Le Barzaz Breiz. Le Barzaz Breiz.

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Le Barzaz Breiz. Le Barzaz Breiz.
21/07/2013
Le Barzaz Breiz.
par Louis Elegoët
professeur d’histoire-géographie et de breton.
Natif de Saint-Méen, il est spécialisé dans l’étude
de l’histoire paysanne.
et
Yan Ber Premel
chanteur breton
Sommaire
Le Barzaz Breiz.......................................................................................................................................................................... 1
I.
Introduction : .................................................................................................................................................................... 1
II.
Le travail de collecte :.................................................................................................................................................. 1
III.
Accueil du Barzaz Breiz en France :............................................................................................................................ 2
IV.
Le Barzaz Breiz et son époque :................................................................................................................................... 2
V.
A-t-on résolu le problème du Barzaz Breiz ?:.............................................................................................................. 3
VI.
Conclusion :................................................................................................................................................................. 3
I.
Introduction :
C’est un livre de chants traditionnels, dont certains sont très anciens.
Certains y auraient vu un recueil de poésies historiques.
Il a été publié pour la première fois en 1839, sous le règne de Louis
Philippe, par Théodore Hersart de la Villemarqué, philosophe français
spécialiste de la culture bretonne.
La Villemarqué publie une nouvelle édition considérablement
augmentée en 1845. C'est dans cette édition qu'apparaissent les chants les plus fameux, « ceux qui
feront la gloire du recueil » (Gourvil). D’autres éditions verront le jour jusqu’en 1893.
II. Le travail de collecte :
De La Villemarqué a parcouru les campagnes à la recherche d’anciens chanteurs. Il recueillait
les textes et les chants qu’il notait au fil du chant.
De La Villemarqué a étudié au collège jésuite de Sainte-Anne d'Auray dès l'âge de dix ans
puis aux petits séminaires de Guérande et de Nantes. Il obtient le baccalauréat le 30 octobre 1833. En
1834 il se rend à Paris pour entrer à la faculté de droit, puis il se tourne vers les études médiévales et
bretonnes. Il étudie même le breton dont il n’a alors qu’une connaissance imparfaite.
Sa mère, Marie-Ursule-Claude-Henriette Feydeau de Vaugien l’avait initié aux études
historiques, et en particulier elle avait commencé à collecter des textes de la littérature orale bretonne.
De La Villemarqué avait à peine 24 ans quand il a publié le Barzaz Breiz.
Il comprend :
Des Gwerz (complaintes)
Des Sonioù (chants d’amour et de fêtes)
Des Kantikoù (légendes et chantes religieux)
Écoute : Marv Pontkalleg (La mort de Pontcallec)
(La conspiration de Pontcallec est rapportée dans un précédent compte rendu).
Dans ce chant, le marquis est célébré ; dans d’autres, au contraire, il était présenté comme
quelqu’un très dur avec ses gens.
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Écoute : Ar C'hakous (Le Lépreux ou le caquin)
On appelait alors « caquin » un lépreux ou un descendant de lépreux, même guéri.
Un lépreux déclare sa flamme à une jeune fille, qui, pour ne pas le décevoir, lui dit qu’elle
n’est pas belle….
Écoute : Kanaouenn an Anaon (Le chant des Trépassés)
Le 2 novembre, on faisait sonner le glas toute la nuit pour les âmes du purgatoire.
Dans le Barzaz Breiz, chaque poème est précédé d'une introduction historique et idéologique.
Pour écrire les musiques, les « amis » de La Villemarqué se sont inspiré des airs qu’il leur fredonnait
de mémoire, après avoir écouté les anciens.
Écoute : Dans un chant qui rappelle le VIème siècle, (l’époque de Clovis), on raconte que le vin
blanc nouveau est meilleur que le vin de mûres, le cidre et l’hydromel. On y fait allusion à des vols de
vins « de France » qui se passaient à Nantes, d’après les propos de Bretons qui y étaient allés faire les
vendanges.
Le XIVème siècle voit se produire de grands évènements : en France avec le début de la guerre
de 100 ans, et ici avec la guerre de succession de Bretagne entre deux prétendants au duché, Jeanne de
Penthièvre et Jean IV de Montfort.
Jean de Montfort a confié des postes importants à des Anglais ; les Bretons irrités le chassent
et il doit se réfugier en Angleterre. Plus tard, le roi de France Charles V confisque le duché et le
rattache à la France. Les Bretons ne l’acceptent pas et rappellent Jean IV de Montfort qui arrive sur un
bateau pavoisé de drapeaux blancs.
Cet épisode est repris dans un des chants du Barzaz.
III. Accueil du Barzaz Breiz en France :
L’œuvre a connu un succès d’estime important chez les lettrés en particulier dans les cercles
littéraires parisiens. « L’auteur croyait que ce ne serait qu’un coup de pistolet ; ce fut un coup de
canon dans toute l’Europe » écrivirent les critiques.
À cette époque, on commençait à recueillir des textes anciens de différentes régions, pour les
mettre en valeur. En 1852, Georges Sand écrivait :"Une seule province de France est à la hauteur,
dans sa poésie, de ce que le génie des plus grands poètes et celui des nations les plus poétiques ont
jamais produit : nous oserons dire qu'elle le surpasse. Nous voulons parler de la Bretagne. Mais la
Bretagne, il n'y a pas longtemps que c'est la France ». Elle a comparé un des chants du recueil, Le
Tribut de Nominoé, à l'Iliade d'Homère, jugeant même le chant breton supérieur au récit antique.
Il fut traduit en anglais en 1840, en allemand en 1841, puis dans beaucoup d’autres langues
dans le monde.
De La Villemarqué est maintenant reconnu comme un savant. En 1856 il devient membre de
l’académie des inscriptions et des belles lettres.
En Bretagne le livre est bien accueilli dans les milieux cultivés, mais cela ne représente que
peu de gens en tout, car plus de 60 % des bretons étaient alors analphabètes.
Écoute : Bosenn Elliant (La peste d’Elliant).
L’histoire se déroule au VIème siècle et 7 000 personnes seraient mortes de la peste.
Historiquement c’est très exagéré, même faux, mais la complainte possède une expression
intemporelle. Les gens ont toujours été désemparés face à cette maladie aux XIVème, XVème, et XVIème
siècles. Tout le monde se reconnaissait dans cette Guerz.
IV. Le Barzaz Breiz et son époque :
En Europe, depuis le début du XVIIIème siècle, naissait un mouvement en faveur des cultures
régionales, qui tendait à élever les récits au niveau littéraire.
En Bretagne, Jean François de Kergariou, Émilie de Saint Prie avaient commencé à collecter
de vieilles chansons et de vieux récits. La mère de la Villemarqué a initié son fils à ce travail.
Mais à partir de 1860, des contemporains ont commencé à critiquer le travail de La
Villemarqué.
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On lui reprochait d’avoir inventé de bout en bout un certain nombre de chants. On disait qu’il
ne connaissait pas le breton, qu’il avait écrit des chants en français et les avait fait traduire. On a
prétendu que ce sont d’autres personnes qui ont fait la récolte de récits à sa place.
Quelles étaient le raisons de telles critiques ? On était jaloux de la chance qu’avait eue l’auteur
de trouver des chants de grande qualité, chance que n’avaient pas eue ses contemporains à la recherche
du même but.
De La Villemarqué ne s’est jamais défendu.
V. A-t-on résolu le problème du Barzaz Breiz ?:
En 1960, Francis Gourvil, qui n’a jamais enquêté sur le terrain, soutient dans une thèse que de
La Villemarqué n’était qu’un usurpateur.
En 1970, un descendant, le général de La Villemarqué, a autorisé la consultation des archives
et des notes que Théodore Hersart de La Villemarqué a écrites entre 1833 et 1840 ; on y trouve les
écrits pris à l’écoute même des chants et des récits. Dans une thèse soutenue en 1974 et publiée en
1980, Donatien Laurent rejette en grande partie ces accusations en démontrant l'authenticité de la
matière de l'ouvrage grâce à la découverte par le général de La Villemarqué, en 1964, des carnets de
collectage de son ancêtre. En outre, des travaux d'universitaires et de linguistes ont démontré que
nombre des prétendues fautes de breton relevées par Francis Gourvil s'expliquaient parfaitement par
les traits dialectaux de la langue du sud de la Bretagne d'où étaient originaire La Villemarqué et les
chants incriminés (Gourvil étant natif du Nord-Finistère).
De La Villemarqué a bien fait son travail, et a eu la chance de faire de belles découvertes.
Il a quelques fois simplement changé ici ou là un mot ou une strophe, pour rendre le chant
plus explicite. Mais on ne pouvait pas lui reprocher de ne pas appliquer des méthodes critiques qui, à
l’époque, n’existaient pas. Des chants qu’on a prétendu avoir été inventés, sont en fait directement
inspirés de petits chants locaux.
Écoute : Ar Chouanted (Les Chouans) :
Une chanson à la gloire des Chouans. Le 16 juillet 1795, conduits par Tinténiac à la tête de
6 000 hommes, remporte une victoire sur les Bleus, à Koatlogen. Parmi eux, le jeune Julien
(Cadoudal) combat courageusement.
Écoute : Pardon Sant Fiacr (Le Pardon de Saint Fiacre) :
C’est le pardon de Saint Fiacre au Faouët. Un chanteur de plein vent harangue les passants qui
se réunissent autour de lui. Il raconte l’histoire de trois jeunes gens partis au pardon ; mais au retour,
deux d’entre eux tuent le troisième par jalousie. Ils étaient jaloux de la passion entre la victime et une
jeune fille, Marianna de Langonet.
La guerz aurait été composée pendant le règne de Louis XV (1710 – 1774).
VI. Conclusion :
Avec son Barzaz Breiz, de La Villemarqué a attiré l’attention de personnes lettrées sur la
Bretagne. Il a sorti de la tradition orale, une partie de l’histoire bretonne.
Les Bretons avaient conscience que par le biais de ces chants, qui se transmettaient de
génération en génération, c’est une partie de leur histoire qu’ils conservaient.
On peut se demander pourquoi quelques-uns de ces textes n’ont pas trouvé place dans les
livres scolaires.
Certains chants ou récits dateraient des XIème-XIIème siècles ; comment ont-ils pu traverser tant
de siècles sans être déformés ? On peut se poser la question de leur entière crédibilité, mais même si
des inexactitudes sont toujours possibles, il est évident que des personnes ont vraiment été désireuses
de transmettre, le plus fidèlement possible, leur histoire.
L'œuvre, devenue centrale dans la culture bretonne, est donc plus qu'un recueil poétique, un
document de musicologie de premier ordre, attestant de modes musicaux spécifiques aux sonorités
bretonnes. Le Barzaz Breiz a eu une grande influence sur beaucoup de chanteurs et musiciens bretons
et celtiques, tels qu’Alan Stivell, Tri Yann, Gilles Servat, Denez Prigent.
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