«Une ville possède de no...aménagées»

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«Une ville possède de no...aménagées»
4/6/2015
«Une ville possède de nombreuses surfaces stériles, pauvrement aménagées» - LeTemps.ch
Immobilier Mercredi 06 mai 2015
«Une ville possède de nombreuses surfaces
stériles, pauvrement aménagées»
Par Propos recueillis par G. S.
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Le Temps: Pourquoi cette idée? Il y avait déjà des jardins familiaux…
Yves Lachavanne: Oui, nous n’avons pas inventé grand-chose! L’une de nos sources d’inspiration est
les jardins ouvriers de la fin du XIXe siècle, ancêtres des jardins familiaux. Ces derniers sont gérés par
une association qui s’est fédérée en Suisse au début des années 20. A Lausanne, une dizaine de
groupements sont répartis en périphérie de la ville, en grands ensembles de parcelles. C’est là que
nous sommes venus en contrepoint de ces jardins familiaux qui sont plus de l’ordre de la résidence
secondaire (ils comportent des cabanons, etc.). Avec les plantages, nous voulions offrir des coins de
terre à des citadins qui ont moins de temps à y consacrer mais souhaitent retrouver un contact avec la
terre.
– Depuis vingt ans, les plantages sont en expansion.
– Récemment, nous avons connu un nouvel élan. Après la création de cinq plantages entre 1996
et 2000, il y a eu une période d’accalmie liée à d’autres projets comme celui du métro, qui nous a bien
occupés… A partir de 2008, il y a eu une relance et aujourd’hui nous sommes face à une forte
demande, ce qui nous amène à poursuivre notre action.
– Pensez-vous que cela corresponde, au XXIe siècle, à un besoin pour l’individu d’être créatif
manuellement à une époque de grande virtualité?
– Nous étions partis de cette idée-là dès 1995-1996 lorsque nous avons lancé notre projet et cela se
confirme aujourd’hui de manière tout à fait avérée, encore plus fortement avec les questionnements
autour de l’agriculture de proximité et de la recherche de lien social.
– Comment se passe l’attribution du lopin de terre?
– La parcelle est mise à disposition pour une année, le contrat étant renouvelé tacitement d’année en
année. On a relativement peu de roulement, les gens conservent leur plantage.
– Lorsque vous avez investi des heures de travail sur un bout de terre, vous devez avoir l’impression
qu’il vous appartient…
– Malheureusement, on perd son attribution du moment où l’on déménage, bien sûr…
– C’est la première fois que ce type d’aménagement paysager est récompensé?
– Oui. Le montant de 25 000 fr. qui nous est attribué nous permettra de financer un prochain
plantage. Ce qui est salué par ce prix est le fait que ce projet s’inscrit dans la durabilité.
– C’était quand même culotté d’imaginer que cette cacophonie végétale valoriserait l’espace public...
– En travaillant sur le plan directeur en 1994, nous avions constaté la disparition progressive des
petits jardins devant les entrées des immeubles, souvent au profit de places de stationnement. On se
disait que si cette partie de jardin avait une vocation nourricière, il y aurait davantage d’hésitation de
la part des personnes concernées qui devraient choisir entre un jardin potager et une place de
stationnement…
Autre constat: on se rendait compte, encore aujourd’hui d’ailleurs, que la ville comporte de
nombreuses surfaces stériles pauvrement aménagées avec un traitement végétal d’une grande
banalité: du gazon, des thuyas. Amener une végétation qui change au gré des saisons, luxuriante par
moments, offre de la richesse et de la biodiversité dans la ville.
– Y en a-t-il ailleurs en Suisse ou cela est-il typiquement lausannois?
– Nous sommes probablement à l’origine de ce concept, sorte d’intermédiaire entre les très
institutionnels jardins familiaux d’un côté et, à l’opposé, les jardins des «guérillas vertes» nées dans le
Bronx à New York dans les années 70: des gens ou des associations de quartier se sont mis à squatter
certaines friches urbaines ou espaces publics pour y installer des jardins potagers.
Notre action a inspiré d’autres villes pour donner naissance au concept de «jardin partagé». En Suisse
romande, l’association Equiterre développe avec succès depuis plusieurs années un projet de
«potagers urbains» dans de nombreuses communes.
– Plantage, c’est un mot ancien?
– Oui, effectivement. C’est un mot qui désignait un coin de terre cultivé avec des pommes de terre.
Nous voulions trouver un terme local qui se distingue de celui de «jardins familiaux».
http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/7d43ac6a-f34e-11e4-bb1f-074820583190/Une_ville_poss%C3%A8de_de_nombreuses_surfaces_st%C3%A9riles_pauvrement_am%C3%A9nag%C3%A9es
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«Une ville possède de nombreuses surfaces stériles, pauvrement aménagées» - LeTemps.ch
– Avez-vous des propositions de particuliers qui offrent leur terre en location pour la faire fructifier?
– En lançant ce projet et en mettant à disposition des parcelles communales sans usage défini, nous
voulions montrer l’exemple, prouver que c’était possible et inciter les propriétaires, les gérances
immobilières, les coopératives à mettre à la disposition de leurs locataires des espaces autour de leur
immeuble. L’idée fait son chemin dans les mentalités. Elle s’est même concrétisée avec la réalisation
du plantage de Florency, installé sur une parcelle privée, moyennant une convention d’usage entre son
propriétaire et la Ville. Une expérience de partenariat privé-public saluée par les habitants du quartier.
– Est-ce que cela fait partie d’un changement d’état d’esprit qui fait que l’on prend conscience que la
terre est à tout le monde?
– On ne peut pas extrapoler de manière aussi radicale. Mais on observe une sensibilité accrue au fait
de s’investir dans l’espace public et de «consommer local».
– L’installation d’un plantage demande-t-elle un investissement important?
– Les aménagements se veulent simples et le coût de réalisation doit rester modeste. En revanche, il y
a de nombreuses étapes: élaboration des plans, appel d’offres aux entreprises, etc.
Et un impératif est apparu récemment: nous avons élaboré une charte incitant tous nos planteurs à
avoir une approche respectueuse de l’environnement. A ne pas utiliser d’engrais chimiques par
exemple. Cette charte date de 2012. En contrepartie, nous leur donnons un cours de jardinage
biologique. Au sein de notre service, des jardiniers ont été formés à la culture potagère biologique et
ont la mission d’animer des ateliers et d’être à la disposition des planteurs tout au long de l’année.
– Le plantage du Désert (voir photo) est étonnant par sa diversité végétale. Il y a comme un bout de
jardin à la française?
– Oui, ce plantage est un cas particulier car il s’inscrit dans la campagne du Désert, parc historique
d’inspiration baroque de la fin du XVIIIe siècle, un de nos plus vieux parcs. Le jardin potager, avec son
bassin et sa haie de buis, en est une pièce maîtresse. Tout comme son canal de 140 m de long et son
allée de tilleuls.
Grâce à notre concept des plantages, nous avions la solution pour assurer l’entretien de ce jardin
potager, ouvert à tous les habitants de Pierrefleur, un quartier à forte densité démographique. C’est
d’ailleurs un des critères pour y aménager les plantages: les réaliser dans des quartiers très peuplés,
où chacun n’a pas forcément son jardin…
© 2015 Le Temps SA
http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/7d43ac6a-f34e-11e4-bb1f-074820583190/Une_ville_poss%C3%A8de_de_nombreuses_surfaces_st%C3%A9riles_pauvrement_am%C3%A9nag%C3%A9es
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