Dossier pédagogique Fil de Faire 2
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Dossier pédagogique Fil de Faire 2
DOSSIER PEDAGOGIQUE « FIL DE FAIRE » Il faut repeindre la pièce. Il a tout apporté : un échafaudage, une bâche, des pots de peintures, des pinceaux, des éponges, des cordes …Bref, un beau chantier en perspective. Mais, patatras ! Le peintre se prend les pieds dans la bâche, les pinceaux volent, les éponges changent de couleur, la bâche se transforme en décors, l’échafaudage éclate et devient tour de piste ! Ce tourbillon burlesque entraîne notre bricoleur vers l’univers du cirque : personnage maladroit et emprunté, il se révèle acrobate, jongleur et magicien. Pris à son propre jeu, il va même se fabriquer pour les besoins d’un numéro, un partenaire en corde armée: manipulation et jeux d’acteur tisseront une véritable relation entre ses deux personnages. Peu de paroles, des onomatopées et de la musique ponctueront ce spectacle sensible et visuel, sorte de rencontre d’un Pinocchio avec le cirque de Calder. Ecriture et mise en scène : Pierre DUMUR Interprétation : Jean-Marc HOVSÉPIAN Interprétation (danse du zèbre) : Bertrand JAMES et Bruno CERATI Création lumière : Bertrand JAMES Décor : Bruno CERATI Photo : Antoine DUBROUX Régie : Bertrand JAMES et Bruno CERATI Spectacle pour tous dès 2 ans. Jauge pour une séance jeune public 2 ans 6 ans : 100 personnes (80 enfants) La compagnie A Suivre est soutenue par le Conseil Général de Seine et Marne. NOTE D’INTENTION DE L’AUTEUR Lorsque Jean-Marc Hovsépian m’a demandé d’écrire un spectacle pour jeunes enfants sur le thème du cirque, j’ai tout de suite pensé au sculpteur Alexander Calder. Et plus précisément au cirque miniature qu’il a construit vers les années 1930 et que j’ai eu le plaisir de découvrir il y a quelques années lors d’une exposition à Beaubourg. Cette découverte m’a fait alors une forte impression : - deux cents personnages articulés - en fil de fer, bouts de ficelle, papier, carton, et autres ressorts - que Calder manipulait avec humour et dextérité - de ce génial bricolage c’est tout l’univers du cirque « Barnum and Bailey » qui jaillissait : nous entraînant vers un ailleurs, ces figurines nous faisaient oublier leur condition d’objet ; très vite nous nous retrouvions dans l’ambiance même du cirque : prouesses, sensations et émotions devant « l’équilibriste », « le dompteur » etc… Un trésor d’ingéniosité et de bricolage propre à stimuler l’imaginaire et réalisé à partir de trois fois rien ... Si cette image s’est imposée à moi lorsque j’ai pensé à un spectacle de cirque pour les toutpetits, c’est certainement parce que je trouve très impressionnant cette capacité qu’ont les tout petits - à donner vie aux objets qu’ils rencontrent - à détourner ces objets de leur fonction initiale pour leur attribuer un nouveau rôle dans leur monde imaginaire (un carton devient une cabane ou voiture …). Avec trois fois rien, les enfants – auxquels on laisse le temps de jouer librement et spontanément – déploient une grande créativité ; ils se créent un monde intérieur personnel dans lequel ils transposent des choses du monde réel, tout en sachant le distinguer de la réalité. Cette capacité à jouer avec le réel, les artistes la partagent avec les enfants. Calder avec son cirque recréé nous fait vivre des aller/retour entre réalité et imaginaire ; les matériaux qu’il utilise pour fabriquer ses personnages et décors sont, pour moi, une invitation à transformer, bricoler … en bref, à agir sur les choses qui nous entourent pour alimenter notre propre imaginaire et porter, finalement, un regard neuf sur du connu. J’ai donc eu envie de travailler dans un axe un peu semblable avec ce spectacle pour tout – petits : - partir d’une situation « ordinaire » qui nous entraîne ailleurs - prendre appui sur des choses connues, ou du moins dont l’évocation fait partie de notre patrimoine culturel « le cirque » et sa magie sous entendue. - utiliser pour cela des moyens adaptés à l’âge des enfants et faisant appel à des images connues ou vécues (peindre, jouer avec le papier, bricoler de la corde…) pour qu’ils aient la possibilité de se projeter ou de s’identifier . Les aspects sensoriels, qui auront donc une grande importance dans le spectacle, et une trame claire en quatre temps, le rendront facilement accessible : - premier temps : Découverte d’un personnage dans un univers quotidien : un peintre avec son matériel sur le point de démarrer son chantier - deuxième temps : Sa maladresse va transformer son univers, l’entraînant dans le monde de la prouesse - troisième temps : Rencontre avec la marionnette qu’il va fabriquer et naissance d’une relation, d’une complicité. - quatrième temps : Grand numéro d’illusion comique, transformation du peintre en zèbre et danse du quadrupède. Ce spectacle sera l’occasion pour nous de partager avec les enfants ce qui nous a fait rêver depuis longtemps - jusqu’à vouloir en vivre pour de vrai ! - la vie du cirque, mais aussi de les encourager à entretenir dans leur rapport aux objets et à la réalité, autre chose qu’un rapport de consommateur : jouer, créer, imaginer … pour agir sur notre environnement et pour trouver une liberté, une autonomie vis à vis de ses contraintes. Puisse ce spectacle être une petite pierre de l’édifice que chaque enfant se construit pour devenir un adulte responsable, critique et doué d’une approche sensible de la société. Pierre Dumur Contact Cie A Suivre… 01 64 20 47 23 www.compagnie-a-suivre.com Alexander Calder, sculpteur et peintre américain, est né à Philadelphie le 22 juillet 1898 et est décédé le 11 novembre 1976 d’une crise cardiaque, à New York où il était venu inaugurer une rétrospective de son œuvre. Fils de deux artistes, Alexander Calder est ingénieur de formation. Il est devenu célèbre grâce à ses mobiles – assemblages de formes animés par les mouvements de l’air – et ses stabiles. En 1923, il entre à l’Art Students League de New York. En 1924, il travaille comme illustrateur auprès de la National Police Gazette. En 1925, il réalise sur commande l’illustration des spectacles du cirque Ringling Bros et Bamum & Balley Il va alors se découvrir une fascination pour le thème du cirque qui débouchera sur son Cirque de Calder, exposé à Paris en 1926. Il s’installe en France en 1927 où il fabrique des jouets et donne des représentations avec son cirque de marionnettes, en fil de fer ainsi qu’en bois articulés. Il entre en contact avec des artistes de l’avant-garde artistique parisienne comme Jean Miro, Jean Cocteau, Man Ray, Robert Desnos, Fernand Léger, Le Corbusier, Théo Van Doesburg et Piet Mondrian en 1930 qui aura une grande influence artistique sur lui. Il abandonne la sculpture figurative en fil de fer qu’il avait pratiquée depuis 1926, pour adopter un langage sculptural entièrement abstrait. En 1931, il intègre le groupe Abstraction-Création qui se consacre à la non figuration. A la galerie Percier, il expose une série d’œuvres abstraites faisant référence au monde naturel et aux lois de la physique qui le gouvernent. Construites en fil de fer et en bois, la plupart de ces œuvres évoquent la disposition de l’univers. Il commence aussi à construire des sculptures composées d’éléments mobiles indépendants, entraînés par un moteur électrique ou par une manivelle manuelle. En 1932, il expose trente de ces sculptures qualifiées de mobiles par Marcel Duchamp marquant ainsi le début de sa carrière. En 1958, il réalise le mobile du siège parisien de l’UNESCO (Dix mètres de haut, deux tonnes d’acier noir, cinq bras) En 1962, il s’installe dans son nouvel atelier du Carroi, une conception très futuriste dominant la vallée de la Basse Chevrière à Sacré en Indre-et-Loire. Il n’hésite pas à offrir ses gouaches et de petits mobiles à ses amis du pays et fait même don à la commune d’un stable trônant depuis 1974 face à l’église : une anti-sculpture affranchie de la pesanteur. La majeure partie de ses stabiles et mobiles ont été fabriqués à Tours (Les Etablissements Biemont) dont, L’Homme, tout en acier inoxydable de 24 mètres de haut, commandé par l’International Nickel du Canada (INCO) pour l’Exposition Universelle de Montréal en 1967. LE CIRQUE DE CALDER La fascination d’Alexander Calder pour le cirque débute vers l’âge de vingt cinq ans, suite à la publication dans un journal new yorkais des illustrations du cirque Barnum et Balley, pour lesquels il avait un laisser-passer d’une durée d’un an. C’est en 1927, à Paris, qu’il créa le célèbre cirque miniature de ce film – des personnages en métal fin, articulés ingénieusement pour marcher comme des funambules, danser, faire de l’haltérophilie ou des acrobaties sur le ring. L’avant-garde parisienne s’est rassemblée dans l’atelier de Calder pour voir le cirque en action. Comme l’a remarqué le critique James Sweney, c’était « un laboratoire dans lequel il développa certaines des caractéristiques les plus originales de son œuvre future ». Il émane de ce film l’immense charme de Calder, filmant et travaillant avec de minuscules personnages, comme « Monsieur Loyal » pendant que sa femme actionne le gramophone dans les coulisses. Lorsque Calder commence ses premières silhouettes pour le cirque dans son très modeste atelier du 22 rue Daguerre, il est fasciné par les Frères Fratellini. Pour arrondir ses fins de mois, il fabrique des jouets. En présentant ses constructions à de possibles acheteurs. Il est amené à ébaucher de petites mises en scène, à passer progressivement de la présentation à la représentation, au spectacle. De 1926 à 1929, il improvise une multitude de personnage : voltigeurs, jongleurs, écuyères, clowns, trapézistes, dompteurs, avaleurs de sabre, équilibristes, danseuses, conducteurs de chars, cantatrices, brancardiers, chiens savants et toute une ménagerie de chevaux, lions, éléphants, otaries… En quatre ans, le cirque augmente considérablement. La troupe, près de 200 figurines, est au point et les numéros bien réglés. Le spectacle dure plus de deux heures avec entracte. Plusieurs dizaines de personnes y assistent, installées par Calder sur des bancs de fortune. Le plus petit cirque du monde a trouvé son public. « MESDAMES ET MESSIEURS, JE VOUS PRESENTE LE CIRQUE CALDER » Les représentations du cirque ne commençaient pas avant dix heures. Dans la maison se bousculait un public hétéroclite, bohême et scintillant, guindé et mal ficelé, parlant anglais, allemand, français et italien. (…) Sur l’appel d’un gong, le monde affluait aussitôt, cherchant la bonne place sur de véritables gradins disposés en amphithéâtre. Dans un angle, assis par terre les jambes écartées, équipé en joueur de base-ball, éclairé par un unique projecteur, Calder frappait le gong. Malgré le ventilateur qui tournait au-dessus de sa tête, il avait chaud. Il se leva et ôta le paillasson qui couvrait sa poitrine, déboutonna sa chemise, apparu mamelu, poilu et rosé, frappa dans ses mains, salua et repris sa place, bien calé dans son coin, gardant ses jambières de bois et ses énormes godasses, pendant que la société, smoking et guenilles mêlés, applaudissait tumultueusement à cette entrée. Calder fit coulisser plusieurs fois un petit rideau bleu, glissant sur un mince fil de fer, tendu à des crochets scellés dans le mur. Puis, il déroula, avec tout le rituel du cirque, un petit tapis jaune et, de biais sur lui, un tapis rouge. Le fildefériste fut particulièrement applaudi. Le ramassage du crottin du lion eut son succès habituel et le colloque des clowns provoqua l’enthousiasme délirant de la partie anglo-saxonne du public, ce colloque étant en « pur » américain. (…) On voyait dans la pénombre Tristan Tzara. A côté de lui, André Lhote répétait à tout le monde : C’est un enfant ce Calder, c’est l’enfant en soi, c’est l’enfant en l’homme, mon cher, tout le mystère de l’enfance ! L’enfant faisait justement signe aux musiciens d’arrêter leurs machines. De toutes parts on fit « chut ! ». Le tambour lui-même ne devait pas intervenir cette fois : pendant les essais de triple sauts périlleux, on n’entendrait que le seul bruit continu des cacahuètes écrasées entre les doigts. Deux chapeaux mexicains remplis de cette denrée circulaient sans cesse parmi les spectateurs. Il y avait un entracte de onze heures à minuit pour permettre à quelques personnes de venir après la sortie des théâtres et d’assister au plus beau. Calder passait l’entracte à faire l’installation compliquée des jeux icariens où un bonhomme, habilement manœuvré, devait être lancé dans le vide d’un trapèze à l’autre et s’accrocher à son partenaire après plusieurs pirouettes. Calder qui avait dépensé pour ce numéro une ingéniosité inouïe n’avait rien oublié, ni le filet tendu sous les trapèzes, ni le jeu des mouchoirs, ni le sac minuscule qui devait envelopper la tête du bonhomme pour le saut de la mort. (…) C’était la fin. Les gens repartaient sans se presser, échangeaient des compliments, louant le génie de Calder en termes élégants exaltants, graves et profonds. Michel Seuphor, dans son roman « Douce Provence » - 1941 -