds documentaire spécialisé : revues, dossiers, ouvrages et
plus de 750 films sur ce secteur.
Institut National des Métiers d’art,
23 avenue Daumesnil, 75012 Paris. Tél. : 01 55 78 85 85
Ouvert du mardi au vendredi de 14 à 18 heures
[email protected]
http://www.institut-metiersdart.org/
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