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COLLOQUE INTERNATIONAL
SOUFISME ET POLITIQUE AU MAROC ET AU SENEGAL.
TERMES ET ENJEUX CONTEMPORAINS
RABAT
08 et 09 NOVEMBRE 2012
Salle des conférences de l'Institut d'Études Africains
Avenue Allal Fassi, Madinat al Irfane
Coordinateurs :
Abdourahmane Seck
Nazarena Lanza
Salim Hmimnat
AVEC LE SOUTIEN DE:
Conseil pour le Développement de la Recherche en
Sciences Sociales en Afrique (CODESRIA), Dakar
Centre d’Études Africaines, École des Hautes
Études en Sciences Sociales (CEAf), Paris
ARGUMENTAIRE
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Le cadre thématique et l’espace géographique de ce colloque se justifient par la nature
des trajectoires contemporaines du soufisme que le Maroc et le Sénégal ont en partage,
mais façonnent, l’un et l’autre, de manière singulière. Une grande partie des musulmans
sénégalais, en effet, appartiennent à la Tijaniya, confrérie soufie dont le lieu de culte et de
pèlerinage se trouve à Fès, ville marocaine qui abrite le mausolée du fondateur.
L’objectif du colloque est de voir comment les voies soufies de l’islam, dans le contexte
géographique et géopolitique de deux pays (qui se présentent comme) « frères », se sont
interpénétrées avec les dynamiques de changements socioculturels qui marquent leur
respective histoire postcoloniale. Il s’agira de documenter les mutations de l’islam soufi,
ses permanences et variations en cours dans les pratiques de spiritualité, systèmes de
représentations symboliques et socles de communautarisation dans les deux espaces,
mais encore d’analyser ses apports et rapports au politique (entendu comme espace,
lien, discours, projet). Dans le contexte actuel de renouveau de l’attachement du Maroc
à l’Afrique subsaharienne d’une part et, d’autre part, de recomposition des forces sociales
qui font le jeu politique dans ces deux pays, l’étude d’une ressource aussi transversale
que les voies soufis de l’islam, reste indispensable et stratégique. Le Maroc et le Sénégal
sont interpellés par les usages des ressources de la baraka des saints, dans l'espace
privé comme dans les arcanes des luttes de pouvoir.
Au Sénégal, l’arrivée d’Abdoulaye Wade au pouvoir, en 2000, a laissé entendre, un
moment, la fin de l’implication des confréries dans le jeu politique. La suite de sa
mandature a plutôt donné à repenser moins une sortie que d’autres formes
d’investissements de la sphère publique par la confrérie et surtout le même intérêt du
politique pour les chefs communautaires confrériques. Au Maroc aussi, dans les
mouvements politiques actuels, on remarque une présence inédite des mouvements
soufis dans l'arène politique: le mouvement d'Al Adl, actif depuis les années 80, s'est
imposé comme force déterminante dans le mouvement du 20 février pour le
renouvellement politique au Maroc; la confrérie de la Bouchichia, à son tour, a appelé ses
adhérents à manifester en faveur de la nouvelle constitution. La frontière reste donc plus
que jamais ténue entre mysticisme soufi et politique tout court. A une échelle plus large,
l’analyse des logiques de transformation des multiples usages et mésusages de la
spiritualité dans les jeux politiques, ne peut que difficilement échapper aux débats post 11
Septembre, notamment sur le rôle que jouerait le soufisme comme alternative face aux
« islamismes ». Il serait heureux, et ce colloque veut en être un prélude, d’arriver, à partir
de terrains privilégiés, à mieux sonder le potentiel de révélateurs, voire de conducteurs
de changements, au niveau global et local, des mutations contemporaines du soufisme.
Retombés et Attendus scientifiques du Colloque
Publication des contributions révisées par leurs auteurs, à l’issue du colloque. Cette liste
n’est pas fermée à l’arrivée d’autres chercheurs qui seraient intéressés par le projet
d’édition.
PRESENTATION DES COMMUNICANTS
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Abdoulaye Kane est Associate Professor au département d’Anthropologie
et au Centre d’Etudes Africaines de l’Université de Floride (University of
Florida). Il a publié en 2010, un ouvrage sur la finance informelle, chez
l’Harmattan : Tontine, Caisses de Solidarite et Banquiers Ambulants. Il est
également coéditeur de deux ouvrages collectifs à paraitre chez Indiana
University Press : Medicine, Mobility, and Power in Global Africa"? et
African Migrations: Patterns and Perspective. Il est aussi auteur de
plusieurs articles et chapitres d’ouvrages portant principalement les
réseaux sociaux et religieux dans les contextes des migrations de la vallée
du fleuve Sénégal en Europe et en Amérique du Nord.
Fabienne Samson est anthropologue, chargée de recherche à l’IRD et
directrice adjointe du Centre d’Etudes Africaines (CEAF) à l’EHESS à Paris.
Elle travaille sur des mouvements religieux de jeunes urbains, et est
l’auteur de plusieurs articles sur l’islam au Sénégal et au Burkina Faso.
Elle étudie également les mouvements évangéliques, en concurrence
avec les mouvements de l’islam, dans ces deux pays. Son ouvrage « les
marabouts de l’islam politique » a été publié en 2005 chez Karthala, et
elle prépare un nouvel ouvrage sur une église évangélique au Sénégal,
terre d’islam.
El Hadji Samba Amadou Diallo est docteur en anthropologie sociale. Il
est chargé d'enseignement à Washington University à Saint-Louis,
Département des études africaines et afro-américaines. M. Diallo
poursuit actuellement ses recherches sur la Tijāniyya en Afrique du Nord,
de l’Ouest et dans la diaspora (plus particulièrement aux États-Unis
d’Amérique). Il s’intéresse également au thème de l’islam en Guinée
(Conakry), et a publié des articles dans Social Compass, French Colonial
History et Afrika Zamani. Son livre La Tijāniyya sénégalaise: les
métamorphoses des modèles de succession a été publié par les Éditions
Publisud en 2010.
Kae AMO est doctorante en anthropologie à l’EHESS. Titulaire de master
en anthropologie (l’EHESS), sociologie (l’Université de Dakar, Sénégal) et
en Science politique (l’Université de Keio, Japon), elle a réalisé de
nombreux voyages d’études et des travaux sur l’Islam en Afrique
subsaharienne, notamment dans le cadre d’équipe « Islam and Global
Governance » (2007-2009, Japon), du projet ANR Publislam (2009-2012)
et du ANR Priverel (2012-2016).
Amadou Dramé est Doctorant inscrit à l’Université Cheikh Anta Diop de
Dakar, à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines, Département
d’histoire. Il prépare une thèse de doctorat sur l’Histoire des bureaux de
contrôle des personnes et des savoirs du gouvernement colonial français
en Afrique de l’Ouest. Il est Membre du Groupe de d’Etude et de
Recherche sur la Marginalité et l’Exclusion au Sénégal
Nina ter Laan est anthropologue et doctorante au Département d’Islam
et Arabe dans la Faculté de Philosophie, Théologie et sciences religieuses
à l’université Radboud, Nijmegen, Pays-Bas. Sa thèse de doctorat porte
sur l’utilisation de la musique religieuse dans la construction des
idéologies religieuses islamiques au Maroc.
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Aziz Hlaoua est doctorant, inscrit à l’Université Pierre Mendès de
Grenoble (UPMF), Laboratoire PACTE. Associé au Centre Jacques Berque
depuis octobre 2010, sa thèse porte sur la confrérie Al Qadiriya AlBoutchichiya au Maroc.
Nazarena Lanza est doctorante en Anthropologie, inscrite à l’Université
de Aix-en-Provence, (Institut d’Ethnologie Méditerranéenne et
Comparative –IDEMEC). Elle est également chercheure associée au
Centre Jacques Berque pour les sciences sociales de Rabat (Maroc). Sa
recherche de thèse porte sur les mobilités religieuses, vers le Maroc, des
disciples de la confrérie soufi Tijannyya du Sénégal.
Youssef Mouncif, doctorant en sciences sociales et humaines, Université
Hassan II, Casablanca chercheur associé au centre marocain des sciences
sociales CM2S où il intervient dans le groupe « Elections et vie politique
au Maroc ». Sa thèse porte sur les nouvelles formes de la culture
militante chez les islamistes du Maroc : le cas du groupe Adl Wal Ihssan
Ruggero Vimercati Sanseverino est docteur en islamologie et chercheur
associé à l’IREMAM (Institut de Recherches et d’Études sur le Monde
Arabe et Musulman, Aix-en-Provence). Spécialisé dans l’histoire et
l’anthropologie religieuse de la spiritualité musulmane, il s’intéresse à
l’exégèse coranique, au soufisme et à l’hagiographie marocaine, à la
transmission et l’interprétation de la tradition prophétique ainsi qu’à la
conception du sacré dans l’islam. Sa thèse Fès et sainteté : hagiographie,
tradition spirituelle et héritage prophétique.
Jillali El Adnani, Université Mohammed V, Agdal, Rabat ; Chef de
département d’histoire. Il a publié, entre autres : -Le maraboutisme chez
C. Geertz, Ouvrage collectif, H. Addi et L. Obadia éds, Archives
contemporaines, Paris 2010. -Les saints à l’épreuve du pouvoir : histoire
d’une sainteté et anthropologie d’une culture, Hespéris-Tamuda, Vol. 31,
2008. - La Tijâniyya (1791-1880) : les origines d’une confrérie
maghrébine, éditions Marsam, Rabat, 245p, 2007. -Regionalism,
islamism and amazigh identity : translocality in the Souss region of
morocco according to M. Mukhtar Soussi, Duke university, Vol1, 2007. Anthropologie religieuse et colonialisme : le dilemme de la
modernité (étude et présentation d’un document inédit de J. Berque, in
Critique économique, N°18, 2006.
Salim Hmimnat, Enseignant-chercheur à l’Institut des Etudes Africaines
(UM5S, Maroc). Titulaire d’une thèse de doctorat en sciences politiques
de la faculté des sciences juridiques, économiques et sociales RabatAgdal (Maroc).
Il mène des recherches qui portent sur deux principaux axes: les
interactions entre politique religieuse, mouvements islamistes et
modernisation au Maroc post-colonial; Les enjeux et défis sécuritaires au
Sahel.
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Khalid Chegraoui, Professeur chercheur est responsable de l’équipe de
Recherche en Afrique, Espaces et civilisations (ERAEC) – IEA Rabat. Il a,
entre autres, publié, "Etat et Islam en Afrique de l'Ouest; à propos du
discours politique soudanais au XIX° siècle",in AL-Maghrib al- Ifriqi, n° 3,
2002, p. 5-14. "Le voyage d'El-Hadjj Umar en Orient ou la quête du
pouvoir" (en arabe), in Le voyage dans le monde arabo-musulman ;
Publications de la Faculté des Lettres de Rabat, série colloques, 2003, p.
141-156. « Idéologie, Religion et ethnocentrisme au Maghreb », in
Intellectuels et nationalisme et idéal panafricain ; perspective historique,
sous la direction de Thierno Bah, CODESRIA, Dakar, 2005.
Abdourahmane Seck est Maître de Conférences en Histoire Moderne et
contemporaine (CNU- Section 22), il est également philosophe et
anthropologue de formation. Chercheur associé au Centre Jacques
Berque de Rabat, il a publié La question musulmane au Sénégal, en
2010, aux éditions Karthala et plusieurs autres articles et chapitres
d’ouvrages sur l’islam, les migrations Sud-Sud et les cultures juvéniles en
contexte urbain. Il est enseignant-chercheur au Centre d’Etudes des
religions (CER) de l’université Gaston Berger de Saint-Louis.
Bakary Sambe est Enseignant-chercheur au Centre d’Etude des Religions
(CER) – (UFR-CRAC « Civilisations, Religions, Arts et Communication ») de
l’Université Gaston Berger de Saint-Louis (Sénégal). Docteur en Sciences
politiques et spécialiste des relations internationales (IEP Lyon), il est,
aussi, titulaire d’un Master en Lettres et Civilisations Arabes (Université
Lumière Lyon 2). Depuis 2003, Dr. Bakary Sambe est chercheur associé au
Groupe de Recherches sur la Méditerranée et le Moyen-Orient
(GREMMO)-Maison de l’Orient et Méditerranée de Lyon. Il rejoint l’Aga
Khan University- Institute for the Study of Muslim Civilisations, à Londres
en 2009. Sambe intègre, ensuite, l’European Foundation for Democracy
(EFD) à Bruxelles comme Chercheur Principal (Senior Fellow), spécialiste
du monde musulman et des réseaux transnationaux. Son livre Islam et
diplomatie : la politique africaine du Maroc, est paru en 2010 chez
Marsam, à Rabat, puis réédité aux Etats-Unis (Phoenix Press
International, 2011).
RESUMES DES COMMUNICATIONS
JILLALI EL ADNANI
La sacralité de la recherche en sciences humaines et sociales : continuités et
ruptures (le cas du thème confrérique).
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Le champ des études confrériques a été investi depuis au moins la deuxième moitié du
XIXe siècle. La trame principale des travaux coloniaux ayant comme objet le thème
confrérique se résume en la conversion d'une force religieuse et spirituelle à une
puissance sociale et politique. Ce schème fut ensuite adopté à la période postcoloniale
par les chercheurs nationaux et étrangers (francophones et anglo-saxons) relevant des
sciences humaines et surtout des sciences sociales. Ce passage a eu comme effet la
consolidation de certaines erreurs d'appréciation des rôles des acteurs et surtout de
jugement quant aux potentialités et perspectives d'avenir des confréries. Notre objectif
sera d'établir un état des lieux sur la question et surtout de déterminer comment et quand
les grandes théories de l'époque coloniale ont refait surface à l'époque postcoloniale et
même actuelle.
Cette communication traitera surtout du débat et des confusions ayant marqué, d'une part
la relation géographie-ethnographie et histoire, et d'autre part la relation Histoire-sociologieanthropologie.
AMADOU DRAME
Le pèlerinage des Tijann à Fèz (Maroc) : des restrictions imposées par
l’administration coloniale française à la modernisation postcoloniale
L’islam confrérique constitue aujourd’hui un élément incontournable dans l’analyse des
relations sociohistoriques entre le Sénégal et le Maroc. Ces liens socio-confrériques se
renforcent à partir du XIXème siècle à l’introduction de la Tijaniyya au Sénégal par
l’intermédiaire des ulémas mauritaniens, puis par El hadj Umar Tall. Première confrérie
religieuse au Sénégal par le nombre de ces disciples, elle entretient de relations
privilégiées avec la zawiya de Fèz. Un des aspects qui symbolisent le mieux ce lien
religieux, basé sur la pratique de la spiritualité et de la communautarisation, est le
pèlerinage à la ville marocaine de Fèz régulièrement effectués par des musulmans
Sénégalais au mausolée du fondateur de cette confrérie. Si de nos jours ce voyage de
recueillement est fréquent chez les musulmans Sénégalais, il a parfois fait l’objet de
mesures restrictives strictes du temps de l’administration coloniale française en Afrique
de l’Ouest.
Ce papier analyse l’évolution de ce pèlerinage des musulmans Sénégalais au Maroc,
marquée par le contrôle et la modernisation, marquée par le contrôle et la modernisation,
de la période coloniale à nos jours. Précisément, il examine les contours des mesures
politico-administratives prises par les autorités coloniales contre les déplacements,
surtout de certaines notabilités religieuses soufies Sénégalaises, au Maroc. Il s’agit de
montrer sur quoi l’administration française se fondait pour limiter ou interdire les
mouvements de ces chefs musulmans vers Fèz. Ce qui permet d’étudier le rôle des
bureaux de surveillances des ordres soufis dans la colonie du Sénégal destiné à
circonscrire les contacts des musulmans de l’Afrique sub-saharienne avec le monde
arabo musulman. Cette démarche permet de répondre aux interrogations suivantes :
quels impacts eurent ces contrôles sur les liens de dépendance confrérique entre le
Sénégal et le Maroc ? Ce papier suggère dans ce sens une réflexion sur la
compréhension de l’espace de mobilité des musulmans et son inscription dans les
espaces géopolitique colonial et postcolonial.
En suivant l’évolution de cette circulation des musulmans entre le Sénégal et le Maroc
(de la période coloniale à nos jours), nous tentons d’expliquer l’apport de l’islam
confrérique à l’éclosion d’un sentiment d’appartenance communautaire entre les deux
peuples. Aujourd’hui, le pèlerinage à Fèz concerne presque tous les musulmans
Sénégalais sans distinction confrérique. Qu’est qui explique cette évolution de la
situation ? Peut-on l’analyser sous l’angle d’une marche normale de la croyance aux
ordres soufis ou sous le signe d’un fort sentiment d’appartenance à un même territoire
religieux ou des opportunités économiques en rapport avec le commerce ? Nous
tenterons par une approche historique d’apporter des éléments d’explication à ces
interrogations.
ABDOULAYE KANE
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L’ethnographie d’un espace religieux transnational : la Zawiya Tijani de Fès.
La Tijaniyya a été dès sa naissance une tariqa transnational. Le fondateur est Algérien et
il est enterré à Fès et l’écrasante majorité de ses disciples sont éparpillés en Afrique de
l’Ouest. Fès a toujours été un lieu symbolique pour les disciples de la Tijaniyya autour du
Sahara. La Zawiya Tijani de Fès est un lieu sacré qui attirent des milliers de pèlerins par
an dont l’écrasante majorité vient des pays Africain au sud du Sahara. Pour cette raison,
la zawiya est un espace social transnational ou se côtoient des disciples Tijani venant de
pays et de cultures différents. L’objet de ce projet de communication est d’examiner les
relations sociales (dans leurs dimensions spirituelle et culturelle) que les pèlerins
entretiennent durant leur séjour à Fès. Nous envisageons de donner les éléments
d’analyse qui vont dans le sens de confirmer notre argument central qui est que la zawiya
est un espace social transnational, un microcosme culturel reflétant la diversité qui
marque les communautés transsahariennes de la Tijanniya et sa Diaspora. C’est
également un espace fraternel dans lequel pour le temps du pèlerinage se dissout les
différences d’identité nationales et ethnique, les différences autour de familles religieuses
clamant l’authenticité de la tariqa (au Sénégal par exemple), etc… Nous allons nous
appesantir sur trois points essentiels dans la communication. Le premier point consiste à
identifier les pèlerins (individuel, en famille ou en groupe) et les principales objectifs qu’ils
ont identifiés comme étant derrière leurs décision de faire le pèlerinage. Le deuxième
point va élaborer sur les interactions, les rituels, et les échanges dans l’espace de la
zawiya qui ont pour principal moteur la recherche par les disciples de la Baraka. Le
dernier point concerne les espaces de sociabilité, d’entraide et de commerce en dehors
de la zawiya qui jouent un rôle capital dans la prise en charge des pèlerins.
RUGGERO VIMERCATI SANSEVERINO
Repenser la « voie muhammadienne » : le renouveau soufi à Fès au XIXesiècle.
La ville de Fès apparaît, à partir de la fin du XIIe/XVIIIe siècle, comme un des centres
d’un renouveau du soufisme qui gagne l’ensemble du monde musulman. Face aux
changements socioreligieux qui s’annoncent avec l’affaiblissement politique et
économique des états arabes et de l’empire ottoman, certains cercles soufis s’engagent à
renouveler le cadre organisationnel et doctrinal de leur enseignement et de leur pratique.
Le Hedjaz, le Yémen et le Caire semblent constituer le point de départ d’une démarche
doctrinale renouvelée qui investit l’Afrique, l’Inde, l’Asie centrale, l’Indonésie. S’il n’est en
aucun cas possible de parler d’une rupture avec le soufisme médiéval (cf. Bernd Radtke,
1993), il s’agit néanmoins de revisiter les fondements de la tradition islamique et du
soufisme selon une approche réformée qui pose la figure du Prophète comme paradigme
central de la pensée et de la pratique islamique, mais aussi de toute forme d’activisme
sociétal et politique. Dans cette intervention, nous proposons de montrer comment cette
« voie muhammadienne », fruit d’une conception spirituelle et métaphysique du Prophète,
inspire à Fès la formation des grands ordres soufis comme la Darqâwiyya, la Tijâniyya et
la Kattâniyya. Il s’agit ainsi d’envisager le renouveau soufi comme une façon alternative à
celle du réformisme et du modernisme musulman de réagir à ce qui est ressenti comme
le déclin du monde musulman.
KAE AMO
Le corps des saints, le corps du pouvoir, le corps politique : Corps et Soufisme à
l’ère de la modernisation politique (Sénégal)
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L'expérience de sainteté dans le processus de « sanctification » d’un corps d’homme,
ainsi que dans la reconnaissance ou la « consécration» de cette sainteté fut le cœur des
débats, souvent polémiques, autour du soufisme au Sénégal. Aujourd’hui, il y a d’un côté,
les critiques internes de certains soufis lettrés vis-à-vis de ce qu’ils qualifient du « culte
de saint » et ainsi la tendance rationaliste de « retour aux écrits (Coran et Sunna) ». Nous
assistons, d’un autre côté, à un renouvellement des rites et des cultes autour des saints
et de l’amplification de ces manifestations dans les sphères publiques, tout en donnant
aux symboliques du corps, d’autres valeurs et lieux d’expression, à la fois spirituelle,
rationnelle, « scientifique » et physique. Ces tendances recto-verso, du rationalisme et du
retour au spirituel, impliquent les hommes religieux et aussi les hommes politiques, à la
recherche du « souverain moderne », symbolisé par le corps des saints, mais aussi par
les corps des disciples qui se mobilisent autour de ces saints et se forment en un « corpsuni», « corps-monde », « corps-nation », et un corps du pouvoir et de la souveraineté
politique.
Au-delà de cette représentation politique des corps physiques, le corps des soufis
représentent une force spirituelle et des liens de transmissions (silsilah) du pouvoir
invisible et de la sainteté, de la grâce divine (baraka). Le corps n’est pas vu par les
disciples, comme la chair et les os, une matérialité d’un vivant, mais il est vu comme une
« enveloppe de l’âme ». Ils se prosternent, non pas devant un corps-physique mais
devant un corps-âme, force spirituelle et immatérielle. Les liens entre un disciple et son
maître ou son condisciple reposent ainsi sur une dimension spirituelle, compréhensible
aux yeux des seuls « initiés », ayant une certaine maîtrise des « codes ésotériques »,
désignées par l’expression « l’œil dedans (batin)».
Ce travail propose, pour une autre lecture de ce thème, le corps des saints et la politique
au Sénégal, sans rentrer dans le piège des critiques et des débats polémiques usés.
Nous essayerons d’analyser les différentes représentations du corps des soufis et la
souveraineté qu’il symbolise dans ses multiples dimensions, spirituelles, symboliques ou
politiques.
HLAOUA ABDELAZIZ
Séquence de vie dans la confrérie soufie Al Boutchichiya au Maroc
La confrérie Al-Boutchichiya est l'une des plus grandes confréries soufie contemporaines
du Maroc, située dans le village de Madagh dans la Province de Berkane au Nord-Est du
pays.
Lieu de méditation, de prière, de transe, d'effort et de socialisation, la confrérie religieuse
Al Boutchichiya au Maroc représente également un espace réservé à des fins pratiques
de disciplinarisation des corps. Le cheikh (maître soufi) de cette confrérie confirme cette
représentation dans ses propos : « tous les disciples sont mes patients, la confrérie est
une grande clinique, je tente de jouer le rôle d'un médecin polyvalent». Le lieu de la
confrérie est un espace d'enfermement affectif et de contraintes, sans qu'il soit hôpital
psychiatrique ou lieu de rétention. L'engagement des disciples à adhérer au mode de vie
enfermé d'une communauté religieuse passe par l'acceptation d'un « contrat social »
entre eux et leur maître, « médecin » et éducateur. L'un des moments forts de la mise en
place de ce contrat est le pacte qui est la cérémonie d'adhésion à l'ordre confrérique. Le
pacte permet au maître soufi de posséder le corps de son disciple, le pacte d'adhésion
pratiqué dans l'institution de la confrérie passe par le idne (autorisation) du cheikh, ce qui
lui donne le pouvoir d'intervenir dans la vie sociale de ses disciples/patients. Le corps du
disciple se construit par identification au corps du maître. La tariqa (voie) initiatique
s'envisage sous la forme d'un pacte qui réunit le disciple et le guide. Ce pacte est l'ordre
naturel qui prolonge l’ordre social et réfléchi comme l'explique Caillois (1950 : 32). Le
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cheikh accompagne ses disciples en bénissant leurs occupations dans la vie quotidienne.
Le maître exploite de multiples formes de démonstration de pouvoir pour appeler les
fidèles à Dieu. Assurant ses responsabilités envers le groupe de disciples, le cheikh Sidi
Hamzagagne le mérite à être servi, c'est la notion de don et contre don(El
Boudrari,1993 :261-280). Les pratiques de traitement au sein de de la confrérie sont
divers, mais la plus connue est le toucher thérapeutique qui consiste à mettre face à face
le maître et le patient, main dans la main, le cheikh donne l'autorisation d'accepter le
disciple dans le groupe et le disciple s'engage à obéir aux procédures de traitement à
long terme. La confrérie appartient à ces lieux que Foucault (1975) identifie comme des
« institutions totales ». C'est un lieu dans lequel les acteurs tentent de pratiquer une
maîtrise sur les corps par la construction d'un savoir et par la disciplinarisation.
Ma contribution montre certaines de ces actions empiriquement documentées. elle
montre un certain déploiement de pratiques disciplinaires, d'émotions, dont l'ennui, les
pleurs et les craintes, d'accomplissement de gestes et de techniques, dont le
balancements, les scansions et les rythmes. Ma contribution traite la place que les
disciples/patients accordent à leurs cheikh/maître et la relation entre eux institutionnalisée
par des codes, des règles, des contraintes et des normes établies par un contrat.
FABIENNE SAMSON
La Tidjaniyya du Sénégal au Maroc, mobilisations sociales et lutte de leadership.
La présentation, construite en deux parties, a pour objectif de montrer le
dynamisme de la Tidjaniyya actuellement, et de démontrer que les adaptations de
cette târiqa au monde contemporain sont liées, en partie tout au moins, à des
questions de rivalité de leadership. La communication portera, tout d’abord, sur
les mutations de la Tidjaniyya au Sénégal, puis sur le rôle de la Tidjaniyya dans
les rapports sénégalo-marocains.
Au Sénégal, les nouvelles générations de guides religieux, en recherche de
légitimité et de fidèles, se démarquent de leurs aînés en transformant leur tariqa
d’origine en mouvements dits « néo-confrériques ». Si cette appellation a ses
limites, elle caractérise les nouveaux groupes qui, dans ce pays, se spécialisent
dans un public de jeunes urbains, s’adaptent aux mutations de leur société, et
tiennent un discours de remoralisation (réislamisation) des mœurs quotidiennes,
sociales et politiques. Le mouvement des Moustarchidine, précurseur de ce type
de mouvement au Sénégal, transforme ainsi la pratique de la Tidjaniyya chez une
grande partie de la jeunesse en quête d’un nouvel idéal social et religieux.
La rivalité de leadership permet également de comprendre les différentes représentations
que se font Sénégalais et Marocains sur les pratiques religieuses des uns et des autres.
Pays frères dans l’islam, le Maroc et le Sénégal ont noués des liens très anciens. Mais au
sein de la Tidjaniyya, confrérie trait d’union entre les deux pays, la légitimité des Cheikhs
sénégalais et marocains ne repose pas forcément sur les mêmes bases. Il est alors
intéressant de voir, au delà du discours fraternel, quels sont les enjeux de leadership qui
se jouent au sein de cette « grande famille » au nord et au sud du Sahara.
NAZARENA LANZA
Le tourisme religieux des sénégalais tijanes au Maroc. Quelques enjeux.
Au Maroc les journaux et la télévision parlent souvent de la Tijaniyya, mais toujours en
référence aux relations avec l'Afrique subsaharienne et particulièrement aux pays qui
abritent une composante importante de musulmans tijanes. Ceci est particulièrement vrai
quand il s'agit du Sénégal, pays qui partage avec le Maroc les mêmes références à
l'islam et à la Tijaniyya, ciment des relations d'amitié toujours mises en avant lors des
rencontres politiques, économiques et même culturelles. On constate aussi une présence
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(physique et médiatique) de plus en plus importante de pèlerins sénégalais qui se
rendent à Fès, pour faire leur zyara sur le tombeau du fondateur de la confrérie, Cheikh
Ahmed Tijani.
Dans cette communication, je voudrais aborder la question du pèlerinage religieux tijane,
dans ses formes qui privilégient des groupes organisés par des agences touristiques. Je
m’intéresserai aux discours qui sont produits dans ces circuits aussi bien religieux que
touristiques. L’objectif sera de voir les fonctions que ces filières nouvelles ont dans la
construction du discours plus général sur l'amitié entre le Maroc et le Sénégal. On
s’interrogera en conséquence sur les statuts pluriels de ces discours dans la production
et la réinvention des imaginaires politico-religeux et historico-culturels qui lient le Maroc et
le Sénégal.
Je baserai cette démarche sur l’exploration partielle de donnés ethnographiques recueillis
auprès de pèlerins sénégalais à Fès, mais aussi de marocains natifs de la capitale
sénégalaise de la tijannyya.
BAKARY SAMBE
Tijâniyya subsaharienne et stratégies d’influence marocaine : Le soufisme à l’heure
du soft power ?
A la différence d’autres pays du Maghreb, le Maroc a toujours tenu à donner un sousbassement idéologique et un contenu symbolique à son engagement continental. Cette
implication africaine du Maroc trouve ses fondements dans ses déterminants historiques
qui en font le pays maghrébin et/ou arabe le plus « présent » en Afrique subsaharienne.
Dans sa constante recherche de modèles religieux et d'une influence au Sud du Sahara,
le Royaume s'est toujours appuyée sur ses énormes ressources symboliques, à travers
l’islam et surtout la confrérie Tijâniyya. Cette stratégie repose, entre autres, sur une vieille
tradition d’ouverture diplomatique vers le sud du Sahara, considéré, au sein de l’élite
politique marocaine, comme un prolongement naturel et historique du royaume. Mais
l'arrivée en force d'autres acteurs sur le continent africain impose désormais à Rabat de
réadapter sa stratégie. Déjà défié par l'Algérie sur ce terrain de la concurrence des
symboles, le Maroc a saisi l'enjeu de ce qui ressemble fort à une fin d'exclusivité. De
plus, il doit composer avec l'émergence de nouvelles puissances sur le terrain
diplomatique africain comme son traditionnel concurrent, - l'Algérie-, mais aussi l'Iran et,
depuis peu, la Turquie. Il est vrai que, suite à l’effervescence islamiste des dernières
décennies en Algérie, les autorités semblent redonner de l’importance au soufisme et aux
confréries après que ses nationalistes les aient farouchement combattus et dénigrés. La
conscience des possibilités en termes d’influence au Sud du Sahara que fournit la
Tijâniyya, la replace, ainsi, au cœur des préoccupations politiques et diplomatiques. Mais,
jusqu’ici, le Maroc semble, de loin, l’emporter sur l’Algérie et gagner la bataille de l’image
auprès des populations subsahariennes. Cependant les dizaines de millions de Tijânis du
Nigeria semblent être un enjeu futur si l’on connaît les positions de Lagos sur la question
du Sahara. Ces différents usages de la confrérie Tijâniyya que nous voulons analyser
montrent qu’au-delà du politique classique, des institutions et des procédés dits
rationnels, il y a les constructions imaginaires, les idéaux et les ressources symboliques
mobilisables, à volonté, pour leur efficacité, par les acteurs politiques.
MOUNSIF YOUSSEF
L’expérience soufie et ses expériences militantes. Le cas de la confrérie Adl Wal
Ihssan
Ma présente proposition porte essentiellement sur la pratique soufie, et sa concordance
militante, vue l’aspect mystique du groupe –objet d’étude- et son positionnement
politique, il rassemble une tradition éducatif sur une voie soufie, qui vise la purification
‘tazkia’ de l’âme, dans un ordre relationnel avec le maitre ‘cheikh’, et l’appropriation d’un
projet politique obsédée par le sphère état (khilafat).
11
Une communauté religieuse, basé sur l’éducation soufi, en incluant la notion du service,
qui me parait importante, pour vérifier les démentions de l’entre soi militant.
Les conseils d’exoration (Majaliss nassiha) constituent à ce propos, un modèle vif, ce
sont des moments forts, qui illustrent la volonté d’une purification spirituelle, et une
pratique religieuse intramondaine, et les maisons des croyants (bouyout almouminin)
constituent un espace réservé à des fins pratiques de disciplinarisation, d’une
socialisation ‘méthodique’.
Ensuite, il présente l’islam comme la tradition par excellence qui concilie l’organisation
religieuse (exotérisme) et la connaissance intérieure (ésotérisme).
Ce rapprochement de l’islam et de la tradition s’accompagne d’une mise en perspective
historique dans le cadre de la modernité.
Comment la confrérie accommode-t-elle des méthodes traditionnelles, avec un postulat
moderne ?
Et quelles sont les notions clés de cette procédure ?
EL HADJI SAMBA DIALLO
Confréries musulmanes et politique au Sénégal : La Tijāniyya et le régime de
l’alternance (2000-2012).
Après les évènements politiques récents en Tunisie, en Égypte et en Libye, les
« islamistes » prennent le pouvoir. Dans d’autres pays, comme le Maroc, ils deviennent
majoritaires à l’Assemblée nationale et influencent ainsi les importantes décisions
publiques. Pourtant ces groupes religieux étaient confinés pendant longtemps dans des
stéréotypes de phobie et de violence, et par conséquent ostracisés par les gouvernants.
La première remarque à tirer de ce processus d’ouverture politique, c’est qu’elle est
survenue à un moment où beaucoup d’observateurs désespéraient de la pertinence de
voir émerger des régimes démocratiques dans les pays d’Afrique du Nord. C’est cela,
entre autres facteurs sociaux internes, qui explique la surmédiatisation qui a accompagné
le Printemps arabe à partir de janvier 2011.
Contrairement à l’Afrique subsaharienne où le manque d’intérêt notoire –non pas des
chercheurs mais des médias non-africains –, a relégué au second plan, pour ne pas dire
a mis aux oubliettes, cette grande vague de démocratisation des institutions depuis les
années 1990. Le Sénégal par exemple, pays à majorité musulmane, a une longue
tradition de culture civique et de démocratie électorale.
Le problème n’est plus donc de se demander si l’islam ou les confréries sont compatibles
avec la démocratie, mais comment l’État et ses représentants attitrés utilisent la religion
et sa symbolique pour rendre leur politique opérante. Comment alors les principes
laïques hérités de la colonisation française ont-ils été réajustés, bricolés ou affaiblis selon
certains, par les hommes du régime d’alternance au Sénégal ? Le jeu d’État avec les
institutions, sous forme de violence symbolique légitime, est devenu la nouvelle règle
avec l’élection d’Abdoulaye Wade en 2000, en tant que troisième président de ce pays. À
mesure de ses années de présidence, il y a constamment graduellement un
renforcement des relations avec les confréries musulmanes (turuq), lesquelles participent
pour beaucoup à la dé-sécularisation de la sphère religieuse sénégalaise. Wade se
réclame d’être membre de l’une d’elles : je veux nommer la Muridiyya, très puissante sur
le plan économique et politique. Il a créé un système qui récompense les marabouts qui
le soutenaient, combat ceux qui résistaient à ses différentes politiques
d’approvisionnement ou de rapprochement – pour ainsi filer une métaphore coloniale –,
et enfin ignore ceux considérés religieusement moins importants ou électoralement peu
rentables, de quelque confrérie qu’ils soient. Dans mon papier, je vais surtout
m’appesantir sur les relations que ce régime d’alternance a eues avec les marabouts de
la Tijāniyya, confrérie majoritaire au Sénégal, mais fragmentée en sous-branches
indépendantes.
Certains marabouts tidianes non-domestiqués, même très minoritaires dans le champ
politique, s’affirment à haute voix dans l’espace public pour dénoncer ces stratégies à la
fois objectives et subjectives de division des confréries. Mais, il ne faut pas aller trop vite
12
dans l’analyse, en n’insistant que sur les lignes de clivages entre institutions dominantes
de la société. Il est aussi important de nuancer, pour voir en ces marabouts des vigiles de
la démocratie et des droits de l’homme, lequel n’est pas ici forcément religieux ou
confrérique. En bref, leur engagement pour une justice sociale n’est pas le résultat de, ou
plutôt n’a rien à voir avec, la crainte de perdre des avantages sociaux et économiques
acquis de l’État central, telle que le suggèrent certains spécialistes des confréries
africaines. Quelles ont été les stratégies de réponses des disciples-citoyens face à
l’autorité spirituelle et au pouvoir politique durant ces douze dernières années ? Je
m’attacherai donc à expliquer l’usage des symboles de l’État et/ou des confréries pour
faire accepter à la grande masse, le point de vue et le projet politique des groupes
dominants.
SALIM HMIMNAT
Official Islam & Sufism in Morocco: Some key findings from the religious policy
(1984-2002)
This paper aims to discuss some key findings from the religious policy during the period
time between 1984 and 2002. This policy has been able to strengthen and promote a
“New State’s Fundamentalism” that while neutralized the Sufism locally; it has strongly
relied on it to support a part of the Moroccan foreign policy, especially towards some
African countries. During the 20 years that followed the independence, Morocco’s
diplomatic presence within the African continent has been very weak, and has not kept
pace with the level of mutual interests that would induce these countries to back up the
kingdom’s strategy and prop its external interests.
Morocco had not had any diplomatic representative in the majority of African capitals.
Besides, it was unable to promote any economic and cultural relations with those
countries. For instance, Moroccan-Senegalese relation, considered among the best
models in the Moroccan-African cooperation, was however very low and in permanent
decline before the 1980s. Despite the awareness of this diplomatic shortcoming and its
negative impacts on the Moroccan foreign interests, Morocco was in fact unable to do
much because of the structural economic crisis the country suffered from due to the
accumulation of foreign debt and the application of structural adjustment policies imposed
by International Monetary Fund (IMF). In this context, the regime had to consider other no
expensive options to overcome this difficult situation, and it seems that the late Hassan II,
in view of its strong Islamic background and its pragmatic sense, did not find better than
exploiting, heavily more than ever, the religious factor to rebuild the diplomatic relations
with some African countries, on the horizon to make it stronger and more efficient.This
trend has been clearly observed in the religious policy which started in 1984, where
Moroccan regime has intensively mobilized the religious ideology to support its territorial
integrity, and this by focusing on two elements: Enhancing the spiritual dimension that
links throughout history the Saharan population with the Moroccan kings; Consolidating
the spiritual ties that associate the Kingdom with some African countries, through the
investment of some Sufi orders known by their strong influence within the African
continent as it is the case for the Tidjania.
KHALID CHEGRAOUI
Islam politique et soufisme au Maroc et au Sénégal : les cas de Al adl Wa al Ihassan
et de Ibadou al Rahmane.
De nouvelles pratiques engagées de l’islam politique ont vu le jour en terre d’Islam, les
cas que nous proposons d’étudier et de présenter sont assez imposant dans leur pays
respectifs, ainsi qu’ils sont apparemment opposés en termes de voie et d’idéologie. Le
mouvement marocain se veut une opposition religieuse sur un fond soufi non déclaré,
mais hérité d’un passé de fort pratique de désillusion d’un disciple en face du maître et du
fils, l’autre mouvement, sénégalais, est plus d’obédience anti-soufi proche du
Wahhabisme, dans un espace producteur de sens en terme de soufisme et de pratique
islamique malikite, loin du Hanbalisme et autre esprit d’Ibn Taymia. Dans ce travail nous
proposons de voir les bases idéologiques et religieuses des deux mouvements, en
relation avec leurs espaces de naissance et d’action et leurs relations dialectiques avec
les différentes tendances politiques et religieuses en vigueurs dans les dits espaces.
NINA TER LAAN
13
From zawiya to Stage: The impact of the political revival of Sufism on Sufi musical
practices and their performers
Over the last decade, Morocco has witnessed an increasing number of musical
performances labeled as ‘Sufi’, outside the contexts in which music of the brotherhoods
was expressed originally. Various factors have contributed to this re-emergence of Sufism
in the cultural arenas of the Moroccan public sphere. Influences of the world music
market, tourism and the recent political revival of Sufism are examples of crucial elements
in the changing musical practices of the Sufi brotherhoods. In this presentation I will
specifically explore the influence of recent government policies on musical
representations of Sufism, the musical practices and its practitioners. After the 9/11
attacks and the Casablanca bombings in 2003, national politics, actively supported
certain ‘approved’ forms of Sufism in the public sphere as a preferred alternative to
religious-political ‘fundamentalism’. As a consequence Sufism has been attributed a
growing importance in the representation of national religious identity. Sufi-music became
a strong symbolic marker in the reformulation and construction of Moroccan Islam as
being ‘moderate’. Sufi rituals and recitations are increasingly disseminated outside the
confines of Sufi orders and presented as ‘sacred’ entertainment in official staged settings
such as national TV- and radio shows and state supported music festivals. How does this
instrumentalisation of Sufi music and musicians on state supported stages effect their
musical practices? How do the performers think about these political protocols?
Relocations of religious music from ritual settings to a politicized and mediatized stage
are often judged as a loss of authenticity and religious meaning. I will argue that the
impact of political protocols on the changing performance settings of Sufi brotherhoods is
not a top-down decision process in which the artists only live up to the expectations of the
audiences and are depended on political figures. It is a constant negotiation process
between these various actors in which the artists take a specific place.
ABDOURAHMANE SECK
Communauté confrérique mouride et société numérique. Contribution à une
relecture des imaginaires sociopolitiques dans le Sénégal postcolonial.
Dans l’historiographie post-indépendance du Sénégal, parler de Démocratie et d’espace
public politique, c’est souvent l’annoncer à l’épreuve de la religion ou des communautés
confrériques. C’est tout le lancinant débat de la place des marabouts dans le jeu
électoral, notamment la problématique du ndigël. Si l’impact du fait confrérique dans
l’espace public sénégalais a, ainsi, fait l’objet d’une attention particulière, l’inverse se
vérifie un peu moins. Cette communication s’interroge sur les dispositifs discursifs de
réception ou contre-réceptions au travers desquels le discours de la confrérie est pris en
charge dans les foras des médias internet. Elle s’interroge sur les significations des
tensions occasionnées par ces processus délibératifs que suscitent, bien
involontairement, les discours confrériques. Elle pose l’hypothèse que ces polémiques
sont, parmi d’autres scènes, une surface d’expression et de lecture d’un processus
d’impact de la société globale dans l’évolution, le fonctionnement, le positionnement et la
prise de parole officielle de la confrérie. Cette communication s’appesantit sur le cas de la
khoutba prononcée par le Khalife général des mourides et diffusée dans la presse, lors
de la fête de la Tabaski de Novembre 2011.
PROGRAMME DES JOURNEES
PREMIERE JOURNEE 08/11/2012
8h008h30
Accueil
Allocutions de bienvenue:
14
8h309h00
9h0010h00
10h0010h30
Yahia Abou El Farah (IEA)- Baudouin Dupret (CJB)–
Helmut Reifeld (KAS)– Abdourahmane Seck (coordination)
Conférences introductives : Variations sur le Thème
Maati Monjib
(Président)
Jillali el Adnani, Rachid Benlabbah, Eric Ross, Léonardo
Villalon
Pause-Café
SESSION 1 : ETHNO-HISTOIRE DE LIEUX, ESPACES ET TERRITOIRES SOUFIS –
Première partie
Jillali el Adnani
La sacralité de la recherche en sciences humaines et
sociales : continuités et ruptures (le cas du thème
confrérique)
10h3012h15
Eric Ross
(Président)
Ibrahima Thioub, Amadou Dramé
Le pèlerinage des Tijann à Fèz (Maroc) : des restrictions Fiona Mc
imposées par l’administration coloniale française à la Laughlin
modernisation postcoloniale.
(Rapporteur)
Abdoulaye Kane
L’ethnographie d’un espace religieux transnational : la Zawiya
Tijani de Fès.
12h4514h00
Pause-Déjeuner
SESSION 2: ETHNO-HISTOIRE DE LIEUX, ESPACES ET TERRITOIRES SOUFIS –
Deuxième partie
14h0015h45
15h4516h00
Ruggero Vimercati Sanseverino
Repenser la « voie muhammadienne » : le renouveau soufi à Rachid
Benlabbah
Fès au XIXesiècle
(Président)
Kae Amo
Le corps des saints, le corps du pouvoir, le corps politique : Léon Busken
Corps et Soufisme à l’ère de la modernisation politique (Rapporteur)
(Sénégal)
Hlaoua Abdelaziz
Séquence de vie dans la confrérie soufie Al Boutchichiya au
Maroc
Pause-café
SESSION 3: LES VOIX DE LA TIJANNIYYA: UNE CONFRERIE AUX MULTIPLES
CAPITALES
15
16h0017h30
Fabienne Samson
La Tidjaniyya du Sénégal au Maroc, mobilisations sociales
Jillali el
et lutte de leadership.
Adnani
Nazarena Lanza
(Président)
Le tourisme religieux des sénégalais tijanes au Maroc.
Khalid
Quelques enjeux.
Chegraoui
(Rapporteur)
Bakary Sambe
Tijâniyya subsaharienne et stratégies d’influence
marocaine : Le soufisme à l’heure du soft power ?
DEUXIEME JOURNEE 09/11/2012
SESSION 4: EN FACE DU POLITIQUE ET DE LA MODERNITE: LES VOIES DU
SOUFISME AU MAROC ET AU SENEGAL - Première partie
9h0010h45
Mounsif Youssef
L’expérience soufie et ses expériences militantes. Le cas de
la confrérie Adl Wal Ihssan
El Hadj Samba Diallo
Confréries musulmanes et politique au Sénégal : La
Tijāniyya et le régime de l’alternance (2000-2012)
Salim Hmimnat
Official Islam & Sufism in Morocco: Some key findings from
the religious policy (1984-2002)
Pause-café
Léonardo
Villalon
(Président)
Abdourahmane
Seck
(Rapporteur)
10h4511h15
SESSION 5: EN FACE DU POLITIQUE ET DE LA MODERNITE: LES VOIES DU
SOUFISME AU MAROC ET AU SENEGAL - Deuxième partie
11h1512h45
Khalid Chegraoui
Islam politique et soufisme au Maroc et au Sénégal : les cas
de Al adl Wa al Ihassan et de Ibadou al Rahmane.
Fiona Mc
Laughlin
(Président)
Nina ter Laan
“From zawiya to Stage. The impact of the political revival of
Sufism on Sufi musical practices and their performers”
Benjamin
Soarès
(Rapporteur)
Abdourahmane Seck
Communauté confrérique mouride et société numérique.
Contribution à une relecture des imaginaires sociopolitiques
dans le Sénégal postcolonial.
12h4514h45
14h4516h15
16h1516h30
Pause-Déjeuner
Secondes variations sur le thème : bilans des débats
Fiona Mc Laughlin, Abdourahmane Seck,
Khalid Chegraoui, Benjamin Soares
Allocutions de clôture IEA + KAS+ CJB+ Coordination
Léon Buskens
(Rapporteur
général)
REPERTOIRE
Abdoulaye Kane
Assistant Professor Anthropology, University of Florida, Gainesville
[email protected]
16
Abdourahmane Seck
Anthropologue, histoirien, Enseignant-chercheur, Centre d’Etudes des religions (CER), de
l’Université de Saint-Louis. Associé au Centre Jacques Berque
[email protected]
Amadou Dramé
Doctorant en Histoire, inscrit à l’Université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal
[email protected]
Aziz Hlaoua
Doctorant en anthropologie, inscrit à l’Université Pierre Mendès France Grenoble
(UPMF), Laboratoire PACTE, chercheur associé au Centre Jacques Berque.
[email protected]
Bakary Sambe
Politologue, enseignant-chercheur au Centre d’Etudes des religions (CER) de l’Université
Gaston Berger Saint-Louis
[email protected]
Benjamin Soares
Anthropologue, Centre d’Études africaines de Leiden – Pays-Bas
[email protected]
El Hadji Samba A. Diallo
Lecturer in African and African American Studies, Washington University in St. Louis
Campus
[email protected]
Eric ross
Associated professor, Al Akhawayn University, School of Humanities and Social Sciences,
Ifrane, Morocco.
[email protected]
Fabienne Samson
Directrice adjointe du CEA. Chargée de recherche IRD, Anthropologie.
(EHEES, CEAf/UMR 194)
[email protected]
Fiona Mc Laughlin
Associate Professor of Linguistics & African Languages, University of Florida
[email protected]
Ibrahima Thioub
Professeur d’Histoire, Faculté des lettres et Sciences humaines de l’Université Cheikh
Anta Diop de Dakar et Directeur du Centre Africain de Recherches sur les Traites et les
Esclavages (CARTE).
[email protected]
Jillalli El Adnani
Enseignant-Chercheur en Histoire, Université Mohamed V-Agdal, Rabat
[email protected]
Kae Amo
Doctorante en anthropologie associée au CEAf, Ecole des Hautes Etudes en Sciences
Sociales, Paris
[email protected]
Khalid Chegraoui
Professeur Histoire et Anthropologie politique, Institut des Etudes Africaines, Rabat
[email protected]
17
Léon Buskens
Associate professor Islamic law and society, based at the department of Arabic Language
and Culture of the Leiden Faculty of Arts.
[email protected]
Leonardo Alfonso Villalon
Professor, Center for African Studies & Departement of Political Science, University of
Florida
[email protected]
Maati Monjib
Enseignant-chercheur Institut des Etudes africaines, Rabat
[email protected]
Mounsif Youssef
Doctorant en sociologie associé CM2S, Université de Casablanca
[email protected]
Nazarena Lanza
Doctorante en anthopologie à l'IDEMEC (MMSH), chercheure associée au Centre
Jacques Berque, Rabat
[email protected]
Nina ter Laan
Doctorante en anthropologie des sciences religieuses à la faculté de philosophie,
theologie et sciences religieuses de l'Université Radboud Nijmegen, Pays-Bas.
[email protected]
Rachid Benlabbah
Chercheur, Institut des Etudes Africaines.
[email protected]
Ruggero Vimercati Sanseverino
Docteur en islamologie et chercheur associé à l’IREMAM, Aix-en-Provence
[email protected]
Salim Hmimnat
Docteur en sciences politiques, chercheur , Institut des Etudes Africaines, Rabat
[email protected]
Les coordinateurs remercient l’ensemble des personnels administratifs et
techniques du Centre Jacques Berque, de la Fondation Konrad Adenauer, de
l’Institut des études africaines, du Codesria et du Ceaf qui se sont mobilisés dans
le cadre de ce colloque.