Hystéroscopie en consultation

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Hystéroscopie en consultation
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Hystéroscopie en consultation :
pour une revalorisation de l’acte
V. VILLEFRANQUE
(Pontoise)
Résumé
L’hystéroscopie de consultation fait désormais partie de l’arsenal diagnostique
courant.
Elle permet des diagnostics plus fins, des thérapeutiques ciblées et moins invasives.
La bonne tolérance de l’examen permet d’ouvrir de nouvelles perspectives pour des
procédures opératoires simples (polypes, stérilisation tubaire, synéchies...).
Cependant les coûts en investissement et en fonctionnement d’unités d’hystéroscopie
de consultation sont aujourd’hui dissuasifs en regard des tarifs octroyés par la Caisse
nationale d’assurance maladie (CNAM).
Pour autant, le coût des hystéroscopies diagnostiques et de nombreuses procédures
simples reste élevé pour la société car la grande majorité d’entre elles sont réalisées en
hospitalisation.
Il apparaît donc urgent de reconsidérer la tarification des endoscopies gynécologiques réalisées en consultation afin de pouvoir faire bénéficier un nombre plus
Centre hospitalier René Dubos - 6 avenue de l’Ile-de-France - 95300 Pontoise
Correspondance : [email protected]
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VILLEFRANQUE
important de patientes de cette avancée dans l’exploration et le traitement des pathologies
gynécologiques.
La revalorisation des tarifs permettra le développement de ces pratiques et de
diminuer de manière notable les coûts pour la société.
Mots clés : hystéroscopie, consultation, coût, tarification, stérilisation tubaire
Déclaration publique d’intérêt
L’auteur organise des formations pour la société Conceptus.
INTRODUCTION
Il fut un temps où métrorragies rimaient avec hystérectomie.
Depuis de nombreuses années, des traitements plus ciblés et des
prises en charge conservatrices ont pu se développer grâce entre autres
à une meilleure connaissance de la physiopathologie et surtout au
développement des techniques d’imagerie et d’endoscopie.
L’hystérosalpingographie fut un premier pas pour les yeux
entraînés de nos aînés vers des diagnostics assez précis des pathologies
gynécologiques et notamment endocavitaires.
Cependant cet examen laissait souvent un mauvais souvenir aux
patientes et n’autorisait pas une vue directe de la pathologie, notam ment endométriale, ni de faire des prélèvements histologiques dirigés.
L’échographie a fait évoluer la stratégie diagnostique.
Moins invasive, elle peut nous aider à différencier une hypertrophie d’un fibrome ou d’une adénomyose. Malheureusement elle
reste imparfaite pour l’analyse de la cavité utérine.
L’hystérosonographie peut corriger cette insuffisance mais reste
moins bien tolérée qu’une vaginoscopie, moins précise dans l’identi fication et ne permet pas les biopsies dirigées.
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HYSTÉROSCOPIE EN CONSULTATION
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POUR UNE REVALORISATION DE L’ACTE
I. L’HYSTÉROSCOPIE DIAGNOSTIQUE
Pendant des années, l’hystéroscopie diagnostique utilisant des
optiques de 5 mm rigides restait d’une indication assez limitée du fait
de la nécessité de recourir à une anesthésie.
Le développement des optiques de moins de 3 mm et des hystéroscopes souples a permis de se soustraire à l’anesthésie et de sortir les
procédures du bloc opératoire. Celles-ci ont vu progressivement leur
nombre augmenter et apparaissent, à ce jour, devoir être disponibles
dans l’exploration des métrorragies.
La simplicité, la rapidité d’apprentissage et la tolérance de l’examen, notamment en vaginoscopie, ne justifient plus une anesthésie, ni
une hospitalisation.
Les recommandations pour la pratique clinique 2013 du Collège
national des gynécologues et obstétriciens français ont pour la première
fois établi comme opposable la pratique de l’hystéroscopie
diagnostique en consultation.
Il n’est plus justifié de réaliser de première intention une anesthésie afin de réaliser une hystéroscopie diagnostique.
Si cela semble une évidence pour la majorité des praticiens
réalisant des hystéroscopies en consultation, il n’en demeure pas moins
que les obstacles rencontrés au sein des établissements sont parfois
difficiles à surmonter.
En dehors des règles d’hygiène, de réglementation, de désinfection
des endoscopes, de la configuration des locaux, se pose la question du
financement.
II. LE FINANCEMENT D’UNE UNITÉ D’ENDOSCOPIE
GYNÉCOLOGIQUE
Les difficultés se situent en effet à plusieurs niveaux :
– la salle de procédure,
– la salle de désinfection,
– le prix du matériel et son amortissement,
– le prix de la désinfection,
– les salaires des personnels.
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La salle de procédure : elle ne nécessite pas de configuration
particulière en dehors de surfaces résistant à l’eau et d’un bac de recueil
du sérum sur la table d’examen.
La salle de désinfection-décontamination : celle-ci est soumise à
des règles de ventilation, qui peut obliger à des travaux substantiels.
La localisation de centres d’endoscopie au contact des blocs
opératoires peut pallier ce problème.
Le matériel : l’investissement est, lui, assez rapidement coûteux.
Il se décompose au minimum en :
– un système vidéo : 7 000 à 20 000 euros,
– un endoscope rigide : environ 3 000 euros,
– une poche à pression,
– consommables (tubulures, poches de sérum, gants stériles),
– les coûts de stérilisation : environ 30 euros par procédure.
L’amortissement de l’investissement sera bien évidemment plus ou
moins rapide en fonction de l’activité de l’unité.
Le calcul est assez rapide et assez simple.
On admettra un amortissement des matériels sur 5 ans.
Les calculs ont été effectués en fonction de nos prix d’achat du
matériel et des consommables.
Amortissement de l’endoscope : il varie selon le matériel utilisé.
Un endoscope rigide de 2,9 mm a un coût d’achat d’environ 3 000
euros et une durée de vie correspondant à environ une centaine d’utilisations, soit environ 30 euros par utilisation, auxquels s’ajoutent encore
30 euros pour les coûts de stérilisation, soit 60 euros pour chaque
utilisation.
Le coût d’utilisation des endoscopes souples est assez similaire.
Les systèmes jetables : il existe des systèmes avec gaines d’hystéroscopie jetables qui sont beaucoup plus onéreux, avec un coût unitaire
de matériel médico-stérile évalué à environ 80 euros, sur lequel
l’amortissement de l’optique qui est de l’ordre de 30 euros et 10 euros
de stérilisation (trempage).
Le consommable : il s’agit des gants, tubulures, poches de sérum
physiologique : environ 5 euros.
Le salaire des personnels : médecin : 23 euros ; infirmier : 7 euros
par procédure.
Au total : la dépense engagée, hors vidéo, est de 95 euros minimum par procédure.
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HYSTÉROSCOPIE EN CONSULTATION
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POUR UNE REVALORISATION DE L’ACTE
II.1. Hystéroscopie diagnostique en consultation
En fonction du système vidéo et du nombre d’hystéroscopies
réalisées par an, on obtient le tableau suivant du coût d’une hystéroscopie en consultation.
Tableau 1 - Prix de revient d’une hystéroscopie diagnostique en fonction du
nombre de procédures/an
50/an
100/an
500/an
1 000/an
Vidéo 7 000 €
123
109
98
96
Vidéo 20 000 €
175
135
103
99
Le tarif de l’hystéroscopie diagnostique est actuellement de 66,48
euros.
II.2. Hystéroscopie opératoire en consultation
Pour ce qui est des actes opératoires réalisables en consultation, le
même raisonnement peut être mené.
Par exemple, pour un polype endométrial dont l’ablation pourrait
être réalisée en consultation à la pince ou au moyen d’électrodes monoou bipolaires.
Le coût en équipement s’accroît de l’amortissement d’un générateur (environ 5 000 euros), et d’électrodes 5 French réutilisables
(environ 10 euros l’utilisation).
Si l’on considère une unité d’hystéroscopie diagnostique réalisant
500 procédures par an, ce qui suppose déjà une activité importante, et
que l’on considère environ 50 ablations de polypes, le surcoût par
rapport à une hystéroscopie diagnostique est de 30 euros.
Le coût de l’ablation d’un polype par hystéroscopie en consultation est alors compris entre 128 et 133 euros.
L’acte « ablation de polype par hystéroscopie » est rémunéré
90,56 euros.
II.3. Stérilisation tubaire en hystéroscopie
Le calcul est là plus simple car la seule différence de prix avec
l’hystéroscopie diagnostique réside dans le prix de l’implant.
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III. DISCUSSION
Il apparaît donc assez rapidement que l’hystéroscopie diagnostique
de consultation, qui apparaît désormais comme devant être accessible
à chaque patiente, est une source de perte financière non négligeable.
Pour autant, la réalisation d’une hystéroscopie diagnostique sans
anesthésie, dans le cadre d’une hospitalisation, en fauteuil, au sein
d’une unité de chirurgie ambulatoire est rémunérée 481,72 euros [2].
Seul le rattachement administratif à une hospitalisation change le
tarif. La procédure en elle-même peut se dérouler toujours dans la
même salle.
En 2012, le nombre d’hystéroscopies diagnostiques réalisées au
bloc opératoire a été de 21 640 sous anesthésie et 2 304 sans anesthésie
[1].
À raison de 750,25 euros l’hystéroscopie diagnostique en hospitalisation sous anesthésie générale et de 481,72 euros sans anesthésie
(tarifs GHS 2013 ; codes 1304Z et 1305Z) [2], ceci nous conduit à un
coût total pour l’assurance maladie de 17,5 millions d’euros.
Le coût moyen par hystéroscopie diagnostique en hospitalisation
est donc de 724 euros.
Nous sommes donc bien loin des 66,48 euros actuels.
Pour l’ablation d’un polype c’est le même raisonnement que
précédemment.
Le même acte réalisé dans la même salle d’hystéroscopie avec une
hospitalisation en fauteuil en unité de chirurgie ambulatoire rapporte
718,96 euros sans anesthésie et 1 009,88 euros avec anesthésie (tarifs
GHS 2013 13K03Z et 13K02Z) [2].
En 2012, 17 128 exérèses de polypes ont été effectuées sous anes thésie générale contre 49 sans anesthésie pour un montant d’environ
17 millions d’euros [1].
Le coût pour la Caisse nationale d’assurance maladie avoisine
donc les 1 008 euros pour un geste payé 90,56 euros.
Il en va de même pour les stérilisations tubaires par hystéroscopie.
Notre service a réalisé plus de 1 100 procédures de stérilisation en
consultation.
L’acte est coté 167,20 euros, ce qui permet de couvrir nos frais,
semblables à ceux d’une hystéroscopie diagnostique.
La problématique dans ce cas particulier réside dans le remboursement de l’implant (environ 700 euros hors taxe).
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HYSTÉROSCOPIE EN CONSULTATION
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POUR UNE REVALORISATION DE L’ACTE
Celui-ci est dépendant d’une hospitalisation, et donc théori quement il est impossible de réaliser l’acte en consultation et de se faire
rembourser l’implant.
Là encore une hospitalisation en unité de chirurgie ambulatoire en
fauteuil permet de régler le problème.
En 2012, 13 638 procédures ont été réalisées sous anesthésie
générale et 4 727 sans anesthésie en hospitalisation [1], soit une
dépense pour la CNAM (tarifs GHS, 2013, 13K03Z et 13K02Z) [2] d’un
peu plus de 17 millions d’euros et un coût moyen par procédure de
935 euros (coût de l’implant non compris).
Il apparaît donc urgent d’ouvrir les négociations sur la base d’un
accord « gagnant-gagnant » pour les patientes, la Caisse nationale
d’assurance maladie, les établissements et les praticiens.
Il est évident que ces procédures en consultation sont bénéfiques
aux patientes : pas d’hospitalisation, d’arrêt de travail, diagnostic
précis...
Les sommes dépensées en hospitalisation semblent actuellement
démesurées par rapport aux coûts en consultation.
Une forte revalorisation de l’acte en consultation permettrait une
plus large diffusion de ces nouvelles pratiques pour la satisfaction de
tous les acteurs.
CONCLUSION
L’activité d’hystéroscopies diagnostiques en consultation et les
procédures simples d’hystéroscopies opératoires peuvent être réalisées
sans aucune difficulté.
Actuellement le schéma proposé par la Caisse nationale d’assu rance maladie rend ces procédures peu rentables, voire franchement
déficitaires. D’un autre côté, nombre de procédures réalisées en
hospitalisation pourrait être facilement réalisé dans une unité de
consultation et les frais engendrés pour la CNAM pourraient en être
largement diminués. Cette économie substantielle pourrait servir à
revaloriser le taux des actes d’hystéroscopies de consultation pour le
bénéfice des patientes, de la CNAM et des praticiens.
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Bibliographie
[1] Agence technique de l’information sur
l’hospitalisation. Données PMSI 2012 http://stats.
atih.sante.fr/mco/catalogmco.php.
[2] Tarifs GHS 2013 ; http://www.ameli.fr/lassurance-maladie/documentation-technique/t2a-ccamet-lpp/fichier-des-ghs-version-19-mars-2013.php.
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