Lettre CNDC au Maire d`Angers à télécharger

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Lettre CNDC au Maire d`Angers à télécharger
 A l’attention de Monsieur Frédéric Béatse, Maire de la Ville d’Angers Le 27 avril 2012
Monsieur le Maire, Nous sommes artistes, pédagogues, chercheurs, critiques et étudiants, de toutes générations et de toutes nationalités, concernés par le projet du CNDC. Nous apprenons qu’un changement de projet à la tête du CNDC est imminent et qu’aucune décision n’a été rendue publique à ce jour. Nous vous interpellons pour vous signifier notre désaccord quant à cette décision si elle venait à confirmer la non poursuite des axes de formation mis en œuvre ces dernières années. Nous sommes convaincus que la poursuite de ce projet pédagogique est adéquate à l’évolution du paysage de la danse contemporaine actuelle. Nous souhaitons attirer votre attention sur quelques points essentiels, voire fondamentaux qui accompagnent la pensée et la réalisation de ce qu’elle met en œuvre à Angers et qui n’ont probablement pas été portés à votre connaissance. Souhaité par le Ministère de la culture et la ville d’Angers, et créé il y a 35 ans, le CNDC est le seul centre chorégraphique doté d’une école supérieure entièrement consacré à la danse contemporaine en cohérence avec l’évolution de la création chorégraphique. Au cours de son histoire, l’école a fait ses révolutions, ses remises en question successives pour essayer d’être au plus près des évolutions contemporaines. La dernière mue importante a été opérée sous la direction d’Emmanuelle Huynh, guidée, pour l’élaboration de son projet, par les travaux et les réflexions opérés au sein du groupe des Signataires du 20 août. C’est ainsi que cette école supérieure et son centre chorégraphique se sont ouverts aux autres champs de l’art, garantissant par leurs apports un geste défait d’une doxa imposée, d’une unique influence technique et d’une pédagogie hiérarchisée. L’écart vertigineux que nous pouvions constater jusqu’à la fin des années 90 entre la scène contemporaine et la formation des interprètes s’est peu à peu comblé sous cette direction permettant à cette école de s’imposer comme l’une des plus structurantes et en cohérence avec le paysage des écoles internationales. Le CNDC a la particularité pleine de sens d’être dirigée par une artiste à la tête de ces deux entités. Un créateur en articulation permanente entre le public et le plateau, entre son activité sur le terrain local et en dialogue avec les artistes du monde entier stimulant une jeune génération avide d’être considérée comme sujet actif de son devenir artistique. Durant neuf années, le CNDC a accueilli des artistes, des pédagogues, des penseurs, des historiens et des étudiants pour penser collectivement ce qu’est être un artiste contemporain en danse, laissant le champ ouvert à des esthétiques très diverses. Le projet d’Emmanuelle Huynh a dès le départ manifesté une volonté de penser l’espace chorégraphique comme un espace esthétique et politique tout en réinterrogeant une histoire de la danse du point de vue de la modernité. Le CNDC Angers est donc devenu naturellement un point de convergence dans l’imaginaire de la communauté artistique et chorégraphique en France et dans le monde. Venir au CNDC, c’est venir y puiser des informations, se nourrir, remettre en question les pratiques, rencontrer d’autres artistes, trouver de l’exigence. Les programmations de chacune des saisons organisées par Emmanuelle Huynh tentent d’être un enjeu pour le public angevin tout en maintenant une exigence de ressources pour les étudiants. Nourris de cette culture chorégraphique, les étudiants issus des deux formations depuis 2004 peuplent un vaste champ chorégraphique dans le monde : du Brésil à l’Autriche, du Japon à l’Iran. Les ancrages et le développement de ces artistes participent aujourd’hui de sa réputation et reconnaissance internationales à travers le monde. Mettre un terme à ce projet tel qu’il est défini aujourd’hui (le centre chorégraphique, les activités pédagogiques – incluant tout à la fois l’école, la sensibilisation des publics et les ouvertures studios pour ne citer que les plus évidentes) sous la direction de l’équipe actuelle, briserait un mouvement dans son élan dont il n’a pas été encore fait ni la réelle critique, ni l’évaluation à même de définir ce que pourrait être un cahier des charges renouvelé ou ambitionné, voire de rupture. Empêcher le développement du projet jusqu’à son terme, c’est aussi congédier tous les artistes qui ont pris part à cette histoire. Il nous apparaît que cette rupture, si elle a lieu, peut être régressive si sa principale visée est de convoquer au travers d’une seule technique, un registre esthétique, voire un nom. Nous respectons ce qu’a déposé le courant formel attaché à Merce Cunningham dans la danse contemporaine, mais en faire le principal moteur pédagogique d’une école et d’un centre chorégraphique ne nous paraît ni opportun, ni approprié. Notre danse ne s’est jamais construite autour de la figure du maître, mais plutôt par un état d’esprit au travail, une pensée en actes, qui ne peut pas se focaliser autour d’un seul héritage. Au regard de tous ces faits, vous comprendrez, Monsieur le Maire, notre désarroi concernant votre actuelle décision. Il ne s’agit pas simplement d’une direction qui serait remplacée, mais tout un projet humain, politique et collectif porté par des artistes responsables d’une histoire dont ils sont les acteurs engagés. En espérant que vous prendrez en compte toutes ces considérations, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Maire, l’expression de nos respectueuses salutations. Marianne Baillot, artiste chorégraphique, Paris (FR)-Porto (PT)
Yaïr Barelli, artiste chorégraphique, Paris (FR)
Stéphane Bouquet, écrivain, Paris (FR)
Yoann Bourgeois, artiste de cirque, Grenoble (FR)
Alain Buffard, chorégraphe, Paris (FR)
Emmanuelle Chérel, historienne de l’art contemporain, Nantes (FR)
Fabienne Compet artiste chorégraphique et enseignante, Nantes (FR)
Jocelyn Cottencin, artiste visuel, Rennes (FR)
Palmina d’Ascoli, responsable du Pôle Résidence, Institut Français, Paris (FR)
Sophie Delpeux, historienne de l’art, Paris (FR)
Olga de Soto, artiste chorégraphique, chorégraphe et chercheuse en danse, Bruxelles (B)
Claire Denis, réalisatrice, Paris (FR)
Aurore Després, enseignante, chercheur en esthétique de la danse, université de Franche-Comté (FR)
Eric Didry, metteur en scène, Paris (FR)
Basile Doganis, réalisateur, Paris (FR)
Nicolas Floc’h, artiste visuel, Paris (FR)
Pierre-Jean Galdin, directeur de l’Ecole supérieure des beaux-arts Nantes Métropole (FR)
Miguel Garcia Llorens, artiste chorégraphique, Paris (FR)
Laurence Gateau, directrice du Fonds régional d’art contemporain des Pays de la Loire,
Carquefou (FR)
Deborah Hay, chorégraphe, Austin, Texas (USA)
Jan Kopp, artiste visuel, Berlin (ALL)
Anne Koren, danseuse et enseignante, Williamsburg (USA)
Célia Houdart, écrivain, Paris (FR)
Isabelle Launay, auteur et chercheur en danse, Paris (FR)
Faustin Linyekula, danseur et chorégraphe, Kisangani (RDC)
Arnaud Meunier, metteur-en-scène, directeur du CDN de Saint-Etienne, (FR)
Alain Michard, artiste et plasticien, Rennes (FR)
Ko Murobushi, artiste chorégraphique, Tokyo (JP)
Lisa Nelson, artiste chorégraphique, Vermont (USA)
Julie Nioche, artiste chorégraphique, Paris (FR)
Marie Orts, artiste chorégraphique, Paris (FR)
Daniel Perrier, artiste visuel, Paris (FR)
François Piron, curateur, Paris (FR)
Sylvain Prunenec, artiste chorégraphique, Paris (FR)
Lia Rodrigues, chorégraphe, Rio de Janeiro (BR)
Lina Schlageter, artiste chorégraphique, Paris (FR)
Robert Steijn, performer, Amsterdam (NL) – Vienne (AUT)
Gilles A. Tiberghien, philosophe, Paris (FR)
Loïc Touzé, danseur et chorégraphe, Nantes (FR)
Jean-Baptiste Veyret-Logerias, artiste chorégraphique, Paris (FR) – Berlin (ALL)
Kimiko Watanabe, agent artistique, Tokyo (JP)
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