Le café à l`italienne, un art de vivre

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Le café à l`italienne, un art de vivre
Lignes de mire
Le Journal du Jura samedi 9 avril 2016
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LES NOUVEAUX ENTREPRENEURS/2 Il est Biennois, trilingue et vient de se lancer dans la torréfaction. Sa petite entreprise à peine
fondée, Fabio Fornaro fourmille d’idées pour promouvoir sa marque. Il projette d’ici peu d’ouvrir un bistrot au centre-ville
Le café à l’italienne, un art de vivre
JULIEN BAUMANN
PROFIL
«Il y a plus d’arômes dans le café
que dans le vin!» Fabio Fornaro
aime partager sa passion pour les
saveurs du café. A bientôt 40 ans,
ce père de famille a lancé sa propre entreprise de torréfaction artisanale. Le local de production
de Cocuma Caffè est installé depuis l’été dernier dans la zone industrielle de Brügg. Pour se démarquer, le Biennois fait de la
qualité une priorité absolue. «S’il
est mal préparé, le meilleur café du
monde ne sera pas bon.» Fabio
Fornaro ne badine pas avec cet
aspect sur lequel il dit ne faire
aucune concession.
Du choix des grains au tirage
du café, le moindre faux pas peut
tout faire capoter selon lui. Il sélectionne minutieusement le
café vert acheté à des microproducteurs d’Inde, d’Amérique du
Sud ou d’Afrique. Il privilégie ensuite la torréfaction lente pour
éviter l’acidité et révéler les arômes. Le traitement de la graine
ne fait pas tout. Réglage du moulin, qualité de l’eau, entretien de
la machine, rien ne doit être laissé au hasard.
1978 Fabio Fornaro naît à
Bienne, il y grandit et y fait sa
scolarité obligatoire.
1999 CFC de constructeur,
serrurier et ferblantier après un
apprentissage.
1999-2015 Diverses expériences
professionnelles dont postes à
responsabilités dans plusieurs
entreprises.
2015 Fondation de la Sàrl
Cocuma Caffè dont le siège est
à Brügg.
pas forcément de l’argent, mais un
petit geste. On pourrait m’autoriser par exemple à aller vendre mon
café avec une petite charrette dans
la rue.»
Pour faire grandir son projet,
Fabio Fornaro ne manque pas
d’idées. La plus concrète est l’ouverture prochaine d’un bistrot
au centre de Bienne, mais on
n’en saura pas davantage pour
l’instant. Il prévoit d’y installer
ses bureaux, son laboratoire et
d’ouvrir un bistrot et une boutique dédiés aux saveurs du café.
«Je pourrai organiser des dégustations», glisse-t-il en parlant de
ses futurs projets.
Trilingue, un atout
Ce souci du détail est un héritage familial. Les parents de Fabio Fornaro sont Italiens, pays
ou la préparation du café est élevée au rang d’art. L’espresso, précise-t-il, y est protégé par un label
aux critères stricts. «J’aimerais
importer cette culture du café ici.»
Pour atteindre ce but et se perfectionner, cet autodidacte, qui
teste et prépare ses produits au
préalable dans un laboratoire,
suit une formation en Italie afin
d’obtenir l’équivalent d’un master en testeur de cafés.
Fabio Fornaro a créé sa petite
entreprise sans avoir d’expérience professionnelle dans le
domaine. Titulaire d’un CFC de
serrurier-ferblantier, il a enchaîné les boulots durant une quinzaine d’années. Il a entre autres
travaillé dans un call-center, une
entreprise de fabrication de stores ou encore occupé le poste de
sous-directeur dans une boîte
active dans le domaine médical.
Sa propre plantation
Fabio Fornaro a fait de nombreuses expériences professionnelles avant d’investir dans son entreprise de torréfaction artisanale.
Se lancer à son propre compte
lui permet de changer d’air. «Je
ne fais pas ça pour l’argent, sinon
j’irais ailleurs, dans une grande
entreprise. Je le fais vraiment par
passion.» Seul maître à bord
pour l’instant, Fabio Fornaro a
misé gros. «J’ai investi tout ce que
j’avais, mais je sentais que je devais
le faire.» Sans vouloir articuler
de chiffres, l’entrepreneur dit
que les affaires se portent bien et
que sa production ne cesse
d’augmenter.
Pour trouver de nouveaux
clients, Fabio Fornaro possède
un atout de taille. Parfait trilingue, français, suisse allemand et
italien, il peut potentiellement
viser les quatre coins de la
Suisse. Il cite des partenariats à
Bienne, Soleure, Lausanne et
Zurich et dans des hôtels cinq
étoiles. L’entrepreneur est aussi
à l’affût des dernières évolutions
technologiques. Une boutique
en ligne est accessible et une ap-
PETER SAMUEL JAGGI
plication pour smartphone doit
bientôt voir le jour. Seule ombre
au tableau: un manque de soutien des autorités locales. «En
Suisse, ce n’est pas facile de se lancer. On a beaucoup de frais mais
peu de gens sont prêts à aider. Si je
réussis, je promets que je vais soutenir des start-up. Je ne demande
S’il ne manque pas d’ambition,
le Biennois n’est pas pour autant
un mégalo. «Le but n’est pas
d’avoir tous les restaurants de
Bienne. Il y a deux types de concurrences: celle qui est saine et
celle qui écrase tout. Certains cassent les prix et vendent à perte
pour attirer des clients. Je ne veux
pas le faire car si on fait tous notre
boulot correctement, il y a de la
place pour tout le monde.» Plus
tard, Fabio Fornaro projette de
vendre son café dans des petites
boutiques spécialisées. Il aimerait aussi pouvoir engager du
personnel et pourquoi pas acquérir sa propre plantation de
café. «Mais ça, c’est encore très
très loin.» }
www.cocumacaffe.com
Les Suisses grands consommateurs
CINQUIÈME D’EUROPE
Les Suisses aiment le café et font partie des plus grands consommateurs du continent avec 7,6 kilos par
année et par habitant selon les chiffres de 2014
publié par l’Organisation internationale du
café. Cela représente en moyenne plus de
1000 tasses par tête. Seuls la Finlande, les pays
scandinaves et l’Autriche ont eu une consommation par habitant plus élevée en 2014.
D’après Procafé, la faîtière du commerce de
café en Suisse, le pays importe environ 98 000
tonnes de café vert par année, dont 33 000
tonnes sont transformées et réexportées sous
forme de café soluble, de café décaféiné ou torréfié.
L’association note que la grande majorité des
importations provient d’Amérique du Sud.
Suivent l’Asie, l’Amérique centrale et le Mexique puis l’Afrique. Procafé précise qu’une
grande partie du commerce mondial a lieu en
Suisse. Plus de deux tiers du négoce international se déroule directement ou indirectement
sur le sol helvétique. La Suisse compte entre
60 et 80 torréfacteurs dont plus de la moitié
sont des petites entreprises. Le magazine Bilan
notait l’an dernier que le marché des capsules
connaissait un véritable boom ces dernières
années. L’hebdomadaire estime que Nespresso, leader sur ce marché, vend environ un milliard de capsules chaque année rien qu’en
Suisse.
TOUJOURS PLUS CHER Si les Suisses aiment le café, ils doivent toujours payer davantage pour s’offrir une tasse. Les prix ont une
nouvelle fois augmenté l’an dernier, surtout en
Suisse alémanique. Les tarifs affichés y sont les
plus élevés en ville de Zurich, avec une
moyenne de 4 fr. 38 la tasse, deux centimes de
plus qu’en 2013. En moyenne, un café crème,
coûte 4 fr. 20. outre-Sarine. Le prix est moins
élevé Romandie et dans le canton de Berne où
il faut débourser moins de 4 fr. En Suisse alémanique, les tarifs affichés continuent de progresser après des hausses de trois centimes en 2014
et deux centimes en 2013. } JBA
Les Suisses sont de gros consommateurs de café avec plus de 1000 tasses par habitant par année. ARCHIVES