Les architectures traditionnelles
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Les architectures traditionnelles
Le plateau landais 4.2 Dans l’arrière-pays, au Nord de l’Adour, le “plateau landais” est essentiellement forestier. Ses lignes sont horizontales, droites. Ce paysage de pinède a succédé au XIXe siècle à celui de la lande pastorale. On y trouve encore des centaines de quartiers “d’airial” représentatifs de l’économie autarcique qu’a imposé la colonisation du plateau humide. L’airial occupe une place essentielle dans l’identité paysagère des Landes de Gascogne : un plancher d’herbe, un plafond de feuillages de chênes, un regard rythmé par quelques bâtiments épars... Vers Dax, Tartas et Mont-de-Marsan, les clairières agricoles, l’industrie et le développement pavillonnaire forment une zone de transition. Les architectures traditionnelles Toujours adaptées au contexte Tout comme le paysage, les constructions résultent du dialogue ancestral entre l’homme et la nature. Dans la lande, l’ancien système agro-pastoral a induit une implantation éparse des constructions rurales sous forme “d’airial”. Ailleurs, la polyculture et l’élevage génèrent une ferme-bloc (Chalosse, Tursan), ou une cour fermée (Bas-Armagnac). L’aspect des maisons varie avec la situation et le statut social (maisons de bourg en bande, maisons bourgeoises imposantes, ...). Cependant, partout les fermes ont des points communs, qui font référence : ■ un volume simple, plan carré ou rectangulaire ; une toiture enveloppante, tuile creuse canal, 2 à 4 versants ; ■ une façade principale orientée Est ou Sud-Est ; ■ de petites fenêtres à volets bois, peints. ■ Les façades sont toujours protégées. Derrière l’enduit ou le badigeon, les matériaux dépendent des disponibilités : pans de bois remplis de torchis ou de brique dans la lande ; maçonneries de moellons ou galets, parfois associées à des pans de bois et adobes en pays d’Adour. Près du Béarn, des toits raidis se couvrent de tuiles plates. Le littoral Le littoral des landes de Gascogne se prolonge au Nord vers la Gironde et la pointe de Grave. Il est formé d’un important massif dunaire et d’une chaîne d’étangs et de courants. Les cordons dunaires (dune bordière, dunes modernes et dunes anciennes) sont fixés par une forêt mixte de pins maritimes et de feuillus : chênes pédonculés, tauzins ou verts, arbousiers, houx et pruneliers, ... Le chêne-liège pousse en sous-étage du pin maritime. Le couvert végétal varie selon l’humidité et la fertilité du sol. La molinie (graminée) témoigne d’un sol pauvre et mal drainé. La fougère aigle demande un sol moins humide en surface. La callune (bruyère) révèle une tendance sèche. Au printemps, la palette colorée s’égaye du jaune vif des ajoncs, genêts et hélianthèmes. Jusqu’à l’automne, les bruyères viennent étaler leurs vagues mauves devant les fonds verts et bruns des sous-bois. 46 guide « ma maison dans les landes » vos références architecturales et paysagères 47 Fermes et maisons de la lande Par l’adoption de volumes simples et enveloppants, la maison traditionnelle de la lande constitue une réponse adaptée aux contraintes du climat et de la topographie. Elle exprime aussi les caractéristiques d’un mode de vie ancien, basé sur une économie agro-pastorale. La maison landaise dispose avant tout d’un cadre, l’airial : une pelouse plantée de chênes, sur laquelle prennent appui les bâtiments d’habitation et d’exploitation. L’espace ne manquant pas, maisons et dépendances sont systématiquement dissociées, ce qui ne signifie pas forcément éparpillées de façon aléatoire. La disposition des bâtiments est liée à une organisation fonctionnelle et à la fréquence d’utilisation des constructions. Les façades principales, symétriques et axiales, sont orientées à l’Est, plus rarement Sud-Est. La nécessité de se protéger des intempéries a généré des volumes simples et bas, carrés ou rectangulaires. Les toitures sont compactes, descendent très bas à l’Ouest pour limiter la prise au vent, qu’il s’agisse de la croupe d’un toit à 3 eaux (dite “en queue de palombe”), ou de l’appentis arrière qui prolonge les couvertures à 4 pans. Les volumes sont élancés quand l’ossature est à pans de bois, et plus massifs dans les quelques zones où le matériau de base est la pierre des Landes, la “garluche”. La nature sableuse du sol impose en fait une maison sans fondations, dont la charpente tient l’ensemble de l’ossature verticale. L’utilisation de la tuile canal autorise des pentes de toit de l’ordre de 17 à 27° (30 à 50 %). un plan simple, des volumes ramassés 1 2 1 3 2 3 Suivant le pays, le plan général de la maison est de géométrie simple, rectangulaire ou proche du carré. Partout la charpente est divisée en travées d’égale largeur, allant d’Est en Ouest. L’habitation s’organise autour d’une travée centrale qui accueille les pièces communes. Chambres et réserves sont disposées de part et d’autre, dans les travées latérales, voire sous l’appentis Ouest. 4 Souligné par une charpente apparente, l’auvent délimite un espace abrité de transition entre l’intérieur et l’extérieur. Ce portique est appelé estantad ou estantade dans la Grande Lande, et emban dans les Petites Landes. 5 Quelques maisons sont de forme plus parallélépipédique à 4 eaux, avec une façade orientée sur le mur gouttereau Est, sans étage, ou à demi-étage. Cette maison parallélépipédique à demi-étage, est aussi répandue dans la zone littorale du Born ou du Marensin. Dans le Born, elle s’élève d’ailleurs parfois un peu plus, avec un étage complet, ordinairement utilisé comme grenier. 4 6 7 8 5 6 9 Une maison de maître, traditionnellement à étage, à plan carré et à 4 eaux. 10 Une petite maison d’ouvrier, sans étage, à 2 eaux. le bois, matériau constructif de base 7 8 11 Apparente, l’ossature en bois est matérialisée par un réseau de poteaux, poutres et fermes, sur l’ensemble de la construction. 12 Dans un pays de sables où la pierre est rare, la maison est avant tout l’œuvre du charpentier, qui officie en véritable architecte. Singulièrement, si on compare à d’autres régions où le colombage n’est utilisé qu’en partie haute, les pans de bois sont ici mis en œuvre sur toute la hauteur des murs. Taillés dans un pin maritime gemmé, donc parfaitement secs, ils sont localement nommés coulanes ou parets. Les pièces maîtresses de la charpente sont en chêne pédonculé. Le tout étant fabriqué sur place : les parois constituées à plat, puis dressées à la verticale et assemblées. Des variantes géographiques L’aspect extérieur de la maison diffère selon les régions landaises. À l’Ouest, vers le Born et le Marensin, l’architecture traditionnelle se singularise par des façades plates sur mur gouttereau. À l’Est, vers la Haute-Lande et jusque dans l’Armagnac, on reconnaît la maison landaise à son mur pignon orienté face au Levant. Il est souvent marqué par une avancée de la toiture en forme d’auvent, soutenue par 2 murs gouttereaux. 9 10 11 12 Maisons landaises du littoral Les typologies traditionnelles présentes dans la lande ont totalement pénétré le secteur littoral, lequel comporte néanmoins quelques variantes. Près de la côte, les maisons sont généralement parallélépipédiques. Plus qu’ailleurs, le remplissage est en briques, disposées notamment en fougères. Les maisons à 3 eaux, à pignon, sont fréquemment sans auvent. Dans le Marensin, elles s’ornent parfois de pans de bois à croisillons apparents, qui jouent un rôle décoratif et caractérisent les “maisons des Anglais”. 48 guide « ma maison dans les landes » Dans la lande, l’archétype de la maison est un plan rectangulaire à 3 travées, dans le prolongement du mur pignon. Le rez-de-chaussée est réservé à l’habitat. Le grenier est accessible par un escalier disposé dans une pièce de service ou dans l’auvent extérieur. vos références architecturales et paysagères 49 Fermes et maisons de Chalosse Rurale par excellence, assez souvent cossue, la ferme de Chalosse exprime toute la richesse de son sol, géologique et agricole, en même temps qu’un caractère géographique médian entre le Pays de la Lande et les contreforts des Pyrénées : Béarn, Pays Basque. Elle est d’aspect trapu, ouvert, accueillant. La ferme chalossaise avait généralement pour fonction de regrouper sous le même toit locaux d’habitation et d’exploitation. Elle se caractérise par : ■ une façade principale généralement orientée à l’Est, développant un large pignon, ■ une toiture à 2 versants, avec souvent une croupe côté Ouest, ■ une couverture de tuiles canal, ■ des soubassements et murs extérieurs en moellons ou pierres. Aux abords du Béarn, des murs de galets peuvent constituer la totalité de la façade Ouest exposée aux intempéries, ■ souvent des colombages de bois avec remplissage de torchis ou de tout-venant. Et parfois, pour les parties hautes et les cloisons, des briques de terre crue, ■ un bâti divisé en 3 travées longitudinales, lesquelles génèrent l’équilibre des ouvertures. Au centre, une grande porte charretière ouvre sur la pièce principale de remise des charrettes et des instruments de labour, le séou. Sur cet axe, la maison s’embourgeoise parfois d’un portail d’entrée noble appareillé de pierres, et d’une entrée travaillée. Le séou peut être remplacé par un couloir ou une pièce d’habitation. Lorsque l’entrée est en retrait, elle est dénommée bouque-aban ou debantin, ■ des enduits au mortier de chaux, recouverts d’un badigeon, souvent ocre naturel, parfois blanc ou rouge toscan. Des matériaux de terroir Le bois intervient principalement dans l’ossature des parties hautes, ainsi que pour les cloisons et les refends. Mais le matériau dominant demeure la pierre : pierre de taille pour les encadrements, les seuils et les éléments décoratifs, moellons et tout-venant pour les murs. Les façades sont généralement couvertes d’un enduit, dont les liants sont souvent des mortiers pauvres en chaux, et dont la texture varie selon le lieu d’extraction du matériau : calcaire gris ou rosé de Montaut, grès de Coudures, chaux de Brassempouy, Saint-Sever ou Tercis, pierre de Dax, Montfort, Pouillon ou Audignon, les minerais sont extraits des carrières des villages environnants, alors même que l’argile nécessaire au remplissage des murs est directement prélevée sur place. 50 guide « ma maison dans les landes » Le Tursan, un proche voisin du Béarn Au Sud-Est des Landes, dans le Tursan, l’influence des maisons béarnaises se traduit par la forme à 4 eaux, couverte de tuiles plates à crochets (tuiles picon), et par le raidissement des toitures. En bas de pente, un coyau vient infléchir l’inclinaison du toit. La composition reste classique dans l’alignement équilibré des ouvertures (fenêtres et lucarnes). La pierre et le galet, protégés par un crépi gris, rappellent les origines pyrénéennes de cette architecture. Dans les maisons apparentées au type chalossais, les 2 versants de la toiture se prolongent souvent par une croupe située à l’arrière du bâtiment. A l’intérieur, un simple couloir ou une pièce commune remplace le séou. Quelques fermes annoncent la configuration des cours fermées de l’Armagnac et du Béarn. Un Armagnac aux charmes gascons Tout contre le Gers, le Bas-Armagnac délimite le département à l’Est. L’habitat est ici encore différent : maisons massives à étages, frontons triangulaires avec fenestreau, génoises, … L’architecture des fermes se réfère soit à celle des cours fermées de l’Armagnac gersois, soit à celle de l’habitat rural de la lande forestière. Les toitures à tuiles canal sont souvent moins accentuées que dans les Landes forestières. Le ton terre des façades s’accorde avec le paysage. Les nuances des pays de Seignanx, Gosse et Orthe Dans le Sud, côté Ouest, la référence connue est l’etchea basque. Elle y compose une architecture solide et typée. Pour répondre à un climat directement océanique, également influencé par la proximité des Pyrénées, les pentes de toit sont ici plus affirmées que dans le reste des Landes. vos références architecturales et paysagères 51 L’habitat de bourg et de ville Dans les landes forestières, au nord de l’Adour et de l’Armagnac, les bourgs ont une structure plutôt distendue, aérée. Néanmoins, on y trouve quelques secteurs d’habitat en bande, qui correspondent généralement à un habitat ouvrier. Ailleurs, la plupart des villes et villages landais s’inscrivent dans une tradition d’urbanisme dense, voire très dense. Les bastides, villes neuves fondées au MoyenÂge, sont ici très nombreuses. Elles représentent le type même d’un habitat volontairement groupé et aggloméré. Des plus grandes (Grenade, Labastide-d’Armagnac, Saint-Justin, Hastingues, Geaune, Cazères,…) aux plus petites (Hontanx, Montégut, Pimbo…), leurs maisons alignées inspirent la structure de centres plus récents (Morcenx, Labouheyre…) et de nombreux villages rues. La maison bourgeoise Souvent qualifiée de maison bordelaise, ou de maison de maître, la maison bourgeoise est présente dans tout le département des Landes. Le plus souvent, il s’agit d’une construction maçonnée en hauteur, avec une toiture à 4 versants, une façade classique, agrémentée d’éléments décoratifs : génoises, frontons, appareillages, pilastres, soubassements, … Dans le Marensin, le Maremne et le Born, cette maison de maître s’appuie souvent sur une ossature bois avec remplissage de briques. Un urbanisme exemplaire La maison capcazalière, ultime témoin du métayage Sur le même modèle que la ferme chalossaise, la maison capcazalière est une maison de maître. Elle s’en distingue par ses détails architecturaux et ornementaux : composition symétrique, encadrements en pierre sculptés, … Il s’agit avant tout d’une “résidence”, qui centralise toute l’activité du domaine. Les dépendances (grange, chai, écurie, …), situées perpendiculairement à la façade, forment un enclos. Le portail d’entrée au domaine est parfois souligné d’une allée de tilleuls, de chênes ou de platanes. Les maisons capcazalières sont construites sur des domaines très anciens, transmis selon une règle d’héritage faisant priorité à la primogéniture. 52 guide « ma maison dans les landes » La plupart des bastides ont conservé leur unité, même si l’insertion de nouvelles constructions y est parfois abordée sans précautions suffisantes (ruptures de hauteurs, pastiches…). Ces formes traditionnelles d’urbanisme se caractérisent par la mixité des fonctions (habitat, commerces et services). Elles présentent un réel intérêt social (par l’accessibilité aux services et les relations de solidarité qu’elles favorisent), un intérêt paysager (par la continuité du tissu urbain et la régularité des morphologies), un intérêt économique (par l’adaptabilité des locaux ou des parcelles à différents types d’activités) et même un intérêt écologique, en favorisant le transport collectif et les liaisons douces. vos références architecturales et paysagères 53