Abus de droit, fraude à la loi et avoir fiscal
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Abus de droit, fraude à la loi et avoir fiscal
Vincent Chaulin Newsletter 1 Nouveautés fiscales de la loi de finances pour 2009 Page 1 of 2 LES AUTRES ARTICLES Abus de droit, fraude à la loi et avoir fiscal Dans un arrêt du 7 septembre 2009 (n° 305586), le Conseil d’Etat a jugé qu’une opération impliquant une détention de titres très courte au moment de la distribution du dividende n’était pas constitutive d’un abus de droit ou d’une fraude à la loi. Au cas présent, une banque avait réalisé plusieurs opérations d’emprunt et d’achat à réméré de titres qu’elle n’avait détenus que pendant de très brèves périodes du fait des particularismes des emprunts en cause, très courts, et de l’achat à réméré qui accorde au cédant un faculté de rachat des biens cédés, faculté qui avait été exercée rapidement par le cédant. Le paiement du dividende est intervenu au cours de ces brèves périodes. Du fait de ces emprunts ou achat de titres, la banque, propriétaire des titres au moment du paiement du dividende, a bénéficié de l’avoir fiscal attaché aux dividendes. Les sociétés prêtant ou cédant les titres étant le plus souvent déficitaires, elles ne pouvaient profiter de l’avoir fiscal, celui-ci, supprimé depuis 2005, étant un revenu mais aussi un crédit d’impôt non restituable étant un moyen de payement de l’impôt sur les sociétés. L’administration a considéré qu’il s’agissait d’un abus de droit, c’est-àdire d’une opération à motivation uniquement fiscal. Suivie en premier instance par le tribunal administratif, l’administration n’avait pas convaincu la cour administrative d’appel. Elle s’est pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat qui a accepté son pourvoi et a rejugé l’affaire au fond. Le Conseil d’Etat a, tout d’abord, écarté l’application de l’article L 64 du Livre des procédures fiscales relatif à la répression de l’abus de droit. Ce dernier ne vise, en effet, dans sa rédaction applicable à l’époque (cf. Newsletter 01/09), que les actes dissimulant la réalisation ou le transfert d’un revenu. Cette solution n’allait pas soi, l’avoir fiscal étant aussi un revenu, ayant justement fait l’objet d’un transfert au cas présent. Il est vrai toutefois que ce transfert n’était pas dissimulé et que l’objet du litige était le transfert de l’avoir fiscal en tant que moyen de paiement de l’impôt. L’administration ayant substitué la fraude à la loi à l’abus de droit, le Conseil d’Etat a dû examiner ce moyen. Actualité de la taxe professionnelle La taxe professionnelle est sur le point d’être réformée. Les principaux traits de cette réforme commencent à être connus. La jurisprudence a, par ailleurs, récemment précisé certains points concernant le contrôle de cette taxe ou l’impact des réorganisations sur son calcul. Modalités d'exercice des contrôles fiscaux et droits du contribuable Le Conseil d’Etat et le tribunal administratif de Montpellier se sont prononcés, dans de récentes décisions, d’une part, sur des situations ne pouvant entraîner de procédure d’imposition d’office et ont précisé, d’autre part, les règles relatives aux garanties contre les changements de doctrine administrative de l’article L 80 A du livre des procédures fiscales. Retour sur la cellule de régularisation des avoirs détenus dans des paradis fiscaux Les premiers retours d’expérience de la cellule de régularisation des avoirs détenus dans des paradis fiscaux et non déclarés commencent à être diffusés. L’expérience semble intéressante. Après avoir rappelé que les objectifs du législateur instituant l’avoir fiscal étaient de favoriser l’actionnariat des entreprises ainsi que le développement de la place financière de Paris et d’éliminer à cet effet la double imposition qui frappe le profit distribué, le Conseil d’Etat souligne qu’aucune condition de délai de détention n’a été posée par le législateur. Le Conseil d’Etat précise ensuite, d’une part, que, du fait des textes encadrant les ventes à réméré (Code civil, art. 1659), les vendeurs n’étaient pas tenus de racheter les titres en cause et, d’autre part, que le risque pesait sur la banque emprunteuse pendant sa période de détention des titres. Dès lors, la Haute Cour administrative en conclut que les opérations en cause n’étaient pas artificielles, le fait que la banque supporte un risque ayant été essentiel dans cette conclusion. En conséquence, l’administration ne démontre pas que les textes relatifs à l’avoir fiscal ont été appliqués à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs. Cette solution n’allait pas de soi. On se rappelle que dans un arrêt du 29 décembre 2006, le Conseil d’Etat avait jugé, dans un contexte quelque peu différent, qu’un schéma impliquant la détention temporaire d’actions sans droit de vote à dividende prioritaire de la filiale française d’une société américaine par une banque anglaise était constitutif d’une fraude à la loi ayant pour objet le remboursement de l’avoir fiscal. Certes les deux opérations ont des caractéristiques différentes. Le portage par la banque anglaise, du fait de la quasi-absence de risque pour cette dernière, conduisait notamment à traiter l’opération comme un prêt et à retirer à la banque la qualité de bénéficiaire effectif des dividendes conditionnant le droit au remboursement de l’avoir fiscal selon la convention fiscale franco-britannique. Pourtant, la motivation essentielle de ces deux opérations litigieuses était bien la détention de titres permettant de recevoir l’avoir fiscal ou son remboursement. La comparaison de ces deux décisions souligne, s’il en était besoin, la nécessité d’une analyse préalable approfondie des opérations ayant une dimension fiscale. L’existence d’un risque justifiant un profit est souvent un élément permettant de considérer qu’une opération n’est pas http://www.chaulin-avocat.com/newsletter8/article1/ 29/09/2009 Vincent Chaulin Newsletter 1 Nouveautés fiscales de la loi de finances pour 2009 Page 2 of 2 artificielle et n’est donc pas constitutive d’un abus de droit ou d’une fraude à la loi. Vincent Chaulin Spécialiste en Droit Fiscal Avocat au Barreau de Paris www.chaulin-avocat.com se désinscrire http://www.chaulin-avocat.com/newsletter8/article1/ 16, rue du général Foy 75008 Paris +33 1 44 90 03 67 [email protected] imprimer s'inscrire à la newsletter 29/09/2009