Au sud du 35e parallèle, on attend les Québécois

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Au sud du 35e parallèle, on attend les Québécois
DOSSIER
Récession
aux États-Unis
Au sud du
35e parallèle,
on attend les
Québécois
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Camping Caravaning
Photos : Paradise by the Sea
De nombreux snowbirds se
préparent à migrer vers des
climats plus chauds. Malgré
les soubresauts économiques
qui secouent le pays de l’oncle Sam, la plupart des proprios de terrains de camping
du sud des États-Unis s’attendent à un bon hiver… et à une
augmentation significative du
nombre de caravaniers provenant du Québec.
Par Claudine Hébert
L
e prix élevé de l’essence et le spectre
d’une autre récession qui plane sur nos
voisins du Sud n’ont pas l’air d’inquiéter
les gestionnaires de terrains de camping sous le
35e parallèle. Au contraire. Pour plusieurs d’entre
eux, les affaires n’ont jamais été aussi bonnes. Une
vigueur que de nombreuses destinations de camping
attribuent sans détour à la force du dollar canadien
qui se maintient à parité depuis bientôt un an.
« Notre clientèle canadienne ne cesse d’augmenter
depuis les trois dernières années. Elle représente
actuellement plus de 35 % des campeurs qui
occupent les quelque 1 500 emplacements destinés
aux maisons mobiles et aux VR sur notre camping
pendant l’hiver », souligne Jeff Dickson, directeur
des ventes du Sun N Fun RV Resort, à Sarasota, en
Floride.
Habitué de voir une clientèle canadienne majoritairement ontarienne et néo-écossaise, M. Dickson
constate que de plus en plus de Québécois se laissent tenter par la côte ouest de la Floride… et particulièrement par le Sun N Fun, un terrain 5 étoiles
où les emplacements coutent entre 50 $ et 75 $
par jour selon la durée du séjour.
« Plus de la moitié des 26 maisons mobiles de
notre parc qui ont été vendues cette année à des
Canadiens ont été achetées par des résidents du
Québec. Du jamais vu à notre camping ! », note
M. Dickson, qui travaille au Sun N Fun depuis 1985.
Selon Bobby Cornwell, directeur de l’association
des campings et parcs de VR de la Floride et de
l’Alabama, les réservations provenant des Canadiens pour la saison hivernale sont effectivement
en hausse. C’est le cas notamment des destinations
qui offrent davantage d’activités et de confort aux
résidents de longue durée. « Les campings limités à
des aires de stationnement ont tendance, eux, à
enregistrer de légères baisses de clientèle », dit-il.
Page de gauche :
Le Paradise by the Sea à San
Diego accueille un grand
nombre de campeurs canadiens attirés par le décor
enchanteur… et motivés par
la force de notre dollar.
Le Sud-Ouest américain connait lui aussi ses
heures de gloire auprès des Canadiens. Au Mesa
Spirit RV Resort, en banlieue de Phoenix, en
Arizona, plus du tiers des luxueux 1 800 emplacements de l’endroit sont occupés l’hiver par des
Photos : Sun N’Fun RV Resort
Du côté de l’Arizona
Page de droite :
Le Sun N Fun RV Resort en
Floride reçoit de plus en
plus de Québécois.
octobre/novembre 2011
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DOSSIER
campeurs du Canada. « Et cette année, cette clientèle augmentera encore de 5 % », souligne Jim
Beach, directeur général du Mesa Spirit. M. Beach
est d’avis que le tarif de jour à 36 $ et celui pour
trois mois à 470 $ — soient les prix moyens des
campings de la région — ainsi que le cout de la vie
très abordable en Arizona constituent des éléments très attrayants pour les snowbirds canadiens. Au même titre que la température.
Même son de cloche au Palm Creek Golf & RV
Resort, à Casa Grande. Ici aussi, plus d’un client
sur trois provient du Canada. Principalement de la
Colombie-Britannique et de l’Alberta. « Actuellement, les Québécois représentent à peine 5 %,
mais ils se font plus présents depuis deux ans. Je
crois qu’ils découvrent peu à peu que l’ouest des
États-Unis est beaucoup plus amical qu’ils ne le
croyaient… », fait remarquer Wendell Johnson,
directeur général du Palm Creek.
L’accès internet
au camping est un
attrait important
pour la clientèle
québécoise.
L’an dernier, au plus fort de l’hiver, le taux d’occupation de ce camping, situé entre Phoenix et
Tucson, a franchi le cap des 95 %. Un record pour
cette destination qui jouit d’un parcours de golf de
18 trous dans sa cour. Pour justement inciter les
snowbirds, et particulièrement ceux du Québec,
à venir installer leurs pénates dans le désert
arizonien, le Palm Creek propose une promotion
« première visite » à tous ses nouveaux clients.
« Vous louez une semaine, on vous en offre une
gratuite. Vous louez deux mois, on vous offre deux
semaines gratuites. Vous louez trois mois… trois
semaines gratuites. Et si vous louez quatre mois, on
vous offre un mois gratuit », explique M. Johnson.
Page de gauche :
Le Bella Terra : un
camping exclusivement réservé aux VR
de classe A dont une
large partie de la clientèle est canadienne.
Pendant ce temps au Texas et en Californie
Photos : Bella Terra
Page de droite :
Le Palm Creek Golf &
RV Resort n’hésite pas
à offrir des promotions
avantageuses pour
attirer les nouveaux
clients.
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Camping Caravaning
Dans la vallée du Rio Grande, on assiste depuis
cinq ans à une forte augmentation de caravaniers
canadiens. Y compris du Québec. Au Sleepy Valley
Resort, à Mission, qui compte 500 emplacements,
plus d’un campeur sur trois provient du Canada.
« Et près d’un sur cinq vient du Québec », indique
fièrement Glenna Clark, directrice générale du
camping qui commence à peine à courtiser le
marché canadien-français. N’empêche qu’elle met
déjà le paquet. La clientèle québécoise prend tellement d’ampleur dans ce camping texan qu’il
double, cet hiver, les allées réservées à la
pétanque, qui passeront de 4 à 8. Au Pleasant Valley Resort, qui fait partie du même réseau que le
camping de Mme Clark, le nombre de terrains de
pétanque triplera de 4 à 12. « On a tout avantage
à séduire cette nouvelle clientèle de snowbirds qui
découvre le sud du Texas », soutient-elle.
Le gestionnaire croit cependant que le véritable
élément qui contribue au succès de son camping
auprès des Canadiens demeure l’internet. « Les
campeurs d’aujourd’hui font de plus en plus de
recherche dans internet. Ce qui a sans doute permis à notre camping familial 5 étoiles — et à plusieurs autres établissements dans le sud-ouest
des États-Unis — de se faire connaitre auprès des
caravaniers canadiens. »
ET LA MARÉE NOIRE DE BP ?
Le déversement de pétrole de la plateforme de BP dans le golfe du
Mexique, survenu en avril 2010, fait désormais partie du passé. Les
plages de cet immense plan d’eau, comme plusieurs d’entre vous
l’avez sans doute constaté l’hiver dernier, se portent bien. N’empêche que la catastrophe écologique a profondément éprouvé le
tourisme dans le golfe du Mexique. Et plus particulièrement l’industrie du camping.
Bien que la saison hivernale soit importante pour les terrains de camping au sud du 35e parallèle, les établissements bordant le golfe du
Mexique enregistrent normalement près de 75 % de leurs revenus
annuels pendant l’été. « Le tort causé par les reportages médiatiques
a été dévastateur pour notre industrie », fait savoir Patrick O’Neill,
directeur général du Camping on the Gulf, à Destin, en Floride. À l’été
2010, plusieurs campeurs ont déserté cet établissement collé directement sur la plage. « Pourtant, des milliers de travailleurs et bénévoles ont ratissé les plages pour éliminer tout amas de pétrole. Tout a
été enlevé en quelques heures », dit-il.
« Les seules flaques de pétrole que j’aie vues… étaient à la télé »,
ajoute pour sa part Jeff Dickson, directeur des ventes au camping
Sun N Fun, à Sarasota, en Floride. Ce dernier en a lui aussi voulu aux
Photos : Palm Creek Golf RV Resort
Même les terrains de camping de la Californie, un
état qui frôle la faillite, tirent eux aussi leur épingle
du jeu grâce aux snowbirds du Canada. Au camping Paradise by the Sea à San Diego, les deux
tiers des 102 sites sont réservés par des Canadiens
l’hiver. Des campeurs parmi lesquels on trouve
une dizaine de Québécois. « Merci à la vigueur de
votre dollar », indique d’emblée Erik Sampson,
directeur général du camping.
médias. Le camping, situé à une dizaine de minutes de la baie de
Sarasota, a néanmoins vite fait un trait sur cette mésaventure. Le taux
d’occupation du terrain de 1500 emplacements a même atteint les
100 % au mois de janvier 2011.
Le retour à la normale a toutefois été difficile pour d’autres. Notamment au Bay Hide Away RV Park and Campground, à Bay Saint Louis,
au Mississippi. « Les nombreux reportages sur la marée noire n’ont
pas seulement grevé notre saison estivale. Nous avons enregistré une
importante baisse au chapitre des réservations de séjours longue
durée (de 3 à 6 mois) pour les mois d’hiver. Influencés par les
médias, ces clients qui réservent généralement au cours de l’été ont
préféré une autre destination à la nôtre », déplore Michele Richard,
propriétaire de ce camping de 43 emplacements.
La situation n’a guère été plus reluisante sur les côtes de l’Alabama.
Au plus fort de la crise, le taux d’occupation du Bella Terra, un chic
camping ouvert exclusivement aux VR de classe A et situé à Foley, a
glissé sous la barre des 10 %. Et ce taux n’a guère dépassé 50 %
l’hiver dernier. « Heureusement, on commence enfin à voir la lumière
au bout du tunnel », dit Tripp Keber, directeur général du groupe Bella
Terra Realty Holdings. M. Keber soutient que le taux d’occupation du
camping de 174 emplacements devrait atteindre 80 % cet hiver. De
ce nombre, près d’un campeur sur cinq sera d’origine canadienne.
Soit le double de Canadiens qui visitent le camping depuis son
ouverture en 2008.
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