dossier pharmaceutique c`est parti
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30 actualités DOSSIER PHARMACEUTIQUE C’EST PARTI ! Tandis que le dossier médical personnel piétine, l’Ordre des pharmaciens vient d’obtenir l’autorisation d’expérimenter les premiers dossiers pharmaceutiques dans six départements. En avance sur le DMP, le DP devra encore faire face à de nombreux défis. Objectif : préserver le monopole officinal. —————— JONATHAN ICART ne poignée d’officines du Doubs, de la Meurthe-etMoselle, de la Nièvre, du Pasde-Calais, du Rhône et de la Seine-Maritime, étrennent en ce moment même les premiers dossiers pharmaceutiques (DP), pour une durée de six mois. Depuis le 30 mai dernier et l’autorisation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), une vague nationale d’expérimentation déferle actuellement sur l’Hexagone. Outre la présentation – avant toute généralisation du dispositif – d’un bilan de « faisabilité et d’acceptabilité », les derniers « ajustements préalables » réclamés par la CNIL n’ont donc été qu’une « formalité », selon Claude Japhet, le président de l’Union nationale des pharmaciens de France (UNPF). Ils concernent, pour l’essentiel, l’information du patient. Et notamment la question de ses droits sur ce dossier partagé. « Le dossier pharmaceutique est facultatif, le patient peut donc choisir de l’interrompre à tout moment, sans aucune incidence sur le remboursement de ses médicaments. Pour activer le DP, le pharmacien a besoin de sa carte CPS, mais également de la carte Vitale du patient. Son consentement est donc indispensable. C’est lui qui a la clef. Il lui sera malgré tout proposé dans son intérêt. Le patient aura par ailleurs la possibilité de masquer certaines données », assure-t-il. A noter que le U P H A R M A C E U T I Q U E S _ J U I N /J U I L L E T 2 0 07 pharmacien, qui en sera informé, ne pourra être tenu pour responsable en cas d’incident sanitaire. Il aura simplement été privé des informations qui lui auraient permis de « bien dispenser ». Un outil professionnel. Dans l’absolu, le DP et le DMP sont étroitement liés. « Certes, il s’agit du volet médicament du DMP qui, lui, appartient au patient. Mais la vocation du dossier pharmaceutique est avant tout d’être un dossier professionnel qui sécurise la dispensation des médicaments. Naturellement, le patient pourra en obtenir une copie, s’il le souhaite, notamment en vue de compléter son dossier avant une hospitalisation », confie Jean Parrot, le président de l’Ordre national des pharmaciens. Le DP intègrera « l’historique des dispensations des quatre derniers mois », indique-t-il afin de mettre en commun les éléments dont les officinaux disposent sur le parcours médicamenteux de leur patientèle. Ils repèreront ainsi les risques d’accidents iatrogènes ou les redondances de traitements pas toujours « décelables » à l’heure actuelle, notamment dans le cas où le patient irait s’approvisionner dans une autre pharmacie que la sienne. « En substance, il ne contiendra aucune donnée médicale. Y figureront exclusivement les médicaments dispensés (nom, formulation, dosage, quantité délivrée, date de délivrance) et quelques données générales (allergies, intolérance à certains antibiotiques…). D’après le président de la commission « Protection Sociale » de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), Alain Jayne, le DP sera une sorte de « back office » de tout ce qui est dans l’axe traditionnellement contrôlé par les pharmaciens. A noter que le coût du DP est évalué à 20 millions d'euros sur cinq ans et qu’il sera entièrement financé par l’Ordre. Une cotisation supplémentaire sera donc réclamée aux pharmaciens titulaires (55 euros) ainsi qu’aux adjoints d’officine (6 euros) en 2007. Le DMP se fait attendre. Si le GIP DMP estime que l’autorisation de la CNIL « constitue une étape supplémentaire dans l'avancée du projet », son nouveau report a pourtant de quoi inquiéter (voir encadré). « Le DP enrichit le DMP. Si le DMP passe à la trappe, il entraînera le DP dans sa chute. Aux termes de l’expérimentation, le DP ne sera pas prolongé dans le temps, sauf à aller au Parlement pour obtenir une séparation en deux entités distinctes… jusqu’au jour où le DMP sera généralisé à la France entière. Tous les acquis de l’expérimentation tomberaient à l’eau. La mise en place s’en trouverait donc retardée », comme le souligne Claude Japhet. Pour sa part, Jean Parrot, se veut plus ©SIPA 31 Jean Parrot s’attend à une monté en charge progressive des expérimentations au cours des six mois à venir. optimiste. Il ne considère pas le nouveau report du DMP comme un couperet. Une nouvelle préoccupante, certes, mais pas pour autant rédhibitoire. « Par mesure de sécurité, les données récoltées sont stockées pendant un an chez notre hébergeur de référence (ndlr : Santéos). Simplement, cette opération représente un coût important qui est à notre charge. Nous ne pouvons donc pas attendre indéfiniment… ». Pour Alain Jayne, le feuilleton du DMP – et ses reports incessants – s’apparente à « une histoire de gros sous ». La cause principale : la sécurisation des données et le choix de l’hébergeur. Il déplore notamment les pressions gouvernementales qui ont été exercées durant la campagne présidentielle. Et de critiquer l’attitude du ministre de la Santé de l’époque, Xavier Bertrand, parti depuis pour d’autres responsabilités. C’est un dossier à 10 ans, affirme-t-il, il faut donc lui « laisser le temps de grandir » et « ne pas précipiter les choses ». Des applications à venir. D’après Jean Parrot, cet outil pourrait probablement permettre, à terme, d’établir des analyses de santé publique à grande échelle. Les laboratoires pharmaceutiques en seront indirectement bénéficiaires. Ils n’auront, en revanche, aucun espoir de voir venir « des statistiques de ventes commerciales ». C’est un dossier professionnel destiné à rationaliser la chaîne de dispensation des médicaments avec trois cibles en ligne de mire : meilleur usage du produit, Le DMP piétine Initialement prévu pour le 1er juillet 2007, puis repoussé au mois de novembre suivant, et par la suite au printemps 2008, le déploiement du DMP pourrait finalement être remis à plus tard… Objet de la discorde : la définition du contenu des informations médicales ou encore la sécurisation et la confidentialité des données. Si le GIP assure avoir soumis un projet de décret tenant compte de ces questions aux partenaires du projet, le Conseil de la Caisse nationale d’assurance-maladie y a porté un sérieux coup d’arrêt, via son avis – consultatif – défavorable du 16 avril dernier. Ce dernier a notamment estimé que « le report de la date de lancement devait être l'occasion de traiter, au fond, un certain nombre de questions essentielles, comme le rôle du médecin traitant, l'articulation avec les dossiers des professionnels, la hiérarchisation des données… ». Toujours selon l’avis, les premiers résultats des expérimentations régionales révèlent quelques dysfonctionnements quant aux conditions d'utilisation et à la finalité de l'outil (faible partage de l'information, doubles saisies, sécurité des données). D’après le GIP, le déploiement du DMP doit coûter 1,2 milliard d'euros sur cinq ans et générer à terme un milliard d'euros d'économies directes pour la Sécu. Des chiffres qui restent cependant encore très théoriques ! meilleure observance du traitement, meilleur suivi du patient. Les industriels y trouveront donc leur compte. « A terme, une meilleure traçabilité des boîtes de médicaments délivrées pourrait (également) nous permettre de nous prémunir contre le fléau de la contrefaçon. Cette possibilité, qui ne nous est pas encore offerte, reste un des objectifs du DP. Une fois le système de codage des médicaments (numéro de lot, date de péremption…) en place, donc pas avant 2011, il sera possible de cibler les pharmacies à informer en cas de retrait de lots, sans pour autant alerter l’ensemble du réseau officinal ». Pour Claude Japhet, le DP est un moyen supplémentaire pour les laboratoires d’informer les patients via l’officine. Un top alerte devrait notamment retentir à l’ouverture du DP pour informer le pharmacien sur les spécialités indiquées dans la thérapeutique de son patient, remarque-t-il. A la FSPF, même son de cloche. « Les laboratoires pharmaceutiques et les professionnels de santé ont le même objectif : soigner au mieux la population. Le DP et le DMP servent à améliorer l’efficience des soins. Nous devons tous ?uvrer pour la même cause : optimiser la délivrance des spécialités thérapeutiques, avoir de bons médicaments, de bonne qualité, dans le bon laps de temps », résume ainsi Alain Jayne. Expérimentations. A l’issue de la phase d’expérimentation, « nous chercherons à savoir si les outils informatiques mis à disposition du pharmacien lui ont permis d’appréhender tous les cas de figures. Il en va de même pour les questions de la rapidité d’accès, des transferts de données et de l’accessibilité permanente au serveur », relève par ailleurs le président de l’UNPF. D’après Jean Parrot, « la mise en place se fait actuellement au compte goutte, pharmacien par pharmacien, en fonction du degré de technicité informatique de chaque officine. On assistera donc à une montée en charge progressive au cours des six mois ». A terme, il s’agira donc de savoir si les pharmaciens sélectionnés ont pu créer, alimenter et consulter sans difficulté cet outil informatique qu’est le DP. Mais pour cela, il faudra patienter… jusqu’à l’automne. ■ J U I N /J U I L L E T 20 07 _ P H A R M AC E U T I Q U E S