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Enquête
Emploi : le secteur des agences de voyages
maintient une vitesse de croisière
“Tous secteurs
confondus,
pour une
embauche
définitive,
on compte
trois personnes
recrutées.”
(Insee)
Depuis quelques années, le marché de l’emploi chez les voyagistes a plutôt
tendance à stagner. Chaque année, 1 500 à 2 000 recrutements sont effectués.
Les agents de comptoir sont les postes à pourvoir en priorité. Loin devant les
f o rfaitistes. La vente constitue encore et toujours le nerf de la guerre des entreprises.
L
e secteur de la distribution
reste celui qui crée le plus
d’emplois . Il constitue la tr adition nelle porte d’entrée pour les
nouveaux dipl ô m é s , su rtout s’ ils
sont mu n is du pr é c ieux sésame ,le
BTS Tou risme (environ 2 500 délivrés par an).“Le diplôme ouvre aujourd’hui les portes des entrepris es,
conf irme Benoît Terrier,animateur
de l’équipe Tou risme au sein de
l’ANPE Vaugirard. Même si, paradoxalement, les professionnels estiment encore au jourd’hui, et apr è s
avoir été remanié en 2003, qu’il ne
correspond pas à leur besoin. Sans
doute parce qu’il n’y a pas mieux,
qu’il n’y a pas autre chose”. Mais,
plus que la formation,c’est la capacité d’ ad apt ation et l’ ex p é rience
qui priment.
L’ an passé, 7 012 of fres d’ emploi
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● BUS & CAR - N° 809
portant sur le poste de technicien
de vente ont été déposées dans les
agences locales de l’ANPE, dont
46,8 % en provenance d’entreprises
de moins de neuf salariés. La plupart d’ entre elles concernait des
postes en contrat à durée indéterm inée (CDI).Qu ant au nombre de
demandes d’ emploi, il était de
14 396.Les candidats à l’ embauche,
âgés majorit airement entre 25 et
49 ans ,dispos aient pour la majorité d’un bac+2. Dans le secteur de
la production , 767 of fres ont été
proposées pour 3 559 demandes.
“Sur les trois dernières ann é es , le
nombre d’offres d’emploi tend à se
stabilis er,relève Benoît Terrier. Environ 1 500 à 2 000 recrutements
sont réalisés par an sur les postes
d’ agents de comptoir et de forfaitistes , en sachant que la proportion
entre les deux métiers, en terme de
besoins en entrepris e , reste constante, soit respectivement 80 et 20 %.”
Pas de doute,les profession nels restent à la recherche de vendeurs.
Problèmes d’offres
ou de demandes ?
“Il y a cep end ant un décalage entre
le dis cours des entrepris es qui af f irment vouloir des profils de commerciaux, et le libellé des offres qu’elles
nous propos ent, où les comp é tences
dem and é es restent avant tout techniques”, rel è ve Benoît Terrier. Et
c’est souvent une déception pour
des étudi ants qui ont une vision
romantique de ce métier,sans avoir
la fibre commerciale. Ils rêvent de
voyages. Mais, confrontés à la réalité, c’ est tout autre chos e. “Il y a
toujours autant de jeunes attirés par
les métiers du tourisme, note Micheline Teupootahiti, administrateur à l’APS chargé de l’emploi.Il est
important qu’ils comprennent que
l’une de leurs principales missions
sera de vendre une prestation de
service. En cela , le BTS Tourisme
mériterait d’ ê tre encore plus axé sur
les techniques de ventes.” Un message qui, selon les professionnels,
doit également comporter quelques
“informations vérités”sur les conditions de tr avail dans les agences
de voyages…
Le stage, un pari
gagnant-gagnant
Pour accéder au premier emploi,les
nouveaux diplômés ne semblent
pas rencontrer de dif f icult é s ,
contr airement à cert aines craintes
exprimées (voir p. 60). Un bon
point pour le BTS Tou risme , qui
comprend dans son cu rsus douze
à qu ator ze sem aines de st age en
entreprise. “L’ employeur qui accueille ces jeunes peut rep é rer les
meilleurs d’ entre eux pour d’ é vent uelles emb auches” ,glisse Micheline Teupoot ah iti.
Quant au jeune demandeur d’emploi , il aura bes oin d’une mise à
n iveau et d’un temps d’ ad apt ation
dans l’ entrepris e. Les professionnels doivent faire preuve d’écoute,
d’ ouvertu re et de patience. “Pour
l’employeur, prendre un débutant
est un investissement . Il faut lui
cons acrer du temps, l’accompagner,
être disponible, pou rsuit - elle. Les
entreprises en ont conscience , et
beaucoup n’ h é sitent pas à s’ engager dans cette démarche.”Les début ants présentent des avantages que
les patrons ont parfois tendance à
négli ger. Ils sont “moins chers” ,
plus malléables et souvent plus dynamiques.
Des candidats souvent
expérimentés
À l’ANPE Tourisme,les demandeurs
d’ emplois ne sont pas tous début ants. Il y en a même très peu.“Ce
sont plutôt des candidats qui ont déjà de l’expérience dans le secteur touristique, toutes activités confondues,
et qui pens ent pouvoir occuper, par
exemple, le poste d’agent de comptoir” ,s ouligne Benoît Terrier.Dif f ic ile.En règle générale,le profil id é al
d’un candidat se résu me à la combinais on :“BTS,plus deux ans d’ expérience avec maîtrise des GDS.”
Dans ce cadre,l’ANPE Tou risme est
en mesure d’apporter une aide complément aire aux pers on nes en recherche d’ emploi en organis ant des
formations aux GDS,mais aussi des
ateliers pour réalis er des enquêtes
sur les différents métiers du tou risme , ou encore d’un “club” agiss ant
VERS UNE REMISE À PLAT
DES FORMATIONS AU TOURISME
Les professionnels sont soucieux de ne pas trouver les salariés qu’ils
souhaitent, tandis que les salariés s’inquiètent des niveaux de
rémunération et des perspectives de carrières qu’ils peuvent espérer
dans le secteur du tourisme… 40 000 emplois non pourvus en France…
Le rapport remis en début d’année par Jean-Jacques Descamps à la
demande de Luc Chatel, alors secrétaire d’État au Tourisme, a fait un
état des lieux sur la formation aux métiers du tourisme. Des pistes sont
proposées : mise en place d’une veille sur l’évolution des métiers et
des demandes des professionnels, renforcement de la formation
permanente, meilleure interaction entre les différents opérateurs
privés et publics, ou encore encouragement à la formation
entrepreneuriale des jeunes qui s’engagent dans le secteur du
tourisme. Des actions concrètes seront annoncées les 18 et 19 juin
lors des Assises nationales du tourisme.
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Enquête
ÉTUDIANTS : QUELLES SONT LEURS ATTENTES ?
Entre janvier et février 2008, l’APS a enquêté auprès de 1 000 étudiants
en tourisme pour connaître leurs motivations, perceptions et attentes
sur leur futur métier. À la question “le secteur du tourisme est-il un
secteur d’avenir ? ” 89 % ont répondu par l’affirmative, et 76,6 %
estiment qu’il est un créateur d’emplois. En s’engageant dans cette
filière, 68,3 % des étudiants disent croire en l’avenir de l’activité, et
65,9 % estiment qu’il y a une possibilité d’y faire carrière.
Ils sont peu nombreux à mettre en avant le salaire et la sécurité
de l’emploi dans leur motivation (respectivement 5,2 % et 12,8 %).
Si 49 % estiment que les cours et les programmes dispensés
correspondent à leurs attentes, ils sont 55,4 % à rencontrer
des difficultés pour trouver un stage. Enfin, la recherche d’un premier
emploi ne semble pas présenter de difficulté pour 61,8 % des étudiants,
qui affichent majoritairement leurs souhaits de travailler ans un grand
groupe ou une grosse entreprise.
À l’ANPE Tourisme, les candidats sont reçus par un conseiller. Ils ont
également à disposition un espace de travail avec les outils nécessaires à la
recherche d’un emploi : accès internet, ligne téléphonique, ouvrages…
comme un réseau pour les dem andeu rs d’emploi. Et,pourtant,en dépit de cette organisation,il semblerait toujours aussi diffic ile de trouver
des candidats.Selon les professionnels, de nombreux postes ne sont
pas pourvus par manque de
connaiss ance des métiers.
Un secteur peu
rémunérateur
À moins qu’ il ne faille chercher du
côté des salaires , peu at tir ants. Les
professionnels ex p é rimentés ont
des exigences et réclament au minimum un alignement sur leu rs
derniers salaires. En vain. Ils préfèrent parfois rester au chômage,
souvent plus rému n é r ateur que
l’entrepris e.En fin de droit ,ils fin iront par céder, avec le risque d’ ê tre
resté à l’ é cart d’une profession qui
évolue sans cesse.
Pour les jeunes,la première fiche de
paye a de quoi faire déchanter. Un
début ant occupant le poste d’ agent
de vente et/ou de réservations et/ou
billet tiste touchait, au 1 er juillet
2007, l’équivalent du Smic(1).
“C’est peu, alors qu’on lui demande
d’avoir de nombreuses compétences,
dont un niveau de technicité élev é ,
indique Micheline Teupootahiti . Ce
n’est pas très motivant, même avec
le vers ement de primes annuelles
lorsque les objectifs sont at teint s .”
Bien entendu,d ans un secteur atomisé compt ant plus de 5 000
agences de voyages , des disparit é s
ex istent selon les points de vente et
leur implant ation géograph ique.
Beaucoup de profession nels privilégient ainsi les avant ages soc i aux
plutôt que la rémunération pu re.
Ce qui peut ex pliquer aussi l’ importance du turn - over dans les
agences. Selon les syndicats des salariés, il est évalué entre 5 et 10 %,
en fonction des entrepris es .
Malgré tout, l’ANPE Tou risme note
que les salariés restent davantage en
poste qu’il y a quelques années .Autre
tend ance : la mobilité est moins élevée en province qu’en Île-de-France.
Petits efforts pour gros
effets ?
Côté salaires,les chos es ont récemment évolué. La dernière vague de
négoc i ation concernant la grille salariale liée à la nouvelle classification (encadré ci-dessous) a abouti à un accord de principe entre le
Snav et qu atre syndicats (CFDT,
CFE-CGC, CFTC et FO). Il doit à
pr é s ent se tr aduire dans un avenant à la convention collective que
les partenaires soc i aux de vr aient
signer ce mois-ci. Les nouvelles
classif ications seraient donc mis es
en place en juillet 2008, les entreprises ayant un délai de six mois
pour les mettre en œuvre.
Au - delà de salaires jugés peu en
adéquation avec le travail demandé,les perspectives d’évolution de
carri è re ont aussi de quoi provoquer des désillusions . “Il est bien
sûr plus fac ile d’ é voluer dans de
grosses structures que dans de petites,
r appelle Micheline Teupoot ah iti.
Mais les débutants ne doivent pas
CLASSIFICATION DES EMPLOIS
Le 26 mai dernier, un accord sur la
révision des classifications et la
revalorisation sur trois ans des
salaires minima a été signé entre le
Snav et quatre organisations
syndicales. Quarante cinq emplois
types, contre 120 actuellement, ont
été définis. De plus, les niveaux
passent de dix à sept : deux
groupes “employés” (A/B), trois
groupes “techniciens/agents de
maîtrise” (C/D/E) et deux groupes
“cadres” (F/G). Les postes de
“cadres dirigeants/supérieurs”
sont désormais classés “hors
grille”. La classification de chaque
emploi au sein de chaque
entreprise sera déterminée par
l’entreprise elle-même en
appliquant trois critères : la
responsabilité, l’autonomie et la
technicité. Par ailleurs, les
partenaires sociaux ont pris deux
engagements. Le salaire minima du
groupe A doit être constamment
supérieur au Smic, et la
négociation déterminera chaque
année l’augmentation du salaire
minimum pour répondre à cet
objectif. Par ailleurs, des écarts
significatifs et croissants doivent
être créés entre les salaires
minima de chaque groupe, et cet
objectif sera réalisé en trois ans.
Au 1er juillet 2010, les écarts devront
être les suivants : 4 % entre A et B,
5 % entre B et C, 7 % entre C et D,
12 % entre D et E, 17 % entre E et F
et 22 % entre F et G.
avoir peur de commencer dans une
petite agence, avant d’intégrer une
grande entreprise”. Malheureusement, les perspectives d’évolution
s ont peu nombreus es . Conséquences logiques : le nombre d’ é tudi ants qui vien nent vers le secteur
tend à diminuer. Et pour celles et
ceux qui auraient un bon profil de
vendeur, ils préféreront s’ é panouir
dans d’autres secteurs plus rémunérateurs.
Perspectives d’embauche
modérées pour 2008
Selon un dossier paru dans Le Nouvel Observateur en février dernier,
“le tourisme serait un secteur qui
crée des emplois.” Un constat optimiste à prendre avec un cert ain recul, le magazine ne citant pas ses
sources .“Compte tenu de la conjonct ure act uelle, et en at tend ant une
repris e , c’ est déjà bien que l’on arrive à garder nos équip es, note Micheline Teupoot ah iti. Cep end ant,
on peut d’ ores et déjà anticip er une
légère am é lioration sur le march é
de l’ emploi cette année.”Ce sont les
agences en li gne qui rec rutent le
plus, en raison de leur forte croiss ance. Agents de réservation ,commerciaux,conseillers vendeurs sont,
entre autres , les postes recherchés.
Il en va de même pour le secteur de
la grande distribution. Tandis que
du côté des réseaux volont aires, les
pr é visions d’embauche sont stables.
Catherine Mautalent
En matière de salaire minimum garanti,il ex iste de nombreuses disparités en Europ e. En Bulgarie, par exemple , il est de 82 euros , qu and au
Luxembourg,il atteint 1 503 euros (source Eurostat – 2006).
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