Directive Bolkestein : Pourquoi les partisans du retrait ont perdu

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Directive Bolkestein : Pourquoi les partisans du retrait ont perdu
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Directive Bolkestein : Pourquoi les partisans du retrait ont perdu ?
Depuis un an, on entend un certain nombre de mandataires politiques, de
syndicalistes et de philosophes s'époumoner contre la mal nommée
"directive Bolkestein", nouveau croquemitaine du courant néogauchiste,
suivi en cela, pour de sombres raisons de tactique politique, par une partie
de la droite française. Cette semaine, la présidence luxembourgeoise du
Conseil européen a judicieusement précisé que cette proposition ne devait
pas et ne serait pas retirée et que le processus législatif suivrait son cours
normal. La proposition de directive aux services dans le marché intérieur
présentée en 2004 par la Commission Prodi (en ce compris Philippe
Busquin), s'inscrit incontestablement dans la filiation des grandes libertés
consacrées par le traité fondateur de 1957 : libre circulation des
personnes, des marchandises, des capitaux et... des services. Le constat
de départ qui a donné naissance à cette proposition est simple : plus de
douze ans après l'ouverture du marché unique, créateur de 2,5 millions
d'emplois et générateur de près de 1.000 milliards d'euros de richesse
supplémentaire, de nombreux obstacles empêchent ou freinent le
développement des services entre Etats membres - en particulier ceux
fournis par les petites et moyennes entreprises, prédominantes dans le
secteur des services et véritables clés du développement de l'économie
européenne.
La proposition de directive n'a pas pour objet la dérégulation ou la
privatisation des services : elle vise à renforcer le principe de nondiscrimination, à offrir davantage de simplicité réglementaire et
administrative et à garantir l'ouverture du marché pour les acteurs
européens dans des services où peut opérer le secteur privé local. Et cela
bien sûr dans un cadre fixé par les pouvoirs publics européens.
La proposition ne traite ni de la libéralisation des services d'intérêt
économique général réservés à des entités publiques et privées, ni de la
privatisation des entités publiques fournissant des services. Rappelons
qu'il est difficile d'assimiler un service d'intérêt général à un service fourni
par une entité publique : de nombreux services ayant un intérêt social
évident sont prestés par des opérateurs privés, mais réglementés par les
pouvoirs publics (en Belgique, l'enseignement et les soins de santé, par
exemple).
Comme le commissaire européen socialiste Verheugen le rappelait ces
jours-ci, le principe du pays d'origine est un principe directeur du marché
intérieur. Le remettre en cause implique de revenir sur les fondements
mêmes du traité de Rome. Est-ce cela l'Europe " progressiste " ? En effet,
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en vertu du principe du pays d'origine, une voiture vendue en Belgique et
assemblée en République tchèque par des ouvriers tchèques l'est bien
évidemment conformément aux conditions sociales en vigueur dans ce
pays. Rien de neuf sous le soleil avec cette proposition de directive sur les
services.
Toutefois, le principe du pays d'origine ne s'applique pas aux conditions de
travail et d'emploi de travailleurs détachés pour fournir un service dans un
autre Etat membre. Les prestataires de services potentiels doivent se
conformer aux conditions de travail et d'emploi applicables dans l'Etat
membre dans lequel le service est fourni, qu'elles découlent de la
législation sociale ou des conventions collectives. L'exemple de l'ouvrier
est-européen qui pourrait venir travailler légalement en Belgique aux
conditions sociales en vigueur dans son pays d'origine est donc une
baliverne aux désagréables relents xénophobes. Il convient également de
répéter que nombre de domaines sont exclus du champ d'application de la
proposition de directive sur les services : fourniture et distribution d'eau,
transport urbain, sécurité sociale, soins hospitaliers, droits des contrats...
En outre, le texte prévoit des possibilités de périodes transitoires et de
régimes d'autorisation (dûment objectivés) afin d'éviter une mise en
œuvre trop rigide. La proposition de directive sur les services propose une
réponse pragmatique à un problème réel : des obstacles à la libre
circulation dans un secteur économique fondamental pour l'Union
européenne et sa place dans le monde (près de 70 % de l'emploi et du
PNB
de
nos
pays
découlent
des
activités
de
services).
Elle contient, comme précisé ci avant, une série de garde-fous afin
d'éviter tout dumping social ou toute atteinte aux services publics.
Pourquoi aurait-il fallu dès lors rejeté en bloc un texte de cette nature
alors que la liberté économique dans le Marché intérieur a déjà prouvé ses
effets bénéfiques par le passé ? Que ce projet de directive sur la libre
circulation des services soit perfectible, c'est bien sûr possible. Vouloir la
mettre à la poubelle n'aurait fait que retarder une Europe de l'emploi, de
la croissance et donc une Europe compétitive et productrice de richesses
pour l'ensemble des Européens. Ces richesses sont préalables et
impératives à la construction de la justice sociale. Nombreux sont ceux qui
disent que l'Union se construit sur les valeurs libérales. C'est vrai, nous
vivons dans une Europe de libertés.
Le néogauchisme et ses partisans ne peuvent proposer d'alternative
crédible. Alors ils diabolisent, jouent sur la peur mais ne proposent rien
d'autre que des oppositions dogmatiques, des cris et des invectives
faciles. Bolkestein devient Frankestein. Le qualificatif libéral est presque
devenu une insulte. N'oublions pas tout ce que le libéralisme de progrès
nous a apporté depuis près de deux siècles : les institutions
démocratiques, l'extension du droit de suffrage, l'enseignement public
ainsi qu'une prospérité économique et une qualité de vie inégalées dans
l'histoire. La campagne de dénigrement organisée contre la directive,
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outre l'offense portée au nom de son promoteur (la Commission est
pourtant un collège), ne permet désormais plus le débat serein et
l'explication des objectifs poursuivis. Les slogans dénués d'analyse
obligent désormais le gouvernement français à lier son attitude face à la
directive au référendum sur la Constitution. A mélanger les pommes et les
poires, on s'éloigne dangereusement de la réalité et de la démocratie. A
nos leaders politiques d'être honnêtes. Sommes-nous aujourd'hui victimes
de duperies, ou d'agendas cachés ? Alors, bas les masques.
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