Fiche du film

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Fiche du film
Fiche n° 1410
LEA
Du 3 au 9 AOUT 2016
1H35
De Marco Tullio Giordana
Avec Vanessa Scalera, Linda Caridi, Alessio Praticò
Lea a grandi dans une famille criminelle en Calabre. Le père de sa fille Denise
est aussi membre de la mafia. Cependant elle aspire à une vie différente pour sa
fille, sans violence, peur ni mensonge. Elle décide de coopérer avec la justice et
s'enfuit sous le régime de protection des témoins... Inspiré de l'histoire de Lea
Garofalo, le combat d'une femme pour échapper à la mafia.
Qui est Lea Garofalo ?
Lea, icône féministe ?
Marco Tullio Giordana évoque le
rôle des femmes dans la mafia et
indique que celles-ci sont le pilier
d'un système bien huilé et qu'elles
possèdent le pouvoir de faire tomber
n'importe quel grande famille de la
pègre :"Dans les milieux de la
criminalité organisée, la femme
appartient au patron du clan. C’est
elle qui élève les enfants et
transmets les « valeurs » sur lesquels
repose la mentalité mafieuse. Quand
les femmes se soumettent à ce rôle,
la société mafieuse est à l’abri. Mais
quand une femme commence à
réfléchir à l’avenir de ses
enfants, qu’elle
refuse
qu’ils
deviennent des petits soldats du
boss,
ou
qu’elle
essaie
de s’émanciper, la crise du système
est irréversible. Je ne pense pas
qu’un homme aurait pu vivre la
même situation, la paternité est
liée à un sentiment plus culturel que
charnel ; pour une femme, l’instinct
maternel est très fort, comme un
instinct de survie qui la rend encore
plus forte et plus courageuse."
Lea Garofalo (incarnée à l'écran par Vanessa Scalera) était la compagne
d'un tueur lié à la 'Ndrangheta, la mafia calabraise, une des organisations
criminelles les plus redoutables d'Europe. La jeune femme souhaitait en finir
avec cette vie dangereuse et violente aux côtés du gangster confirmé Carlo
Cosco ; elle a donc décidé de collaborer avec les autorités afin de livrer tout
ce qu'elle savait sur le milieu. Elle n'a malheureusement pas pu terminer son
combat, disparaissant dans la nuit du 24 au 25 novembre 2009, tuée à l'âge
de 35 ans par son ex petit ami. Selon la police, elle aurait été kidnappée,
interrogée et assassinée avant que son corps ne soit dissout dans l'acide. Lea
avait décidé de changer de vie en 1996, quand son criminel de compagnon
s'était fait arrêter par la police avec pertes et fracas devant sa fille, Denise
: "La scénariste Monica Zapelli, avec qui j’avais écrit mon film Les Cent
pas, m’a proposé d’écrire un film sur ce sujet. Le producteur Angelo
Barbagallo et la Rai m’avaient assuré le respect absolu de la vérité. La force
et l’importance de raconter cette histoire, ainsi que cette confiance m’ont
décidé à me lancer dans le projet", explique Marco Tullio Giordana.
Telle mère, telle fille
La fille de Lea, Denise, a hérité du courage de sa mère, continuant le combat de
cette dernière contre la famille mafieuse calabraise responsable des malheurs de
sa famille. Elle a ainsi été un témoin clé lors du procès amenant l'ex compagnon
de Lea Garofalo et ses complices à purger une peine de prison à vie. Denise vit
désormais sous protection policière constante : "Après la mort de Lea Garofalo,
l’Etat italien a déclenché pour Denise un système de protection conséquent,
constitué d’une équipe policière, mais aussi de psychologues et assistants
sociaux. Personne ne doit connaître son identité actuelle, ni son visage. On a été
donc en contact épistolaire, via son avocat Enza Rando, ainsi que Don Luigi
Ciotti, fondateur de Libera, l’association qui a défendu et soutenu Lea et Denise
Garofalo depuis le début. Je sais que Denise a vu le film et en a été troublée, ce
qui était prévisible. Pour elle, il ne s’agit pas d’une fiction, mais de sa propre vie
et celle de sa mère. Je ne m’attendais pas à avoir son propre ressenti, ni ne
souhaitais la solliciter. Mais je sais qu’elle pense que cette histoire devait être
racontée
et
à
travers
le
cinéma,
toucher
le plus grand nombre. Cela me suffit. On m’a dit que quand Denise était petite,
sa mère lui avait montré Les Cent pas. Quand je l’ai appris, j’ai compris
combien il était important pour moi de faire ce film", relate Marco Tullio
Giordana.
Un réalisateur engagé
Marco Tullio Giordana est un spécialiste des récits tirés d'histoires vraies tragiques liées à des intrigues criminelles et
politiques. On lui doit par exemple Une histoire italienne, long-métrage racontant l'histoire du célèbre couple à la vie comme
à l'écran, Osvaldo Valenti et Luisa Ferida, durant la seconde guerre mondiale. Ils avaient été deux stars de ce cinéma des
"téléphones blancs" que le fascisme avait encouragé. Dans ces films rassurants et bien-pensants, ils avaient toujours joué le
rôle des méchants, troublant l'Italie petite-bourgeoise avec des personnages qui se reflétaient aussi dans la conduite très libre
de leur vie privée. Ils ont été exécutés par les partisans à la fin de la guerre. Giordana a également mis en scène Piazza
Fontana, relatant cette fois l'attentat à la bombe de la Piazza Fontana à Milan le 12 décembre 1969. Ce drame fit 16 morts et
88 blessés, marquant notamment le début des "années de plomb italiennes." L'Italien est aussi auteur des Cent pas, film
dénonçant le pouvoir de la mafia, de Nos meilleures années, fresque de plus de 6 heures qui parcourt plus de 40 ans d'Histoire
italienne, ou encore Une Fois que tu es né, qui porte sur l'immigration clandestine.
Au coeur de la mafia calabraise
Marco Tullio Giordana est un expert en matière de criminalité italienne et concernant le fonctionnement des différents types
de mafias qui composent la grande botte ; de la mafia sicilienne à la camorra napolitaine en passant par 'ndrangheta
calabraise, chaque organisation criminelle a ses propres codes : "La ‘ndrangheta a gardé la famille comme noyau, les affiliés
ne sont pas des associés, mais des frères, fils, cousins, neveux. S’il faut faire des alliances et des fusions, cela se passe à
travers des mariages. C’est pour cela qu’elle reste une des organisations criminelles des plus impénétrables. Et elle réussi a
contaminé l’Italie du Nord et l’Europe par ses disponibilités d’argent courant provenant du trafic de la drogue. C’est une des
raisons pour les lesquelles le sujet du film a une résonnance forte dans l’actualité."
********
Film historique sur la mafia ou drame familial ? LEA oscille entre les deux genres pour montrer les intrications du crime
organisé avec le quotidien d’une famille « ordinaire. » Les affranchis présentés dans le film sont très éloignés des gangsters
de Scorsese ouCoppola. Ils préfèrent porter des bleus de travail que des costumes trois pièces, et prennent pour couverture un
garage ou la location d’un immeuble pourri à Milan plutôt qu’un grand casino tape-à-l’œil. Mais s’ils sont normaux en
surface, les mafiosi de LEAn’en sont pas moins cruels. Obéissant au code immuable de la vendetta, les criminels mettent audessus de toute Loi, la suprématie de la famille en tant que clan.
Léa refuse que sa fille grandisse dans ce milieu anxiogène, elle tentera alors de le fuir pour la protéger. Ce sont bien deux
visions de la loyauté familiale qui s’opposent dans le film de Marco Tullio Giordana.
Cette opposition suffit en soi à susciter l’intérêt du spectateur, mais pourtant mon implication fut fluctuante durant le
visionnage. Le film essaye de couvrir sur trois décennies l’évolution de cette femme hors-norme. Pour palier à la fois au côté
répétitif de la fuite de Léa et à la nécessité de couvrir beaucoup d’évènements infimes mais nécessaires, le réalisateur emploie
un montage très sec. Ce rythme est assez artificiel pour retranscrire l’atmosphère sensée être pesante, mais se relève efficace
pour maintenir un intérêt le temps de retrouver une situation véritablement prenante. Selon moi, LEA souffre des mêmes
défauts consubstantiels à presque tous les films « tirés d’histoires vrai » : le récit qui nous est proposé, véridique, heurte notre
sens commun de la dramaturgie. LEA comme bien d’autres biopics, échoue à rendre palpitant un enchaînement de péripéties
pas forcément cohérent avec le thème central du film. Le film est prisonnier de son argument de véracité.
Pour donner à LEA une ampleur de fiction, Marco Tullio Giordana semble avoir sur-investi le traitement de ses
personnages. Plaçant dans leur bouche des dialogues percutants, souvent d’une intelligence comique malgré le tragique de la
situation (ils ont tous un formidable sens de la répartie), choisissant une direction d’acteurs proche du théâtre populaire, le
réalisateur de LEAflirte avec des modes antiques, voire peut-être une réminiscence de l’opérette italienne. Sans y voir un
dispositif frontal, j’ai ressenti le découpage de chaque scène comme si elle avait été écrite pour le théâtre. Pourtant le
réalisateur a apporté une grande attention aux détails : costume, accessoires, coupe de cheveux… On croit sans problème à
l’existence réelle de ces personnages, même s’ils sont interprétés avec un mélange troublant de panache et d’extroversion.
Thomas Coispel
3 bonnes raisons de voir ce film :


Son histoire, tirée d'un fait divers marquant de la lutte contre la mafia.
Un portrait des méthodes de la mafia à faire froid dans le dos.

Le symbole de rébellion qu'est devenue Léa.
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