Contribution de Jean

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Contribution de Jean
JC Devèze
Table ronde n°2 La nécessité de promouvoir les productions alimentaires :
quelles voies explorer ?
Il y a beaucoup de discours sur la promotion de l'agriculture, mais les résultats obtenus ne sont
pas à leur hauteur ! Essayons pendant cette table ronde de poser le plus franchement possible le
problème de la façon de nourrir demain tous les habitants de notre planète correctement et
durablement.
Il ne faut pas oublier au préalable trois questions qui influencent largement l'ampleur de la
tâche pour promouvoir les productions alimentaires :
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● celle du rythme de l'augmentation de la population et du changement de sa répartition
sur la terre (à lier aux mouvements migratoires) ;
● celle de l'évolution des régimes alimentaires, non seulement l'augmentation quantitative
et qualitative de la ration des sousalimentés, mais aussi la diminution de celle des
suralimentés (à lier à l'importance de nos aliments d'origine animale), et la diminution des
pertes et gaspillages ( perte estimée au quart des produits alimentaires commercialisés) ;
● celle du contexte politique dans lequel doit se faire cette promotion (voir précédente
table ronde sur libéralisation ou régulation des échanges)
Dans ces trois domaines, les prévisions restent peu optimistes, d'où l'ampleur de la tâche pour
mieux nourrir 9 milliards d'homme en 2050 (presque doubler la production mondiale pour 2050
et la tripler en Afrique), en continuant à avoir des personnes riches qui surconsomment (la
frugalité/sobriété dans nos sociétés n'est pas encore une valeur très prisée) et des pays dominants
qui allient le meilleur et le pire dans leurs politiques et des pays pauvres qui n'ont ni politique
propre, ni, s'ils en ont une, la volonté et les moyens de l'appliquer.
Différentes voies à explorer pour promouvoir les productions alimentaires afin de répondre
au droit à l'alimentation sont couramment citées. Je les présenterai sous une autre forme que
mon ami V Beauval, à savoir de la façon suivante:
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Des prix agricoles rémunérateurs et stabilisés (un récent document d'une étude AFD a
listé tous les instruments possibles pour stabiliser les prix et/ou réduire les effets de
l'instabilité des prix selon que la gouvernance est à dominante privée ou publique). Parmi
ces instruments je privilégie pour ma part le stockage (il s'est réduit chez les paysans
comme au niveau des Etats) et l'organisation des marchés agricoles régionaux.
L'accès aux facteurs de production (intrants, terre, eau, matériel agricole, etc.), d'où
l'importance des politiques foncières, d'organisation de filière, de crédit agricole, etc. Une
question délicate reste celle de la part respective de l'augmentation des surfaces cultivées
et de l'augmentation des rendements pour faire face à la demande alimentaire.
L'accès au savoir, à l'information, aux techniques, aux méthodes d'organisation et de
gestion afin d'être capable de faire les choix, d'orienter et alimenter la recherche (par
1 On n'insiste pas assez sur le coût social d'une population jeune nombreuse, d'où les difficultés financières des
PMA africains par exemple.
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exemple vers l'intensification écologique, la gestion du milieu naturel, l'association
agrosylvopastorale...). Pourquoi cette priorité est négligée dans tant de pays?
L'accès au pouvoir des acteurs agricoles et plus largement des filières agroalimentaires,
d'où l'importance des concertations sur les politiques agricoles, des organisations de
filière, des politiques contractuelles, l'augmentation du poids économique et financier des
acteurs dominés, etc. Pourquoi cela est-il si difficile ?
A la question « selon quelle type d'agriculture? », je ne pense pas qu'il suffit de répondre en
priorisant les agricultures familiales, car il faut aller plus en profondeur pour examiner quelles
agricultures familiales vont produire quoi et comment, avec quels rapports avec les autres acteurs
(dont les agroentreprises) et les consommateurs.
A la question « à quelles conditions les paysans du Sud pourront-ils augmenter et sécuriser leur
production ? », j'aurai tendance de privilégier un climat de confiance et donc de renforcement de
la considération envers les paysans et bien entendu de leur responsabilisation. Peut-on y arriver si
les responsables n'inspirent pas confiance ?
A la question « quels partenariats favoriser ? », je me demanderais si ce n'est pas celui qui
accompagne qui doit se mettre au service de celui qui cherche sa propre voie.