Le diable boiteux

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Le diable boiteux
Sacha Guitry : Le diable boiteux (1948)
Pour Sacha Guitry le cinéma n’est qu’une invention nuisible à l’art dramatique. Et pourtant au
cours des années 30 il enchaîne la réalisation d’une bonne dizaine de films. Il écrit le scénario,
les dialogues et se donne le rôle principal. Il accorde une place centrale aux répliques, très
étudiées, en même temps qu’elles doivent être données par des comédiens aguerris. Si durant
la période d’avant-guerre le ton de ses films est plutôt frivole, il devient nettement plus
désabusé après guerre. C’est qu’entre-temps Sacha Guitry a été la vedette du tout Paris avant
d’être emprisonné à la Libération, accusé de collaboration. Son diable boiteux propose un
portrait complexe du personnage de Talleyrand qui change de bord politique, tantôt conseiller
de Bonaparte, tantôt conseiller du roi Louis XVIII, puis de Charles X.
L’avis de Nekochka :
Comme pour justifier la difficulté à prendre position, Sacha Guitry incarne Talleyrand. Ce
dernier ne sert pas les intérêts diamétralement opposés des dirigeants mais ceux de la France,
faisant ainsi preuve de constance derrière un apparent opportunisme. Le peuple lui-même ne
s’y retrouve pas, qui ne sait s’il doit graver sur les murs « vive l’empereur » ou « vive le roi ».
Car les têtes couronnées se succèdent : Bonaparte s’esquive par la petite porte pour laisser
Louis XVIII revenir au pouvoir. Dans ce bouleversement perpétuel Louis XVIII déclare
vouloir faire arrêter le peintre David, mais apprenant sa fuite hors du royaume il regrette
aussitôt ce départ. Demandant à Talleyrand si les français auront encore peur longtemps les
uns des autres, ce dernier réplique qu’il « en a bien peur ». De telles répliques pointent avec
humour la difficulté d’être constant en politique. A se demander même si cela est possible.
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