1 Les affaires Lockerbie devant la Cour Internationale de Justice

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1 Les affaires Lockerbie devant la Cour Internationale de Justice
Les affaires Lockerbie devant la Cour Internationale de Justice1
Après plus de dix années de procédure devant la Cour Internationale de Justice (CIJ), le
différend qui opposa la Libye au Royaume-Uni et aux Etats-Unis d'Amérique au sujet de
l’extradition de deux ressortissants libyens a pris fin le 10 septembre 2003 suite au
désistement des parties à l’instance.
Le 3 mars 1992, la Lybie a déposé au Greffe de la Cour Internationale de Justice (CIJ)
deux requêtes introductives d’instance contre le Royaume-Uni et les Etats-Unis au sujet
de différends concernant l'interprétation ou l'application de la convention pour la
répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile signée à Montréal
le 23 septembre 1971.
Cette requête fait suite à la destruction, le 21 décembre 1988, de l'appareil assurant le vol
103 de la Pan Am au-dessus de Lockerbie, en Ecosse, qui avait fait 270 morts (la totalité
des 259 passagers et membres d'équipage, ainsi que onze personnes au sol). Le Lord
Advocate d'Ecosse ainsi qu’un Grand Jury des Etats-Unis avaient alors accusés deux
ressortissant libyens, Abdelbasset Ali Ahmed Al Megrahi et Ali Amin Khalifa Fhimah,
d'avoir placé une bombe à bord du vol de la Pan-Am.
A la suite de ces accusations, le Royaume-Uni et les Etats-Unis avaient exigé de la Libye
qu'elle leur remette les suspects afin qu'ils soient jugés en Ecosse ou aux Etats-Unis.
Le Conseil de sécurité des Nations Unies avait, pour sa part, adopté trois résolutions
(Résolutions 731 et 748 en 1992 et Résolution 883 en 1993), enjoignant la Libye de
«donner une réponse complète et effective» aux demandes du Royaume-Uni et des EtatsUnis «afin de contribuer à l'élimination du terrorisme international».
Dans ses requêtes, la Libye soutenait qu'il n'existait aucun traité d'extradition en vigueur
entre elle et le Royaume-Uni, ni entre elle et les Etats-Unis, et qu'elle était tenue de juger
elle-même ses ressortissants, conformément aux dispositions de la convention de
Montréal de 1971 pour la Répression d'Actes Illicites dirigés contre la Sécurité de
l'Aviation civile (Articles 5 et 7), à laquelle les trois Etats sont parties.
Février 1998 : La Cour Internationale de Justice se déclare compétente
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Les noms officiels de des affaires sont « Questions d'interprétation et d'application de la convention de
Montréal de 1971 résultant de l'incident aérien de Lockerbie (Jamahiriya arabe libyenne c. Etats-Unis
d'Amérique) » et « Questions d'interprétation et d'application de la convention de Montréal de 1971
résultant de l'incident aérien de Lockerbie (Jamahiriya arabe libyenne c. Royaume-Uni) ».
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En portant devant la CIJ ces deux affaires, la Libye a fait valoir que puisque les actes
allégués constituaient une infraction pénale au sens de l'article premier de la convention
de Montréal de 1971 pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de
l'aviation civile, la CIJ était compétente, conformément au paragraphe 1 de l'article 14 de
ladite convention, pour connaître d'un différend concernant son interprétation ou son
application.
Après la présentation par la Libye de ses pièces de procédure écrite, le Royaume-Uni et
les Etats-Unis ont soulevé des exceptions préliminaires à la compétence de la Cour et à la
recevabilité des demandes libyennes. Selon le Royaume-Uni et les Etats-Unis la CIJ n'a
pas compétence en l'espèce et les demandes libyennes ne sont pas recevables, compte
tenu en particulier de résolutions adoptées par le Conseil de Sécurité des Nations Unies.
Le 27 février 1998, la CIJ, organe judiciaire principal des Nations Unies, s'est déclarée
compétente pour examiner sur le fond l'affaire introduite par la Libye contre les EtatsUnis d'Amérique et le Royaume-Uni au sujet de l'incident aérien de Lockerbie. Elle a
rejeté l’exception d’incompétence sur la base du paragraphe 1 de l’article 14 de la
convention de Montréal qui l’autorise à interpréter les dispositions de ce traité. Elle a
également jugé les demandes libyennes recevables.
Suite de la procédure
La procédure devant la CIJ comprend deux phases, l'une écrite et l'autre orale. Durant la
phase écrite, des pièces de procédure sont échangées. La procédure écrite une fois close,
des audiences publiques sont organisées au cours desquelles les Parties présentent les
points qui les divisent encore. La Cour ne rend un arrêt sur le fond qu'après la procédure
orale.
Après que la Libye ait présenté un mémoire sur le fond, le Royaume-Uni et les Etats-Unis
ont déposé un contre-mémoire au début de l’année 1999. En juin 1999, la Cour a autorisé
la présentation la Libye à présenter une réplique et le Royaume-Uni et les Etats-Unis à
déposer une duplique.
Les affaires rayées du rôle de la Cour à la demande conjointe des Parties
Alors que dans chacune des deux affaires, Lybie c. Royaume-Uni et Lybie c. Etats-Unis,
les pièces de procédure avaient été déposés par les Parties dans les délais prescrits, le 10
septembre 2003, les deux affaires ont été rayées du rôle de la Cour à la demande
conjointe des Parties.
Par deux lettres datées du 9 septembre 2003, les Gouvernements de la Libye et du
Royaume-Uni d’une part, et de la Libye et des Etats-Unis d’Amérique d’autre part, ont
conjointement notifié à la Cour qu’ils étaient «convenus de se désister [des]
instance[s] … et de renoncer à toute action» dans les affaires.
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Suite à ces notifications M. le juge Shi, président de la Cour, a pris, le 10 septembre 2003,
une ordonnance dans chacune des affaires prenant acte du désistement de l’instance, par
accord des Parties, ainsi que de toute action en l’affaire, et prescrivant que l’affaire soit
rayée du rôle de la Cour.
Entre temps, la Libye avait accepté que ses deux ressortissants, Abdelbasset Ali Ahmed
Al Megrahi et Ali Amin Khalifa Fhimah, soient jugés par une cour neutre, en Hollande,
composée d’un panel de 5 juges Ecossais. Ali Mohmed Al Megrahi a été déclaré
coupable et condamné à une peine d’emprisonnement à vie le 31 janvier 2000. Son coaccusé, Al Amin Khalifa Fhimah a été acquitté.
Al Megrahi purge actuellement sa peine dans la prison Greenock, près de Glasgow en
Ecosse, où il continue de proférer son innocence. Après s’être vu refusé un premier appel
en 2002, la décision des juges de première instance est actuellement en cours de
réexamen. Alors que l’on approche du vingtième anniversaire de la tragédie du 21
décembre 1988, la décision des juges d’appel est attendue prochainement.
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