LES DICTONS METEOROLOGIQUES

LES DICTONS METEOROLOGIQUES
Dans chaque village au fil des jours et des ans, les agriculteurs, les vignerons, les éleveurs,
les bûcherons, etc. observent l'état du ciel, la forme des nuages, la direction du vent et
ressentent le chaud, le froid, le sec et l'humide.
Petit à petit, consciemment ou inconsciemment, des relations de causes à effets vont être
établies entre les observations et les impressions (le temps vécu) et le temps à venir à très
courte et courte échéances et entre le temps vécu sur des périodes plus ou moins longues et
les récoltes.
Une connaissance individuelle qui sera partagée avec le cercle familial et le village et
transmise aux enfants et petits enfants sous forme de courtes phases facilement
mémorisables grâce à l'utilisation de rimes : "les dictons".
Ces dictons matérialisent une connaissance locale pendant une certaine période et ne
peuvent pas être représentatifs des évolutions ou des conséquences du temps pour d'autres
régions.
Les dictons voyagent très mal : un dicton d’Argonne peut n’avoir aucune signification à
Reims et être horrible à Troyes. Dans certains cas, ils ne peuvent être utilisés que dans un
endroit très précis et dans des conditions bien définies.
Des dictons différents peuvent exister : ceux du monde de la rivière et ceux de la plaine ;
d'autres peuvent être composés de trois mondes géographiques donc de trois mondes
météorologiques, c'est le cas de ceux du vignoble où ces trois mondes sont aussi
économiquement différents, il y a coexistence du monde de la plaine (celui des cultivateurs),
du monde de la vigne (celui des vignerons) et du monde de la forêt (celui des bûcherons).
Trois mondes pour lesquels les conditions météorologiques favorables peuvent être
différentes, d'où des dictons en certains cas contradictoires.
Dans les cas des dictons se référant à des périodes précises de l'année (date, fêtes de
saintes ou saints), il ne faut pas oublier de prendre en compte des possibles variations du
calendrier général et des calendriers locaux.
La météorologie populaire a été jusqu'à la fin du 19e siècle le seul outil de prévisions dont
disposaient les agriculteurs, les marins et les autres.
Ne rejetons pas ce qui nous est parvenu de cette forme de connaissance "des trésors sont
cachés dedans". Il nous faut réapprendre à la lire en faisant les tris nécessaires.
Quatre catégories de dictons peuvent être définies :
1) Les dictons météorologiques dont le message est une prévision à courte échéance :
"Lune cerclée, pluie assurée"
et "Soleil cerclé, pluie assurée"
(Toutes régions françaises)
Un dicton connu par les Assyriens depuis plus de 3000 ans qui est vérifié dans tous
les cas. Le halo est la conséquence d'une réfraction puis d'une réflexion de la lumière
solaire (directe ou indirecte dans le cas de la lune) par certains cristaux de glace,
ceux composant les cirrostratus des nuages supérieurs (5000 – 6000 m) qui forment
les marges antérieures de nos perturbations.
1
"Arc-en-ciel du matin fait tourner le moulin
Arc-en-ciel du soir fait aller l'arrosoir"
(Île-de-France, Champagne)
L'arc-en-ciel correspond à une réfraction et réflexion des rayons solaires à l'intérieur
des gouttes de pluie et est visible à l'opposé du soleil. En France, 90% de nos
perturbations se déplacent d'ouest en est, si bien que si le matin (soleil dans l'est)
vous voyez un arc-en-ciel, il est dans l'ouest, donc pluies ou vent et si le soir (soleil
dans l'ouest) vous voyez un arc-en-ciel, il est dans l'est, aucune pluie à venir.
"Rouge le soir, blanc le matin,
C'est la journée du pèlerin.
Blanc le soir, rouge le matin
Fait tourner le moulin"
(Champagne-Ardennes)
Au lever et au coucher du soleil, ses rayons traversent une grande épaisseur
d'atmosphère, la diffusion est alors maximum, d'où l'aspect rouge de l'astre et du ciel,
en cas de présence de beaucoup de vapeur d'eau. Un ciel rouge annonce la pluie, un
ciel blanc annonce du beau temps.
2) Les dictons agrométéorologiques qui lient le temps vécu à ses conséquences pour
le monde agricole.
"Neige de février remplit les greniers"
"Mieux vaut voir un voleur au grenier qu'un paysan bras nus en février"
(Nord de la France)
"Mieux vaut le loup dans la bergerie qu'un mois de février doux"
(Sud de la France)
Dans toutes les régions de France, le monde agricole a la hantise d'un mois de
février doux. Cette douceur favorise le réveil de la végétation et les floraisons
précoces sont souvent victimes des gelées de printemps.
3) Les dictons climatiques qui présentent une forme de prévision ou tendance à
longue échéance
"Un jour est mouillé et l’autre sec quand le coucou ouvre son bec".
(Nord et est de la France)
Le coucou chante de fin mars à début avril, époque ou les phénomènes
météorologiques les plus fréquents sont des averses violentes et de courtes durées les giboulées de mars-.
"Gelées qui commencent par vent d’est longtemps restent".
2
Un petit chef d’œuvre, un véritable cours de météorologie qui nous vient de LorraineChampagne. En l’an 1000, période où la croyance en une terre plate était généralement
admise, des paysans qui n’avaient aucune notion de ce que pouvait être la circulation
générale de l’atmosphère avaient observé que :
Si des gelées commençaient par un vent de secteur ouest, elles n’étaient pas fortes et de
courte durée (2 à 3 jours au maximum). Sans le savoir, ils avaient découverts la logique du
régime perturbé d’Ouest (80% de nos épisodes pluvieux caractérisés par le passage de
séries de fronts chauds et froids).
Si par contre des gelées commençaient par un vent de secteur Est, elles étaient fortes et de
longue durée. Sans le savoir ils avaient découvert les conséquences de la mise en place sur
l’ouest de l’Europe de l’anticyclone sibérien.
4) Les dictons calendaires
Les dictons calendaires ont beaucoup plus d’intérêt pour les historiens et les sociologues
que pour les météorologistes.
Dans de nombreux cas des incertitudes existent sur les calendriers utilisés.
Certains présentent un intérêt météorologique :
"Noël au balcon, Pâques aux tisons".
une autre écriture de
"L’hiver le loup ne le mange pas on l’a ou on l’aura".
"Avant la Saint- Jean pluies bénites, après la Saint-Jean, pluies maudites".
Un dicton que l’on peut expliquer en considérant les caractéristiques des pluies d’été
(averses avec ou sans grêle et orages) rarement favorables au monde agricole.
D’autres ne correspondent à aucune logique météorologique et sont à oublier :
"S’il pleut avant la messe, il pleut toute la semaine".
"Les 12 jours de Noël aux Rois, le temps des douze mois".
"Saint-Médard grand pendard, il pleut quarante jours plus tard".
"La pluie de la Saint- Médard peut durer quarante jours".
Pour ce qui concerne Pâques dont la date peut varier du 22mars au 25 avril
"Le curé dit : les Pâques pluvieuses sont souvent fromenteuses.
Le vicaire répond : et souvent fort menteuses".
5) Dictons divers
Le bestiaire des dictons est très abondant, dans presque tous les cas le comportement des
animaux est une réponse aux conditions existantes et non un indice du temps à venir.
"Aronde volant haut, le temps sera beau ; Aronde volant bas, bientôt il pleuvra".
Le niveau de vol des hirondelles indique l’endroit auquel se trouvent les insectes qui
forment la base de sa nourriture. En moyenne le dicton peut être considéré comme
représentatif d’un état stable à courte échéance des conditions météorologiques.
3
Les animaux réagissent différemment aux conditions météorologiques. Certains comme les
grenouilles sont particulièrement sensibles aux variations de la pression atmosphérique.
D’autres comme les chiens et les chats aux variations de l’humidité et de l’électricité
atmosphérique.
Aucune certitude météorologique ne peut être liée aux comportements des animaux.
Certains dictons ne concernent que les sociologues. Le plus bel exemple est :
"Quand les oignons ont trois pelures
A prévoir grande froidure"
Tous les dictons relatifs au cycle de la lune sont à oublier. Ils ne correspondent à aucune
réalité météorologique.
"A chaque phase de la lune, un changement de temps".
"Jamais la pleine lune n’a vu le soleil"
"Au cinq de la lune on verra quel temps tout le mois donnera pourvu que des jours le
sixième reste le même qu’au cinquième".
Document rédigé par Georges Dhonneur ingénieur général de la météorologie
4