Mohandas Gandhi (1869-1948)

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Mohandas Gandhi (1869-1948)
Mohandas Gandhi (1869-1948)
Mohandas Karamchand Gandhi est né le 2 octobre 1869 à Porbandar, dans l'actuel état du
Gujarat. Il était hindou. Son père fut Premier ministre de la principauté de Rajkot. Il appartient à la
caste des vaishyas (marchands).
Marié à l'âge de 13 ans, il a 5 fls dont le premier meurt précocement peu après la mort de son
propre père (en 1895). Il part alors à Londres faire des études de droit, comme le faisait alors de
nombreux indiens. Il est rejeté de sa caste par le chef de sa communauté. Marqué par la
Bhagavad-Gîtâ, il s'intéresse aux autres religions qui proposent de « présenter la joue gauche face
à la claque sur la joue droite ». Il rentre en Inde en 1891, travaille pour son frère avocat malgré sa
timidité et son peu d'expérience.
Il repart pour l'Afrique du Sud en 1893 où il retrouve près de 70 000 indiens. Un jour, à Durban
(province du Natal), un magistrat lui demande d'enlever son turban. Il refuse et est expulsé du
tribunal. Il se fait également jeter d'un train pour avoir refusé de quitter la première classe alors
qu'il avait un billet valide et est chassé de nombreux hôtels à cause de sa couleur de peau. Il réagit
et obtient que les indiens habillés à l'européenne puissent voyager en première classe. « Où était
le devoir pour moi ? Songeais-je. Fallait-il lutter pour défendre mes droits ? Retourner dans mon
pays ? Poursuivre ma route jusqu'à Pretoria en ignorant les afronts, puis rentrer aux Indes le
procès terminé ? Repartir précipitamment pour l'Inde sans m'acquitter de mes obligations, ce
serait lâcheté. Le traitement injuste que l'on m'infigeait n'était que superfciel ; pur symptôme du
malaise profond qu'entretenait le préjugé racial. Il fallait essayer si possible, d'extirper le mal,
quitte à soufrir l'injustice en cours de route. Et de ne se poser en redresseur de torts que dans la
mesure où ce serait nécessaire à la suppression du préjugé racial » [Gandhi 1925 p. 143].
Comme avocat, il s'occupe d'une afaire que le juge tranche en sa faveur, contraignant son
adversaire à payer les arriérés qui le conduisaient inévitablement à la banqueroute. Gandhi convint
alors son patron de négocier un versement échelonné pour éviter cette perspective. Il apprit ainsi à
permettre à chacune des parties de conserver une certaine dignité. Alors qu'il pense à rentrer en
Inde, il décide de lutter contre une loi qui interdit le droit de vote aux indiens. Il met en place une
pétition et recueille 400 puis 10 000 signatures. La loi fut votée mais censurée par les
britanniques. Il crée alors le Natal Indian Congress, le 22 mai 1894, une organisation plutôt
aristocratique dont il devient secrétaire. Puis il fonde un journal ( Indian Opinion) avant de devenir
avocat à la Haute Cour. Il croit toujours dans le pouvoir de la loi.
En 1896, il retourne en Inde chercher sa femme et ses enfants. Il en profte pour prendre contact
avec des militants nationalistes comme Tilak (révolutionnaire) ou Gokhale (réformiste). A son
retour, il est attaqué par des blancs qui tentent de le lyncher mais refuse de porter plainte. Gandhi
fut aussi un père absent voire injuste, chassant ses enfants de la maison, se détournant de leur
éducation...
En 1899, au début de la deuxième Guerre des Boers (qui dure jusqu'en 1902), il déclare que les
Indiens doivent soutenir l'efort de guerre s'ils veulent légitimer leur demande de citoyenneté. Il
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organise un corps d'ambulancier volontaire qui secoure les Sud-africains noirs. Il est lui-même
porteur de civière. En 1904, après la guerre, il crée la colonie de Phoenix, où les rédacteurs du
journal participent aux travaux agricoles et reçoivent le même salaire que des personnes hors
castes ou pauvres (quel que soit leur couleur de peau, métier, nationalité) 1. Il commence la
pratique du jeune, arrête de consommer du lait, nettoie ses latrines. Il gagne de l'argent grâce aux
commerçants gujarati qui apprécient son intégrité et par son travail d'avocat.
En 1906, il aide des Zoulous fouettés car l'un de leurs chefs avait refusé de payer des impôts. La
même année, le gouvernement du Transvaal vote une loi qui demande l'enregistrement des
indiens (avec empreinte de pouce). Le Gouvernement britannique ( Colonial Ofce) ne réagit pas
s'en tenant au principe du self governement (auto-gouvernement). Lors d'une réunion à
Johannesburg, un marchand musulman du Gujarat Haji Habib proclame : « Au nom de Dieu, je ne
me soumettrai jamais à cette loi ». Cette parole frappe Gandhi. Il adopte la satyagraha2 en défant
la loi et en appelant à ne pas s'enregistrer et subir les punitions plutôt que de résister par la
violence. Selon les préceptes de son ami indien Shrimad Rajchandra (1867-1901), un ascète jaïn,
mais aussi de sa lecture de Thoreau, Ruskin ou Tolstoï. Il négocie un compromis avec le général
Smuts pour que l'enregistrement reste volontaire. On tente de l'assassiner. Il s'enregistre mais est
trahi par Smuts et reprend la lutte non-violente. Il est emprisonné pour deux mois fermes avec
des prisonniers de droit commun. La lutte dure 7 ans et des milliers d'Indiens et de Chinois sont
emprisonnés, fouettés ou abattus pour avoir fait grève, refusé de s'enregistrer ou résisté de
manière non-violente. En 1908, Gandhi engage les Indiens à brûler les certifcats établis. Il est de
nouveau arrêté et condamné.
Il échange quelques lettres avec un Léon Tolstoï en fn de vie. En 1912, l'architecte juif allemand
Kallenbach lui ofre une ferme de 44 hectares ( Tolstoï Farm) où logeront entre 50 et 75 indiens de
toute religions qui risquaient la déportation pour leur résistance. L'industriel Tata, le parti du
Congrès ou la Ligue Musulmane l'appuient fnancièrement. En 1913, il s'infige pour la première
fois un jeune pour faire comprendre a ses pupilles la gravité de leur faute et leur inspirer du
remords.
Sa résistance culmine en 1913 avec une grève des mineurs. Une marche de 2000 personnes est
organisé à travers le Transvaal. Gandhi est arrêté et condamné à 9 mois de réclusion. L'opinion
publique réagit à la répression féroce du régime. Gandhi est emprisonné. Les mineurs qui
l'accompagnent sont rapatriés dans leurs mines et fouettés. L'Inde réagit fortement à ces
événements. Le général Smuts est obligé de négocier un compromis avec Gandhi. La taxe de trois
livres (six mois de salaires) pour les indiens qui voulaient devenir travailleurs libres est abolie. Et
les conditions d'enregistrement sont révisées.
Gandhi quitte le continent le 18 juillet 1914 à la mort de son frère. Il devient donc chef de famille
et doit rentrer. En Inde, il décide de parcourir son pays de village en village. Il fonde un ashram en
1915 dans la banlieue d'Adhmedabad. Il fait scandale en acceptant d'accueillir une famille
d'intouchables (y compris pour sa femme ou ses soutiens fnanciers). Les permanents font vœu de
vérité, de célibat, d'ahimsa, de pauvreté et de servir le peuple indien. Il s'intéresse au khadi, un
tissu fait main avec le rouet traditionnel (depuis longtemps abandonné). Le flage prend une
dimension politique. « Si je ne jure que par le khadi, c'est qu'il me permettra de donner du travail
aux indiennes sous-employées et sous-nourries ». C'est également une manière d'inclure les
femmes dans le mouvement mais aussi de réaliser un travail manuel et sur soi, une solidarité avec
les plus pauvres et une contribution à l'autosufsance. Il appelle à s'engager dans l'armée pour
aider les Britanniques afn d'obtenir la citoyenneté et la paix dans l'Empire. Il fait des discours lors
de réunions du Congrès national indien.
En 1918, il organise la résistance civique de dizaines de milliers de paysans sans terre forcés de
cultiver l'indigo exporté plutôt que la nourriture nécessaire à leur subsistance. Les villages du
Champaran (Bihar) subissent la discrimination, des conditions d'hygiène déplorable, l'alcoolisme. Il
s'oppose ainsi à des capitalistes hindous. Au cours d'une famine, les britanniques veulent
1
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Cette communauté s'inspire de la communauté des trappistes de Marianhill qu'il a visité plusieurs années auparavant où ceux-ci vivaient parmi les
Zoulous, partageaient leur nourriture, étiat organisé avec une école...
Le mot est trouvé suite à un concours lancé dans Indian Opinion pour un mot désignant la « résistance passive »
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augmenter les taxes. A Kheda (Gujarat), les problèmes sont similaires. Il y établit un ashram et
réalise avec des partisans une étude détaillée sur les villages. Il dirige le nettoyage des villages, la
construction d'écoles et d'hôpitaux. Il est arrêté par la police pour trouble à l'ordre public. Des
centaines de milliers de personnes manifestent autour de la prison, des commissariats et des
palais de justice. Gandhi mène des grèves et des manifestations contre les grands propriétaires. Il
signe un accord avec le gouvernement britannique accordant plus de contrôle aux paysans et
l'annulation de la taxe. Il est baptisé par le peuple Bapu (père) et Mahatma (Grande âme), terme
qu'il refusera toujours de porter.
Le 28 février 1919, le serment de Satyâgraha mobilise Gandhi et son équipe3 contre le projet de loi
Rowlatt qui permettait d'emprisonner arbitrairement les agitateurs. Ils mobilisent les habitants de
nombreuses villes, ce qui accroit sa popularité. Il lance un appel à la grève générale après la
promulgation de la loi. Le 13 avril, des soldats britanniques ouvrent le feu sur la foule rassemblée
pacifquement dans le parc de Jalianwalla Bagh à Amristar (Penjab). Plus de 300 civils sont tués et
plus d'un milliers d'autres blessés. Des violences se répandent en Inde. Gandhi suspend sa
campagne le 18 avril. Pour lui, toute violence est maléfque et ne peut être justifée. Il forme
malgré tout une commission d'enquête non ofcielle sur ces événements.
Il devient le dirigeant exécutif du Parti du Congrès en décembre 1921. L'adhésion est ouverte à
tous ceux qui sont prêts à payer une participation symbolique et il le transforme ainsi en
organisation nationale de masse. Il défend une politique de boycott des marchandises étrangères
et demande que le dhoti soit porté par tous les indiens au lieu des textiles britanniques. Il appelle
au boycott des institutions judiciaires et scolaires, à la démission des postes gouvernementaux et
au rejet des honneurs britanniques. La non-coopération bénéfcie d'un grand succès. De violents
afrontements se déroulent dans la ville de Chauri Chaura (Uttar Pradesh) en février 1922 et il
arrête sa campagne afn de stopper la violence.
Il est emprisonné en mars 1922 pour subversion. Il est libéré en février 1924. Le parti se divise et
la coopération entre hindous et musulmans s'étiole. En décembre 1928, il somme le
gouvernement britannique à choisir entre l'octroi du statut de protectorat ou faire face à une
nouvelle campagne de non-violence pour une indépendance complète. Les britanniques ne
répondent pas et le drapeau indien est déployé à Lahore le 31 décembre 1929.
Le 26 janvier 1930, Gandhi prononce un serment d'indépendance. Quelques jours plus tard, il
publie ses « Onze points » dans Young India. Ils ne visent qu'à des réformes partielles
(allègements fscaux) très en retrait par rapport à l'indépendance. Mais il passe à l'action en se
concentrant sur un seul point. : la taxe sur le sel. Le 4 mars, il écrit d'abord au vice-roi (lord
Irwin) : « Cher ami, avant de m'embarquer dans la désobéissance civile (…) La taxe apparaît plus
lourde encore pour les pauvres quand on pense que s'il y a bien une chose dont ils ont plus
besoin que les riches, c'est le sel ». Gandhi annonce alors devant 75000 personnes qu'il ouvre « la
guerre d'indépendance ». Il part à pied avec quelques 78 membres d'Ahmedabad le 12 mars.
Chaque soir, il fle sur rouet, conseille les villageois et donne des interviews. Des milliers d'indiens
se joignent à lui le long des 400 km. Ils arrivent à Dandi (nord de Bombay) le 6 avril 1930. Il
s'approche de la mer, explique son geste, récite des prières, se baigne et ramasse du sel dans ses
mains. Ce geste revient à violer le monopole d'Etat sur la distribution du sel et l'imposition qui y
est liée. Il déclare « Le règne des Britanniques dans l'Inde y a apporté la ruine matérielle, morale,
culturelle et spirituelle. Je le regarde comme une malédiction. Je suis résolu à détruire ce système
de gouvernement. » L'exemple est suivi partout dans le pays. Alors, il écrit à Lord Irwin une
seconde fois pour lui annoncer qu'il va piller les dépôts de sel. Cette fois, le gouvernement le fait
arrêter. Le monde entier s'émeut alors de l'arrestation. Des grèves se déclenchent. Des postes de
police sont brûlés. Les marchandises anglaises sont boycottées. 60 000 personnes sont arrêtées et
remplissent les prisons.
Le gouvernement accepte de négocier. Il libère les leaders nationalistes dont Gandhi en janvier
1931. Un accord est signé en mars 1931. Le gouvernement libère tous les prisonniers politiques
et laisse un droit à collecter le sel contre la suspension du mouvement de désobéissance civile. Le
comité exécutif du Congrès adopte le drapeau orange, blanc et vert avec l'image du rouet comme
3 Patel, Sobani, Banker, Horniman, Sarjonin Naïdou
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emblème. En septembre, Gandhi est invité à Londres pour une table ronde. Mais il n'est pas
question de transfert de pouvoir. Et la répression reprend.
Gandhi est arrêté à nouveau le 4 janvier 1932. Face à Gandhi, Ambdekar milite pour un électorat
séparé pour les intouchables (depressed classes). Le premier ministre britannique Ramsay
McDonald répond favorablement à cette demande en septembre 1932. Gandhi s'oppose à cette
décision qu'il perçoit comme remettant en cause l'unité des hindous. Il entame un jeûne à mort
afn de préserver l'afliation traditionnel dans l'hindouisme et donc dans les castes. Ambedkar
cède et accepte la proposition de sièges réservés aux classes défavorisées mais élus par tous les
électeurs. Il commence une nouvelle campagne pour ceux qu'il appelle les Harijans (enfants de
Dieu).
Le 15 janvier 1934, un tremblement de terre touche le Bihar et cause de nombreuses victimes et
dégâts. Gandhi maintint que cela était dû au péché commis par les castes hindoues supérieures de
ne pas laisser les intouchables accéder à leurs temples. Rabindranath Tagore s'opposa
diamétralement au point de vue de Gandhi, soutenant qu'un tremblement de terre pouvait être
seulement créé par des forces naturelles, pas par des raisons morales, aussi répugnante que
puisse être la pratique de l'intouchabilité. Il entame un jeune de 21 jours et décide de quitter le
parti du Congrès qui a accepté le pouvoir en échange d'un statut de fédération pour l'Inde.
En juillet 1939, il écrit à Hitler pour qu'il ne déclenche pas la guerre et lui demande d'atteindre ses
objectifs par la non-violence. Gandhi ofre un « appui moral non violent » à l'efort de guerre mais
les autres dirigeants du Congrès démissionnent vus l'implication de l'Inde dans la guerre sans leur
consultation. Gandhi fnit par déclarer que l'Inde ne peut pas participer à une guerre ayant pour
but une liberté (la démocratie) refusée à l'Inde elle-même. Il écrit une résolution appelant les
Britanniques à quitter l'Inde (Quit India). Les violences se déchaînent. Des milliers de personnes
sont tuées ou blessées par la police. Gandhi dit clairement qu'ils ne participeront pas à l'efort de
guerre si l'Inde ne devient pas indépendante. Gandhi et tout le comité dirigeant du Congrès sont
arrêtés à Bombay en août 1942. Il est détenu deux ans à Pune. Son conseiller de 42 ans (Mahadev
Desai) meurt d'une crise cardiaque comme sa femme Kasturba après 18 mois d'emprisonnement.
Gandhi est relâché le 6 mai 1944 pour subir des soins médicaux.
A la sortie de la guerre, sous la pression de l'URSS et des Etats-Unis, le gouvernement britannique
adopte les principes de l'indépendance. Gandhi demande d'arrêter la lutte. 100.000 prisonniers
politiques sont relâchés. Gandhi conseille de rejeter les propositions britanniques qui proposent
un regroupement aux états à majorité musulmane. Cet avis est rejeté par le Congrès car Nehru et
Patel craignent que le contrôle du gouvernement passe aux mains de la Ligue musulmane. Plus de
5000 personnes sont tuées dans des violences entre les communautés religieuses. Des millions de
personnes sont déplacées. La partition est approuvée par la direction du Congrès afn d'éviter une
guerre civile. Gandhi dévasté donne son accord. Il ne participe aux aux festivités le 15 août 1947,
jour de l'indépendance. Il porte le deuil de la participation. Il construit un dialogue avec les
dirigeants des deux communautés.
Il lance son dernier jeune le 13 janvier 1948 à 78 ans pour que les violences communautaires
cessent et que l'Inde paye son dû au Pakistan, ce que les dirigeants fnissent par faire. Il est
assassiné le 30 janvier 1948 par balles à New Delhi par Nathuram Godse, un hindou nationaliste
qui le tient pour responsable de la partition de l'Inde.
Sources :
GANDHI Mahatma (1925), Autobiographie / Mes experiences de la vérité, Paris, P.U.F, coll.
"Quadrige", 7e édition, 2003, 676p.
Wikipedia (2012), Article Gandhi, http://fr.wikipedia.org/wiki/Mohandas_Karamchand_Gandhi
SAINT-CHERON Michael (2011), Gandhi. L'anti-biographie d'une Grande Ame, Hermann, 212p
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