La place de l`industrie en Alsace

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La place de l`industrie en Alsace
Avis
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La place de l’industrie
en Alsace
15 avril 2003
Vu la Loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes,
des départements et des régions,
Vu la Loi n°86-16 du 16 janvier 1986 relative à l’organisation sociale et
professionnelle 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la
République,
Vu la lettre de saisine de Monsieur le Président du Conseil Régional d’Alsace en
date du 30 janvier 2002,
Vu le projet d’avis transmis par la Commission Développement Economique et
Social du CESA le 11 avril 2003,
Vu la décision du Bureau du CESA en date du 15 avril 2003,
Monsieur Yves LAVOINNE, rapporteur, entendu
Le Conseil Economique et Social d’Alsace émet l’avis suivant :
POUR : 68
CONTRE : 0
ABSTENTION : 0
Conseil économique et social d’Alsace
………………………………………………………………………………………………………………………………………
Avis n°3-03 – Avril 2003 – La place de l’industrie en Alsace
2
Introduction
Le Président du Conseil Régional a saisi le CESA sur « la place de l’industrie en
Alsace » (lettre du 30 janvier 2002). Une note d’accompagnement établissait un
« diagnostic » sur la « bonne tenue » de l’industrie alsacienne. Depuis, la
dégradation rapide de la conjoncture économique montre l’ampleur des problèmes
structurels de l’Alsace dans un contexte de globalisation et de financiarisation de
l’économie mondiale.
La saisine suggérait en substance deux grandes orientations comme bases de
réflexion :
- Quels atouts permettraient à l’Alsace de garder une industrie importante ?
- Comment faciliter l’évolution et le redéploiement de l’activité industrielle ?
Destinées en priorité à la Région, les propositions du CESA s’adressent également
aux autres acteurs des politiques publiques industrielles et au monde économique
et social.
Le CESA a identifié des facteurs d’attractivité du territoire de nature fiscale et
administrative, qui relèvent du niveau national. Le CESA ne formule pas de
propositions dans ces domaines sur lesquels les acteurs régionaux n’ont pas prise.
Le CESA souligne la place importante de l’industrie dans l’économie alsacienne et
considère qu’il s’agit d’un atout à conforter.
I. Diagnostic et perspectives de l’industrie en Alsace
1.1. Place de l’industrie en Alsace
Le poids de l’industrie en Alsace est illustré par sa part importante dans le PIB
régional et le nombre de ses emplois.
La part de l’industrie dans le PIB régional en 2000 était de 28,2 % (contre 28,9 % en
19991), chiffre sensiblement supérieur à la moyenne française (21,1% en 2000).
Au 1er janvier 2000, l’activité industrielle (entreprises artisanales et industrielles)
fournissait 170 096 emplois, soit 26,5 % de l’emploi salarié régional, chiffre
nettement supérieur à la moyenne nationale (19,3 %)2. Il convient d’y ajouter les
emplois dans :
- les services à la production dont l’intérim ;
- les industries suisse et allemande.
De 1990 à 1999, l’emploi industriel s’érode en moyenne de 0,79 % par an, taux
inférieur à la moyenne nationale. L’externalisation d’activités relevant de l’industrie a
entraîné le classement d’une partie de celles-ci dans le secteur tertiaire et explique
partiellement cette baisse. L’érosion s’est aggravée en 2002 (– 2,9 %),3 notamment
------------------------------------
1
Dans un contexte de croissance du PIB régional global de 3,7% de 1999 à 2000.
Tableaux de l’économie alsacienne, INSEE, 2002.
3
Banque de France.
2
Conseil économique et social d’Alsace
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Avis n°3-03 – Avril 2003 – La place de l’industrie en Alsace
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en raison de la multiplication des restructurations et plans sociaux liés à des
phénomènes structurels et conjoncturels.
Le nombre d’entreprises de plus de 200 salariés (2,8 %) est supérieur à la moyenne
nationale (1,5 %)4.
La répartition de l’emploi entre les principaux secteurs industriels est assez
équilibrée :
mécanique : 14 % ;
industries agroalimentaires : 13 % ;
automobile : 11 % ;
équipements mécaniques : 11 % ;
chimie, caoutchouc, plastique : 11 % ;
équipements du foyer (meubles, appareils domestiques…) : 7 %5.
-
Cette diversité a pu contribuer à amortir les effets des crises économiques passées.
Par contre, elle peut constituer une difficulté pour la structuration de pôles
industriels forts, qui requièrent l’existence d’une masse critique d’entreprises de la
même branche.
1.2. Forces et faiblesses de l’industrie alsacienne
Le tableau ci-dessous fait apparaître chacun des facteurs dans sa double
dimension, forces et faiblesses.
FORCES
-
-
-
-
FAIBLESSES
FACTEURS GEOGRAPHIQUES
Malgré le poids des métropoles - L’insuffisance de liens avec les
régionales, Strasbourg et Mulhouse,
grands axes de circulation Est-Ouest
la localisation des industries est assez
et Nord-Sud pénalise d’autant plus
équilibrée
dans
l’ensemble
de
l’Alsace que l’élargissement de
l’Alsace. L’industrialisation de la
l’Union Européenne déplace vers l’Est
région de Colmar et de la bande
le centre de l’Europe.
rhénane est plus récente.
FONCIER
Le foncier est moins coûteux qu’en
- Le foncier a tendance à se raréfier et
Suisse et dans le Bade-Wurtemberg.
est moins disponible qu’en Lorraine
ou en Franche-Comté
GLOBALISATION DE L’ECONOMIE
L’émergence de nouveaux marchés - L’émergence de nouveaux pays
dans les nouveaux pays industriels
compétitifs (coûts de main d’œuvre
peut représenter une potentialité pour
plus bas,...) entraîne une évolution
l’industrie alsacienne.
profonde de l’économie mondiale qui
peut menacer l’industrie alsacienne.
L’économie alsacienne est très - Le poids de l’exportation est à
ouverte :
relativiser, car elle va principalement
- en 2001, 43,7 % du chiffre
vers des pays proches (Allemagne,
d’affaires de l’industrie alsacienne
Suisse…).
était
réalisé
à
l’exportation - Depuis la fin des années 1990,
------------------------------------
4
5
L’Alsace industrielle, INSEE.
INSEE, 1997.
Conseil économique et social d’Alsace
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(moyenne
française
6
31,7 %) , surtout du fait des
grandes
unités
industrielles
notamment à capitaux étrangers :
- 29,9 % des achats des entreprises
alsaciennes sont réalisés à
l’étranger (France 7,6 %)7.
- les capitaux étrangers jouent un
rôle important : les implantations
d’entreprises étrangères (suisses
et allemandes, puis américaines et
japonaises) ont généré 40% des
créations d’emploi au cours des
décennies 1980 et 19908.
- 35,5 % des salariés travaillent
dans des établissements contrôlés
par des capitaux étrangers (France 18 %)9.
-
-
l’attractivité de l’Alsace pour les
entrepreneurs étrangers a tendance à
diminuer (les coûts de production,
coûts salariaux et sociaux rendent les
PECO10 compétitifs comme sites
d’implantation).
Des secteurs importants de l’industrie
alsacienne, y compris des PME,
passent sous le contrôle de capitaux
étrangers, de plus en plus souvent
détenus
par
des
groupements
d’investisseurs
qui
n’ont
pas
forcément d’attache industrielle et
dont certains recherchent en priorité
une rentabilité financière à court
terme.
L’importance des capitaux étrangers11
et la tendance au désinvestissement
local,
lors
des
transmissions
d’entreprises,
renforcent
la
dépendance vis-à-vis de centres de
décision extérieurs à la région
(nationaux ou internationaux).
STRUCTURE
L’automobile constitue une véritable - Bien des secteurs ne sont pas
filière. Certains pôles industriels sont
organisés
en
filières.
en développement (biotechnologies,
pôle image, pôle matériaux…).
- De tradition fortement manufacturière,
l’industrie alsacienne emploie moins
En
se
développant,
certaines
de cadres (8 %) que la moyenne
entreprises artisanales participent au
nationale (11 %)12.
renouvellement du tissu industriel
alsacien, notamment dans les zones - Le taux de valeur ajoutée est de
rurales.
58 000 €/salarié. Depuis 1999, il est
inférieur à la moyenne nationale qui
est de 61 000 €13. Ce taux est dû
d’abord
au
caractère
très
manufacturier
de
l’industrie
alsacienne et ensuite au calcul des
valeurs de transfert à l’intérieur des
------------------------------------
6
Banque de France, données 2001, « Tendances régionales ».
---------------------------------------------7
Banque de France : intrants.
8
ADA.
9
L’Alsace industrielle, INSEE (chiffre 1994) : proportion de 43,0% en 1999 selon la Banque de France.
10
Pays d’Europe Centrale et Orientale.
11
Au demeurant, dans une économie mondialisée (notamment au niveau de la finance), la nationalité
des capitaux, devenus très mobiles, devient difficile à appréhender.
12
CRCI.
13
Banque de France.
Conseil économique et social d’Alsace
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-
-
RESSOURCES HUMAINES
La part des jeunes dans la population - En
raison
des
perspectives
alsacienne est plus forte que dans le
d’évolution de la pyramide des âges,
reste de la France et dans le Rhin
à système de formation inchangé, la
Supérieur.
difficulté déjà observée à recruter du
personnel qualifié se fera très
durement sentir dans les prochaines
années.
-
-
-
-
-
-
groupes.
Le taux de rentabilité des industries
alsaciennes est en baisse régulière
depuis 199714.
La part des femmes dans l’emploi
industriel tend à progresser, (29,3 %
en 199915) mais elle est encore trop
réduite et surtout contenue dans des
emplois non qualifiés.
FORMATION
L’apprentissage et la formation en - Le niveau de sortie du système de
alternance contribuent à une bonne
formation est moins élevé en Alsace
formation des salariés des activités
que dans le reste de la France, alors
industrielles.
que le niveau de qualification des
Actives en matière de formation
personnels
recherchés
tend
à
professionnelle, les universités et
augmenter.
grandes écoles ont une excellente
réputation. Cette qualité attire une
forte proportion d’étudiants étrangers
à la région.
La
connaissance
des
langues
étrangères par les Alsaciens est un
facteur d’attractivité.
RECHERCHE
La recherche publique (universités,
grandes écoles et organismes de
recherche), notamment fondamentale,
est importante en Alsace.
La part des contrats de recherche - Les contrats de recherche et les
avec le monde industriel démontre
transferts de technologies demeurent
des relations réelles.
encore trop limités.
- La faiblesse des investissements
privés dans le domaine de la
recherche / développement en Alsace
se traduit par un niveau de dépôt de
brevets européens sensiblement plus
faible que dans le Bade-Wurtemberg
---------------------------------------------------------------------------------14
Banque de France.
15
Tableaux de l’économie alsacienne, INSEE, 2002.
Conseil économique et social d’Alsace
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6
(6 % des dépôts de brevets
européens contre 0,6 % en Alsace16).
-
IMAGE
L’Alsace bénéficie d’une image globalement positive en matière
d’offres et d’activités culturelles, et de cadre de vie.
Certains
clichés
dévalorisants
subsistent néanmoins.
Bien que troisième région industrielle
de France, l’Alsace voit son caractère
industriel souvent méconnu.
II. Propositions
La politique économique et industrielle du Conseil Régional d’Alsace doit s’appuyer
non seulement sur des aides directes ciblées mais également sur le renforcement
d’un environnement favorable à la présence d’industries, sur le soutien au
partenariat entre les acteurs et sur le redéploiement des politiques.
2.1. Pour un environnement favorable à l’industrie
Valoriser la situation géographique de l’Alsace
Pour valoriser l’atout que constitue leur situation géographique, l’industrie
alsacienne et, plus globalement, l’économie régionale, devront s’articuler plus
fortement à l’ensemble du Rhin Supérieur, sans négliger pour autant leur
appartenance au grand Est.
Rendre l’Alsace plus accessible
Le développement des infrastructures doit ancrer l’Alsace au carrefour des liaisons
européennes Ouest-Est et Nord-Sud.
Cela implique la réalisation :
- de voies routières, ferroviaires, fluviales17 ;
- d’aéroports : reliés par fer aux grandes villes ;
- de plates-formes logistiques pluri-modales18.
Le CESA soutient la politique régionale de réseau « haut débit ». Elle permettra une
bonne irrigation du territoire, ce qui, en-dehors des grandes zones urbaines,
contribuera à maintenir les entreprises existantes et à favoriser les implantations
nouvelles.
Poursuivre l’élévation du niveau de formation
Le remplacement des personnes qualifiées partant en retraite ne pourra se faire à
moyen terme qu’en jouant simultanément sur la formation initiale et continue. La
-------------------------------------------------------------------------------16
Source : Eurostat et INPI.
17
Voir l’avis du CESA sur « Les transports dans l’aménagement du territoire » (7 mars 2003).
18
Voir l’avis du CESA sur « Les transports dans l’aménagement du territoire » (7 mars 2003).
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réduction significative du nombre de sortants sans diplôme ou sans projet
professionnel doit être une priorité du Schéma Régional de l’Education et de la
Formation.
A court et moyen termes, le renforcement et l’activation du programme « Objectif
Qualification » doit accompagner la nécessaire évolution des compétences des
salariés. La formation professionnelle continue dans les entreprises doit s’attacher à
élever le niveau de qualification de tous les salariés et tout particulièrement de ceux
ne maîtrisant pas les pré-requis.
L’augmentation des besoins des entreprises en personnel qualifié demande sur les
moyen et long termes un effort de formation. Dans cette optique, le système de
formation initiale doit s’attacher à trois objectifs prioritaires :
- promouvoir l’orientation des hommes et des femmes vers les filières scientifiques
et techniques ;
- développer l’accès aux niveaux III et IV ;
- assurer à tous la maîtrise de langues étrangères.
La politique de formation de la Région doit se mettre en place sans délai en
coordination avec les partenaires sociaux afin de répondre aux attentes fortes qui
existent.
Favoriser la création et la reprise d’entreprises
Le CESA rappelle l’importance de la création et de la reprise d’entreprises, tel qu’il
l’avait proposée dans son avis du 25 septembre 2001. Outre ses propositions
antérieures, le CESA préconise de :
- sensibiliser les étudiants aux métiers industriels et à leur dimension commerciale,
et à l’intérêt de créer ou de reprendre des entreprises industrielles ;
- améliorer l’information sur les opportunités de reprise.
Promouvoir l’image de l’Alsace industrielle
Le développement de l’image de l’Alsace comme région industrielle passe par le
développement d’une communication sur cette thématique. Le lancement de
nouvelles manifestations de rayonnement international (foires, congrès…), liées
notamment aux pôles, peut y contribuer avec l’aide de la Région et en collaboration
avec les collectivités locales. Pour les productions fabriquées en Alsace, un label
ALSACE pourrait être valorisant et favoriser l’ancrage territorial des entreprises
concernées.
Renforcer l’attractivité culturelle de l’Alsace
L’attractivité de l’Alsace repose notamment sur des politiques culturelles et le
développement d’écoles internationales.
2 2. Renforcer le partenariat entre les acteurs de l’industrie
Proposer une stratégie de développement des activités industrielles
A côté des filières existantes (agroalimentaire, automobile, bois, chimie de
spécialité, textile), le Conseil Régional doit cibler des filières émergentes permettant
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un renouveau du tissu industriel, la création d’emplois attractifs, et créant de
nouvelles valeurs ajoutées ; par exemple : les biotechnologies, les TIC,
l’écoenvironnement, les matériaux, la métrologie, les nouvelles techniques
d’usinage, le pôle image, les sciences de la vie…
L’organisation de ces filières industrielles existantes ou émergentes en pôles, en
SPL ou en plates-formes technologiques, permettra un effet d’émulation, la mise en
réseaux des moyens et de l’information, et l’augmentation de la valeur ajoutée par
un renforcement de la recherche, des transferts de technologies et des formations
techniques adéquates.
Cette structuration doit, à l’instar de ce qui s’observe dans l’agroalimentaire, pouvoir
intégrer des entreprises artisanales, par la formalisation de liens qui, souvent,
existent déjà.
D’une façon générale, la structuration des filières industrielles est souhaitable pour
le développement des productions et la coopération de l’ensemble des partenaires
de la branche.
Recherche et industrie
Le développement de l’industrie, voire la réorganisation de secteurs en difficulté,
passe en général par l’accroissement de la valeur ajoutée grâce à de nouvelles
productions, la création d’emplois qualifiés, une capacité d’innovation accrue et
l’amélioration des services rendus aux clients.
L’innovation de produits, comme celle de procédés, suppose de :
- créer et développer les plates-formes technologiques qui jouent un rôle
structurant, en veillant à leur bonne répartition spatiale ;
- développer une politique contractuelle pluriannuelle ;
- améliorer les transferts de technologies vers l’industrie grâce à une coopération
renforcée entre les universités, les centres de recherche et l’industrie à l’échelle
du Rhin Supérieur et du Grand Est ;
- améliorer la qualité de l’information sur :
- les dispositifs existants ;
- les thèmes et les savoir-faire19 des laboratoires publics de recherche (universités,
CNRS, INSERM, INRA).
Plus particulièrement, le CESA suggère :
- la tenue d’une conférence annuelle de la recherche et de l’industrie ;
- la mise en place d’un dispositif d’incitation à la recherche effectuée au bénéfice
des entreprises.
Ce renforcement de la recherche au bénéfice de la région doit contribuer à l’essor
de pôles de recherche compétitifs au niveau international.
Information et veille économiques
Afin de mieux anticiper l’évolution de l’économie et d’avoir une meilleure
compréhension de la situation en Alsace, il convient de renforcer l’information et la
concertation sur l’industrie, y compris sur les risques industriels.
-----------------------------------19
Eventuellement transférables dans l’innovation de process industriel .
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Pour ce faire, le CESA recommande la création, sous l’égide de la Région, d’un
observatoire de l’économie régionale associant universités, organismes spécialisés,
organisations professionnelles et syndicales, collectivités territoriales, dont les
missions seraient de :
- rassembler et mettre en cohérence les données éparses sur le sujet ;
- assurer une mission de veille, de diagnostic et de prospective opérationnelle sur
les grandes branches économiques.
Sur la base notamment des travaux de l’observatoire, le CESA se propose
d’organiser une conférence régionale annuelle sur l’évolution et le devenir de
l’économie régionale avec l’ensemble des acteurs. Les conclusions de cette
conférence régionale pourront orienter les travaux du Comité de Coordination
Régional Emploi Formation Professionnelle.
2.3 Redéployer les politiques de soutien à l’industrie
En tant que chef de file dans le domaine des aides économiques20, la Région doit
pouvoir assurer une fonction d’impulsion et veiller à la mise en cohérence des
politiques économiques en concertation avec les autres collectivités et l’ensemble
des partenaires : industriels, universités, organismes de recherche, grandes écoles,
lycées, acteurs consulaires, économiques et sociaux, pouvoirs publics.
Mieux structurer l’action publique
Dans le souci d’une clarification des compétences, le CESA approuve les
propositions de la Région Alsace portant sur le transfert des mesures de soutien au
développement industriel actuellement gérées par l’Etat.
Le CESA ne formule pas de recommandations précises concernant le système
actuel des aides régionales (les conditions d’octroi ou les montants allouables). Il se
félicite par contre de l’étude envisagée par le Conseil Régional visant à établir un
bilan de celles-ci. Le CESA préconise une politique régulière d’évaluation (calcul
coûts/avantages, conséquences sociales, environnementales,…) et de suivi de
chacun des dispositifs afin de déterminer leur impact réel et de permettre les
éventuels ajustements rendus nécessaires par les évolutions économiques.
Optimiser les aides publiques à l’industrie
Le CESA constate que le dispositif régional d’aide couvre bien, pour l’essentiel, les
diverses phases de la vie de l’entreprise. Il est néanmoins conscient du volume
inévitablement limité des aides publiques régionales21 et suggère pour les
optimiser :
- des mesures ciblées dans le cadre d’une approche par filières, moyen pertinent
de concentrer l’action publique, afin de maximiser l’effet de levier en terme de
création de richesses sur le territoire régional ;
- la création d’une PRCE22 spécifique, afin d’accompagner les entreprises pendant
la phase souvent difficile de « post-création » (3 à 5 ans).
------------------------------------
20
Article 102 de la loi 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité.
11 millions d’euros en 2002, ayant contribué à la création de 1600 emplois.
22
Prime Régionale à la Création d’Entreprises.
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Le CESA rappelle par ailleurs qu’il est favorable au maintien du système actuel de
plafonnement des aides à l’emploi en cas de reprise d’entreprise23.
Favoriser la création de nouveaux outils financiers
Outre ses propositions antérieures24, le CESA préconise de :
- étendre l’action de la SOFARIS (Société française de garantie des financements
des petites et moyennes entreprises) au financement de l’immobilier en zone
rurale, dans une logique d’aménagement intercommunal du territoire ;
- créer un FCP à long terme « AlsaceTech », largement ouvert à l’épargne locale,
qui pourrait faciliter la transmission des entreprises et, en outre, jouer un rôle
dans l’investissement à long terme ;
- la création d’outils financiers à long terme permettant de doter les entreprises
industrielles très petites ou moyennes en fonds propres.
Développer une politique foncière et d’équipement
Le CESA a noté une réelle demande en matière d’immobilier d’entreprises et de
foncier, notamment en zones rurales. Les efforts déjà entrepris par les collectivités
locales dans ce domaine (politique départementale notamment) seraient à renforcer
en priorité par rapport aux autres types d’aides.
Le CESA recommande un recensement des terrains et bâtiments disponibles, en
valorisant les friches industrielles et militaires bâties. Les terrains proches
d’infrastructures ferroviaires ou fluviales doivent être privilégiés.
Une agence de développement unique pourrait se voir confier cette mission
foncière.
L’émergence de nouvelles entreprises implique une augmentation des efforts déjà
entrepris en matière de :
- mise à disposition de zones d’activité équipées ;
- création de locaux spécialisés pouvant être mis à disposition sous forme locative
ou sous forme d’achat (ateliers relais, hôtels d’entreprises / pépinières) ;
- mise en place d’incubateurs.
Une agence de développement pour l’Alsace aux compétences redéfinies
Dans une perspective de cohérence, de lisibilité et de crédibilité de l’action de
promotion de l’Alsace25, la fusion des trois agences de développement alsaciennes
est impérative. Il appartient désormais à la Région Alsace de mener à bien cette
opération en coordination avec les départements et les autres collectivités.
Outre la promotion de l’Alsace, les autres missions de cette agence de
développement de l’Alsace devraient être redéfinies, en concertation avec les
organismes déjà existants (chambres consulaires…), dans le sens d’un
renforcement de son rôle de soutien aux entreprises existantes ainsi que de
l’animation des filières industrielles précédemment évoquées, de la recherche de
repreneurs d’entreprises défaillantes et de l’aide au développement à l’exportation.
------------------------------------
23
Voir l’avis du CESA « Budget primitif 2003 » (9 décembre 2002).
Voir l’avis du CESA « la création et la reprise d’entreprises en Alsace » (25 septembre 2001).
25
Voir avis du CESA « La prospection et l’accueil des investissements directs internationaux en
Alsace » (4 octobre 1996)
24
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CONCLUSION
L’avenir de l’industrie en Région Alsace passe par la mise en place d’une stratégie
de développement qui permette à la fois anticipation et réactivité.
Une industrie modernisée valorisant à la fois les filières traditionnelles et les filières
émergentes implique un effort accru de :
- formation ;
- renforcement de la recherche privée ;
- meilleurs transferts de technologies de la recherche publique vers l’industrie.
Cette évolution doit être favorisée par une politique d’accompagnement jouant sur
quatre leviers :
- l’environnement des entreprises : infrastructures, services aux entreprises et aux
personnels, outils financiers… ;
- les aides ciblées à l’industrie ;
- le soutien à la constitution d’un nombre limité de réseaux d’entreprises sous la
forme de SPL26, de pôles technologiques et / ou de filières industrielles ;
- la mise en place d’une agence de développement unique.
Les propositions du CESA ne trouveront de sens que dans leur articulation avec
une politique industrielle menée à l’échelle nationale et européenne.
Les propositions qui précèdent constituent des éléments forts de réflexion du CESA
pour réorienter les actions en matière de politique industrielle de la Région.
Aujourd'hui, la multiplication des plans de restructuration et les licenciements
économiques en Alsace nécessitent la mobilisation de tous pour mettre en place
des plans de sauvegarde de l’emploi. Cet objectif doit concerner tous les secteurs,
toutes les entreprises et tous les territoires en difficultés.
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26
Systèmes Productifs Localisés.
Conseil économique et social d’Alsace
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