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HORS TEMPS SCOLAIRE
Formations
Auteur
Jean-Carl Feldis
Date
2013
Descriptif
LE SON ET SON POUVOIR AU CINÉMA
Suite à la formation du 17 décembre 2013 menée à Gauchy à destination des professionnels de l'animation et de la
médiation, Jean-Carl Feldis, compositeur, bruiteur, ingénieur du son, propose dans ce texte d'aborder la question du
« pouvoir du son au cinéma » au travers de quelques notions et points de vue.
Suite à l'invitation de l'Acap – Pôle Image Picardie à rencontrer des professionnels de l'animation et de la
médiation, j'ai abordé les différentes familles de sons qui peuvent habiller une bande sonore d'un film, au travers
différents exercices pratiques. Je vous propose ici un retour sur quelques notions importantes du son au cinéma, et
quelques points de vue.
Il existe quatre grandes familles de son :
•
•
•
•
La musique
Le bruitage
Les voix
Les sons d'ambiance
J'ai abordé en 2011 la musique de film (se référer, sur le portail ressources de l'ACAP, au document que j’avais rédigé
intitulé : « Musique et cinéma » : http://ressources.acap-cinema.com/onglet-l-atelier-193.html).
Le son a le pouvoir de nous raconter une histoire :
•
Soit celle du film : on entend ce que l'on voit à l'image.
•
Soit parallèle à celle du film : où l'on peut entendre des choses que l'on ne voit pas à l'image (des pensées, des
sons hors champs, des musiques, des bruitages).
Le cinéma, c’est 24 images par seconde.
Le temps de voir, d'écouter et nous sommes déjà dans la mémoire de ce qui vient de se passer sans avoir le temps de
réfléchir aux sonorités, au risque de rater la suite du film et donc la compréhension de l'histoire. Il y a donc beaucoup (trop)
d'informations sonores et visuelles. Il y a peu de silence dans les films aujourd'hui.
Le son peut être également associé à un personnage. Du coup, dès que l'on va entendre une musique, un bruitage, une
voix, le spectateur doit immédiatement identifier un personnage, une chose, une période historique, une pensée, sans
même le/la voir à l'image.
La musique du film « Les Dents de la Mer » est un bon exemple de ce point de vue. Dès que l'on entend les deux notes
graves de la contrebasse, le spectateur imagine tout de suite le requin sans le voir à l'image.
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Le cinéma, finalement, n’a jamais été réellement muet. Dès ses débuts, il y a eu des musiciens, des bruiteurs, des
bonimenteurs qui accompagnaient les films en direct, car techniquement on réussissait à fabriquer des films, mais pas à
coller du son dessus.
Les artistes qui accompagnaient les films ont été confrontés à un gros problème : la synchronisation (le son en coordination
avec l'image). Cela nous paraît évident aujourd'hui, mais cela ne l'était pas à l'époque.
J'ai montré au public de la formation des extraits de films plus ou moins connus sur lesquels j'ai enlevé toute la bande son.
Ils devenaient alors des extraits de films muets.
Avec un micro et un logiciel de montage son/image, nous avons enregistré toutes les familles de son, comme des artisans,
sur des films très différents : film en noir et blanc, film d'animation, film de science fiction.
Les choses évidentes qui ont interpelé les participants sont :
1-
La magie des bruitages et de ses outils
Aujourd'hui encore, les bruiteurs ont des valises avec eux qui comportent des objets du quotidien. Ces objets,
quand ils sont manipulés de différentes façons, puis enregistrés, reproduisent différents sons selon l'image (le
feu, le galop d'un cheval, la pluie, etc.).
2-
La synchronisation
Le son en même temps que l'image s'avère en pratique pas évident mais très drôle. Cependant aujourd'hui, avec
un logiciel de montage image/son, nous pouvons rattraper cela.
3-
La magie du mixage
Régler les volumes de chaque famille de sons. Les voix, le bruitage, etc.
Équaliser les graves, les mediums, les aigus de chaque son dans le film.
Utiliser certains effets (réverbe, compression, équalisation, etc.).
Il est apparu une chose évidente : les participants n'imaginaient pas le même mixage des sons sur un même
extrait de film. Cela générait des débats très constructifs et interactifs (plus forte la pluie pour certains, moins
forts les bruits de pas pour d'autres, plus fortes les voix, etc.).
Le mixage a une importance primordiale dans un film. Tous les films sont mixés et le mixage a beaucoup de
pouvoir.
Si je décide de mettre tel ou tel son plus ou moins fort, il peut changer le sens de la scène ou dénaturer celle-ci.
Cela doit être abordé /proposé avec le réalisateur en fonction du scénario.
Pour les films, souvent, nous garderons les sons enregistrés lors du tournage (voix et ambiance). Ensuite, en postproduction nous ré-enregistrerons certains bruitages inaudibles du tournage, des ambiances, des voix et les musiques
composées par le compositeur.
Mais il est possible aussi que la totalité de la bande son soit refaite en studio, ce qui s'avère bien pratique pour la qualité
des prises de sons, des voix et des bruitages. Ce qui n'est pas toujours très naturel/évident lors du mixage l’est encore
moins dans les salle obscures.
Pour les films d'animation, tous les sons doivent être enregistrés/synchronisés/mixés en post-production.
Les studios travaillent également avec des CD pré-enregistrés : les sons d'une ville, d'une forêt, d'une usine, d'un marché,
des explosions, des coups de feu, etc.
Pour des raisons budgétaires, les CD sont bien pratiques mais très impersonnels...
L'idéal est de chercher et d'enregistrer les sons soi-même en fonction du film. L' avantage de cette démarche est d'avoir
une audiothèque très personnelle sur chaque film, même si cela a un coût certain. Quel bonheur toutefois d'entendre des
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sons originaux, travaillés, mixés !
Chaque période du cinéma a une couleur sonore qui lui est propre : un film des années 1950 a un son particulier, ainsi
qu'un film des années 80, 90, etc.
Le son et le mixage n'étant pas des sciences exactes, chaque ingénieur du son a « SON oreille ». Chaque studio a ses
propres couleurs sonores, ainsi que chaque pays.
C'est pour cela que l'on parle de « famille » ; souvent un réalisateur travaille avec la même équipe technique et avec le
même studio pour le mixage.
Quant à moi, j'essaie d'aborder le son d'un film comme une peinture et d'aborder chaque famille de sons de manière
originale, de ne pas avoir peur d'innover et, comme souvent dans l'art, certaines erreurs peuvent apporter de grandes
choses !
Et surtout n'oublions pas que le cinéma est un spectacle et que le « son » doit servir l'image et non l'inverse.
Bon film, bonne sonorisation et bon mixage !
Jean-Carl Feldis
Compositeur, bruiteur et ingénieur du son
3/3