Télérama L`OBS Le Figaro Magazine Le Point Les Échos

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Télérama L`OBS Le Figaro Magazine Le Point Les Échos
Télérama
À se régaler des Rustres, dans la savoureuse et toxique mise en scène qu’en propose
aujourd’hui Jean-Louis Benoit, on saisit enfin pourquoi l’auteur, le Vénitien Carlo Goldoni, fut
condamné à quitter sa ville tant aimée. […] La culture de la liberté, celle qui est pourtant de
tradition dans leur cité de carnaval, les héroïnes des Rustres en sont ici les vigilantes
gardiennes. […] [Elles] sont épatantes en créatures rusées par qui le bonheur redevient
possible. Car on a compris que les sévérités réactionnaires de leurs rustres ne menaient à
aucun progrès. Et même à une destruction du verbe, à voir tous les tics de langage qui
deviennent ici source de comique.
Fabienne Pascaud
L’OBS
De tous les dramaturges des siècles passés, Goldoni est avec Tchékhov celui qui inspire le
plus d'amitié. Comme lui, il ne juge pas et moins encore ne condamne, il s'efforce de
comprendre. […] Un spectacle idéal pour les fêtes. Dommage que le Vieux-Colombier n'ait
que trois cents places à offrir.
Jacques Nerson
Le Figaro Magazine
Les Rustres : une fête
Le spectacle est d'une gaieté franche, nerveuse, merveilleuse. On rit comme des enfants de
tant de jeunesse et de tant de talents. Mais il ne s'agit pas que de cela. Comme dit Benoit :
« Amuser le public pour pouvoir l'instruire. » Car la pièce n'est pas qu'une farce, elle est une
comédie de caractères, une comédie de mœurs, voire une comédie sociale. Elle n'évoque
pas seulement l'atmosphère d'une cité en déclin, elle ne peint pas seulement la bêtise des
hommes, mais surtout elle annonce, et avec quelle lucidité, quelle audace prémonitoire, un
phénomène nouveau : la résistance des femmes à la sauvagerie des hommes. On vient de
parler des rustres, parlons de ce qui fait le prix de la pièce : le cri de liberté qu'elle donne à
entendre par la bouche des quatre malheureuses héroïnes victimes de l'oppression mâle.
Leur révolte est d'autant plus efficace qu'elle s'inscrit dans un contexte comique au moyen
de procédés comiques : elle touche l'homme a son point sensible, le ridicule. Elles sont
toutes quatre extrêmement drôles, méchantes, tendres, intelligentes.
Philippe Tesson
Le Point
Vous voulez rire ? Vous donnez libre cours à votre colère ? Vous voulez avoir la preuve que
l'intelligence, le théâtre, les mots, le maniement de la langue sont des armes au tranchant
absolu, plus fortes que tout ? Courez voir ces Rustres de Goldoni. Et quels rustres ! Quelle
merveilleuse mécanique ! Quels brillants raisonnements ! […] Le public ne s'y trompe pas et
rit tout au long de la pièce. Le metteur en scène, Jean-Louis Benoit, a su mettre
particulièrement en relief les outrances de comportement de "propriétaires de femmes",
laissant à ses comédiens, purs sangs géniaux le don de la mesure et de la démesure. […]
On ne dira jamais assez l’excellence de la troupe de la Comédie-Française.
Brigitte Hernandez
Les Échos
Des « Rustres » en liberté à la Comédie-Française
Goldoni à travers ses Rustres brosse le portrait cinglant d’une bourgeoisie vénitienne inculte,
paranoïaque et repliée sur elle-même. Le metteur en scène fait ressortir la violence de la
charge. Les femmes ont beau faire lever un vent de liberté, le dernier geste de Lunardo
montre qu'elles ont encore du pain sur la planche...
Nos quatre « ours » font merveille, mais leurs « dresseuses » ont du répondant et campent
avec brio les ménagères au bord de la crise de nerfs, changées en redoutables amazones.
En 1760 à Venise, déjà, la femme est l’avenir de l'homme. Et, en plus, elle est
révolutionnaire.
Philippe Chevilley
La Croix
Mené tambour battant, ce spectacle sans temps mort réserve certaines séquences
d’anthologie quand, dans un moment de quiproquos et d’affolement général, chacun se
prend à courir en tous sens, que claquent les portes et se déplacent les cloisons.
Quand, encore, les maris, assis sur un banc, s’interrogent doctement sur la façon de museler
leurs femmes, voire de s’en débarrasser… avant, tout penauds, de se rendre à l’évidence   :
« Les femmes, comment s’en passer   ? »
On rit, on pleure, on est ému. En sympathie totale avec cette charge gaillarde contre le
machisme et l’obscurantisme de ces bourgeois confits qui ne savent que dire   : « Chez moi,
c’est moi qui commande. » En empathie profonde pour les épouses et les enfants sacrifiés.
Didier Méreuze
Libération
La source habituelle du comique envahit [la pièce] jusqu’à l’estuaire : cette source, c’est la
méchanceté. Goldoni, dans son journal, est non pas plus nuancé, mais, avec sa rapidité
habituelle, plus simple : «Ce sont quatre bourgeois de la ville, du même état, de la même
fortune et tous les quatre du même caractère, hommes difficiles, farouches, qui suivent les
usages de l’ancien temps, et détestent les modes, les plaisirs, et les sociétés du siècle.» Ils
refusent en particulier le théâtre et, comme on est au théâtre, voilà sans doute le péché qui
résume les autres. Goldoni ne leur reproche ni d’être des bourgeois, ni d’être des
patriarches, ni de «tenir» leurs femmes et leurs gosses. Il leur reproche d’être sans grâce,
sans légèreté, sans plaisir. Les rustres sont des misanthropes à front bas, qui ne pensent
pas et ne jouissent pas.
Ils sont quatre, mais surtout trois. […] Ce qui rend le trio prodigieux de burlesque et
d’agressivité, c’est non seulement la qualité de chaque comédien, mais plus encore
l’assemblage des trois.
Philippe Lançon

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