bateaux poncelet

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bateaux poncelet
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SUDPRESSE
LUNDI 14 OCTOBRE 2013
FLEURUS/MARTINROU
La Rolls des bateaux
en bois made in Charleroi
Un Carolo relance la production des bateaux de luxe Poncelet, une vraie institution belge
Marc Deltenre, Carolo pur
jus, né à Courcelles, a bien
mené sa barque professionnelle.
Et récemment, après avoir
revendu son entreprise à son fils,
il a décidé d’orienter ses activités
vers un secteur de pointe. Il a
repris les bateaux Poncelet, une
sorte de patrimoine national,
alliant ainsi le travail et une vraie
passion.
m’a tout appris… »
Petit à petit, des liens d’amitié se
sont tissés : Marc Deltenre a fourni à son mentor une machine à
commande numérique pour effectuer ses découpes. La maman
de Roger, de son côté, l’accueillait
le midi pour partager une soupe
et une tartine, en lui racontant
l’histoire extraordinaire de la société (ndlr : voir ci-dessous). Et finalement, lorsque Roger a décidé
Comme cela arrive souvent, c’est de passer la main, il a repris la
le hasard qui a bien fait les barre de l’entreprise : « La restaurachoses. Fin 2007, Marc Deltenre a tion de mon bateau a été en
racheté un Poncelet de 1970 à un quelque sorte ma pièce d’épreuve.
ami. Un bateau de plaisance dé- Je me sentais prêt à relever le défi :
couvert, léger, également baptisé perpétuer ce savoir-faire artisanal et
runabout : « Il était en très mauvais exceptionnel mais avec les moyens
état et j’ai donc contacté le fabri- techniques d’aujourd’hui. Car bien
cant afin de savoir s’il pourrait le sûr, il faut vivre avec son temps. »
restaurer, nous explique-t-il. M. Passionné d’architecture, le CaroPoncelet avait beaucoup de choses à lo a fait construire un élégant bâfaire par ailleurs et m’a averti que timent dans le zoning de Martinrou où il prépare l’avenir
cela risquait de prendre
beaucoup de temps. »
des bateaux Poncelet,
Le
C’est alors qu’une
espérant employer
p
idée lui est venue :
cinq à huit perroc
« Mon entreprise
sonnes dès l’an
modèlehain
roulait bien (ndlr :
prochain. Pour
entière sera
voir encadré cicréer le modèle
m
constr ent
dessous) et finalequ’il commerciament, j’effectuais
lisera bientôt, il a
en aca uit
jou
surtout du travail
fait appel à la
de bureau. J’avais encrème de la crème.
vie de revenir à des
La création du protochoses plus concrètes. Je rêtype a été confiée au carvais depuis toujours d’apprendre à rossier milanais Touring Supertravailler le bois ; j’ai donc deman- leggera (qui a travaillé entre
dé à Roger Poncelet s’il acceptait autres avec Aston Martin, Lamborque je m’installe dans son atelier ghini ou encore Alfa Romeo) et
pour effectuer moi-même la restau- son designer Louis de Fabriberation. Et je suis resté là cinq ans ! Il ckers. Celui-ci est par ailleurs ori-
Marc Deltenre et son Poncelet, un sept mètres vingt qu’il a entièrement restauré.
ginaire d’une famille bien
connue de l’entité gerpinnoise.
Design de 2013, certes mais tradition de fabrication respectée : le
bateau sera entièrement réalisé
en bois, en acajou plus précisément. Ceci explique le délai de
production (« au début, je pense
que nous sortirons un bateau par
mois ») et le prix, qui devrait tourner autour de 150.000 euros. « Il
Voici le prochain bateau Poncelet.
faut aussi comparer ce qui est comparable. Il s’agit quasiment de
pièces de collection, d’une finition
exceptionnelle. C’est un objet fait
pour durer, un bateau plaisir, si on
peut dire. Quand il est entretenu régulièrement, il peut durer 60, voire
70 ans. » Ce qui n’enlève rien à ses
performances : « Mon Poncelet de
1970 atteint les 90, 95 km/h.
Marc Deltenre est en tout cas
confiant : « La tendance est au vintage, aux manufacturiers, il y a sans
aucun doute un créneau à occuper,
d’autant que nous sommes les seuls
en Belgique à encore fabriquer ce
type de bateau de plaisance. » l
l DR/TOURING SUPERLEGGERA
VICE-PRESIDENT DE B4C
F.O.
LES PONCELET
Un vrai roman !
La saga de l’entreprise bruxelloise Poncelet a débuté avec Paul. À 17 ans, au
tout début du 20e siècle, il tente de
construire son premier avion. Ses premiers essais ratés seront suivis par une
série d’exploits jusqu’à la construction
du planeur le Castar, dans les ateliers de
la SABCA où il est employé. Après s’être
distingué en vol à voile, Paul construit
un appareil baptisé Vivette, qui bat le record du monde de durée en vol. Il crée
en 1933 sa société, spécialisée dans la
fabrication d’hélices en bois. Son fils Albert reprend le flambeau en 1953 et se
lance dans la construction de bateaux. Il
meurt à 61 ans et son épouse lui succède, avant de laisser sa place à la troisième génération, son fils Roger. Celui-ci
a développé les activités notamment
dans l’éolien et l’aviation légère. Parmi
les réalisations étonnantes des Poncelet,
on peut citer le moule des traîneaux
d’Alain Hubert et Dixie Dansercoer pour
leur expédition polaire de 2002. l
UNE AUTRE SPÉCIALITÉ
Charleroi, il y croit !
Marc Deltenre a démarré sa
carrière en 1975 dans l’entreprise familiale, la manufacture Léon Deltenre, leader
belge de la signalétique d’affichage des prix. En 1990, il
rachetait l’affaire à son père,
avant de la revendre en 2007.
Entre-temps, il avait créé en
2004 la société Delplex, spécialisée dans le thermoformage de matière plastique
pour en faire des plateaux
alimentaires, distribués dans
toute l’Europe. À son tour,
son fils a racheté Delplex :
« C’est une tradition de re-
vendre et pas de donner car il
faut apprendre la valeur de
l’argent », précise-t-il.
Carolo convaincu, il est co-
fondateur et vice-président
de B4C, un club d’affaires impliqué dans la vie de la métropole : « Nous avons choisi
de rester dans notre ville, à
titre professionnel et à titre
privé, plutôt que d’aller voir si
l’herbe est plus verte ailleurs
car nous croyons fermement à
l’avenir de Charleroi. Nous savons que le renouveau économique est en route. Les Carolos sont chaleureux, volontaires mais nous souffrons
d’un déficit d’image. Les politiques peuvent nous aider à redorer cette image, en menant
des actions concrètes et en faisant disparaître les erreurs du
passé. » l
F.O.
En bois aussi, les hélices
C’est le troisième volet des activités de Poncelet que Marc Deltenre continuera à assurer : la fabrication d’hélices d’avion… en bois massif, cela va
de soi .
Elles seront placées sur des reconstitutions d’ancêtres, mais pas seulement : « Certains propriétaires d’avion à hélice optent encore pour le bois,
notamment parce qu’ils trouvent que cela donne un look plus esthétique
à l’appareil. » l TH.P.
l THIERRY PORTIER
INSOLITE
Des ailes pour
la Nouvelle-Zélande
Un travail de bénédictin...
On découvrira par ailleurs
dans cette page que la famille
Poncelet a démarré ses activités dans l’aéronautique, au début du 20e siècle.
Du coup, dans ce domaine aussi, Marc Deltenre a décidé de
perpétuer la tradition, d’une
manière pour le moins originale.
En prévision du centième anniversaire du début de la Grande
Guerre, le néo-zélandais Peter
Jackson (réalisateur du « Seigneur des anneaux », entre
autres) a imaginé de faire
construire des reproductions
d’avions d’époque, modèle
Aviatic C1, de 1916.
Le Musée de l’Air de Bruxelles,
qui possédait de précieuses
pièces originales de cet appareil, a été associé au Musée de
l’Air d’Auckland, en NouvelleZélande et à celui du Bourget
en France pour la réalisation
de trois Aviatic.
Et c’est notre Carolo qui a em.
l TH.P.
porté le marché pour la réalisation des ailes : « J’en suis à près
de 2000 heures de travail. Tout
doit être parfaitement fidèle aux
plans originaux, et d’une précision infaillible puisque deux de
ces trois avions voleront pour de
bon. Il est évidemment hors de
question que nous fassions courir le moindre risque à un pilote. »
Il ne s’agit donc pas de réaliser
une « simple » maquette grandeur nature.
Il a fallu longuement se documenter, calculer, faire des projections, des découpes à la
commande numérique, assembler les pièces au millimètre
près…
Marc Deltenre ne s’est pas découragé pour autant, au
contraire : « Cela fait partie de
mes projets de revenir aux activités traditionnelles de Poncelet, et
donc de continuer à fabriquer
des avions ancêtres. » l
F.O.
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