INTA40 Culture at the heart of the city post Habitat III Henry Chabert Pr

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INTA40 Culture at the heart of the city post Habitat III Henry Chabert Pr
INTA40 Culture at the heart of the city post Habitat III Henry Chabert Président honoraire de l’INTA Mesdames Messieurs les élus, mes chers collègues de l’INTA, Mesdames Messieurs, Ce congrès rend compte du formidable travail qui a été effectué par les membres de l’INTA à propos d’habitat III, le met en discussion et ouvre de nouvelles perspectives. Permettez-­‐moi en ce qui me concerne, de mettre plus particulièrement l’accent dans le cadre de ces discussions sur la dimension culturelle du développement urbain. Aussi loin que remonte notre connaissance de l’histoire, nous constatons que bien que vivant de manière extrêmement précaire nos ancêtres n’en n’avaient pas moins développé une forme supérieure de partage, de rites et d’expression dont témoigne l’art des cavernes comme celui de la Grotte Chauvet plus de 27 000 ans av. J.-­‐C. Dès l’apparition des premières villes il y a plus de 11000 ans leurs remparts protègent une vie sociale intense dont la civilisation sumérienne nous laisse des traces de culture hautement maîtrisée et qui ne cessera de se développer au cours des siècles et de tous les modèles de villes que nous ont laissés les grandes civilisations et les différentes époques, la Grèce, Rome, la Renaissance, Hausmann, Cerda, Tony Garnier pour ne citer que quelques exemples. Mais ce qui est notable c’est que dès le départ, la ville apparaît comme le creuset privilégié non seulement de vie sociale mais de partage civilisationnel. Comme n’importe quel animal, l’homme se nourrit, s’adapte à son environnement, s’abrite, se défend en tribu ou en meute, mais lorsqu’il se nourrit, il invente la cuisine et la gastronomie, lorsqu’il s’habille il invente la mode, lorsqu’il s’abrite se rassemble, se défend il invente la ville l’architecture le patrimoine ce qui fait dire à William Cowper « Dieu a fait la campagne et l’homme a fait la ville ». Pour satisfaire ses besoins d’ordre intellectuel et spirituel il a inventé des mythes, créé des symboles, façonné des dieux plus ou moins à son image et cela quelque soit par ailleurs la nature de sa foi. Dans le libre arbitre qui le caractérise, l’homme n’a-­‐t-­‐il pas besoin de repères de racines, de références de points d’ancrage qui sont les ingrédients de l’inclusion et de l’égrégore d’une communauté qu’il s’agisse d’une ville, voire d’un quartier ou d’une nation, voire d’une civilisation. La dimension culturelle au sens large du terme englobe ce corpus de valeurs qui seul est de nature a apporter à l’homme ce supplément d’âme sans lequel il ne serait qu’un animal. La culture et l’art en particuliers sont l’expression, la manifestation symbolique et sensible de ces valeurs qui se révèlent sous la plume d’un écrivain ou d’un poète sous le pinceau d’un peintre ou le ciseau d’un sculpteur, ou l’écriture de la partition d’un musicien ou qui s’exprime à travers les fruits de la main et du savoir faire de l’artisan. De cela les villes ont toujours été les supports et les reflets. Elles ont besoin de le rester sans doute plus que jamais. Au moment où se perdent les repères de nombreux de nos concitoyens, où beaucoup d’entre eux s’égarent dans un obscurantisme mortifère n’est-­‐il pas, en effet plus nécessaire que jamais que la culture joue son rôle d’antidote. Ce n’est pas un hasard si les premiers actes de toute tyrannie sont la censure suivie de l’effacement et de la destruction des traces du passé. Les bouddhas de Bamyân, le temple de Bel À Palmyre les chefs d’œuvres du musée de Mossoul ou les vestiges de Nimrod en ont fait récemment les frais… Rien ne peut remplacer naturellement la transmission de la culture par l’éducation et la formation mais la qualité et la richesse symbolique de l’environnement peut contribuer à illustrer un récit dans lequel l’homme trouve sa place et se positionne face à son destin. Nos centres-­‐villes, un peu partout dans le monde, constituent autant de références patrimoniales exceptionnelles en général magnifiquement et heureusement entretenus et réhabilités qui traduisent l’identité et le génie d’un peuple d’une Nation d’une civilisation. Lisbonne fait partie de ces villes qui portent témoignage de la richesse de ses racines. Pourquoi faut-­‐il en revanche que nos banlieues, nos entrées de ville souffrent d’une étrange uniformité, d’une banalité parfois affligeante et même carrément laide et « moche» ? Nous sommes profondément attachés à notre patrimoine d’hier et d’avant-­‐hier. Mais en dehors de quelques monuments ou équipements symboliques et emblématiques avons nous toujours le souci, dans l’étalement urbain, dans l’urgence de l’extension des villes de fabriquer ce qui sera « le patrimoine de demain » révélateur non pas seulement d’une somme de techniques de construction ou de procédés perfectionnés de fonctionnement de services urbains mais de l’expression d’une sensibilité d’une pensée d’une recherche du beau, voire du sublime. En tout cas l’expression des signes qui traduisent l’esprit le cœur les interrogations, les aspirations de ceux qui y habitent. La France a inventé dès 1951 le 1% artistique appliqué aux bâtiments de l’éducation nationale et étendu depuis à de nombreux bâtiments publics relevant de l’État ou des collectivités locales. La mesure consiste à consacrer 1 % du budget d’investissement d’un bâtiment neuf à une œuvre artistique. Elle a permis de mettre en contact avec des œuvre d’art un public nombreux, des enfants en particulier, qui n’auraient sans doute pas fait pour beaucoup d’entre eux l’effort de franchir les portes d’un musée. En revanche environ 40 milliards d’euros ont été consacrés à la rénovation urbaine de quartiers des années 60 en France. Démolition, reconstruction, réhabilitation, création d’infrastructures, et d’équipements, aménagement d’espaces publics ont radicalement et très positivement transformé l’image de ses quartiers. Toutefois il est difficile de distinguer l’identité d’un quartier réhabilité à Strasbourg, à Limoges à Lyon, à Rennes, ou à Marseille. Tous sont bien faits mais tous se ressemblent plus ou moins et semblent d’une certaine manière ignorer les racines culturelles et l’environnement patrimonial dans lequel ils se situent. De nombreux efforts ont été effectué pour accompagner ces réhabilitations par des actions d’ordre culturel qui constituent autant de bonnes pratiques qui méritent d’être soulignées mais le nombre des actions pérennes restent extrêmement limité et très loin en tout cas même de 1% des investissement réalisés. Or le quartier, la ville, par leur proximité avec les habitants constitue le tremplin majeur de leur promotion culturelle et intellectuelle. La ville est certes d’abord le système fonctionnel qui permet à ses habitants de se loger de se déplacer, de travailler, d’échanger. Que l’évolution technologique et le développement des moyens de communication la rendent « intelligente » est un réel progrès et nous ne pouvons que nous en réjouir. Mais c’est aussi un lieu où doit souffler l’esprit, où doit s’épanouir la dimension sensible et spirituelle de ses habitants. Un territoire dans lequel n’apparaît aucun signe culturel, un immeuble dont le béton et les modénatures sont muets, sans message sans signe de transcendance et de références à l’humain, un quartier sans éléments déclencheur de pensée, d’émotions sont autant de produits inachevées, on parle alors de cage à poule ou de fourmilière, bref un produit de la matière où le cœur et l’esprit n’ont pas pris leur place. Nous sommes ici nombreux à être des fabricants de la ville ; sachons en être aussi les inspirateurs. Soyons ceux qui sont préoccupés de bien faire circuler des piétons, des voitures et des vélos, de bien gérer les services urbains, d’inventer des systèmes constructifs de plus en plus complexes, de créer des logiciels de plus en plus performants au service d’un organisation optimisée de la ville… mais soyons aussi ceux, chaque fois que cela est possible, qui savent apporter le supplément d’intelligence et de sensibilité dont ses habitants ont besoin. Il convient pour cela de réviser quelques uns de nos paradigmes : il faut introduire la culture dans toutes nos politiques, dans tous nos projets car elle est de nature transversale. Il faut rechercher et cultiver nos racines et notre mémoire collective (Pas un territoire n’en manque) et dans le même temps, en se nourrissant de ces racines, favoriser la création par la commande publique et privée et la liberté de création. La salle de Congrès construite récemment à Lyon par Renzo Piano est par sa forme une réplique contemporaine du théâtre gallo romain de la colline de Fourvière Il faut faire sortir la culture de ses carcans, abattre les frontières entre des démarches fonctionnelle et esthétique, entre le social, l’économique et le culturel. Les lieux d’histoire et de mémoire n’ont pas vocation à âtre conservé dans la naphtaline Les espaces de la ville, ses lieux de rencontre doivent être innervés par des artistes dont l’intervention doit se faire le plus en amont possible de la commande. Des parkings des stations de métro, sont autant d’espaces publics qui peuvent justifier une telle démarche C’est ce qu’ont fait aussi bien Lyon Parc Auto que la Sémaly à Lyon. L’esprit des pocket garden petits espaces dans la ville accueillant un arbre, un banc et une œuvre d’art en sont une autre illustration. Les musées ont naturellement au rôle essentiel à jouer dans la transmission de la culture. Mais par une forme de perversion liée notamment à la financiarisation de l’art, notre société en vient à privilégier la production de l’art contemporain en faveur des musées plutôt que des villes qui les hébergent et encourage ainsi une sorte de divorce entre l’artiste et la société contraire à la nature même de l’art qui doit partout et tout le temps, orner, interpeller, interroger tout un chacun et pas seulement quelques privilégiés. Imagine-­‐t-­‐on Garnier sans Carpeaux ? Il faut au fond retrouver l’esprit de Florence ! Chaque ville avec ses racines avec ses moyens dans son contexte social géographique économique, financière, mais avec la même préoccupation qui est non seulement d’être fonctionnelle et intelligente (désormais) mais également sensible. L’homme doit trouver dans la ville les clefs de son épanouissement matériel mais également spirituel et nous avons à œuvrer pour cela en toute fraternité comme la devise de la République Française nous y invite. Cela s’appelle tout simplement l’humanisme et c’est tout un programme ! Je vous remercie