LA CONFUSION SEIN/TETINE

Transcription

LA CONFUSION SEIN/TETINE
LA CONFUSION SEIN/TETINE
et le sevrage précoce
C’est encore aujourd’hui le sujet qui porte le plus à polémique dans les maternités de France ;
hormis dans les Hôpitaux Amis des Bébés (label IHAB) qui doivent respecter les 10
recommandations de l’O.M.S. et l’U.N.I.C.EF. dont le n°6 qui indique bien : « Ne donner aux
nouveaux-nés aucun aliment ni aucune boisson autre que le lait maternel » et le n°9 qui stipule lui :
« Ne donner aux enfants nourris au sein aucune tétine artificielle ou sucette ». Malgré les
nombreux écrits et études publiés sur le sujet, encore aujourd’hui la plupart des professionnels de
santé ne veulent pas reconnaître cette confusion sein/tétine. Certains même continuent de donner,
parfois à l’insu des mères, des biberons de complément ou des tétines-totoches aux nouveau-nés. Le
problème reste complexe dans une structure collective. Car, soyons réalistes ! Qui peut se permettre
de laisser hurler une dizaine de bébés en pouponnière toute le nuit ? Problème de locaux, de
matériels, de formations, manque de financement, diminution constante du personnel...
La situation des maternités en France est critique depuis plusieurs années déjà, avec de moins en
moins de petites maternités et de personnels qui, eux, font de plus en plus d’heures… Elle est
également critiquée dans de nombreux rapports ministériels, mais qui n’apportent pourtant jamais
de solutions concrètes et financières à la question complexe de « l’industrialisation de la
naissance », dénoncée déjà dans les années 1970 de grands médecins français de renoms comme
Frédéric LEBOYER (ancien pédiatre, conférencier et écrivain) ou encore Michel ODENT (ancien
gynécologue obstétricien, écrivain, conférencier et chercheur en Santé Primal à Londres).
Cependant, c’est surtout l’absence de formation initiale « spécifique en allaitement » auprès de
l’ensemble des professionnels de santé du secteur publique et privé, en PMI comme en libéral
(médecins, sages-femmes, puéricultrices, infirmières, auxiliaires de puéricultrice, aides
soignantes…), qui est le plus déploré ; notamment par le Dr Jack NEWMAN (pédiatre canadien
mondialement célèbre et précurseur des consultations d’allaitement – concours de consultant(e)s en
lactation IBCLC). Mais, la route sera encore longue avant la reconnaissance d’une telle formation
dans l’ensemble des écoles de médecines, infirmières, aides soignantes ou sages-femmes de France.
C’est pourquoi, il est souvent difficile de trouver des professionnels suffisamment bien informés sur
la question de l’allaitement maternel.
En attendant, les mamans devront partir elles-mêmes à la recherche des informations nécessaires au
bon démarrage de leur allaitement, et en cas de soucis de santé pour elles ou leurs enfants s’orienter
plutôt vers un spécialiste en allaitement maternel (Diplômé universitaire DIU allaitement ou
Consultant en lactation).
1
I Qu’est-ce que la confusion sein/tétine
C’est lorsque le bébé n’arrive plus à téter correctement suite à l’introduction d’un objet en silicone
(tétine de biberon, totoche, téterelle…) qui va perturber la position naturelle de sa langue et donc sa
succion :
A. Faire le test de l’index
- Ouvrir largement la bouche, lèvres retroussées et mettre l’index en entier au fond, jusqu’à la 2ème
phalange, comme si bébé prenait le sein. Observer la position de la langue (en bas vers l’avant au
niveau des gencives). Puis, mettre le bout de l’index seulement jusqu’à la 1ère phalange, comme
lorsqu’il presse une tétine (langue au fond en haut ou qui touche le bout de l’index).
Ce simple test illustre parfaitement et de façon concrètement le risque important de confusion
sein/tétine chez un nouveau-né a qui on propose plusieurs positions de langues surtout avant 6-8
semaines (plus grande maturité cérébrale) et le 2ème palier de croissance (3-6-3-6). Cependant, on
constate moins de risques après 2-3 mois, mais il existe toujours un risque de sevrage précoce au
delà. A trois mois, souvent bébé commence à choisir ce qu’il veut mettre lui-même en bouche avec
ses mains et sa langue, à l’inverse, il repousse les « objets étrangers ». C’est le réflexe inné de
« repousser avec la langue », certains bébés l’ayant plus que d’autres. Après quatre mois, la plupart
sont désormais capable de ramener les aliments avec la langue vers le fond de la gorge. Bébé
signale ainsi qu’il distingue bien les objets pour se nourrir de ceux pour jouer et expérimente, de
fait, divers matières de son environnement. A chaque âge de nouveaux acquis et de nouvelles
exigences !
Voilà pourquoi, sauf nécessité absolue et vitale, laissons lui le temps de bien maîtriser une
technique d’alimentation avant de lui en proposer d’autres (biberon, seringue, cuillère…). Donc, ne
rien mettre d’autre que le sein maternel dans la bouche de bébé avant 6-8 semaines minimum.
B. Les conséquences sur l’allaitement
- Les conséquences : au mieux, il y aura une baisse de la production, au pire un risque de gerçures,
de crevasses ou de refus du sein (« grève de la tétée »). Certains bébés ne feront jamais la
confusion sein/tétine et d’autres la feront dès le premier biberon de complément, la première
totoche ou téterelle (protège mamelon), etc. Et cela même plusieurs jours ou semaines après la
naissance. Alors pourquoi prendre un tel risque si bébé se porte bien ?
- Les 4 « ustensiles » à éviter : biberon, la tétine ou totoche, mais aussi la téterelle ou le tire-lait
manuel ou électrique – sauf si nécessité vitale. Car, tous sont susceptibles, en réalité, de provoquer
une confusion sein-tétine ; même si aucun de ces « outils modernes » n’est réellement mauvais en
soi. C’est leur utilisation abusive et précoce qui est dangereuse et nuisible à la poursuite de
l’allaitement maternel – sauf évidemment en cas de déshydratation avérées, faible poids,
hospitalisation, urgence, etc.
- Bref rappel historique : l’utilisation des premiers « biberons » ou plutôt « d’outils humains »
conçu pour nourrir un bébé remonterait à l’Antiquité avec la corne de vache ou les vases à bec.
Cependant les formes et usages de ces « ancêtres du biberon » ont varié au fil des temps, selon les
matériaux disponibles sur place, de la culture du pays ou des mœurs de l’époque, etc. (lire Tétons et
tétines de Marie-Claude DELAHAYE – édition Trame Way). Paradoxalement, le « biberon
moderne » en verre puis plastique s’est imposé au fur et à mesure des progrès scientifiques jusqu’à
avoir réussi aujourd’hui à supplanter le sein maternel dans nos sociétés de consommations – surtout
2
depuis les années d’après-guerre et les années 1960-70. Toutefois, certains pays européens ont
réussi à inverser le phénomène à temps ; par exemple, les pays nordiques où aujourd’hui plus de
90% des mères allaitent exclusivement au-delà d’1 mois et plus de la moitié au-delà d’1 an.
- Situation mondiale : Rappelons que l’utilisation du lait industriel peut avoir des conséquences
tragiques sur la santé des nourrissons à travers le monde. Avec notamment le scandale des « colis
humanitaires » qui ont entraîné la mort de millions d’enfant, parce que distribués volontairement de
façon mercantile, dès les années 70, aux pays les plus pauvres, sans se soucier des conditions
d’hygiène inadaptées, avec du lait en poudre dilué dans de l’eau impropre à la consommation, des
biberons non stérilisés, etc. Donc diarrhée, déshydratation, maladie et mort… En 1981, l’O.M.S et
l’U.N.I.C.E.F ont officiellement et clairement dénoncé les pratiques commerciales douteuses des
firmes de laits industriels en édictant un Code de Commercialisation des Substituts du Lait
Maternel. Certains points de ce code ratifiés par presque 200 états du monde entier (sauf USA par
ex), ont ensuite été intégrés au droit français, mais dix ans plus tard en 1991. Pourtant, ceci a permis
d’interdire notamment sur les publicités des termes trompeurs de « maternisé » ou la promotion
directe de « lait 1er âge » et le décret n°98-688 du 30 juillet 1998 a encore reprécisé et renforcé la
réglementation sur la fabrication, promotion et distribution des laits industriels en France. Mais, les
fabricants de lait arrivent toujours à contourner la loi en se glissant dans ses « failles » ; comme
avec le scandale des « blouses blanches » qui se proclamaient « conseillères en allaitement » auprès
des maternités, qui organisaient ensuite gracieusement les fameux « tours de laits » des marques.
Cependant, leurs propagandes continuent toujours de circuler aujourd’hui ; par exemple directement
au travers des divers publicités, cadeaux et échantillons gratuits des fameuses boîtes « roses ou
bleues » des maternités, laboratoires ou PMI, ou encore indirectement par des images et messages
récurrents sur les avantages du « lait 2ème âge » ; mais aussi partout dans les supermarchés comme
dans les associations caritatives ; de façon plus ou moins subtiles à la télévision, la radio ou la
presse (notamment dans les nombreux magazines pour parents), dans les jouets et poupées, les
livres et matériels scolaires, sur les cartes de vœux ou en décoration, etc. Ou encore plus subtil : en
vantant certains des avantages de l’allaitement maternel dans des brochures d’informations
distribuées aux professionnels de santé avec leurs logos dessus, bien visibles aussi sur des post-it,
stylos, carnets et autres objets promotionnels. Sans compter les subventions pour la recherche, achat
de matériels hospitaliers et autre…
Car, la réglementation française est beaucoup plus laxiste que celle d’autres pays plus
politiquement impliqués dans la promotion de l’allaitement maternel ; comme dans les pays
nordiques, par exemple.
II Les « mauvais » et les « bons » outils :
A. Présentation des 4 T : Tétine, Totoche, Téterelle, Tire-lait.
1) Le biberon même de « complément », c'est-à-dire qui va venir compléter le lait maternel soit
disant « insuffisant ». Il est malheureusement trop souvent rempli par du lait infantile « 1er ou
2ème âge » à base de lait de vache pasteurisé, lyophilisé et modifié, hypoallergénique ou épaissi,
« anti-reflux » ou autres.. Alors que le lait maternel pourrait être exprimé en première intention
et redonnés au prématurés ou nourrissons, qui ont des difficultés à téter au sein, à l’aide d’une
sonde gastrique via un DAL (Dispositif d’Aide à la Lactation), une Soft-cup (biberon-tasse), au
bol flexible, à la pipette ou une seringue à bout rond, (voir plus loin), etc. L’expression
manuelle étant le meilleur choix d’expression, mais sinon à l’aide d’un bon tire-lait à double
pompe. Car, c’est surtout la tétine de ces biberons de compléments qui risque d’entraîner une
confusion chez le nouveau-né de moins de 2 mois, plus que l’objet lui-même (voir plus loin
tétine). Il ne s’agit pas non plus de l’en « dégouter » en l’obligeant à le prendre trop tôt. Mais
de choisir le bon moment, d’une bonne façon et surtout avec la bonne personne (pas forcément
3
la mère) SI on souhaite passer à un allaitement mixte. Toujours privilégier le sein et le lait
maternel, toujours !
Car « le lait en poudre stérile n’est et ne sera jamais équivalente au lait maternel entier
et vivant ». Malgré les nombreux slogans publicitaires qui vantent leurs « innovations » depuis
des siècles, les marques de lait infantile n’arriveront jamais à le copier entièrement. De plus,
une copie sera toujours inférieure à l’original. Même les compléments vitaminés qu’on
donne en prévention aux nourrissons (type A.D.E.C., Fluor ou K1…) ne présagent pas du fait
que le lait maternel soit carencé en vitamines et qu’il soit moins bon ! C’est une prescription
générale, par prévention et non par omission. Au contraire, le lait maternel est toujours
parfaitement adapté à l’âge du bébé. Il varie en fonction de la journée et de la tétée (lait fluide
ou gras). Il est plus digeste, plus pratique, toujours disponible et à bonne température,
économique et surtout, il limite les risques d’obésité, d’infections et d’allergies précoces chez
l’enfant, sans compter les bienfaits pour la mère, etc. Ceux-ci, en générale, restant largement
sous-estimé et encore trop peu étudié et diffusé en France (voir thème N°1 sur les avantages du
lait maternel).
o Lire également La composition du lait maternel du Docteur Michel MASSOL, professeur à
l’université de Toulouse III, disponible sur les sites www.allaiter.free.fr ou
www.nutramag.info, et également le Programme National Nutrition Santé (P.N.N.S) – thème
Nutrition du Gouvernement Français, disponible sur le site www.sante.gouv.fr .
2) La tétine-totoche : A éviter aussi avant 6 semaines, car la langue risque également de mal se
positionner ; c’est à dire se placer vers l’arrière ou plus à droite ou à gauche, ou encore bébé
risque de téter ses gencives, etc. A moins qu’il ne vienne simplement mordre le sein de sa mère
dès l’apparition des premières dents, le prenant pour une tétine avec laquelle on peut jouer.
Alors que l’enfant exclusivement nourrit au sein, rentrera ses gencives et n’abîmera jamais la
poitrine de sa mère. D’ailleurs, toutes les femmes du monde qui allaitent plusieurs années leurs
enfants ne se laisseraient jamais mordre tout ce temps-là. C’est une question d’éducation,
comme ne pas taper ou griffer, etc. En fait, cet outil typiquement occidentale que la « totoche »,
peut entrainer de nombreux soucis et pas uniquement dentaires ou d’élocution, mais aussi
diminuer la production de lait de la mère à certains moments. Car, le bébé y trouve là un
palliatif au sein et y satisfera volontiers son besoin physiologique de succion. Ce besoin plus ou
moins intense libère en lui un cocktail d’hormones apaisantes ; telles que les endorphines pour
l’endormir ou l’ocytocine pour le plaisir... Mais si ce plaisir orale n’est pas assouvi petit, alors
l’enfant puis l’adulte pourra le réprimer et l’assouvir plus tard sur autre chose (doudou,
aliments, cigarettes, fétichismes, etc.). Surtout le sein se trouvera moins stimulé et donc
productif, puisque bébé ne le prendra que pour se nourrir et non pour boire, s’entraîner à téter
ou se réconforter. Cependant, si la mère s’absente ou souhaite se reposer un peu, il serait plutôt
préférable avant 6-8 semaines de lui proposer à téter le petit doigt de quelqu’un d’autre,
comme celui du papa par exemple. Placer alors la pulpe de votre auriculaire vers le haut, votre
doigt propre, sans ongle et profondément mis en bouche pour que la langue avance. Cela pourra
permettre aussi une rééducation progressive en cas de confusion sein/tétine sévère. Ensuite,
souvent après 6-8 semaines, bébé repoussera de lui-même le doigt avec sa langue (ou réflexe
nauséeux) et choisira peut être alors sa propre main ou poing ?
La technique de l’auriculaire : Beaucoup vous diront qu’ils ne souhaitent pas non plus que leurs
enfants prennent le pouce, mais il n’est pas dit qu’ils le prendront non plus si on leur propose
régulièrement et fréquemment le sein pour satisfaire ce besoin légitime de contact et de
réconfort. De toute façon, le pouce ou la tétine déforment autant les dents s’ils sont gardés trop
longtemps. Demandez à l’occasion à votre dentiste. Il vous répondra sûrement que le mieux
serait qu’il n’ait rien en bouche et justement l’allaitement long peut permettre cela (même
mixte ou symbolique). Car, beaucoup d’assistantes maternelles ou d’enseignants remarquent un
4
fréquent retard de vocabulaire ou une diction déficiente chez les petits ayant toujours une
totoche en bouche. Beaucoup les gardent plus longtemps qu’ils ne l’avouent d’ailleurs. Mais
cela arrive plus rarement aux bébés allaités longtemps – voir études internationales. Pas besoin
pour eux de palliatif, en fait ! Sans compter le nettoyage systématique de ce « nid à microbes »
ou la chasse régulière à la tétine perdue, surtout en pleine nuit. D’ailleurs, ce seront
généralement les mêmes personnes qui ventent les avantages de la tétine comme du biberon
(l’un allant souvent avec l’autre), qui omettent de parler de leurs réels inconvénients. Voilà
pourquoi, en attendant que bébé grandisse et apprenne à se séparer progressivement du sein
maternel, il faudra bien choisir : soit la tétine, soit le téton, mais pas les deux ensembles ; et
surtout pas avant 6-8 semaines au risque de compromettre le démarrage de l’allaitement
maternel.
3) La téterelle ou protège-mamelon : C’est une sorte de « bout de sein » en silicone transparent
ou en caoutchouc qu’on place sur l’aréole du sein (l’ovale pigmenté de la peau) et que le bébé
tète à la place du mamelon de sa mère (le bout du sein). Le lait vient ainsi directement en
bouche sans trop d’efforts pour le bébé et moins d’inconfort pour la maman fatiguée et
généralement blessée par des gerçures ou des crevasses récurrentes. Les principales raisons
avancées pour l’utilisation de protèges-mamelons sont, le plus souvent, les mamelons
ombiliqués ou soit-disant « mal formés », trop courts ou longs, une peau trop fine ou blanche,
etc. Alors que le plus souvent ces crevasses arrivent justement à cause d’une confusion
sein/tétine et/ou d’une mauvaise prise du sein, un frein de langue ou de lèvre, un bébé
hypotonique, d’un accouchement long, douloureux et difficile, etc. (voir le thème N° 7 sur les
problèmes de santé). En réalité, cela revient à mettre un pansement sur une blessure sans
chercher à en déterminer la cause ; et risque donc davantage de compliquer l’allaitement
maternel à court ou long terme.
.
Car, il s’agit plutôt d’un outil intermédiaire entre le sein, dont il la forme, et la tétine, dont il a
le goût et la texture. Pourtant le bébé comme la maman auront souvent beaucoup de mal à s’en
déshabituer (risque d’accoutumance) s’il est gardé plus de 2 ou 3 jours (risque accru de
confusion sein/tétine). De plus, à cause de l’humidité entre le silicone et la peau du sein et la
mauvaise prise du sein qu’il engendre, il y a de grandes chances de voir revenir de toutes
façons les gerçures, crevasses, canal bouché ou pire d’avoir une mycose ou une mastite
infectieuse par la suite. Surtout si la mère est fréquemment sujette aux mycoses vaginales ou
n’offre que peu ou mal le sein à bébé. Comme les bactéries et champignons prolifèrent vite
dans le lait, s’il y a contamination du lait par le sang, il y aura donc un risque de mycoses
récidivantes qu’il sera alors difficile de soigner. Même chose pour les coquilles recueille-lait
en plastique ou silicone, utilisées parfois pour désengorger les seins, mais qui, portées à
longueur de journée, ne feront que les stimuler inutilement (fuites de lait) et conserver
l’humidité (mycoses aussi). Elles seront plutôt à utiliser après 6-8 semaines, par exemple
pendant les tétées de nuit, une demi-heure maximum et ensuite jeter le lait ou le boire.
 Rappel : Ne jamais donner le lait qui a macéré plusieurs heures dans les coquilles à un bébé !
4) Le tire-lait : Il ne remplacera jamais l’expression manuelle du sein qui est LA technique la
plus simple et la plus ancienne d’expression du sein. Un savoir qui s’est également perdu
depuis plusieurs générations, principalement dans les pays industrialisés. Cependant, cela reste
LA meilleure méthode pour désengorger rapidement un sein, la plus économique et la plus
pratique aussi. Facile à faire partout (même aux toilettes), sans installation particulière, ni
vaisselle ensuite… Seulement, si la mère a appris très tôt cette technique, en fait dès les
premiers jours du post-partum ; sinon il lui sera extrêment difficile de se motiver. Par contre,
cela reste plutôt une méthode ponctuelle d’expression et pour la reprise du travail avec
expressions fréquentes et régulières, il peut être plus facile et rapide encore de faire appel à des
appareils modernes : soit mécaniques avec la main (3 semaines avant pour s’entraîner), soit
5
électriques avec ceux à double pompe (seulement 2 semaines). Ces appareils peuvent être
également utilisés en cas d’extrême nécessité : chez un bébé prématuré ou de petit poids ou
encore lors de problèmes de santé chez le bébé ou la maman (hospitalisation, infection du sein
ou autre…). Hormis ces cas particuliers, il s’agit là encore d’outils qui vont le plus souvent
venir compliquer l’établissement d’une bonne production de lait, sans trop de variations. Car la
mère devra parfois l’extraire à un moment où le bébé en aurait peut-être eu besoin et lui
redonner ensuite lorsqu’il ne le souhaite pas vraiment, sans compter les écarts entre pré-lait du
départ et lait gras de fin de tétée, de début ou de fin de journée, de nuit plus riche en graisses,
etc. Les femmes n’étant pas des vaches, elles peuvent également se bloquer avec un tel
appareil, n’ayant plus suffisamment de stimulations sensorielles et psychologies. C’est
pourquoi, il peut parfois être utile de coupler les deux, en démarrant par l’expression du sein,
plus sensuelle, et en terminant par le tire-lait, plus technique – ou vis et versa.
En conclusion, avant 6-8 semaines, on devrait intervenir le moins possible ou très rarement lors de
la mise en route de l’allaitement, en donnant si besoin le lait maternel avec d’autres méthode
alternatives de nourrissage et si possible qu’une ou deux fois par semaine ; pour rassurer ou
remplacer une absence occasionnelle de la mère et c’est tout ! En réalité, chacun de ces
« accessoires modernes » représente un risque potentiel pour la poursuite de l’allaitement. Alors
qu’avec un peu d’aide pour une bonne prise du sein, apprendre l’expression manuelle en prévention
et surtout avoir un maximum de sources informations diverses, on pourrait éviter des nombreux
soucis ensuite. Surtout qu’il existe beaucoup d’autres moyens pour nourrir un enfant, pendant un
temps limité, avant de pouvoir reprendre l’allaitement au sein par la suite.
B. Les méthodes de nourrissage alternatives
1) Dispositif d’Aide à la Lactation (D.A.L) : Une méthode à privilégier pour les prématurés qui
ont besoin d’être complétés pour assurer une bonne croissance et surtout perfectionner leurs
prises du sein - cela sous surveillance médicale et pour une durée d’un mois maximum
(risque d’accoutumance également). Mais, parfois aussi pour les nouveau-nés ayant une
succion faible (comme les bébés trisomiques) ou encore une malformation congénitale (fente
palatine ou « un bec de lièvre », mais aussi cardiaque, etc.). Il s’agit simplement d’un biberon
de lait maternel dont on fait partir de la tétine une fine sonde de gavage (de 1 à 1,5 mm de
diamètre et de 30 à 40 cm de long) à placer sur le sein jusqu’au mamelon en le laissant dépasser
d’1 cm environ au bout (avec ou sans sparadrap sur le sein). Le bébé reçoit ainsi suffisamment
de lait et en même temps « apprend » à téter efficacement au sein maternel.
2) Le doigt et le DAL : Idem, mais cette fois le DAL est placé sur la pulpe du petit doigt – à
utiliser, par exemple, quand le bébé fait déjà une confusion sein/tétine sévère et blesse les
mamelons de sa mère, lorsqu’il est trop faible pour arriver à téter le sein efficacement ou qu’il
le refuse lors d’une relactation… Il peut permettre aussi d’amorcer la tétée au doigt et
d’intéressé ensuite le bébé à prendre le DAL sur le sein. De toute façon, celui-ci reste toujours
une solution transitoire et doit être progressivement enlever du sein (avec puis sans DAL).
3) La pipette ou seringue coupée : On la remplit de lait maternel, recueilli dans un petit verre, ou
bol flexible et gradué par exemple, et on la dépose d’abord sur les lèvres du bébé pour qu’il
ouvre grand la bouche et tire la langue vers l’avant. On dépose ensuite quelques gouttes de lait
sur sa langue pour qu’il apprenne « à laper comme un petit chat ». Certes, le lait dégouline un
peu au départ le long du menton, mais bébé ira de plus en plus vite, et de toute façon c’est
toujours mieux que de jeter le lait maternel dans l’évier ensuite. La pipette permet surtout une
rééducation progressive de la langue ; mais inversée par rapport à la technique de l’auriculaire
qui lui va au fond de la bouche. Savoir que n’importe quelle méthode demande un certain
temps d’apprentissage, beaucoup de patience et prend autant de temps au final qu’une tétée ;
6
même s’il y a, certes, plus de « gaspillage » de lait. Le biberon demande lui aussi un certain
temps d’apprentissage, et à cet âge risque davantage de contrarier l’allaitement. C’est au choix !
4) Le bol flexible et gradué : Même technique que la pipette : le bébé doit tirer la langue vers
l’avant et laper le lait maternel. Le bol doit être souple pour mieux le pincer entre le pouce et
l’index. Parfois, cette méthode est préférable aux autres et peut même être plus rapide. En fait,
cela dépend surtout des bébés !
5) Le gobelet à bec : Sorte de gros biberon ou gourde avec un bec verseur que le bébé plus grand
(et plus souvent après 6 mois) peut utiliser pour se nourrir en l’absence occasionnelle de sa
mère. Mais, il peut aussi être utilisé dans le cadre d’une reprise du travail après 3-4 mois en cas
de rejet du biberon classique, en accord avec la nourrice et le bébé bien sûr. Autres
possibilités aussi : pot de yaourt en verre, pot de confiture, etc. Faire preuve d’imagination !
6) La cuillère : Proposer de laper le contenu de la cuillère avec la langue toujours vers l’avant ;
technique plutôt utile après 4 mois à cause du réflexe de repousser avec la langue qui apparaît à
cet âge. On peut épaissir aussi le lait maternel, mais en fonction des indications de votre
médecin traitant (risque d’obésité, d’allergies, de coliques ou constipations, etc.). D’abord, avec
de la farine de riz, par exemple, (bouillie des grands-mères) ou autres céréales sans gluten, mais
toujours de façon occasionnelle. Le mieux étant toujours d’attendre entre 6 et 12 mois pour
l’introduction progressive d’autres aliments liquides ou solides, ou même boissons autre que le
lait maternel ; qui reste le meilleur choix jusqu’à 2 ans ou plus (selon les recommandations de
l’Organisation Mondiale de la Santé).
III Le sevrage trop précoce
A. Différence entre un sevrage brutal, planifié et naturel
- Le sevrage est dit « brutal » lorsque la mère est obligée de sevrer prématurément son bébé pour
quelque raison que ce soit et cela par rapport à son projet d’allaitement avant la naissance ; par
exemple à cause de problèmes de douleur au sein ou au mamelon pendant ou après son séjour à la
maternité, à cause d’une confusion sein/tétine, de problèmes de santé chez le bébé ou chez la mère
(traitements, médicaments ou opération), par manque de confiance en soi (peur de « manquer de
lait »), à cause de la reprise rapide du travail, etc. Le terme de sevrage « brutal » s’applique lorsque
la mère à dû sevrer trop rapidement, souvent avec l’aide de médicaments, plantes… en quelques
jours.
- Le sevrage est dit « planifié » lorsque la mère a prévu une date butoir pour le sevrage et désire
volontairement et sans « pressions extérieures » espacer les tétées, les raccourcir ou les remplacer
progressivement 2 à 3 semaines avant la date. Il vaut mieux souvent remplacer une tétée par « autre
chose » au milieu de l’après-midi ou de la matinée et garder, en dernier, celles du soir et/ou de la
nuit. Cela en prenant bien soin de laisser 2 ou 3 jours minimum d’écart, afin de ne pas rendre le
sevrage trop douloureux ou inconfortable. La mère peut essayer aussi de conserver deux tétées par
jour si elle et le bébé le désirent, mais plutôt après 9 mois (automatisme mammaire). Car, avant, il y
a souvent des risques d’engorgement si elle ne tire pas au moins 2 fois par jour son lait et peut voir,
par conséquent, diminuer trop rapidement sa lactation. Il existe plusieurs types d’allaitement hormis
l’allaitement exclusif (complet, mixte, symbolique), mais en France la planification du sevrage est
la méthode la plus fréquente ; pour diverses raisons : le congé de maternité trop court, la reprise
précoce du travail ou des concours à passer, les modes de garde inadaptés, le manque
d’informations, etc.
7
- Le sevrage est dit « naturel » lorsque l’enfant, en accord avec le désir de sa mère, décide à un
moment donné de changer d’alimentation (de grandir !) et donc de se sevrer « tout seul » ; en
espaçant régulièrement les tétées. Cela concerne plutôt les enfants de plus de 1 an et demi ou 2 ans
en réalité. Auparavant, on parle davantage de sevrage « planifié », programmé plus ou moins
consciemment ou inconsciemment par les parents ou la famille. Les allaitements longs étant plutôt
rares en France, le sevrage « naturel » l’est aussi. Si la mère ou le bébé ne sont pas réellement prêts
à arrêter l’allaitement maternel ensemble, c’est que peut-être il ne s’agit pas encore du bon
moment ? La maternité d’une femme se déroule un peu comme un film avec un début (la
conception puis la grossesse), un milieu (l’accouchement et le démarrage de l’allaitement) et une
fin (l’allaitement et le sevrage). Il serait dommage de garder de l’amertume à cause d’un début ou
d’une fin « ratée » ou « mal faite », trop rapide, etc. Même s’il n’est pas toujours facile de dire « au
revoir à son lait » et de sevrer son enfant - et cela à n’importe quel âge en réalité. Mais, il y a
effectivement des âges et des moments plus faciles que d’autres pour le sevrage et des histoires qui
se terminent parfois simplement, sans trop de regrets ou avec, du moins, un certain « lâché prise »
de la mère ! En fait, il s’agit toujours de prendre en considération les sentiments des deux, mère et
enfant, et surtout de leur laisser le temps.
Attention le refus brutal du sein à n’importe quel âge n’est pas naturel !
Et le père dans tout cela, me direz-vous ? Certainement, un élément important dans le démarrage
comme le bon déroulement de l’allaitement, il le sera aussi au moment du sevrage. Et ce qu’il dira
ou pas, fera ou pas, jouera énormément dans cette relation à trois (ou plus). Mais, son rôle de
« tierce séparateur », comme l’envisage beaucoup de psychologues modernes, est largement
surestimé et pourrait même conduire à de nombreuses incompréhensions et conflits de couple par la
suite. Si le dialogue, l’écoute et la communication au sein des parents n’est pas très bonne à la base.
Respecter les souhaits et désirs de l’autre étant effectivement essentiel au moment du passage
délicat de la maternité à la « parentalité » (voir thème sur la place du père et de l’entourage)
B. Le sevrage précoce : un vrai traumatisme !
En fait, comme il a déjà été démontré à la question précédente sur la production de lait : plus les
mères allaitent longtemps, plus elles sont satisfaites ; surtout au-delà de 3 mois. D’après une
Enquête réalisée dans 8 maternités de la Loire, (par la COFAM en 2004), près de 80 % des
primipares déclarent vouloir allaiter leur bébé au moins 3 mois et 32 % 6 mois ou plus. Alors
qu’après l’accouchement, seulement 46 % de ces mères ayant allaité moins de 4 semaines sont
satisfaites et plus de 90 % quand l’allaitement dure plus de 4 mois.
En résumé, si le sevrage précoce intervient avant le 3ème palier de croissance du 3éme mois la mère
ne gardera souvent qu’un mauvais souvenir de son allaitement, pensant que tous ses soucis, fatigues
ou douleurs sont dû à l’allaitement maternel ; et risque donc de ne plus vouloir allaiter ses autres
enfants par la suite. Tout ceci peut représenter un vrai traumatisme physique et psychologique.
Alors qu’ailleurs dans le monde, les femmes allaitent souvent avec plus de soutien, moins
d’angoisses et de pressions que « dans les pays où le biberon reste la norme sociale».
De nombreuses études randomisées contrôlées (www.pub-med.gov) prouvent que l’utilisation trop
précoce d’outils modernes en silicone, au cours de la phase de démarrage des premiers 3 mois,
tendent inévitablement à réduire la durée de l’allaitement maternel, et à le rendre surtout plus
compliqué et douloureux. Laissant parfois dans le souvenir des femmes « modernes » l’image de
l’allaitement comme étant contraignant, frustrant, difficile, archaïque… Ce qui est très loin d’être le
cas, en réalité, lorsqu’il d’agit d’un allaitement et d’un sevrage « naturel » et non d’un allaitement et
d’un sevrage « médicalement assisté ».
8
En résumé :
Ainsi, comme pour la grossesse et l’accouchement, l’allaitement puis le sevrage peuvent être plus
ou moins compliqués, involontairement ou non, à cause du milieu hospitalier « iatrogène » et
intrusif ou encore à cause d’un entourage familiale ou professionnel, parfois ignorant et mal
informé. L’enfer n’est-t-il pas pavé de bonnes intentions ? Alors qu’il faudrait plutôt « laisser
faire » et surtout laisser vivre à la mère son accouchement comme son allaitement avec confiance et
bienveillance.
Donc, si dès la maternité ou une fois rentrée à la maison, la mère :
-
donne des biberons de complément,
exprime régulièrement son lait au tire-lait (électrique ou manuel),
utilise des téterelles ou des coquilles recueille-lait,
donne fréquemment une tétine à son bébé,
Sachez qu’elle aura plus de 50 % de risque d’avoir quelques petits soucis par la suite :
o soit que son bébé fasse une confusion sein/tétine et qu’il lui crée des crevasses en
plaçant mal sa langue.
o soit qu’ayant des compléments, il ne tète inégalement et lui provoquera des
engorgements ou pire des lymphangites, mastites ou abcès du sein.
o soit qu’il refuse de téter sans téterelle et, ne stimulant pas suffisamment le sein, la
production lactée ne vienne à diminuer comme « peau de chagrin ».
o soit que la téterelle ou la coquille recueille-lait ne crée crevasses ou mycoses.
o soit qu’il se mette à mâchouiller ou pire à mordre le sein comme une totoche au
moment des premières dents.
o soit simplement qu’il refuse le sein et se sèvre prématurément.
Cela fait tout de même beaucoup de risques à prendre à cause de simples ustensiles qui, au lieu
d’aider la mère, finiront malheureusement souvent par un sevrage précoce ; à moins que le
problème ne soit résolu à temps. Dans tous les cas, il faudra contacter rapidement quelqu’un
d’expérimenté dans l’allaitement, c'est-à-dire une consultante en lactation (www.consultantslactation.org) ou un professionnel de santé favorable à l’allaitement et si possible spécialisé avec un
Diplôme Universitaire d’allaitement (DIU), ou sinon une sage-femme libérale ou une puéricultrice
de PMI bien informée ; pour savoir cela : appeler une des nombreuses associations promouvant
l’allaitement, faisant partie de la C.O.F.A.M. (Coordination Française pour l’Allaitement
Maternel) qui vous dirigera vers quelqu’un de compétent dans votre région www.coordinationallaitement.org – ou encore notre association au 03.87.24.12.20. - [email protected] www.danslesbras.org
Stéphanie KELLER – Dans les Bras
Mars 2011
Note : Pour ceux et celles qui veulent en savoir plus sur cette confusion, ainsi que sur l’analyse des
mythes concernant l’allaitement ; lire les articles de Jack Newman, pédiatre et ancien consultant de
l’UNICEF pour l’Initiative Hôpital Ami des Bébés en Afrique (95 pages à télécharger gratuitement) sur
le site : www.info-allaitement.org
9

Documents pareils