RAPPORT NATIONAL DE l`INSTITUT DES ACTUAIRES

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RAPPORT NATIONAL DE l`INSTITUT DES ACTUAIRES
RAPPORT NATIONAL DE L’INSTITUT DES ACTUAIRES
France
Jean BERTHON
Délégué Général
Institut des Actuaires
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A l’aube du troisième millénaire, les actuaires français ont décidé de changer l’organisation
de leur mouvement afin de le rendre plus apte à faire face aux nouveaux défis que la
profession d’actuaire va rencontrer à l’avenir en France et dans le monde.
Le rythme des innovations financières, la complexité des marchés et leur interdépendance,
l’augmentation du risque en terme de fréquence aussi bien qu’en terme de montants, la
mondialisation des activités, des productions comme des clientèles, les bouleversements
démographiques qu’entraîne le vieillissement de la population rendent nécessaire une
réflexion profonde sur les modèles actuariels qui ont depuis l’origine servis de support à
l’activité des entreprises d’assurance et de banques dans leur rôle de fournisseur de produits
de prévoyance, d’épargne et de retraite.
Les défis posés concernent tout autant l’organisation de notre profession, la formation, son
rôle au service de l’intérêt du public et le renforcement du professionnalisme.
I L’état du mouvement actuariel français au début du 3ème millénaire : un constat
mitigé
La profession d’actuaire en France s’est renforcée en nombre depuis quelques années et est
présente dans de nombreux secteurs d’activité, sans pour autant que son influence soit à la
mesure du rôle que jouent ses membres dans les entreprises.
La formation d’actuaire en France
Le mouvement actuariel français a fait preuve depuis plus d’un siècle d’une grande vigueur
et d’une faculté d’adaptation et d’innovation remarquable.
Après une période d’implantation et d’expansion au début du siècle caractérisée par la mise
en oeuvre d’un modèle traditionnel fondé sur un Institut organisant la formation et délivrant
le diplôme d’actuaire, le mouvement actuariel a su se régénérer dans le milieu du siècle
dernier à travers un certain nombre d’initiatives : avant la 2ème guerre, création d’une
première filière concurrente de formation d’actuaires, l’ISFA, à l’Université de Lyon, suivie
dans les années 60-70 de l’ouverture de l’Institut des Actuaires Français à des formations
externes, formations continues comme le CNAM puis le CEA, formations universitaires ou
de grandes écoles comme l’ISUP et l’ENSAE et plus tard l’ESSEC et le Collège des
Ingénieurs ; au début des années 90, création de deux autres filières concurrentes et
indépendantes, le Magistère d’actuariat à l’Université de Strasbourg et l’EURIA à
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l’Université de Brest ; enfin en 2001 création d’une nouvelle filière rattachée à l’IAF, au sein
de l’Université de Paris-Dauphine.
Au total ce sont donc aujourd’hui dix filières différentes qui forment bon an mal an près de
150 actuaires.
Toutes ces filières délivrent un diplôme d’actuaire universitaire ou professionnel (à travers
l’Institut des Actuaires Français) qui permettait jusqu’à aujourd’hui à chaque étudiant de
devenir membre d’une des quatre associations françaises membres de l’Association
Actuarielle Internationale et du groupe Consultatif Actuariel Européen et qui composaient la
Fédération Française des Actuaires. La création de cette dernière en 1994 avait été un des
premiers pas décisifs vers l’unité du mouvement actuariel et avait permis de lancer les bases
du développement professionnel de l’actuariat français. Elle apportait aussi une réponse
unique aux exigences imposées par notre participation aux organismes représentatifs de la
profession dans le monde en permettant l’élaboration d’un programme de formation minimal
conforme aux cursus préconisés par le groupe Consultatif et l’AAI.
Les métiers exercés par les actuaires français
Depuis longtemps, les actuaires français ont eu la réputation de sortir du domaine
traditionnel de l’actuariat et de diversifier leurs champs d’action. Ils ont toujours chercher à
être présents dans tous les secteurs où leurs compétences et leur savoir-faire leur
permettaient de jouer un rôle.
Aux dernières statistiques les actuaires se répartissent ainsi entre les divers secteurs
économiques :
Assurance
48%
Réassurance
8%
Retraite-Prévoyance
7%
Banque et gestion d’actifs
19%
Actuariat-conseil
11%
Administration (Contrôle)
4%
Divers (Enseignement)
3%
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Bien que le métier de l’assurance reste, et de loin, le métier qui attire le plus nos collègues,
on notera avec intérêt la diversification vers les métiers financiers et bancaires caractérisée
par une présence accrue dans les salles de marché et dans les directions de gestion ou de
contrôle des risques de ces organismes. De même les activités de conseil s’affirment comme
un des pôles à l’avenir prometteur ainsi que les métiers des domaine de la retraite et de
prévoyance. Enfin la présence d’une très grande majorité d’actuaires au sein du Corps de
Contrôle des Assurances caractérise la diversité de la profession.
Ce développement de l’actuariat français dans des secteurs aussi variés est un sujet de
satisfaction mais force est de constater qu’il n’est pas malheureusement suivi d’effet en ce
qui concerne le rôle de l’actuaire ou la reconnaissance de la profession. En effet de
nombreuses réticences dont on peut penser qu’elles sont plus liées à des pesanteurs
historiques qu’à une réelle méfiance vis à vis du rôle que pourrait jouer notre profession font
qu’il apparaît aujourd’hui difficile pour ne pas dire vain de chercher à ce que les pouvoirs
publics reconnaissent réglementairement un rôle particulier à notre profession, même si notre
technicité et notre compétence sont reconnues et font de nous des auxiliaires incontestés des
dirigeants d’entreprises comme des autorités de tutelle.
Cet état de fait qui traduit une grande vitalité du mouvement actuariel français et en même
temps une certaine incapacité à s’affirmer a conduit les actuaires à réfléchir sur l’adéquation
de leurs structures aux objectifs que l’on doit se fixer face aux évolutions de la société et de
notre profession.
A l’analyse, il apparaît, en effet, nettement qu’aucune des associations d’actuaires n’atteint
la taille critique pour pouvoir à elle seule prétendre gérer le mouvement actuariel français et
fournir aux actuaires les moyens et le soutien qu’ils s’attendent à trouver au niveau
professionnel. Cela est vrai tant sur le plan du nombre d’actuaires représentés que sur celui
des moyens financiers disponibles. De même, si la richesse de l’Ecole française d’actuariat
repose aujourd’hui sur la diversité et le nombre des filières de très haut standard qui
dispensent la formation d’actuaires, il vaut veiller à ce que le niveau de qualité en soit
maintenu dès lors que, poussées par la demande, d’autres filières souhaiteraient s’agréger au
processus de formation des actuaires. De même faut-il s’assurer que chaque nouvel actuaire
adhère pleinement à l’éthique commune de notre profession. Enfin, sur le plan professionnel
le besoin d’un interlocuteur unique encadrant l’exercice de la profession et représentant les
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intérêts des actuaires se fait de plus en plus sentir au fur et à mesure que les métiers et les
responsabilités se développaient.
II La nouvelle organisation de la profession d’actuaire en France
Partant de ce constat une réflexion a été lancée dès 1999 sur la mise en place d’une structure
unique, organisme professionnel réunissant tous les actuaires adhérents directs et chargé de
les représenter et d’animer la profession.
Elle a abouti courant 2001 sur une série de préconisations qui ont été immédiatement suivies
d’effet et ont conduit à la série d’opérations suivantes :
- transformation des associations regroupant les actuaires diplômés des universités de Lyon,
Strasbourg et Brest en amicales et renonciation à leur caractère professionnel,
- incorporation de tous les actuaires membres de ces associations comme adhérents directs
de la FFA,
- fusion-absorption de la FFA par l’Institut des Actuaires Français et changement de nom de
ce dernier qui devient, au 1er janvier 2002, l’Institut des Actuaires.
Ainsi la profession se trouve dotée en France d’un seul organisme de représentation et
d’organisation chargé de défendre les intérêts de chacun de ses membres et de la profession
et de promouvoir cette dernière et de développer son rôle auprès des pouvoirs publics et des
autorités.
Cette démarche extrêmement structurante a été placée par le nouveau Président de l’Institut
des Actuaires, François DELAVENNE sous le double signe de l’Unité et de l’Ouverture,
unité car elle rassemble tous les actuaires sans distinction d’école au sein d’un même Institut,
ouverture car elle vise à ce que le mouvement actuariel, loin de se replier sur lui-même et de
céder à toute tentation corporatiste, se rapproche de ses interlocuteurs privilégiés que sont les
formations, les entreprises, les autorités et les organisations internationales et noue avec eux
des partenariats d’actions communes qui permettent de renforcer le rôle de notre profession
et d’élargir son influence.
Un immense défi s’ouvre à nous à l’occasion de deux chantiers qui devraient déboucher en
2005 et au delà : les nouvelles normes comptables de l’assurance, les nouvelles exigences en
matière de solvabilité des compagnies d’assurance ainsi que des banques. Le développement
des modèles internes de mesure des risques d’activité, de marché ou de crédit, l’introduction
de modèles d’évaluation et de gestion dynamiques des postes du bilan sont des opportunités
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pour l’actuaire, compte tenu des ses compétences propres dans le domaine de l‘estimation
des risques.
Le Congrès de 2006, que la France se fait un honneur d’accueillir sera l’occasion de mesurer
la capacité de la profession, au niveau mondial, à s’adapter à ces nouvelles évolutions.
Pour cela, le mouvement actuariel français s’est fixé les ambitions suivantes :
-
se doter d’une identité forte
-
accéder au rang d’organisme de place
-
se mobiliser pour réussir 2006
La nouvelle organisation de l’Institut des Actuaires doit répondre à ces ambitions.
L’organigramme de l’Institut des Actuaires
Trois grands pôles ont été retenus : le pôle professionnel , le pôle scientifique et le pôle
fonctionnel. Chaque pôle regroupe plusieurs départements, chaque département se voyant
lui-même rattachées les commissions et organes oeuvrant dans son secteur d’activités.
Trois structures affiliées participent également aux activités de l’Institut.
Conseil d’administration
Président
Délégué général
Pôle Professionnel
Pôle scientifique
Pôle fonctionnel
Départements
Départements
Départements
Accréditation
Formation
Relations extérieures
Règles Professionnelles
Recherche et
Communication
Groupes de travail
développement
Secrétariat Central
Structures affiliées
SCI CHAULAG
ACIAP
CEA
Maison des Actuaires
Congrès 2006
Formation continue
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Cette organisation a pour but de favoriser la mobilisation de membres et des formations
autour des projets communs, d’obtenir l’adhésion des entreprises et des autorités. Elle se
place dans un objectif global de doublement à moyen terme du poids de la profession.
La stratégie à 5 ans
En terme de formation il s’agit de s’assurer d’une part que la profession est en mesure
d’attirer les meilleurs candidats possibles alors que nous sommes clairement au niveau
formation initiale en concurrence avec les grandes écoles françaises d’ingénieurs et de
commerce ainsi qu’avec les troisièmes cycles des universités de mathématiques, économie et
sciences de gestion. Cela passe par une démarche active auprès des candidats et par une
meilleure information sur la profession et sur son avenir. Cela implique aussi le soutien sans
faille des entreprises et des autorités qui devraient se féliciter de tout effort visant à maintenir
et augmenter la qualité des futurs actuaires.
En terme de renforcement de notre influence et de notre rôle, les quelque 150 nouveaux
actuaires formés chaque année devraient conduire à un doublement à 10 ans du nombre
d’actuaires actifs et permettre ainsi à notre profession de gagner des parts de marché dans les
secteurs d’activité qui la concernent.
Le besoin de renforcer le professionnalisme a conduit de même l’Institut à mettre en place, à
côté des systèmes d’agrément existant d’ores et déjà, un processus de qualification qui
devrait permettre aux actuaires débutants qui entreront désormais comme membres associés
de l’Institut des Actuaires de prétendre, après trois ans d’expérience professionnelle sous le
contrôle d’un actuaire référant, au titre d’actuaire qualifié, correspondant au niveau FQA de
l’AAI.
Nous n’échapperons pas au besoin de doter notre profession en France de règles et d’usages
professionnels. D’ores et déjà, certaines recommandations ont été émises qui retiennent
l’attention des entreprises et des pouvoirs publics mais un grand pas reste à franchir avant
que soit reconnu le principe de l’imposition de ces règles dans l’exercice de notre profession
que ce soit sous forme libérale ou salariée. Cela passe sans nul doute par la mise en place
d’un système de couverture du risque civil couru dans l’exercice du métier et par la
reconnaissance de ces normes au niveau des autorités et des employeurs. Dans cette
démarche, l’Institut pense pouvoir être soutenu par les autorités de contrôle qui devraient
voir d’un bon œil toute démarche allant dans le sens d’une plus fine appréciation des risques
et de plus de rigueur. Il y a là convergence d’intérêts entre notre profession et les corps de
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contrôles dans la défense commune de l’intérêt général et l’Institut mettra tout en œuvre pour
que soient défendus les principes prudentiels de l’Ecole française d’actuariat.
Le 28ème Congrès International des Actuaires, Paris 2006
D’ores et déjà l’ensemble du mouvement actuariel français, conduit par Claude BEBEAR,
Président du Conseil de Surveillance d’AXA, qui a accepté de présider la structure en charge
du Congrès de 2006, se mobilise pour faire de ce prochain congrès international un
évènement exceptionnel. Il sera l’occasion de faire le point sur la capacité de la profession à
faire face aux évolutions majeures que lui imposent l’environnement réglementaire et
comptable et aux défis posés par le progrès scientifique et économique. Il sera aussi
l’occasion de montrer à tous les collègues étrangers participants et à leurs accompagnants
que la France est un pays qui a toujours su marier l’esprit scientifique d’analyse et de
synthèse à un art de vivre harmonieux et de qualité. Tous les actuaires de France se
réjouissent d’accueillir leurs collègues du monde entier et leurs souhaitent la bienvenue.
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