Cass. civ. 3ème, 3 décembre 2003.

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Cass. civ. 3ème, 3 décembre 2003.
CIV.3
FB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 3 décembre 2003
Rejet
M. WEBER, président
Arrêt n° 1351 FS-P+B
Pourvoi n° Z 02-12.266
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu
l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Garance productions, société par actions
simplifiée, dont le siège est 72, rue Rochechouart, 75018 Paris,
en cassation d'un arrêt rendu le 11 janvier 2002 par la cour d'appel de Paris (16e chambre
civile, section B), au profit :
1°/ de M. Pierre Carrus, demeurant …,
2°/ de M. Jacques Carrus, demeurant …,
3°/ de Mme Janine Carrus, épouse Iche, décédée,
4°/ de M. Jean-François Iche, demeurant …, agissant en sa qualité d'ayant droit
de Janine Carrus, épouse Iche,
5°/ de Mme Laurence Iche, demeurant …, agissant en sa qualité d'ayant droit
de Janine Carrus, épouse Iche,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de
cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de
l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 29 octobre 2003, où étaient présents :
M. Weber, président, M. Assié, conseiller rapporteur, MM. Peyrat, Dupertuys, Philippot,
Mme Bellamy, M. Foulquié, conseillers, MM. Betoulle, Jacques, Mme Monge, conseillers
référendaires, M. Bruntz, avocat général, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Assié, conseiller, les observations de la SCP Gatineau,
avocat de la société Garance productions, de Me Luc-Thaler, avocat des consorts Carrus et
des consorts Iche, les conclusions de M. Bruntz, avocat général, et après en avoir délibéré
conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 11 janvier 2002), que, par acte sous seing
privé du 19 décembre 1985, les consorts Carrus ont donné à bail en renouvellement, pour une
durée de 9 ans à compter du 1er octobre 1985, à M. Delaporte, aux droits duquel est venue la
société Garance productions, différents locaux à usage commercial ; que, par acte du
20 juillet 1995, les bailleurs ont donné congé pour le 1er avril 1996 à la société Garance
Productions avec offre de renouvellement moyennant un loyer déplafonné ; qu’aucun accord
n’ayant pu intervenir entre les parties sur le prix du bail renouvelé, le juge des baux
commerciaux a été saisi à l’initiative des bailleurs ;
Attendu que la société Garance Productions fait grief à l’arrêt de retenir le
caractère monovalent des locaux et de fixer le nouveau loyer à une certaine somme alors,
selon le moyen :
1°/ que seuls les locaux, dits monovalents, construits en vue d’une seule
utilisation peuvent, par dérogation, voir leur prix déplafonné et déterminé selon les usages
observés dans la branche d’activité considérée ; que la monovalence s’apprécie au regard de
la profession exercée et non au regard d’un secteur d’activité ou d’une catégorie
socioprofessionnelle ; que ne sont pas monovalents les locaux qui peuvent recevoir de
multiples affectations correspondant à l’exercice de métiers différents même s’ils concernent
tous le même secteur d’activité ou appartiennent à la même catégorie socioprofessionnelle ;
qu’en l’espèce, la cour d’appel a relevé que les locaux litigieux étaient constitués d’une
“grande surface plane avec des installations modulables et des sièges amovibles” destinée à
recevoir “des activités différentes de spectacle (manifestations sportives, boxe, catch, tennis,
patinage, tous autres spectacles de variété)” correspondant à autant d’activités de nature
différente et à l’exercice de métiers dissemblables par des professionnels de spécialités
distinctes ; qu’en jugeant cependant que ces locaux répondaient au critère de monovalence
au prétexte que, bien que différentes, les activités accueillies dans les locaux litigieux
concernaient toutes “le spectacle”, la cour d’appel a violé l’article 23-8 du décret du
30 septembre 1953 ;
2°/ que le pluralisme des commerces autorisés par le contrat de bail exclut le
caractère monovalent des locaux ; qu’en l’espèce, le contrat de bail prévoyait que les locaux
loués pourraient être utilisés pour “l’exploitation d’une salle de bal et de patinage ainsi que
pour des manifestations sportives (boxe, catch, tennis) et aussi pour tous autres spectacles
connexes de variété à ceux qui viennent d’être précisés” ; qu’en affirmant néanmoins que,
bien que la destination des lieux prévue au bail vise des activités différentes, les locaux
avaient un caractère monovalent, la cour d’appel a violé l’article 23-8 du décret du
30 décembre 1953 ;
Mais attendu qu’ayant relevé que les lieux ne pouvaient être transformés en
vue d’une destination différente sans réalisation de travaux importants et coûteux, la cour
d’appel a pu en déduire que, bien que la destination des lieux prévue au bail vise des activités
différentes de spectacle telles que manifestations sportives, boxe, tennis, patinage et tous
autres spectacles de variétés, il n’y avait pas lieu de faire de distinction entre les différentes
branches de spectacle et que les locaux présentaient un caractère monovalent ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Garance productions aux dépens ;
Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société
Garance productions à payer aux consorts Carrus et Iche la somme de 1 900 euros et rejette la
demande de la société Garance productions ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et
prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille trois.

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